FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES
Par acte sous seing privé du 04 février 1988, Monsieur Jean Marie X... a reconnu devoir à Monsieur et Madame Y... la somme de 200.000 francs, remboursable en 5 ans avec un taux d'intérêt de 11 %. Monsieur Z... est intervenu à l'acte pour cautionner Monsieur X....
Monsieur X... a été déclaré en liquidation judiciaire par extension de la liquidation judiciaire de la S.N.C. LE BASCO BEARNAIS dont il était l'un des associés.
Le prêt n'ayant pas été intégralement remboursé, Monsieur et Madame Y... ont fait assigner Monsieur X..., Maître DE THORE, ès qualités de mandataire liquidateur, et Monsieur Z....
Par jugement du 15 octobre 1996, le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES a : - débouté Monsieur et Madame Y... de leurs demandes à l'encontre de Monsieur Z..., - fixé à la somme de 226.423 francs la créance de Monsieur Y... à l'encontre de Monsieur Jean-Marie X....
Monsieur et Madame Y... ont interjeté appel de ce jugement.
Ils demandent à la Cour de : - constater que Monsieur Y... a régulièrement déclaré sa créance pour un montant de 256.423 francs, - constater que le montant de la créance de Monsieur Y... à l'encontre de Monsieur X... est d'un montant de 256.423 francs, - condamner Monsieur A... à payer à Monsieur et Madame Y... la somme de 256.423 francs, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, - condamner les intimés à leur payer une indemnité de 15.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Sur le montant de la créance, ils soutiennent que le Tribunal a omis de prendre en considération la demande de dommages-intérêts.
Sur l'action contre les cautions, ils font valoir que : - l'appel est recevable même s'ils ont fait signifier le jugement après la déclaration d'appel, ce qu'a jugé le Conseiller de la mise en Etat, - l'assignation introductive d'instance est régulière car l'acte a été remis à l'une de ses employées, - le cautionnement est valable car, en l'absence de mention manuscrite de la somme cautionnée, l'acte vaut commencement de preuve par écrit et est complété par d'autres éléments, - le second acte du 18 janvier 1991, auquel Monsieur Z... n'est pas partie, est lié au premier et ne constitue pas une novation.
Monsieur Z... soulève l'irrecevabilité de l'appel à son encontre, la nullité de l'assignation introductive d'instance et la nullité du cautionnement.
Il sollicite le paiement de 20.000 francs à titre de dommages-intérêts et de 15.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Il expose que : - l'appel est recevable car en signifiant le jugement après la déclaration d'appel, Monsieur et Madame Y... ont acquiescé au jugement, - l'assignation a été délivrée à une adresse qui n'était pas la sienne et remise à une personne qui n'était pas sa préposée, - le cautionnement est nul car il ne porte pas la mention en lettres et en chiffres de la somme cautionnée et aucun complément de preuve n'est rapporté, - il y a eu novation par la deuxième reconnaissance de dette souscrite le 18 janvier 1991.
Maître DE THORE, ès qualités de mandataire-liquidateur, s'en rapporte à justice sur le mérite de l'appel dirigé contre Monsieur Z... et conclut à la confirmation du jugement et à l'allocation d'une indemnité de 10.000 francs pour frais de procédure.
MOTIFS DE L'ARRET - SUR LA PROCEDURE :
Attendu que la Cour constate que Monsieur X... a été intimé mais
n'a pas été assigné ;
Que certes Monsieur X... a été déclaré en liquidation judiciaire par extension de la liquidation judiciaire de la S.N.C. LE BASCO BEARNAIS dont il était l'un des associés et que Maître DE THORE, ès qualités de mandataire liquidateur de la S.N.C. LE BASCO BEARNAIS, a constitué avoué et conclu ;
Que cependant, la créance invoquée par les époux Y... est une créance personnelle de Monsieur X... et non une créance sur la S.N.C. LE BASCO BEARNAIS au passif duquel Monsieur X... serait tenu ;
Que les deux procédures collectives concernant un associé et la société même si la première est la conséquence inéluctable de l'autre par application de l'article 178 de la loi du 25 janvier 1985, sont distinctes ;
Qu'il en résulte que Monsieur X... n'est pas représenté par Maître DE THORE, ès qualités de mandataire liquidateur de la S.N.C. LE BASCO BEARNAIS et que n'ayant pas été assigné, la procédure n'est pas en état à son égard ;
Qu'il convient d'inviter les parties à régulariser la procédure ;
- SUR LA DEMANDE DIRIGEE CONTRE Monsieur Z... . Sur la recevabilité de l'appel :
Attendu que les époux Y... ont interjeté appel le 13 décembre 1996 à une date où le jugement n'avait pas encore été signifié ;
Que cette déclaration d'appel est régulière ;
Attendu que Monsieur Z... soutient que la signification du jugement, postérieurement à l'appel, vaut renonciation à celui-ci ;
Mais attendu que si un désistement d'appel peut être implicite encore faut-il qu'il soit sans équivoque ;
Or attendu que par application de l'article 681 du Code de Procédure Civile, la signification d'un jugement même sans réserve n'emporte
pas acquiescement ;
