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02/07/1999 | FRANCE | N°1997-6429

France | France, Cour d'appel de Versailles, 02 juillet 1999, 1997-6429


FAITS ET PROCEDURE,

Selon offre préalable acceptée le 24 février 1994, la Société FORD CREDIT EUROPE P.L.C a consenti à Monsieur Hamed X... un contrat de crédit d'un montant de 85.000 Francs accessoire à l'achat d'un véhicule FORD "TRANSIT" d'une valeur de 100.000 Francs. Le crédit était remboursable en 60 mensualités de 2.251,60 Francs chacune et assorti d'une assurance décès incapacité et chômage contractée auprès de la Société "Compagnie d'assurances PROXIMA". Le 28 avril 1994, le prêteur a fait inscrire son gage sur le véhicule en préfecture.

Par acte

d'huissier en date du 8 août 1996, la Société FORD CREDIT EUROPE P.L.C a fait cit...

FAITS ET PROCEDURE,

Selon offre préalable acceptée le 24 février 1994, la Société FORD CREDIT EUROPE P.L.C a consenti à Monsieur Hamed X... un contrat de crédit d'un montant de 85.000 Francs accessoire à l'achat d'un véhicule FORD "TRANSIT" d'une valeur de 100.000 Francs. Le crédit était remboursable en 60 mensualités de 2.251,60 Francs chacune et assorti d'une assurance décès incapacité et chômage contractée auprès de la Société "Compagnie d'assurances PROXIMA". Le 28 avril 1994, le prêteur a fait inscrire son gage sur le véhicule en préfecture.

Par acte d'huissier en date du 8 août 1996, la Société FORD CREDIT EUROPE P.L.C a fait citer Monsieur X... devant le tribunal d'Instance de DREUX afin de le voir condamner avec exécution provisoire à : - lui restituer le véhicule FORD "TRANSIT", - lui payer la somme de 90.784,48 Francs outre les intérêts contractuels, - lui payer la somme de 5.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A l'appui de sa demande la Société "FORD CREDIT EUROPE P.L.C" a indiqué qu'en janvier 1996, étant avisée par Monsieur X... qu'il était au chômage, elle a formulé une demande de prise en charge auprès du "Cabinet" d'Assurances LABALETTE ; qu'à la suite de la consultation du dossier adressé au "Cabinet" d'Assurances LABALETTE par Monsieur X... pour la prise en charge de son prêt, ce dernier lui a notifié, par lettre recommandée en date du 2 février 1996, un refus d'assurance en raison de la fausse déclaration faite lors de la signature du contrat (Monsieur X... étant alors en arrêt maladie à la suite d'un accident), conformément aux prescriptions de l'article

L.113-8 du Code des assurances ; que depuis cette notification Monsieur X... n'a acquitté aucune des échéances du prêt et ce, malgré une sommation de payer en date du 10 juin 1996 et une ordonnance, rendue par Madame le Juge de l'exécution du tribunal de grande instance de CHARTRES en date du 20 juin 1996, lui intimant de restituer le véhicule ; que Monsieur X... ayant formé opposition de cette ordonnance, elle l'a assigné devant ledit tribunal en vertu de l'article 152 du décret du 31 juillet 1992.

Devant le Premier juge, Monsieur X... a demandé la garantie de la Société "Compagnie d'assurances PROXIMA", qu'il a fait assigner par acte du 29 novembre 1996, laquelle s'est opposée à cette demande en raison de la nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle.

Reconventionnellement, la Société "Compagnie d'assurances PROXIMA" a sollicité la condamnation de Monsieur X... à lui payer la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement contradictoire en date du 29 avril 1997, le tribunal d'instance de DREUX a rendu la décision suivante : - ordonne la jonction des litiges inscrits au Greffe sous les n° 405/96 et 565/96, - ordonne à Hamed X... de restituer dans un délai de 15 jours à compter de la date de signification de la présente décision le véhicule FORD TRANSIT n° BDVFPM 69884, sous astreinte provisoire de 200 Francs par jour de retard, - condamne Hamed X... à payer à la Société FORD CREDIT EUROPE P.L.C la somme de 64.841,65 Francs au titre du prêt en date du 24 février 1994 outre les intérêts contractuels (TEG de 17,95 %) à compter du 5 juillet 1996, - condamne

la Compagnie d'assurances PROXIMA à garantir Hamed X... dans le cadre de l'assurance-chômage selon les modalités prévues au contrat signé par les parties, - ordonne l'exécution provisoire, - déboute les parties du surplus de leurs prétentions, - met les dépens à la charge de la Compagnie d'assurances PROXIMA.

