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07/05/1999 | FRANCE | N°1997-3305

France | France, Cour d'appel de Versailles, 07 mai 1999, 1997-3305


FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé en date du 25 novembre 1991, la SCI WALLACE ECHENBERGER a donné à bail un appartement dépendant d'un immeuble sis 59, boulevard Richard Wallace à PUTEAUX au premier étage à Monsieur X....

Par acte en date du 25 novembre 1991, Monsieur Y... s'est porté caution solidaire du paiement des loyers, charges et indemnité d'occupation pouvant être dus par Monsieur X....

Le 4 novembre 1994, un commandement visant la clause résolutoire a été délivré à Monsieur X... aux fins de paiement de la somme de 25.574,75 Francs au

titre des loyers restés impayés.

Par acte d'huissier en date du 4 septembre 199...

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé en date du 25 novembre 1991, la SCI WALLACE ECHENBERGER a donné à bail un appartement dépendant d'un immeuble sis 59, boulevard Richard Wallace à PUTEAUX au premier étage à Monsieur X....

Par acte en date du 25 novembre 1991, Monsieur Y... s'est porté caution solidaire du paiement des loyers, charges et indemnité d'occupation pouvant être dus par Monsieur X....

Le 4 novembre 1994, un commandement visant la clause résolutoire a été délivré à Monsieur X... aux fins de paiement de la somme de 25.574,75 Francs au titre des loyers restés impayés.

Par acte d'huissier en date du 4 septembre 1995, la SCI WALLACE ECHENBERGER a fait assigner Messieurs X... et Y... aux fins de les voir condamner solidairement au paiement des sommes suivantes :

[* 43.990,72 Francs avec intérêts de droit à compter du 4 novembre 1994,

*] 5.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 21 février 1996, le tribunal d'instance de PUTEAUX a rendu la décision suivante :

- déclare la SCI WALLACE ECHENBERGER irrecevable en sa demande à l'encontre de Monsieur X...,

- condamne Monsieur Y... en sa qualité de caution à payer à la SCI WALLACE ECHENBERGER en deniers ou quittances valables la somme de 39.714,50 Francs à titre de loyers, indemnité d'occupation, charges et réparations locatives impayés pour la période du 1er juin 1994 au 31 mars 1995,

- dit que cette somme ne portera pas intérêts en application des dispositions de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989, au profit du bailleur,

- déboute la requérante du surplus de sa demande,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamne Monsieur Y... aux dépens à l'exclusion toutefois des frais du commandement du 4 novembre 1994 et de l'assignation du 4 septembre 1995.

Le 26 novembre 1996, Monsieur Y... a relevé appel de cette décisions.

Il reproche à la décision entreprise de l'avoir condamné en sa qualité de caution au paiement de la somme de 39.714,50 Francs, et il invoque le bénéfice de l'exception de subrogation visé par l'article 2037 du code civil, en soulignant que, selon lui, la SCI WALLACE ECHENBERGER avait tardé à faire délivrer un commandement de payer et qu'elle ne justifiait pas avoir tenté de mettre en oeuvre le privilège des meubles garnissant les lieux loués.

En outre, Monsieur Y... fait valoir que la SCI WALLACE ECHENBERGER est de mauvaise foi, au motif, selon lui, qu'elle l'avait assigné avec Monsieur X... par acte extrajudiciaire en date du 4 septembre 1995, alors qu'elle avait déjà obtenu un jugement condamnant Monsieur X... au paiement des loyers restant dus, décision qu'elle n'avait jamais cherché à exécuter.

Par conséquent, il demande à la Cour de :

- dire et juger Monsieur Y... recevable et bien fondé en son appel,

En conséquence et y faisant droit,

Vu les dispositions de l'article 2037 du code civil et le comportement fautif de la SCI WALLACE ECHENBERGER,

- infirmer la décision en ce qu'elle a condamné Monsieur Y... à payer la somme de 39.714,50 Francs,

A titre reconventionnel,

- condamner la SCI WALLACE ECHENBERGER à payer à Monsieur Y... la somme de 45.000 Francs à titre de réparation du préjudice subi par Monsieur Y... compte-tenu de la faute de la SCI WALLACE ECHENBERGER,

A titre subsidiaire,

Si la cour devait considérer Monsieur Y... redevable en sa qualité de caution,

- voir fixer le montant de la créance de la SCI WALLACE ECHENBERGER à la somme de 23.635,50 Francs au titre des loyers et charges dus de juin 1994 à novembre 1994,

En tout état de cause,

- condamner la SCI WALLACE ECHENBERGER au paiement de la somme de 8.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamner la SCI WALLACE aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

La SCI WALLACE ECHENBERGER, intimée, réplique que Monsieur Y... ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 2037 du code civil aux motifs que l'absence de mise en oeuvre du privilège du vendeur est imputable à Monsieur X... et que l'acte de caution mentionne expressément que Monsieur Y... ne peut invoquer le bénéfice de discussion. Enfin, elle allègue que Monsieur Y... étant parfaitement informé de l'étendue de l'acte de caution fait preuve de mauvaise foi.

