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06/05/1999 | FRANCE | N°1996-9467

France | France, Cour d'appel de Versailles, 06 mai 1999, 1996-9467


FAITS ET PROCEDURE

La société CRYOLIFE a confié à la société ELECTROFLUID un marché de production de chaleur et de froid dans le cadre de la construction à PRESLES EN BRIE (77) d'un laboratoire destiné à la conservation d'organes humains.

La société ELECTROFLUID a confié à son tour, sur la base d'un devis accepté de 570.000 francs HT, en sous-traitance, à la société PERMO, devenue B.W.T. FRANCE (ci-après désignée B.W.T.), la fourniture, le montage et la mise en service de la production d'eau déminéralisée.

Un acompte de 57.000 francs a été vers

é à la société PERMO à la commande, le solde devant être réglé par paiements échelonnés sui...

FAITS ET PROCEDURE

La société CRYOLIFE a confié à la société ELECTROFLUID un marché de production de chaleur et de froid dans le cadre de la construction à PRESLES EN BRIE (77) d'un laboratoire destiné à la conservation d'organes humains.

La société ELECTROFLUID a confié à son tour, sur la base d'un devis accepté de 570.000 francs HT, en sous-traitance, à la société PERMO, devenue B.W.T. FRANCE (ci-après désignée B.W.T.), la fourniture, le montage et la mise en service de la production d'eau déminéralisée.

Un acompte de 57.000 francs a été versé à la société PERMO à la commande, le solde devant être réglé par paiements échelonnés suivant l'état d'avancement des travaux.

Un litige a, par la suite, opposé les parties quant à la conformité

au cahier des charges, dit C.C.T.P., de l'ouvrage livré par la sous-traitante et à l'exécution de travaux supplémentaires.

Aucun accord amiable n'ayant pu intervenir et la société CRYOLIFE, maître d'ouvrage ayant été placée en règlement judiciaire en laissant une part du marché principal impayé, la société ELECTROFLUID a obtenu en référé une mesure d'expertise pour établir un compte entre les parties.

L'expert a déposé son rapport le 12 mai 1995, estimant que la non conformité de l'installation au C.C.T.P. entraînait une retenue justifiée sur le devis initial de 114.000 francs de sorte qu'il restait dû à la société PERMO (B.W.T.) la somme de 399.000 francs HT, soit 473.214 francs TTC, laquelle a été spontanément réglée par la société ELECTROFLUID.

Contestant les conclusions de l'expert et estimant n'avoir pas été remplie de ses droits, la société PERMO, devenue B.W.T., a engagé une instance au fond pour obtenir paiement du solde de sa créance, outre les intérêts de retard.

Par jugement en date du 04 septembre 1996 auquel il est renvoyé pour plus ample exposé des éléments de la cause, le Tribunal de Commerce de VERSAILLES, suivant pour l'essentiel l'argumentation de la société B.W.T., a statué dans les termes ci-après :

* Entérine le rapport de l'expert en ce qui n'est pas contraire au présent jugement.

* Condamne la SA ELECTROFLUID à payer à la SA B.W.T. FRANCE la somme de CENT TRENTE CINQ MILLE DEUX CENT QUATRE FRANCS (135.204 francs), en sus les intérêts calculés au taux légal à compter du 1er octobre 1993, et ce, jusqu'à parfait paiement.

* Condamne la SA ELECTROFLUID à payer à la SA B.W.T. FRANCE les intérêts calculés au taux légal sur une somme de QUATRE CENT SOIXANTE TREIZE MILLE DEUX CENT QUATORZE FRANCS (473.214 francs) du 1er octobre 1993 au 06 juin 1995.

* Reçoit la SA ELECTROFLUID dans sa demande reconventionnelle, l'y dit mal fondée et l'en déboute.

* Ordonne l'exécution provisoire.

* Condamne la SA ELECTROFLUID à payer à la SA B.W.T. FRANCE la somme de CINQ MILLE FRANCS (5.000 francs) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

* Condamne la SA ELECTROFLUID aux frais d'expertise.

* Condamne la SA ELECTROFLUID aux dépens.