Le 8 juillet 1997, la Société "Compagnie d'assurances PROXIMA" a relevé appel de cette décision. Dans ses conclusions récapitulatives, elle fait grief au premier juge d'avoir constaté que Monsieur X... avait fait une fausse déclaration lors de la souscription de l'assurance et de l'avoir tout de même condamnée à garantir le paiement des échéances du prêt en retenant qu'elle n'avait pas démontré la mauvaise foi de Monsieur X..., alors que, selon elle, la fausse déclaration intentionnelle de l'intimé suffit à établir sa mauvaise foi et à entraîner la nullité du contrat sur le fondement de l'article L113-8 du Code des assurances ; qu'en conséquence, elle ne peut devoir garantie de la défaillance de Monsieur X... auprès de la Société "FORD CREDIT EUROPE P.L.C.".

Par conséquent, elle prie la Cour de : - déclarer recevable et bien fondée la Compagnie PROXIMA en son appel à l'encontre du jugement prononcé par le tribunal d'instance de DREUX en date du 29 avril 1997, Y faisant droit, - réformer cette décision en ce qu'elle a cru devoir condamner la Compagnie PROXIMA Assurances à garantir Monsieur X... du chef des condamnations prononcées à son encontre.

Par application des dispositions de l'article L133-8 du Code des assurances, - déclarer nul et de nul effet le contrat d'assurances souscrit le 24 février 1994 par Monsieur X... pour fausses déclarations intentionnelles, et ce conformément aux dispositions

sus-visées, - déclarer irrecevable, et en tout cas mal fondé Monsieur X... en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, - débouter la Société FORD CREDIT de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la compagnie d'assurances PROXIMA, - ordonner et condamner Monsieur Hamed X... à restitution de toute somme versée ayant eu titre de l'exécution provisoire assortissant le jugement dont appel avec intérêts légaux à compter de la perception desdites sommes, à tout le moins à compter des présentes, - condamner Monsieur X... au paiement de la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - de condamner enfin aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant pourra être directement recouvré par la SCP LAMBERT DEBRAY CHEMIN, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur X... (aide juridictionnelle partielle) sollicite la confirmation de la décision déférée en soutenant que lors de la signature du contrat, il était en arrêt maladie à la suite d'un accident de travail, que son état de santé, en dehors de la blessure dont il était victime, n'était pas déficient, qu'il avait d'ailleurs réglé ses échéances jusqu'à son licenciement, motifs pour lesquels il a demandé à la société "compagnie PROXIMA" la prise en charge des échéances du prêt.

Par conséquent, il demande à la Cour de : - débouter la compagnie d'assurances PROXIMA de son appel, l'en dire mal fondé, - confirmer le jugement prononcé par le tribunal d'instance de DREUX le 29 avril 1997 sauf en ce qu'il a débouté Monsieur X... de sa demande basée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - l'émender de ce chef et statuer à nouveau, - recevoir Monsieur Hamed X... en son

appel incident, l'en dire bien fondé, - condamner la Compagnie d'assurances PROXIMA à lui verser la somme de 5.000 f en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner la Compagnie d'assurances PROXIMA aux entiers dépens de Première instance et d'appel et autoriser la SCP LEFEVRE et TARDY, Avoués, à recouvrer directement ceux la concernant, conformément aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle.

La Société "FORD CREDIT EUROPE P.L.C" conclut à la confirmation de la décision déférée faisant valoir que le 10 juin 1997, Monsieur X... a restitué le véhicule litigieux à la concession FORD de VERNOUILLET, que le véhicule a été vendu aux enchères pour un montant net de 43.000 f, qu'elle reste donc créancière de la somme de 33.831,49 Francs.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Y ajoutant, condamner Monsieur X... et la Société PROXIMA à lui payer la somme de 10.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner Monsieur X... et la Société PROXIMA aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP JUPIN et ALGRIN, Avoués aux offres de droit, qui en poursuivra le recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 6 mai 1999 et les parties ont fait déposer leur dossier à l'audience du 3 juin 1999.

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'aux termes de l'article L113-8 du Code des assurances

: "indépendamment des causes ordinaires de nullité et sous réserve des dispositions de l'article 132-26, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion par l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre" ;

Considérant qu'il est constant, en la présente espèce, que le 24 février 1994, Monsieur Hamed X... a signé une demande d'adhésion à l'assurance décès-incapacité-chômage, et qu'il a indiqué notamment qu'il n'était pas en arrêt total ou partiel de travail pour raison de santé, alors qu'en fait, il est démontré qu'il était bien en arrêt de travail pour des raisons médicales, entre le 27 décembre 1993 et le 10 juin 1995 ; qu'il y a donc sur ce point une fausse déclaration ;

