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09/04/1999 | FRANCE | N°1997-5103

France | France, Cour d'appel de Versailles, 09 avril 1999, 1997-5103


FAITS ET PROCEDURE

Par acte en date du 23 octobre 1967, la SNC LEMAIRE-GILLARD a consenti à bail un appartement dépendant d'un immeuble sis 60, rue Henri Litolff à COLOMBES à Monsieur et Madame X.... Ils ont fait l'objet d'un commandement de payer, du 22 mars 1996, visant des loyers et des charges.

Par acte d'huissier du 4 avril 1996, Monsieur et Madame X... ont fait assigner, au fond, devant le tribunal d'instance de COLOMBES, la SNC LEMAIRE-GILLARD, aux fins d'entendre :

- constater que la location du logement dont ils sont locataires 96, rue Jean Jaurès à BOIS

COLOMBES, est régie par la loi du 1er septembre 1948,

- dire que le l...

FAITS ET PROCEDURE

Par acte en date du 23 octobre 1967, la SNC LEMAIRE-GILLARD a consenti à bail un appartement dépendant d'un immeuble sis 60, rue Henri Litolff à COLOMBES à Monsieur et Madame X.... Ils ont fait l'objet d'un commandement de payer, du 22 mars 1996, visant des loyers et des charges.

Par acte d'huissier du 4 avril 1996, Monsieur et Madame X... ont fait assigner, au fond, devant le tribunal d'instance de COLOMBES, la SNC LEMAIRE-GILLARD, aux fins d'entendre :

- constater que la location du logement dont ils sont locataires 96, rue Jean Jaurès à BOIS COLOMBES, est régie par la loi du 1er septembre 1948,

- dire que le loyer s'établit à 2.354,90 Francs à compter du 1er juillet 1995, et que le droit de bail s'élève à 58,87 Francs,

- déclarer nul et de nul effet le commandement de payer délivré le 22 mars 1996,

- fixer les dommages-intérêts en réparation du préjudice moral que leur cause l'attitude du défendeur, à 5.000 Francs,

- condamner la SNC LEMAIRE-GILLARD à 4.500 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La SNC LEMAIRE-GILLARD fait valoir quant à elle :

- qu'il y a lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement des causes du commandement ;

- que l'expulsion des demandeurs doit être ordonnée, d'autant plus, qu'ils ont muré deux fenêtres avec du "placoplâtre ;

- qu'ils doivent payer 2.251,20 Francs de soldes de charges, 14.048,05 Francs de loyers impayés ;

- qu'il convient de condamner la partie opposée à verser 5.000 Francs de dommages-intérêts, et 4.500 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 13 mai 1997, le tribunal d'instance de COLOMBES a rendu la décision suivante :

Vu l'article 32 bis de la loi du 1er septembre 1948,

Vu l'article 1728 du code civil,

- déclare la demande principale fondée,

- déclare la demande reconventionnelle non fondée,

En conséquence,

- constate que la location du logement dont sont locataires Monsieur et Madame X... au 96, rue Jean Jaurès à BOIS COLOMBES, est régie par la loi du 1er septembre 1948,

- dit que le loyer s'établit à 2.354,90 Francs par trimestre, à compter du 1er juillet 1995, et que le droit de bail, s'élève à 58.87 Francs, soit en tout, 3.363,77 Francs par trimestre, y compris la provision sur charges,

- donne acte à Monsieur et Madame X... du règlement d'une somme de

816,20 Francs en septembre 1995, pour la régularisation des charges de l'année 1994, et de leur engagement de régler celles dues au titre de l'année 1995, dès la présentation des pièces justificatives,

- déclare nul et de nul effet le commandement de payer délivré le 22 mars 1996,

- dit n'y avoir lieu à dommages-intérêts,

- dit que la SNC LEMAIRE-GILLARD devra payer à Monsieur et Madame X... 4.400 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- rejette le surplus des demandes,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,

- met les entiers dépens à la charge de la SNC LEMAIRE-GILLARD.

Le 9 juin 1997, la SNC LEMAIRE-GILLARD a interjeté appel de cette décision.

Elle fait grief à la décision entreprise d'avoir ainsi statué alors que :

* la clause résolutoire du fait du non paiement des charges pour l'année 1995, était acquise, les époux X... n'ayant pas saisi le tribunal dans le mois du commandement de payer, de sorte qu'ils se trouvaient forclos à contester ladite clause. A l'appui de cette prétention, elle ajoute qu'il en va de même en dépit de la déduction de la facture de dératisation,

En outre, elle allègue que la clause résolutoire, du faut du non paiement des loyers, est également acquise, les époux X... n'ayant contesté le décompte que par courrier en date du 8 novembre 1994, alors que la motivation dudit décompte de surface corrigée, datait du 5 septembre 1994, de sorte qu'ils se trouvaient forclos une nouvelle fois dans leur contestation. En outre, elle ajoute que l'argument des époux X... consistant à dire que la répartition des charges est faite à tort sur 6 occupants alors qu'il n'y en a que 5 se retourne

contre eux de sorte que le solde réclamé constitué un minimum.

