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02/04/1999 | FRANCE | N°1998-2937

France | France, Cour d'appel de Versailles, 02 avril 1999, 1998-2937


FAITS ET PROCEDURE,

Monsieur X... DE Y... et Mademoiselle Isabelle Z... ont été locataires d'une propriété sis ... à VILLE D'AVRAY, appartenant à l'indivision A....

Par acte d'huissier du 31 mars 1995, les consorts A... ont fait délivrer un congé pour vendre à Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... pour le 30 septembre 1995.

Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... ont fait assigner en inscription de faux les consorts A... et l'huissier instrumentaire, la SCP DAILLY ayant délivré les congé.

Déboutés par jugement du tribunal de grande in

stance de PARIS, Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... ont fait appel de cett...

FAITS ET PROCEDURE,

Monsieur X... DE Y... et Mademoiselle Isabelle Z... ont été locataires d'une propriété sis ... à VILLE D'AVRAY, appartenant à l'indivision A....

Par acte d'huissier du 31 mars 1995, les consorts A... ont fait délivrer un congé pour vendre à Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... pour le 30 septembre 1995.

Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... ont fait assigner en inscription de faux les consorts A... et l'huissier instrumentaire, la SCP DAILLY ayant délivré les congé.

Déboutés par jugement du tribunal de grande instance de PARIS, Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... ont fait appel de cette décision le 15 mai 1997.

Par ordonnance du 7 février 1997, le Juge des Référés du 16ème arrondissement de PARIS a dit n'y avoir lieu à référé sur le paiement d'une somme provisionnelle jusqu'à la libération effective des lieux. Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... ont, en effet, quitté les lieux en juillet 1996 mais ceux-ci sont, à ce jour, occupés par Monsieur et Madame B... et par Monsieur et Madame C..., sous-locataires en vertu d'un acte sous seing privé des 22 mars 1981 (en faveur des époux B..., et du 15 octobre 1993 en faveur des époux C....

Par acte d'huissier en date du 2 juillet 1997, les consorts A... ont fait assigner Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... en paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle de 31.000 francs par mois à compter du mois de septembre 1996 et jusqu'à la libération effective des lieux, ainsi qu'en paiement d'une somme de 15.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A l'appui de leur demande, les consorts A... exposent qu'ils sont contraints d'attendre la décision de la Cour d'appel de PARIS quant à la validité du congé délivré le 31 mars 1995 mais qu'en attendant, compte tenu de la présence dans les lieux de sous-locataires du chef de Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z..., ils ne peuvent récupérer les biens donnés en location ; qu'ils sont donc bien fondé à demander le paiement d'une somme équivalente au montant du loyer mensuel qui leur était payé par Monsieur DE Y... et Madame Z... et qui sera qualifiée d'indemnité d'occupation si les congés sont validés ou de loyer dans le cas contraire.

Par acte d'huissier du 23 juillet 1997, Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... ont fait assigner Monsieur et Madame B... et Monsieur et Madame C... devant ce tribunal pour que celui-ci : - déboute les consorts A... de leur action dirigée contre eux-mêmes, - condamne Monsieur et Madame C... et Monsieur et Madame B... à payer directement aux consorts A... une indemnité d'occupation, Subsidiairement, condamne Monsieur et Madame B... et Monsieur et Madame C... à les garantir des condamnations pouvant être prononcées contre eux, - ordonne l'expulsion des sous-locataires, - condamne Monsieur et Madame

B... et Monsieur et Madame C... à leur verser et subsidiairement à verser aux consorts A... une indemnité d'occupation mensuelle de 31.000 Francs par mois, soit 15.500 Francs par couple, si ils persistent à occuper les lieux, ou 31.000 Francs à la charge de celui qui s'y maintiendrait, - condamne Monsieur et Madame B... et Monsieur et Madame C... à leur payer la somme de 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

A l'appui de leurs demandes, ils exposent que les contrats de sous-location prévoient expressément qu'en cas de congé donné par le bailleur les sous-locataires ne pourront prétendre au renouvellement du contrat et devront quitter immédiatement les lieux ; qu'ayant reçu congé du bail principal par acte du 31 mars 1995, congé qu'il a dénoncé à ses sous-locataires le 27 juin 1995, puis qu'il a lui-même donné congé le 30 mai 1996 pour le 31 août 1996, que par jugements du 14 novembre 1996, les époux B..., comme les époux C... ont été déboutés de leurs demandes tendant à voir suspendre les effets du congé qui leur a été délivré, jugements qui sont devenus définitifs. Madame D... divorcée B..., et les époux C... exposent qu'ils ont voulu payer leurs loyers entre les mains de Monsieur DE Y... à compter de septembre 1996 mais que celui-ci a refusé ce paiement.

Ils soulèvent l'irrecevabilité de Madame Z... en sa demande, celle-ci n'ayant pas la qualité de locataire et soutiennent sur le fond qu'ils ne sauraient être tenus que delà des loyers mis à leur charge par la sous-location, soit 6.200 Francs en ce qui concerne

Madame D... et 7.600 Francs en ce qui concerne Monsieur et Madame C....