Par conséquent, elle demande à la Cour de :

- dire irrecevable et mal fondé Monsieur Y... en son appel,

- l'en débouter,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

- condamner Monsieur Y... au paiement d'une somme de 10.000 Francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et celle de 10.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'appelant a conclu une dernière fois par voie de conclusions récapitulatives, le 4 mars 1999.

L'ordonnance de clôture a été signée le 18 mars 1999, après deux reports et l'affaire a été plaidée à l'audience du 25 mars 1999.

SUR CE LA COUR

I)

Considérant que Monsieur Y... a fait signifier, le 4 mars 1999, des conclusions récapitulatives, conformes aux dispositions du nouvel article 954 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile (en sa rédaction du décret du 18 décembre 1998) et que seules ces dernières conclusions de l'appelant sont donc retenues par la Cour ;

II)

Considérant quant au fond, que l'appelant invoque expressément l'application de l'article 2037 du code civil contre la bailleresse, SCI WALLACE ECHENBERGER, intimée, et qu'en droit, il est constant que l'application de ce texte est subordonnée à un fait de commission ou d'omission qui soit imputable au créancier, c'est-à-dire fautif ;

Considérant d'abord que l'appelant soutient que la SCI WALLACE

ECHENBERGER avait, selon lui, commis une faute en attendant 5 mois après le premier impayé, avant de délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire, et que, toujours, selon lui, ce retard avait "compromis ses chances" (à lui, Monsieur Y...) d'agir valablement contre le débiteur principal ;

Mais considérant que le simple fait pour la SCI WALLACE ECHENBERGER, bailleresse, d'avoir attendu 5 mois à compter du premier incident de paiement n'est pas, en soi, constitutif d'une faute, notamment de négligence, qui puisse être retenu contre l'intéressée, alors que celle-ci, en raison du caractère personnel du bail qui est conclu intuitu personae (en considération de la personne), était en droit de faire preuve de patience envers son locataire et de lui accorder un délai de grâce, de fait, pour lui permettre d'essayer de régulariser sa situation ;

Considérant de plus, et en tout état de cause, que Monsieur Y... doit faire la preuve du préjudice certain et direct qu'il aurait personnellement subi, et qu'il doit donc notamment, démontrer qu'il;aurait pu - sans la prétendue faute de la SCI - tirer un

quelconque profit effectif des droits susceptibles de lui être transmis par voie de subrogation ; que d'une manière générale, Monsieur Y... qui procède par voie d'affirmations péremptoires, et sans une analyse, ni une démonstration des circonstances précises de la cause, ne démontre pas, d'abord, que la subrogation avait été rendue impossible par le fait de la SCI créancière, comme l'exige l'article 2037 du code civil, et qu'ensuite le simple risque qu'il invoque (par l'emploi du participe passé "compromis" ne représente nullement une impossibilité avérée et démontrée d'une subrogation ; qu'en outre, Monsieur Y... qui parle du privilège de la SCI bailleresse sur le mobilier du locataire, ne précise et ne démontre rien au sujet de ce mobilier dont on ne sait rien et dont rien ne démontre qu'une mesure d'exécution à son sujet aurait pu avoir pour résultant d'apurer, en tout ou partie, la créance de la SCI WALLACE ECHENBERGER qui a été exactement fixée à 39.714,50 Francs et qui est confirmée ;

Considérant que les conditions d'application de l'article 2037 du code civil, ne sont donc pas remplies et que Monsieur Y... est débouté de tous ses moyens et de toutes ses demandes de ce chef ;

Considérant par ailleurs, que d'une manière plus générale, Monsieur Y... qui est commerçant et qui est une personne avisée et prudente avait des rapports d'amitié ou du moins de confiance avec Monsieur X... à qui il a consenti librement et en toute connaissance de cause, un cautionnement même pour les indemnités d'occupation qui pourraient être dues par ce locataire ; qu'il appartenait donc à Monsieur Y... de faire toutes diligences personnelles pour s'assurer notamment en s'adressant directement à Monsieur X..., que celui-ci payait bien régulièrement l'intégralité du loyer convenu, ce que manifestement il n'a pas fait, faisant ainsi preuve d'une négligence certaine dans la sauvegarde de ses propres intérêts de caution solidaire ; qu'aucune faute, ni aucune mauvaise foi ne sont démontrées à la charge de la SCI, ni sur le terrain de l'article 2037 du code civil, ainsi qu'il l'a déjà été ci-dessus motivé, ni sur le terrain d'aucun autre fondement de responsabilité ;

