La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/1999 | FRANCE | N°1997-3038

France | France, Cour d'appel de Versailles, 09 avril 1999, 1997-3038


FAITS ET PROCEDURE

Souhaitant acquérir un bien immobilier, Madame X... s'est adressée à la société BPI.

Un appartement lui a été proposé, et Madame X... a alors formalisé une offre d'achat de ce bien au prix de 795.000 Francs, après avoir versé un chèque de 79.500 Francs.

Cette offre d'achat était valable jusqu'au 15 mai 1996, vingt heures.

Le vendeur a accepté cette offre dès le 13 mai.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 mai suivant, Madame X... a informé la société BPI qu'elle retirait son offre et sollici

tait la restitution des sommes versées par elle. Après avoir vainement mis Madame X... en demeure ...

FAITS ET PROCEDURE

Souhaitant acquérir un bien immobilier, Madame X... s'est adressée à la société BPI.

Un appartement lui a été proposé, et Madame X... a alors formalisé une offre d'achat de ce bien au prix de 795.000 Francs, après avoir versé un chèque de 79.500 Francs.

Cette offre d'achat était valable jusqu'au 15 mai 1996, vingt heures.

Le vendeur a accepté cette offre dès le 13 mai.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 mai suivant, Madame X... a informé la société BPI qu'elle retirait son offre et sollicitait la restitution des sommes versées par elle. Après avoir vainement mis Madame X... en demeure d'avoir à respecter ses engagements, la société BPI a saisi le tribunal d'instance de VANVES.

Par jugement rendu le 12 décembre 1996, ce tribunal a :

Vu l'article 6 de la Loi du 2 janvier 1970,

Vu l'article 20 de la Loi du 31 décembre 1989,

- condamné la société BPI à restituer à Madame X... la somme de 79.500 Francs indûment conservée depuis le 14 mai 1996,

- débouté la société BPI de sa demande en réparation d'un préjudice financier,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté la société BPI de sa demande accessoire au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamné la société BPI à verser à Madame X... la somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société BPI fait grief au tribunal d'avoir ainsi statué alors que tant les dispositions de l'article 20 de la Loi du 31 décembre 1989 et celles de l'article 6 de la Loi du 2 janvier 1970 soulevées d'office, sont inapplicables, selon elle, en l'espèce d'une part, et alors d'autre part que Madame X..., définitivement engagée en raison de son offre unilatérale d'achat ne pouvait légitimement se rétracter.

Elle s'estime fondée à obtenir réparation du préjudice subi par elle du fait de l'attitude de Madame X....

Elle prie par conséquent la Cour de :

- infirmer le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

- constater qu'à la suite de l'acceptation de la promesse unilatérale d'achat de Madame X... par le vendeur, le contrat est devenu parfait et définitif,

- condamner Madame X... à lui payer la somme de 30.000 Francs à titre de dommages-intérêts augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 mai 1996, date de la première mise en demeure,

- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner Madame X... au paiement de la somme de 15.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Madame X... conclut, quant elle, à la confirmation du jugement entrepris, au débouté de la société BPI et à sa condamnation au paiement de la somme de 15.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 4 mars 1999 et l'affaire plaidée le 16 mars 1999.

SUR CE LA COUR

Considérant qu'il doit être souligné en premier lieu que c'est à tort que le tribunal a fait grief à la société BPI de ne pas avoir respecté l'article 20 de la Loi du 31 décembre 1989, ce texte ne s'appliquant qu'à l'acquisition ou la construction d'un immeuble neuf d'habitation, la souscription de parts donnant vocation à l'attribution en jouissance ou en propriété d'immeubles neufs d'habitation, ou aux contrats préliminaires de ventes d'immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière;

Que tel n'est pas le cas en l'espèce, s'agissant de la vente d'un appartement ancien par un particulier ;

Considérant que si la société BPI ne peut, conformément aux dispositions de l'article 6 de la Loi du 2 janvier 1970, percevoir aucune somme d'argent ou rémunération de quelque nature que ce soit, préalablement à la conclusion de la vente, il n'en demeure pas moins que l'agent immobilier est recevable à solliciter d'éventuels dommages-intérêts lorsque la vente n'a pu avoir lieu du fait soit de son mandant soit, comme en l'espèce du fait de l'acquéreur potentiel; Considérant qu'il résulte sans ambigu'té des termes de la "lettre-proposition d'achat" signée par Madame X... le 11 mai 1996 et du reçu qui lui a été délivré en contrepartie de la remise d'un chèque, que la somme de 79.500 Francs, correspondant à 10 % du prix de vente, ainsi versée représentait un acompte devant s'imputer sur le prix convenu dans l'hypothèse où la vente se réaliserait et que la société BPI n'a reçu cette somme qu'en qualité de séquestre;

Que dans ces conditions, le premier juge, eu égard aux dispositions de la Loi du 2 janvier 1970, sus rappelée, a, à juste titre, ordonné la restitution de cette somme par la société BPI à Madame X...;