*

Appelante de cette décision, la société ELECTROFLUID persiste à soutenir que, comme l'a selon elle démontré l'expert, l'installation

livrée par la société PERMO (B.W.T.) n'était pas conforme aux prescriptions du C.C.T.P. et que cette dernière ne peut utilement soutenir qu'elle n'a jamais eu connaissance du contenu de ce document, alors que tout en l'espèce démontre le contraire.

Elle déduit de là qu'elle n'est plus redevable envers B.W.T. d'aucune somme dès lors qu'elle a réglé le solde arrêté par l'expert après l'abattement lié à la non conformité. Elle estime également que les travaux n'étant ni conformes, ni achevés, elle ne peut être redevable d'intérêts de retard. Elle conclut donc au rejet de toutes les demandes adverses et réclame à la société B.W.T. FRANCE le remboursement des sommes qu'elle a été contrainte de lui verser au titre de l'exécution provisoire avec intérêts au taux légal à compter de la date du versement. Elle réclame également la somme de 50.000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'une indemnité de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

*

La société B.W.T. conclut, pour sa part, à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice commercial et elle réclame, à ce titre, dans le cadre d'un appel incident, la somme de 50.000 francs. Elle sollicite aussi le bénéfice de la capitalisation des intérêts ainsi qu'une indemnité complémentaire de 10.000 francs en couverture des frais qu'elle a été contrainte d'exposer devant la Cour.

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que l'obligation de résultat à laquelle le sous-traitant est tenu vis à vis de l'entrepreneur principal a pour seul fondement les rapports contractuels et personnels existant entre eux ; qu'il en résulte que le sous-traitant a le devoir de livrer un ouvrage exempt de vice et conforme aux spécificités de la commande qu'il a reçu de l'entrepreneur principal.

Considérant qu'en l'espèce, la société ELECTROFLUID entend refuser de régler le solde qu'elle reste devoir à la société B.W.T., motif pris que l'ouvrage ne serait pas conforme au cahier des charges, dit C.C.T.P., qui prévoyait que la stérilisation de l'installation devait se faire à la vapeur et non au moyen de produits chimiques.

Mais considérant qu'il suffit de se référer aux pièces des débats pour constater que ni l'offre détaillée de service de la société PERMO, en date du 11 mars 1993, ni la commande, passée par la société ELECTROFLUID le 17 février suivant, ne font une quelconque référence au C.C.T.P. ; que ce document, au regard duquel il est demandé que soit apprécié le défaut de conformité alléguée, ne peut être valablement opposé à la société B.W.T. qu'autant qu'il soit démontré de manière certaine et non équivoque que ladite société en a été destinataire en cours de réalisation des travaux et que ledit document est ainsi entré dans le champ contractuel.

Or, considérant que sur ce point, tant l'expert que la société ELECTROFLUID procèdent par voie d'affirmation en soutenant que la société PERMO en a eu nécessairement connaissance ; qu'à cet égard, force est tout d'abord de constater que le C.C.T.P. n'a jamais été produit aux débats même au cours des opérations d'expertise ; qu'il est donc impossible d'en apprécier son contenu précis ; que, par ailleurs, le fait que la société B.W.T. qui espérait, à l'origine, obtenir directement le marché, ait participé à l'élaboration des premiers plans et que ceux-ci aient été utilisés par la suite par le maître d'oeuvre pour établir les documents de consultation des entreprises n'est pas suffisant à permettre de présumer que la société PERMO (B.W.T.) ait eu connaissance du contenu précis du C.C.T.P., notamment en ce qui concerne la méthode de stérilisation de l'eau préconisée par ce document ; que les observations du maître de l'ouvrage par l'entremise du maître d'oeuvre relatives au non respect

par l'entreprise principale du C.C.T.P. dont se prévaut l'appelante, ne sont pas plus opposables à la société PERMO (B.W.T.), à défaut d'une relation contractuelle directe entre ledit maître de l'ouvrage et le sous-traitant ; qu'il sera, en outre, relevé que ce dernier a proposé d'effectuer les modifications requises pour respecter les prétendues préconisations du cahier des charges mais à la condition que ces travaux, qui n'étaient spécifiés dans la commande, lui soit payés comme travaux supplémentaires ; qu'il apparaît également comme le précise l'expert sans être utilement contredit, que la réception des travaux n'a pu intervenir, non pas seulement en raison de la non conformité de l'ouvrage au C.C.T.P. dont il n'est pas justifié qu'elle soit imputable, comme il vient d'être dit, à la société PERMO (B.W.T.), mais en raison de la défaillance du maître de l'ouvrage, placée entre temps en liquidation judiciaire ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a condamné la société ELECTROFLUID à payer à la société B.W.T. le solde restant dû de 135.205 francs avec intérêts au taux légal à compter du 09 août 1983. * Sur les intérêts de la somme de 473.214 francs