Considérant, de plus, que l'article L113-8 exige une "fausse déclaration intentionnelle" et que sur ce point, Monsieur X... se borne à dire que l'imprimé qu'il avait signé était pré-imprimé et qu'il n'avait pas coché les cases, question par question ; que son argumentation est vaine et n'est pas retenue, alors qu'il lui appartenait de contracter de bonne foi (article 1134 du Code civil), c'est-à-dire de prendre connaissance complète du libellé de la demande d'adhésion à l'assurance facultative qu'il acceptait délibérément de souscrire ; que c'est donc bien intentionnellement qu'il a omis d'indiquer, en cochant la case, qu'il était en arrêt de travail pour raisons de santé, et qu'en tout état de cause, le fait de ne pas avoir coché cette case relative à son état de santé constitue une "réticence", au sens de ce même article ; qu'en ne cochant aucune des trois cases, Monsieur X... a donc nécessairement

indiqué qu'il remplissait toutes ces conditions exigées pour obtenir une assurance, alors que la première condition n'était manifestement pas remplie par lui puisqu'il était en état d'arrêt de travail pour raisons de santé ;

Considérant qu'il y a donc eu de sa part réticence et fausse déclaration intentionnelle de "mauvaise foi" ;

Considérant, par ailleurs, que cette longue incapacité de travail pour raisons de santé était à l'évidence de nature à diminuer l'appréciation du risque par l'assureur la Société "compagnie PROXIMA", et qu'en tout état de cause, de plus, cet assureur est en droit d'invoquer cette réticence et cette fausse déclaration intentionnelle de Monsieur X... même s'il est vrai que ce risque omis ou dénaturé par celui-ci a été sans influence sur le sinistre qui était constitué, en l'espèce, par un licenciement ; qu'en outre, l'article L113-8 du Code des assurances (ainsi que l'article 1134 du Code civil exigeant la bonne foi de tout contractant) obligeaient Monsieur X... à déclarer son arrêt de travail pour raisons de santé et qu'il ne lui appartenait pas de se dispenser délibérément de cette obligation légale, au simple motif, selon lui, qu'il "pouvait totalement considérer que sa santé n'était nullement défaillante" ; qu'un tel raisonnement, erroné, s'il était généralisé et admis, conduirait chaque assuré à se faire seul juge, -et selon ses convenances et ses intérêts- des circonstances existantes (santé, travail, chômage, emploi stable etc...) qu'il déciderait d'indiquer ou au contraire d'omettre ou de dénaturer intentionnellement ;

Considérant que Monsieur X... est donc débouté de tous ses moyens relatifs à l'application de cet article L113-8 du Code des assurances

; que le projet déféré est donc infirmé de ce chef, et que la Cour statuant à nouveau, déclare nul le contrat d'assurances du 24 février 1994 ;

Considérant, par conséquent, que Monsieur X... et la Société "FORD CREDIT EUROPE P.L.C." sont déboutés de toutes leurs demandes formées contre l'appelante ;

Considérant que Monsieur X... est condamné à rembourser à la Société "compagnie PROXIMA" toutes les sommes et indemnités reçues d'elle, et ce, avec intérêts au taux légal à compter de cette demande formée par voie de conclusions signifiées le 21 avril 1999 et valant sommation de payer au sens de l'article 1153 alinéa 3 du Code civil ; Considérant enfin que, compte tenu de l'équité, Monsieur X... est condamné à payer à l'appelante la somme de 5.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

VU l'article L113-8 du Code des assurances :

. PRONONCE la nullité du contrat d'assurance souscrit le 24 février 1994 ;

. DEBOUTE Monsieur X... et la Société "FORD CREDIT EUROPE P.L.C."

de toutes leurs demandes contre la Société "compagnie PROXIMA" ;

. CONDAMNE Monsieur X... à rembourser à l'appelante toutes les sommes et indemnités reçues d'elle et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 21 avril 1999 ;

. CONDAMNE Monsieur X... à payer à l'appelante la somme de 5.000 Francs (CINQ MILLE FRANCS) en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

. CONDAMNE Monsieur X... à tous les dépens de la Première instance et d'appel exposés par la Société "Compagnie d'assurances PROXIMA", qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP LAMBERT DEBRAY CHEMIN conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile et à celles de la loi sur l'aide juridictionnelle ;

LAISSE à la charge de la Société "FORD CREDIT EUROPE P.L.C." ses entiers dépens.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-6429
Date de la décision : 02/07/1999

Analyses

ASSURANCE (règles générales) - Risque - Déclaration - Réticence ou fausse déclaration - Article L. 113-8 du Code des assurances - Influence sur l'opinion de l'assureur - Nullité du contrat - Condition - /

Selon l'article L. 113-8 du Code des assurances, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre. Dès lors, un assuré qui souscrit une assurance décès-incapacité-chômage sans renseigner les cases relatives à son état de santé alors qu'il est en arrêt de travail, produit une fausse déclaration intentionnelle que la compagnie d'assurance est en droit d'invoquer pour faire déclarer nul le contrat


Références :

Code des assurances, article L113-8

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-07-02;1997.6429 ?
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