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16/04/1999 | FRANCE | N°1997-3060

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16 avril 1999, 1997-3060


FAITS ET PROCEDURE

Le 6 février 1996, Monsieur X... a vendu à Monsieur Y... un véhicule automobile d'occasion 305 Peugeot au prix de 16.000 Francs. Le 30 juillet 1996, Monsieur Y... a fait assigner Monsieur X... devant le tribunal d'instance d'ECOUEN, afin de voir annuler la vente pour dol et subsidiairement, prononcer sa résolution pour défaut de délivrance conforme et plus subsidiairement pour vices cachés, condamner Monsieur X... à lui restituer la somme de 16.000 Francs, avec intérêts au taux légal à compter du 6 février 1996 et à lui payer la somme de 14.000 Francs Ã

  titre de dommages-intérêts et celle de 10.000 Francs sur le fondem...

FAITS ET PROCEDURE

Le 6 février 1996, Monsieur X... a vendu à Monsieur Y... un véhicule automobile d'occasion 305 Peugeot au prix de 16.000 Francs. Le 30 juillet 1996, Monsieur Y... a fait assigner Monsieur X... devant le tribunal d'instance d'ECOUEN, afin de voir annuler la vente pour dol et subsidiairement, prononcer sa résolution pour défaut de délivrance conforme et plus subsidiairement pour vices cachés, condamner Monsieur X... à lui restituer la somme de 16.000 Francs, avec intérêts au taux légal à compter du 6 février 1996 et à lui payer la somme de 14.000 Francs à titre de dommages-intérêts et celle de 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de

procédure civile et ce, avec le bénéfice de l'exécution provisoire.

Monsieur Y... a exposé qu'il avait acheté le véhicule afin de participer à une action humanitaire en BOSNIE; que quelques jours avant son départ, le garagiste auquel il avait confié le véhicule pour une visite technique, lui a indiqué que le radiateur devait être changé et que le véhicule ne serait pas prêt pour le jour de son départ; que par la suite, le centre technique spécialisé consulté par ses soins, a constaté des défectuosités pratiquement irréparables; qu'il a donc engagé des frais à hauteur de 5.031 Francs pour un véhicule qui ne fonctionne pas; qu'il a perdu la rémunération prévue pour la mission en BOSNIE et que sa candidature a été rejetée par l'école "Bioforce Rhône-Alpes", en raison de son manque d'expérience dans le domaine de l'action humanitaire; que Monsieur X... ne

pouvait ignorer que le véhicule ne fonctionnait pas lorsqu'il l'a vendu.

Monsieur X... a répliqué que Monsieur Y... n'établissait pas l'existence de manoeuvres dolosives et ne justifiait pas que le véhicule était inutilisable.

Il a donc demandé au tribunal de rejeter les demandes de Monsieur Y... et de le condamner à lui payer la somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 4 février 1997, le tribunal d'instance d'ECOUEN a rendu la décision suivante :

- annule la vente intervenue le 6 février 1996,

- condamne Monsieur X... à restituer à Monsieur Y... la somme de

16.000 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 16 avril 1996, - condamne Monsieur X... à verser à Monsieur Y... la somme de 5.031 Francs à titre de dommages-intérêts, et celle de 2.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamne Monsieur X... aux dépens.

Le 24 février 1997, Monsieur X... a interjeté appel.

Il reproche au premier juge de s'être fondé sur deux vagues attestations pour annuler la vente. Il expose qu'il a fait passer une annonce dans le journal "Boum Boum" de février 1996, en proposant à la vente une Peugeot 305 diesel millésime 82 dont le kilométrage était de 122.000 kms; qu'il a précisé à l'acquéreur qu'il ne s'agissait pas d'un véhicule de première main et lui a communiqué le contrôle technique; que le problème afférent au radiateur, non mentionné dans le rapport du contrôle technique du 7 décembre 1995,

est un vice apparent.