Considérant que le jugement déféré est don entièrement confirmé ;

III)

Considérant qu'à titre reconventionnel, l'appelant invoque un

prétendu préjudice qui, selon lui, devrait être réparé par l'allocation de 45.000 Francs de dommages-intérêts et que, pour ce faire, par une formule très générale et sans autre explicitation de moyens, ni justifications, il se borne à parler à nouveau de sa perte d'une "chance" et d'un prétendu "crédit abusif du débiteur principal" qu'il reproche à la SCI ; que l'appelant est donc débouté de cette demande de dommages-intérêts, infondée et injustifiée ;

Considérant enfin, en ce qui concerne la demande subsidiaire de Monsieur Y..., qu'il est constant que l'acte de cautionnement solidaire qu'il a librement signé, en toute connaissance de cause, et contre lequel, d'ailleurs, il ne formule pas de critiques au regard des dispositions de l'article 1326 du code civil, a expressément stipulé qu'il cautionnait aussi les indemnités d'occupation pouvant être dues par le locataire ; que le premier juge a donc fait une exacte application de ces stipulations contractuelles en condamnation la caution solidaire à payer aussi ces indemnités, et que le jugement est confirmé de ce chef ;

V)

Considérant que Monsieur Y... succombe en tous ses moyens d'appel

et que, compte-tenu de l'équité, il est donc débouté de sa demande en paiement de 8.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que par contre, eu égard à l'équité, il est condamné à payer à la SCI WALLACE ECHENBERGER la somme de 8.000 Francs pour ses frais irrépétibles en vertu de ce même article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que certes, Monsieur Y... succombe en tous ses moyens et en toutes ses demandes, mais qu'il n'est pas pour autant établi qu'il aurait opposé à la SCI une résistance abusive, comme celle-ci le prétend ; que l'intimée est donc déboutée de sa demande en paiement de 10.000 Francs de dommages-intérêts de ce chef ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

I)

Vu l'article 2037 du code civil :

Vu les conclusions récapitulatives de l'appelant, du 4 mars 1999 :

- DEBOUTE Monsieur Faouzi Y... des fins de son appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ;

- CONFIRME le jugement déféré ;

II)

Et y ajoutant :

- CONDAMNE Monsieur Y... à payer à la SCI WALLACE ECHENBERGER

8.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- DEBOUTE la SCI intimée de sa demande de dommages-intérêts ;

- CONDAMNE Monsieur Y... en tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP d'avoués JUPIN ALGRIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M-H. EDET

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-3305
Date de la décision : 07/05/1999

Analyses

CAUTIONNEMENT - Extinction - Subrogation rendue impossible par le fait du créancier - Fait du créancier

En droit, l'application de l'article 2037 du Code civil est subordonnée à un fait de commission ou d'omission imputable au créancier, c'est à dire à un fait fautif. La circonstance qu'un bailleur attende cinq mois à compter d'un premier incident de paiement du locataire pour mettre en cause sa caution ne constitue pas une faute, pas même de négligence, dès lors qu'en raison du caractère intuitu personae du bail, il était en droit de faire preuve de patience envers son locataire et de lui accorder un délai de grâce pour lui permettre de régulariser sa situation. Qu'en outre, la caution qui revendique l'application de l'article 2037 précité doit faire la preuve du préjudice personnel, certain et direct, en démontrant qu'il aurait pu tirer un quelconque profit effectif des droits susceptibles de lui être conférés par voie de subrogation. En l'espèce, à défaut de démontrer que la subrogation dans les droits du créancier a été rendue impossible par le fait du créancier, et que celle-ci serait " compromise ", comme allégué, les conditions d'applications de l'article 2037 du Code civil n'étant pas remplies, la caution ne peut prétendre être déchargée de son engagement, alors que, de surcroît, il appartient à la caution qui s'engage, librement et en toute connaissance de cause, de faire toutes diligences personnelles pour s'assurer que la personne cautionnée exécute régulièrement ses engagements et qu'en ne procédant pas à cette vérification, elle a fait preuve d'une négligence certaine dans la sauvegarde de ses propres intérêts


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-05-07;1997.3305 ?
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