* que la résiliation du bail est justifiée en vertu des stipulations du contrat. A l'appui de cette prétention, elle fait valoir que le tribunal a été justement saisi de cette contestation et que les époux X... ne justifient en l'état, ni de la réalité d'un cambriolage en 1995, ni des conseils qui leur auraient été soi-disant donnés par la Police ou par leur assureur.

En conséquence, elle prie la Cour de :

- infirmer le jugement rendu le 13 mai 1997 par le tribunal d'instance de COLOMBES et statuant à nouveau,

- débouter les époux X... de leur demande irrecevable et mal fondée,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire suite au non paiement même d'une partie seulement des causes du commandement en date du 22 mars 1996,

En conséquence,

- ordonner l'expulsion des époux X..., ainsi que celle de tous occupants de leur chef, sous astreinte journalière de 500 Francs, à

compter de la signification de la décision à intervenir avec le concours si besoin est, de la force publique et d'un serrurier,

- ordonner le transport du mobilier et du matériel dans tel lieu au choix du bailleur, aux frais, risques et périls des preneurs,

- supprimer le délai de deux mois prévu à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 compte-tenu des circonstances de l'espèce,

- condamner solidairement les époux X... au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au loyer actuel, majoré de 30 % soit à la somme de 2.000 Francs,

- les condamner solidairement à payer à la SNC LEMAIRE-GILLARD les sommes suivantes :

* 2.251,20 Francs, solde des charges 1995,

* 14.048,05 Francs, solde des loyers impayés,

* 5.000 Francs, à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

* 4.500 Francs, au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- les condamner solidairement aux dépens, inclus le coût du commandement, dont distraction au profit de la SCP LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Les époux X... font valoir quant à eux :

- que le commandement de payer est nul et de nul effet, tant en raison des charges que des loyers impayés. A l'appui de leur

prétention, ils font valoir que d'une part, que la clé de répartition des charges restent mystérieuses, que d'autre part, faute de saisie de la juridiction compétente pour l'établissement du décompte de la surface corrigée, le tribunal d'instance de COLOMBES n'était pas saisi de cette partie du litige de sorte que le commandement de payer est nul eu égard au désaccord sur ce point.

A titre subsidiaire, ils alléguent que ce décompte n'a pas acquis un caractère définitif, la SNC LEMAIRE-GILLARD y ayant renoncé.

En outre, ils font valoir qu'ils n'ont pas méconnu les dispositions du contrat de bail, de sorte que la demande en résiliation du bail, est infondée. A l'appui de leur prétention, ils allèguent que les deux photos versées au débat n'établissent pas la relation entre leur appartement et les travaux réalisés ;

* qu'elles correspondent au bouchement d'une porte fracturée au rez-de-chaussée à l'occasion d'un cambriolage dans la nuit du 17 au 18 avril 1995 et au trou pratiqué par ces cambrioleurs dans un mur mitoyen au 68, qui a effectivement été bouché par des carreaux de plâtre sur les conseils de la police et de l'assureur.

Par conséquent, les époux X... requièrent la Cour de :

- débouter la SNC LEMAIRE-GILLARD de son appel,

- le déclarer mal fondé,

- confirmer purement et simplement le jugement entrepris,

Y ajoutant,

- condamner la SNC LEMAIRE-GILLARD à payer à Monsieur et Madame X... une somme de 8.000 Francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamner la SNC LEMAIRE-GILLARD en tous les dépens qui seront recouvrés directement par la SCP KEIME GUTTIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 4 février 1999 et l'affaire plaidée à l'audience du 12 mars 1999.

SUR CE LA COUR

Considérant que tout commandement de payer doit avoir une cause et que cet acte doit reproduire, à peine de nullité, les dispositions de l'article 80 de la loi du 1er septembre 1948, applicable en l'espèce ;

Considérant que la régularité même de ce commandement, au regard de cet article de loi, n'est pas discutée, et que les époux X... se bornent à faire valoir, principalement, devant la Cour, que, selon eux, la régularisation de charges locatives dues par eux, s'élevait à 816,28 Francs et non pas à 2.607,10 Francs comme réclamés ;

Considérant que cet aveu judiciaire est retenu contre les époux X... et que le commandement de payer a donc une cause et est fondé, à concurrence de ces 816,28 Francs reconnus ;

Qu'il est par ailleurs constant et reconnu que cette somme a été régularisée "avec un retard" et que les époux X... n'ont pas saisi le juge des référés, dans les conditions et aux fins visées par l'article 3 de cet article 80 de la loi du 1er septembre 1948 ;

Considérant que les époux X... ont saisi, au fond, le tribunal d'instance le 4 avril 1996, mais sans discuter explicitement le montant des charges visées dans ce commandement de payer du 22 mars 1996 ; que dès cette date, ces locataires étaient en mesure de prendre connaissance des documents justificatifs relatifs à ces charges réclamées, ce que manifestement ils n'ont pas fait ; que ces charges locatives - au moins à concurrence des 816,28 Francs reconnus - sont donc dues et justifiées et qu'aucune nullité, de ce chef, n'est donc encourue par ce commandement de payer ;