Il soutient donc que Monsieur Y... n'établit pas qu'il aurait commis des manoeuvres dolosives, pas plus qu'il ne démontre l'existence de vices cachés ou l'impossibilité d'utiliser le véhicule en l'absence de toute expertise contradictoire ou encore le non respect de l'obligation de délivrance à la charge du vendeur; que Monsieur Y... a acheté le véhicule en connaissance de cause.

Il demande à la Cour de:

- réformer le jugement entrepris,

- débouter Monsieur Y... de toutes ses demandes,

- condamner Monsieur Y... à payer à Monsieur X... la somme de

15.000 Francs en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamner Monsieur Y... aux dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés directement par la SCP KEIME GUTTIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Monsieur Y... répond que le rapport du contrôle technique du véhicule, en date du 7 décembre 1995, ayant mentionné que la fixation de l'articulation de l'essieu avant était mauvaise, qu'il y avait une fuite au niveau du moteur , que les émissions de fumée étaient excessives et que l'avertisseur ne fonctionnait pas, Monsieur X... ne pouvait, de bonne foi, indiquer dans son annonce que le véhicule était en parfait état, ce qui l'a déterminé à l'acquérir pour se rendre en BOSNIE; que s'il avait connu son état réel, il ne l'aurait

pas acheté; que l'intention dolosive du vendeur ressort également des circonstances, puisque Monsieur X... a reconnu qu'il avait acheté ce véhicule deux mois plus tôt et qu'il était demeuré immobilisé pendant toute cette période. Il conteste le caractère apparent des défectuosités du véhicule et souligne que celles-ci ont affecté irrémédiablement son fonctionnement.

Il forme appel incident quant à la réparation de son préjudice, résultant non seulement de son impossibilité de partir en BOSNIE pour remplir son contrat d'engagement vis-à-vis de l'organisme Camps SF et du rejet de sa candidature par BIOFORCE, mais aussi des frais de

déplacement, voire de gardiennage du véhicule qu'il sera contraint d'engager, le syndic de la copropriété où il demeure lui ayant enjoint de retirer le véhicule litigieux de la cour de l'immeuble où il est garé depuis son achat.

Il demande à la Cour de:

- donner acte à la SCP DELCAIRE BOITEAU de ce qu'elle se constitue aux lieu et place de Maître DELCAIRE, avoué précédemment constitué,

- débouter Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer en tous points le jugement rendu par le tribunal d'instance d'ECOUEN le 4 février 1997,

Y ajoutant,

- ordonner la capitalisation des intérêts année par année,

- condamner Monsieur X... à payer à Monsieur Y... les sommes de 6.000 Francs à titre de dommages-intérêts supplémentaires pour les frais de déplacement du véhicule, 6.000 Francs au titre de l'indemnité prévue au contrat d'engagement CAMPS SF pour trois mois, 10.000 Francs pour perte de chance et 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant sera recouvré par la SCP DELCAIRE BOITEAU, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 4 mars 1999 et les dossiers des parties ont été déposés à l'audience du 16 mars 1999.

SUR CE LA COUR

Considérant que sont indiqués sur le rapport de contrôle technique du 7 décembre 1995 certains défauts présentés par le véhicule litigieux, dont une fuite moteur, une opacité de fumées (gazole) excessive et la corrosion du berceau et de la carrosserie; qu'il en résulte que le véhicule n'était pas alors en "parfait état";

Considérant qu'il est constant dans ces conditions qu'en mentionnant dans l'annonce de vente de ce véhicule, son "parfait état", Monsieur X..., qui connaissait les termes de ce rapport, a menti sur son état réel; que certes, le simple mensonge peut constituer un dol, à la condition cependant qu'il ne soit pas aisément décelable, car dans une vente notamment, il appartient à tout contractant capable de discernement, de ne pas être la dupe trop facile des déclarations exaltant la qualité de la chose à vendre;

