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06/05/1999 | FRANCE | N°1996-9158

France | France, Cour d'appel de Versailles, 06 mai 1999, 1996-9158


FAITS ET PROCEDURE

Suivant contrat en date du 29 mars 1990, la Commune de NOGENT LE ROTROU a concédé à la S.A. MONTENAY, aux droits de laquelle se trouve la S.A. ESYS MONTENAY, le service de distribution de l'énergie calorifique destiné à l'immeuble industriel de la rue Sainte-Anne à NOGENT LE ROTROU, pour une durée de dix ans à effet au 1er décembre 1988.

Se prévalant du non règlement par la SARL METHACRYL d'un solde de factures, la société ESYS MONTENAY l'a assignée en paiement devant le Tribunal de Commerce de CHARTRES.

Par jugement rendu le 21 mai 199

6, cette juridiction rejetant l'exception soulevée par la société METHACRYL s'es...

FAITS ET PROCEDURE

Suivant contrat en date du 29 mars 1990, la Commune de NOGENT LE ROTROU a concédé à la S.A. MONTENAY, aux droits de laquelle se trouve la S.A. ESYS MONTENAY, le service de distribution de l'énergie calorifique destiné à l'immeuble industriel de la rue Sainte-Anne à NOGENT LE ROTROU, pour une durée de dix ans à effet au 1er décembre 1988.

Se prévalant du non règlement par la SARL METHACRYL d'un solde de factures, la société ESYS MONTENAY l'a assignée en paiement devant le Tribunal de Commerce de CHARTRES.

Par jugement rendu le 21 mai 1996, cette juridiction rejetant l'exception soulevée par la société METHACRYL s'est déclarée compétente, a condamné cette société à verser à la société ESYS MONTENAY, la somme de 266.885,89 francs avec intérêts légaux à compter de l'assignation du 15 mai 1995 et le bénéfice de l'exécution provisoire, outre une indemnité de 10.000 francs en vertu de

l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Appelante de cette décision, la société METHACRYL qui souligne n'avoir souscrit aucun contrat d'abonnement avec la société ESYS MONTENAY en violation de l'article 5.3 du contrat de concession soutient que le litige portant uniquement sur les difficultés d'appréciation des conditions de fixation des tarifs par cette société et la ville de NOGENT LE ROTROU relève de la compétence des tribunaux administratifs.

Elle estime, en toute hypothèse, que la créance revendiquée par la société ESYS MONTENAY est contestable dans son principe et son montant en faisant état de l'absence de liens contractuels entre elles et du caractère excessif de la tarification stipulée dans le contrat de concession attestée par les deux avenants intervenus avant la résiliation à l'initiative de la commune comme par l'expertise amiable qu'elle a fait diligenter avec deux autres sociétés implantées dans le même lieu par Monsieur X....

Elle demande donc à la Cour de déclarer le Tribunal de Commerce de CHARTRES incompétent et de renvoyer les parties à se mieux pourvoir devant le Tribunal administratif d'ORLEANS, subsidiairement, d'infirmer intégralement le jugement déféré en ordonnant le remboursement des sommes versées par l'effet de l'exécution provisoire avec intérêts au taux légal à compter de leur règlement et en condamnant la société ESYS MONTENAY au paiement de la somme de 16.392 francs au titre des frais d'expertise avec intérêts légaux à partir de l'arrêt à intervenir et de 30.000 francs de dommages et intérêts.

Elle réclame, par ailleurs, une indemnité de 50.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société ESYS MONTENAY conclut pour sa part à la confirmation totale de la décision attaquée, au rejet de toutes les prétentions de la société METHACRYL et à l'octroi d'une somme de 20.000 francs pour frais irrépétibles.

Elle oppose que la société METHACRYL lui a réglé pendant les années

1991 et 1992 ses factures de chauffage comme l'obligation lui en incombe en vertu de son bail et du contrat de concession du 29 mars 1990.

Elle ajoute que le litige étant lié exclusivement au recouvrement du prix de fournitures et de services par elle offerts à la société METHACRYL ressort de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

Elle fait valoir au fond que la société METHACRYL qui a accepté son raccordement au réseau de chauffage et par là même les prix pratiqués, n'a pas qualité pour contester auprès d'elle le montant des prestations.

Elle dément tout caractère exorbitant du coût de la redevance en indiquant que les deux baisses successives ont pu être appliquées en raison d'économies et d'une diminution des obligations mises à sa charge, et en précisant que la cause de la résiliation du contrat de concession provient de la vente de la plupart des locaux concernés.

Elle conteste les conclusions du rapport non contradictoire menées selon elle sur des bases tronquées.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 février 1999.