Considérant, quant aux loyers également visés dans ce commandement de payer, qu'ils ont certes été contestés, dans le délai d'un mois, non pas devant le juge des référés comme l'exige l'article 80 alinéa 3 de la loi d'ordre public du 1er septembre 1948, mais devant le tribunal d'instance qui a été saisi le 4 avril 1996 ; que ce juge n'a pas été saisi en référé, en vue de l'octroi de délais de paiement et de suppression des effets de la clause résolutoire, mais au fond, au sujet d'une contestation , entre autres, d'un décompte de surface corrigée qui avait été adressé par la SNC bailleresse depuis le 6 septembre 1994 et que celle-ci entendait clairement faire appliquer, sans y avoir explicitement ni définitivement renoncé malgré les termes de sa lettre recommandée du 19 décembre 1994 invoquée par les intimés ; que ce loyer ainsi exigé par la SNC LEMAIRE-GILLARD n'a d'ailleurs pas été contesté par les époux X... dans le délai de

deux mois de l'article 32 de la loi ;

Considérant que ce commandement de payer du 22 mars 1996 qui visait également les loyers et qui n'a pas été soumis au juge des référés dans les conditions et le délai prévus par la loi d'ordre public du 1er septembre 1948, en son article 80 doit donc recevoir ses pleins effets, et que la prétendue illicéité de ces loyers, maintenant invoquée par les locataires, ne les dispensait pas de leur obligation légale et contractuelle de payer leur loyer et ce, dans l'attente d'une décision éventuelle du juge du fond, modifiant son montant ; qu'en tout état de cause, les époux X... n fournissent pas d'éléments d'appréciation sur l'application qui serait à faire des articles 27 et suivants et notamment 32 bis de la loi du 1er septembre 1948, quant à la détermination d'un loyer dit "licite" selon eux, et qu'ils n'ont produit aucun décompte de surface corrigée, ni jamais demandé qu'une mesure d'instruction soit ordonnée au sujet de cette valeur locative ; que le commandement de payer 22 mars 1996, n'encourt donc aucune nullité de ce chef, étant observé que le jugement déféré n'a pas parlé expressément d'une quelconque illicéité de ce loyer ;

Considérant que la clause résolutoire était donc recevoir sa pleine application et que la Cour, infirmant et statuant à nouveau, ordonne l'expulsion des époux X... et la séquestration de leur mobilier qui se feront conformément aux dispositions des articles 21 et 61 à 66 de la loi du 9 juillet 1991 (modifiée par la loi du 29 juillet 1998) et en respectant, notamment, le délai de deux mois fixé par l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 ;

Considérant en outre, que la Cour fixe à 1.800 Francs le montant mensuel de l'indemnité d'occupation due in solidum par les époux X... ;

Considérant que le solde des charges réclamées pour un montant de 2.251,20 Francs n'est pas justifié par les pièces versées aux débats (article 38 de la loi du 1er septembre 1948), et que la SNC LEMAIRE-GILLARD, appelante, est donc déboutée de ce chef de demande ;

Considérant que certes les époux X... succombent en leurs moyens, mais qu'il n'est pas pour autant démontré qu'ils auraient opposé une "résistance abusive" comme le prétend la SNC LEMAIRE-GILLARD qui est donc déboutée de sa demande de dommages-intérêts de ce chef ;

Considérant enfin que l'équité ne commande pas que la SNC LEMAIRE-GILLARD obtienne une somme en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et qu'elle est donc déboutée de sa demande de ce chef ; que de même, et compte-tenu de l'équité, les époux X... sont déboutés de leur propre demande sur ce fondement ; PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

- DECLARE régulier et valable le commandement de payer visant la clause résolutoire du 22 mars 1996 ;

Par conséquent :

Infirmant et statuant à nouveau,

- ORDONNE l'expulsion des époux X... et la séquestration de leur mobilier qui se feront conformément aux dispositions des articles 21 et 61 à 66 de la loi du 9 juillet 1991 ( modifiée par la loi du 29 juillet 1998) et en respectant le délai de deux mois fixé par l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 ;

- FIXE à 1.800 Francs par mois l'indemnité d'occupation due par les époux X... et LES CONDAMNE in solidum à payer cette indemnité à la SNC LEMAIRE-GILLARD ;

- DEBOUTE cette SNC de sa demande en paiement de 2.251,20 Francs de charges locatives ;

- DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives en paiement, fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- CONDAMNE les époux X... à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre eux par l'a SCP LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER qui a assisté au prononcé

LE PRESIDENT

M-H. EDET

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-5103
Date de la décision : 09/04/1999

Analyses

COMMANDEMENTValidité - Conditions

L'existence d'une cause est la condition de validité du commandement de payer. En conséquence, dès lors que le locataire débiteur de loyers et charges limite sa contestation au montant de la somme due, sans revenir sur la régularité du commandement, il confirme, par son aveu judiciaire, que celui-ci a une cause et est fondé à concurrence du montant de la dette reconnue


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-04-09;1997.5103 ?
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