Considérant qu'en l'espèce, Monsieur Y..., à la lecture du rapport du contrôle technique, était en mesure de réaliser le caractère outrancier de la déclaration de Monsieur X... quant à l'état de son véhicule; qu'en particulier, le fuite moteur, l'opacité de fumée et la corrosion de la carrosserie sur un véhicule, mis en circulation 14 ans plus tôt, avec un kilométrage de 122.000 kms, auraient du l'alerter sur l'état général du véhicule, surtout avant d'entreprendre son voyage en BOSNIE; que dans ces conditions, il n'est pas démontré que le caractère outré et abusif de l'annonce

publicitaire (ou bien/autre formule le mensonge du vendeur dans l'annonce publicitaire) ait déterminé Monsieur Y... à acquérir le véhicule litigieux;

Considérant que Monsieur Y... ne prouve pas que Monsieur X... se serait livré à d'autres manoeuvres pour le tromper et surprendre son consentement, notamment qu'il lui aurait caché qu'il n'avait pas utilisé le véhicule depuis son acquisition; que la cour ne peut donc retenir qu'il ait eu dol en application de l'article 1116 du code civil.

Considérant que dans ses conclusions devant la cour, Monsieur Y... n'invoque pas expressément d'autres causes de nullité du contrat de vente; qu'en tout état de cause, pour justifier de l'impossibilité d'utiliser normalement le véhicule, il ne produit que des attestations, dont l'une établie par Monsieur Z..., gérant de la société "SECA carburologie", lequel déclare que le taux de compression des 4 cylindres du moteur est très faible et que les réparations à effectuer risquent d'entraîner des frais importants; que faute d'une analyse technique plus précise et surtout d'un rapport d'expertise contradictoirement établi, Monsieur Y... ne démontre pas l'existence de vices cachés au sens de l'article 1641 du code civil; qu'il ne démontre pas davantage que le véhicule livré ne correspondait pas à celui acheté en connaissance de ses défauts techniques, de son âge et de son kilométrage et que partant, l'obligation de délivrance n'aurait pas été remplie;

Considérant que par conséquent, la cour, infirmant le jugement déféré, déboute Monsieur Y... de sa demande de nullité de la vente du véhicule litigieux ainsi que de toutes ses autres demandes,

notamment en restitution du prix de vente et en paiement de dommages-intérêts;

Considérant qu'eu égard à l'équité, il y a lieu d'allouer à Monsieur X... la somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

- INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions;

Et statuant à nouveau:

- DEBOUTE Monsieur Y... des fins de toutes ses demandes;

- CONDAMNE Monsieur Y... à payer Monsieur X... la somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

- LE CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP KEIME GUTTIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M-H. EDET

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-3060
Date de la décision : 16/04/1999

Analyses

VENTE - Nullité - Dol - Preuve

Lorsqu'il ressort des mentions du rapport de contrôle technique d'un véhicule qu'il n'est pas en " parfait état", il s'ensuit que sa mise en vente avec la mention "parfait état" atteste du mensonge du vendeur. Si le simple mensonge peut certes être constitutif de dol, il appartient à tout contractant, notamment dans une vente, de ne pas être dupe des déclarations exaltant la qualité de la chose à vendre. La lecture du rapport de contrôle technique précité suffisant à établir le caractère outrancier de l'affirmation de l'annonce, alors que les défauts mentionnés rapportés à l'âge du véhicule et au kilométrage parcouru étaient de nature à alerter sur l'état réel du véhicule, il n'est pas établi que l'annonce litigieuse ait déterminé la décision d'acquisition. A défaut pour l'acquéreur de prouver que le vendeur se serait livré à d'autres manuvres pour tromper et surprendre son consentement, il ne peut être retenu qu'il y ait eu dol, en application de l'article 1116 du Code civil


Références :

Code civil, article 1116

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-04-16;1997.3060 ?
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