Considérant que le bon de commande prévoyait que les travaux seraient réglés selon les modalités suivantes :

* 10 % à la commande,

* 30 % à la livraison,

* 10 % à la tuyauterie,

* 35 % à la fin des travaux,

* 15 % à la réception.

Considérant que la société ELECTROFLUID entend obtenir l'infirmation du jugement déféré en ce qui concerne les intérêts de retard alloués sur la somme de 473.214 francs depuis la date de la mise en demeure jusqu'au 06 juin 1995, date de règlement de ladite somme, motif pris que les travaux n'auraient pas été achevés et réceptionnés.

Mais considérant que, comme il a été vu précédemment, la non réception des travaux n'est pas imputable à la société B.W.T. qui a livré un ouvrage achevé et dont la non conformité à la commande reçue

n'est pas démontrée ; qu'il s'ensuit que le sous-traitant, qui ne peut être tenu pour responsable de la non réception des travaux, est fondé à réclamer les intérêts de retard sur les factures non payées conformément aux prévisions du contrat ; que le jugement déféré sera encore confirmé de ce chef et la société ELECTROFLUID déboutée de son appel qui s'avère sans fondement.

* Sur les autres demandes formées par la société B.W.T. FRANCE

Considérant que la société B.W.T. est fondée à solliciter le bénéfice de la capitalisation des intérêts, conformément à l'article 1154 du Code Civil, et ce, à compter du 29 octobre 1997, date de la première demande en justice formée par voie de conclusions.

Considérant, en revanche, que la société B.W.T. ne justifie du préjudice commercial qu'elle prétend avoir subi ; que la demande de dommages et intérêts qu'elle forme de ce chef sera rejetée.

Considérant enfin qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société B.W.T. les sommes qu'elle a été contrainte d'exposer devant la Cour ; que la société ELECTROFLUID sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 6.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, laquelle indemnité s'ajoutera à celle déjà allouée par le premier juge sur le même fondement ; que, succombant, l'appelante supportera également les entiers dépens à ce jour, en ce compris les frais d'expertise.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- REOEOIT la société ELECTROFLUID SA en son appel principal et la société B.W.T. FRANCE SA (anciennement société PERMO) en son appel incident,

- DIT ces appels mal fondés et les rejette,

- CONFIRME, en conséquence, en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y ajoutant,

- ORDONNE la capitalisation des intérêts de retard, conformément à l'article 1154 du Code Civil, et ce, à compter du 29 octobre 1997,

- CONDAMNE la société ELECTROFLUID SA à payer à la société B.W.T. FRANCE SA une indemnité complémentaire de 6.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ladite indemnité s'ajoutant à celle déjà allouée sur le même fondement en première instance,

- CONDAMNE la société ELECTROFLUID SA aux entiers dépens exposés à ce jour, en ce compris les frais d'expertise et autorise la SCP d'avoués, JULLIEN-LECHARNY-ROL, à poursuivre directement le recouvrement de la part la concernant, comme il est dit à l'article

699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M.T. GENISSEL

F. X...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-9467
Date de la décision : 06/05/1999

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Sous-traitant - Rapports avec l'entrepreneur principal - Obligation de résultat - /

L'obligation de résultat à laquelles est tenu le sous-traitant à l'égard de l'entrepreneur principal a pour seul fondement les rapports contractuels et personnels existants entre eux. Il en résulte que le sous-traitant à l'obligation de livrer un ouvrage exempt de vice et conforme aux spécificités de la commande reçu de l'entrepreneur principal. Dés lors, la responsabilité du sous-traitant ne peut être engagée à l'égard de l'entrepreneur au motif que la construction n'est pas conforme au cahier des charges s'il est démontré que ni dans l'offre de service délivrée par les sous-traitant ni dans la commande passée par l'entrepreneur il n'est fait référence à ce cahier des charges.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-05-06;1996.9467 ?
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