MOTIFS DE L'ARRET

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 5.4 du contrat de concession conclu le 26 mars 1990, toute fourniture de chaleur est subordonnée à un contrat écrit d'abonnement entre le concessionnaire et le propriétaire ou locataire ;

Que toutefois, il n'est pas discuté par la société ESYS MONTENAY qu'une telle convention n'a pas été souscrite par la société

METHACRYL, locataire d'un bâtiment situé à l'intérieur du périmètre défini par la concession, ni davantage démontré que la propriétaire, la SCI DU VAL D'HUISNE qui, au demeurant, n'est pas dans la cause et lui a consenti un bail le 1er janvier 1994 postérieurement aux fournitures de chaleur litigieuses, ait contracté un abonnement écrit ;

Considérant que la société METHACRYL n'a donc pas la qualité d'abonné mais celle d'usager d'un service public industriel et commercial au regard du contrat de concession conclu entre la municipalité de NOGENT LE ROTROU et la société ESYS MONTENAY sur lequel cette dernière fonde son action ;

Considérant que la société METHACRYL conteste la tarification édictée dans le contrat de concession en fonction d'un élément R.1 proportionnel représentant le coût du combustible nécessaire pour assurer la chaleur des locaux concernés variant selon la consommation effective et d'un élément fixe R.2 représentant le coût des prestations d'entretien et d'amortissement des installations réparti entre l'ensemble des abonnés au prorata des puissances souscrites par

eux en kilowatt, en soutenant que celle-ci en dépit de deux avenants au contrat de concession intervenus les 18 février 1991 et 03 février 199 ayant réduit la valeur du second élément, demeure excessive, en se prévalant du rapport de l'expert amiable Monsieur X... qui a fait état de disparités inexplicables selon lui dans la facturation du R.1 et d'une surévaluation importante du R.2 ;

Or, considérant que si les tribunaux judiciaires sont compétents pour les litiges relatifs à l'application aux usagers des tarifs pratiqués par les concessionnaires de services publics industriels et commerciaux, ils ne le sont pas pour statuer sur la détermination des tarifs arrêtés en accord avec une personne morale de droit public présentant à leur égard un caractère réglementaire et ressortant de la compétence des juridictions administratives ;

Qu'il suit de là que le Tribunal de Commerce de CHARTRES comme la Cour sont incompétents pour connaître du présent litige et qu'il y a lieu en infirmant entièrement le jugement entrepris, de renvoyer les parties à se mieux pourvoir, conformément à l'article 96 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que l'équité commande d'allouer à la société METHACRYL une indemnité de 12.000 francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Que la société ESYS MONTENAY qui succombe en toutes ses prétentions et supportera les dépens des deux instances, n'est pas fondée en sa demande au même titre.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau,

- DECLARE le Tribunal de Commerce de CHARTRES comme la Cour, incompétents pour connaître du litige opposant la S.A. ESYS MONTENAY et la SARL METHACRYL ;

- RENVOIE les parties à se mieux pourvoir ;

- CONDAMNE la S.A. ESYS MONTENAY à verser à la SARL METHACRYL une indemnité de 12.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- LA CONDAMNE aux dépens des deux instances et autorise la SCP KEIME etamp; GUTTIN, Avoués, à recouvrer ceux d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

ARRET REDIGE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M. Thérèse Y...

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-9158
Date de la décision : 06/05/1999

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Services et établissements publics à caractère industriel et commercial - Usagers - Litige les opposant au concessionnaire

Lorsqu'en vertu d'un contrat de concession, la fourniture de la prestation objet dudit contrat, en l'occurrence la fourniture de chaleur dans un immeuble industriel, est subordonnée à un contrat écrit d'abonnement entre le concessionnaire et le propriétaire ou le locataire dudit immeuble, en l'absence de souscription d'un tel contrat par le propriétaire ou son locataire, la fourniture de la prestation litigieuse au locataire intervient, au regard du contrat de concession, non pas en sa qualité d'abonné, mais en qualité d'usager d'un service public industriel et commercial. Si les tribunaux judiciaires sont compétents pour connaître des litiges relatifs à l'application aux usagers des tarifs pratiqués par les concessionnaires de services publics industriels et commerciaux, ils ne le sont pas pour statuer sur la détermination des tarifs arrêtés en accord avec une personne morale de droit public en ce qu'ils présentent à leur égard un caractère réglementaire relevant de la compétence de l'ordre administratif. Dès lors qu'en l'espèce l'objet du litige porte sur la contestation de la tarification édictée dans le contrat de concession, notamment la valeur des éléments retenus pour sa détermination, les juridictions judiciaires ne sont pas compétentes pour en connaître


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-05-06;1996.9158 ?
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