Considérant que le document signé par Madame X... le 11 mai 1996 constitue de sa part une déclaration unilatérale de volonté, à destination du vendeur de l'appartement, et par laquelle, en qualité d'offrant, elle propose à ce dernier d'acquérir son bien immobilier moyennant un prix défini, 795.000 Francs, somme correspondant, au surplus, exactement au prix de vente fixé dans le mandat confié à l'agent immobilier par la propriétaire;

Que cette offre était limitée dans le temps et engageait par conséquent Madame X... jusqu'à l'expiration du délai fixé;

Qu'elle est parfaitement valable et régulière, étant souligné que Madame X... n'apporte pas la preuve d'éventuelles manoeuvres de la part de la société BPI susceptibles d'avoir vicié son consentement;

Considérant qu'il est établi que la société BPI a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 mai 1996, averti Madame X... de ce que sa proposition d'achat avait été acceptée par le vendeur, cette lettre étant confirmée par un télégramme en date du 15 mai;

Que Madame X..., quant à elle, a informé la société BPI de sa volonté de retirer l'offre qu'elle avait faite par courrier daté également du 14 mai 1996;

Considérant qu'il doit être relevé que la propriétaire de l'appartement litigieux n'a pas été appelée en la cause et ne s'est pas prévalue des termes de l'offre de Madame X...;

Que seule la société BPI agit à l'encontre de Madame X... et lui réclame des dommages-intérêts;

Considérant cependant que si Madame X... a effectivement commis une faute en révoquant l'offre d'acquérir régularisée par elle le 11 mai 1996 avant la fin du délai d'expiration de ladite offre, soit le

mercredi 15 mai 1996, 20 heures, le préjudice qui en est résulté pour la société BPI ne peut en aucun cas consister en la perte pour lui de la commission qu'il aurait dû percevoir;

Qu'elle ne peut en effet imputer la responsabilité de la non signature de la vente à Madame X... seule, dès lors que la propriétaire de l'appartement elle-même, avec laquelle elle était liée par un contrat de mandat, a renoncé à poursuivre la vente à son terme en assignant le cas échéant Madame X... et, n'a en tout état de cause fait aucun reproche à son mandataire, ni mis en oeuvre sa responsabilité;

Considérant au surplus que la société BPI n'a pas perdu la possibilité de percevoir sa rémunération;

Qu'en effet elle ne justifie pas ne plus avoir été en mesure de réaliser la transaction avec d'autres personnes, suite au retrait de son offre par Madame X...;

Considérant que le seul préjudice, direct et certain, subi par la société BPI, est limité aux démarches, lettres, télégrammes, appels téléphoniques auxquels elle a dû faire face suite à la défaillance de Madame X...;

Que la Cour dispose d'éléments d'appréciation suffisants pour fixer à la somme de 3.000 Francs le montant de la réparation à laquelle peut prétendre la société BPI;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette condamnation

d'intérêts antérieurement au prononcé du présent arrêt;

Que la demande de capitalisation des intérêts formée par la société BPI est par suite sans objet;

Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société BPI les sommes exposées par elle qui ne sont pas comprises dans les dépens;

Qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 4.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

- INFIRME le jugement le jugement rendu par le tribunal d'instance de VANVES le 12 décembre 1996, sauf en ces dispositions relatives à la restitution de la somme de 79.500 Francs par la société BPI à Madame X...;

Statuant à nouveau,

- CONDAMNE Madame X... à payer à la société BPI les sommes de :

* 3.000 Francs à titre de dommages-intérêts,

* 4.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- DEBOUTE la société BPI du surplus de ses demandes;

- CONDAMNE Madame X... aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés, en ce qui concerne ces derniers, par la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M-H. EDET

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-3038
Date de la décision : 09/04/1999

Analyses

AGENT IMMOBILIER - Commission - Opération non effectivement conclue.

En application des dispositions de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, un agent immobilier ne peut percevoir aucune somme d'argent ou rémunération de quelque nature que ce soit, préalablement à la conclusion d'une vente. Une telle interdiction ne s'oppose pas à ce que le professionnel soit recevable à solliciter, le cas échéant, des dommages et intérêts lorsque la vente n'a pu avoir lieu du fait de son mandant, ou, comme en l'espèce, du fait d'un acquéreur déclaré

AGENT IMMOBILIER - Commission - Opération non effectivement conclue.

Celui qui fait une offre d'acquérir par un acte unilatéral de volonté et procède ensuite à son retrait avant l'expiration du délai de validité, commet une faute. Le préjudice résultant d'un tel retrait, à l'égard de l'intermédiaire professionnel, ne consiste pas en la perte de la commission qu'il aurait dû percevoir. En effet, si la responsabilité de la non signature de la vente ne peut être imputée au seul offrant dès lors que le propriétaire a renoncé à poursuivre la vente à son terme, et si le professionnel concerné ne justifie pas avoir été en mesure de réaliser la transaction avec d'autres clients, le préjudice subi est alors limité aux démarches et diligences administratives entreprises consécutivement au retrait fautif de l'offre


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-04-09;1997.3038 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award