Qu'au contraire, les époux Y... avaient déjà formé un recours et, par la suite, ont conclu au soutien de celui-ci ;
Que Monsieur Z... sera débouté de son exception d'irrecevabilité d'appel ; . Sur la nullité de l'assignation introductive d'instance : Attendu que Monsieur Z..., personne physique, a été assigné à son adresse professionnelle ;
Que l'huissier de justice a remis l'acte à "Madame MASSELIN B..., employée" qui avait déclaré être habilitée à recevoir l'acte et a coché la case correspondant à une signification à une personne morale ;
Attendu qu'un tel acte ne répond pas aux exigences des articles 653 et suivants du Code Civil et notamment à l'obligation de signifier un acte à personne ;
Mais attendu que Monsieur Z... doit rapporter la preuve du grief que lui aurait causé cette irrégularité ;
Attendu certes que Monsieur Z... n'a pas comparu devant le Tribunal ;
Que cependant cette non-comparution ne lui a pas fait grief puisque la décision rendue lui a été favorable, les époux Y... étant déboutés de leur demande à son égard ;
Qu'en l'absence de grief, la nullité de l'assignation introductive d'instance n'est pas encourue ;
- SUR LA PREUVE DU CAUTIONNEMENT
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 1326 et 2015 du Code Civil que la caution doit écrire de sa main la somme en lettres et en chiffres de l'obligation déterminée qu'elle entend cautionner ; Attendu qu'au pied de la reconnaissance de dette souscrite par
Monsieur X..., Monsieur Z... a écrit "Lu et approuvé. Bon pour caution solidaire" et a signé ;
Attendu que cette mention, qui ne correspond pas aux exigences précitées, ne fait pas la preuve complète de l'obligation souscrite et vaut seulement comme commencement de preuve par écrit ;
Attendu cependant que constituent un complément de preuve, d'une part, les mentions dactylographiées claire et précises en dessous desquelles Monsieur Z... a apposé sa signature et portant sur le montant de la somme, la durée du prêt et le taux d'intérêt, d'autre part, le fait que Monsieur Z... a, à la demande de Maître PIERREPONT, avocat des époux Y..., accepté de faire estimer son immeuble par un notaire et payé le coût de cette estimation ;
Que la preuve est ainsi complètement rapportée de l'engagement pris par Monsieur Z... ; - SUR LA NOVATION
Attendu que la novation ne se présume point ;
Attendu que le 18 janvier 1991, Monsieur X... a rédigé un autre acte sous seing privé aux termes duquel il reconnaissait devoir à Monsieur et Madame Y... la somme de 168.100 francs qu'il s'engageait à rembourser au plus tard le 04 février 1993 avec un intérêt de 11 % ;
Attendu que Monsieur Z... n'est pas intervenu à l'acte bien que son nom apparaisse en qualité de mandataire de Monsieur Y... ; Attendu que ni la lecture de ce document, ni aucun élément extérieur ne permettent de dire que Monsieur X... a contracté envers Monsieur et Madame Y... une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne qui serait, de ce fait, éteinte ;
Que cet acte n'est pas le prolongement du précédent et permettait aux parties de fixer le montant de la somme restant due, les modalités de remboursement et l'échéance finale étant inchangée ;
Qu'il n'y a donc pas eu novation et Monsieur Z... reste engagé sur la base de la reconnaissance de dette du 04 février 1988 ;
- SUR LES COMPTES
Attendu qu'il appartient au débiteur de rapporter la preuve qu'il s'est libéré de sa dette ;
Attendu que Monsieur et Madame Y... présente un décompte qui fait application des clauses contractuelles et qui tient compte des versements ;
Que Monsieur Z... ne verse aux débats aucun document permettant de dire que Monsieur X... aurait versé des sommes supplémentaires ;
Qu'il sera fait droit à la demande à hauteur de 226.423 francs ;
Attendu que la preuve du caractère abusif de la résistance de Monsieur Z... n'est pas rapportée ;
Que la demande de dommages-intérêts sera rejetée ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des appelants les frais irrépétibles qu'ils ont exposés.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Constate que la procédure n'est pas en état en ce qui concerne Monsieur X...,
Invite les appelants à régulariser la procédure en faisant assigner Maître DE THORE, ès qualités de mandataire liquidateur de Monsieur X...,
Déclare l'appel recevable à l'égard de Monsieur Z...,
Rejette l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance,
Infirme le jugement entrepris en ses dispositions concernant Monsieur Z...,
Condamne Monsieur Z... à payer à Monsieur et Madame Y... la
somme de 226.423 francs, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et une indemnité de 8.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Les déboute de leur demande de dommages-intérêts,
Condamne Monsieur Z... aux dépens de première instance et d'appel exposés par les appelants et qui seront recouvrés par la SCP JUPIN ALGRIN, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Arrêt prononcé par Monsieur FALCONE, Président,
Assisté de Madame DUCLOS, Premier Greffier,
Et ont signé le présent arrêt,
Monsieur FALCONE, Président,
Madame DUCLOS, Premier Greffier qui a assisté au prononcé.