Ils ajoutent que depuis le départ des locataires, ils entretiennent seuls les locaux, s'acquittent de 100 % des factures de fuel, et de 100 % des frais afférents au jardin au lieu des 50 % prévus par le bail, si bien qu'ils demandent le remboursement des sommes de 8.058 Francs pour le fuel et 7.200 Francs pour le jardin. Les époux C... offrent donc de payer 75.942 Francs et Madame D..., exposant qu'elle a payé 39.106 Francs en sus des loyers qu'elle devait à hauteur de 6.200 Francs (1/5 du loyer principal), reconnaît donc devoir 41.494 Francs qu'elle offre de payer, comme les époux C... entre les mains des consorts A... ou de Monsieur DE Y....

Ces deux affaires ont été jointes sous le n° 1255/97.

Par jugement contradictoire en date du 15 janvier 1998, le tribunal d'instance de BOULOGNE BILLANCOURT a rendu la décision suivante : - reçoit les demandes de Madame Isabelle Z..., - condamne in solidum Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... à payer aux consorts A... une indemnité d'occupation mensuelle égale de 31.000 Francs à compter du 1er septembre 1996 et jusqu'à la parfaite libération des lieux, - constate que Madame D... et Monsieur et Madame C... sont occupants sans droit ni titre des lieux qu'ils occupent 3, rue de VERSAILLES à VILLE D'AVRAY, - ordonne leur expulsion et celle de tous occupants de leur chef, avec si besoin est l'assistance de Monsieur le Commissaire de Police, - rappelle, s'agissant des meubles et objets laissés dans les lieux, qu'il devra être procédé conformément aux articles 65 et 66 de la loi du 9

juillet 1991, - condamne in solidum Madame D... E... et Monsieur et madame C... à payer à Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... une indemnité d'occupation mensuelle égale de 31.000 francs à compter du 1er septembre 1996 et jusqu'à la parfaite libération des lieux, - condamne Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... à payer à Madame D... la somme de 39.106 Francs représentant des loyers trop-perçus de janvier 1994 à août 1996, - ordonne la compensation entre cette créance et la créance de Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... sur Madame D..., - ordonne l'exécution provisoire de la présente décision, - condamne Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... à payer aux consorts A... la somme de 3.500 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamne in solidum Madame D... et Monsieur et Madame C... à payer à Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z... la somme de 3.500 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - déboute les parties du surplus de leurs demandes, - condamne Monsieur X... DE Y... et Madame Isabelle Z..., ainsi que Madame D... et Monsieur et Madame C... aux dépens.

Le 2 avril 1998, Madame D... E... divorcée de Monsieur B... a relevé appel de cette décision à l'encontre des personnes suivantes : [* Monsieur A... F...,

*] Monsieur G... H... née A...,

[* Monsieur DE Y... X...,

*] Monsieur A... I...

[* Madame J... K... née A...,

*] Monsieur B... L....

Le 15 avril 1998, les époux C... ont également relevé appel de la décision contre Monsieur DE Y... et Madame Z....

L'ordonnance de jonction en date du 19 novembre 1998, les deux affaires ont été jointes.

Madame D... fait grief à la décision entreprise d'avoir ainsi statué alors que les sous-locataires n'ont aucun lien juridique, les deux contrats de sous-locations étant totalement distincts, tout comme les fautes commises tant dans leur assiette (parties occupées étant de taille différente), que dans leur durée, et le préjudice qui en résulte, de sorte qu'une condamnation in solidum au paiement d'une indemnité d'occupation des sous-locataires doit être exclue.

Subsidiairement, elle allègue que, contrairement à une jurisprudence constante, l'indemnité d'occupation mise à sa charge ne correspond pas à la valeur de jouissance du bien occupé (et au dommage résultant de la privation de la faculté de disposer de son bien).

En conséquence, elle prie la Cour de : - infirmer la décision déférée rendue le 15 janvier 1998 par le tribunal d'instance de BOULOGNE BILLANCOURT en ce qu'elle a condamné in solidum Madame D... et les époux C... à payer à Monsieur DE Y... et Madame Z... une indemnité mensuelle égale à 31.000 Francs à compter du 1er septembre 1996 jusqu'à la parfaite libération des lieux, Statuant à nouveau, dire et constater que les différents sous-locataires ne sauraient être tenus au paiement d'une indemnité globale d'occupation alors que l'indemnité d'occupation doit correspondre à la valeur de jouissance de chacun des sous-occupants, et qu'elle ne peut réparer que le seul préjudice subi à raison de la faute commise par chacun des

sous-locataires, - dire que le dommage se décomposant en parts distinctes, dont chacune a été séparément causée par chacun des deux sous-locataires, l'obligation in solidum doit être exclue, Y faisant droit, dire que Madame D... n'est redevable que d'une somme de 6.200 Francs au titre de l'indemnité d'occupation mensuelle pour la période du 1er septembre 1996 au 30 avril 1998 inclus, - confirmer le jugement pour le surplus, notamment en ce qui concerne la condamnation de Monsieur DE Y... et Madame Z... à restitution, et en ce qui concerne la compensation, - condamner Monsieur DE Y... et Madame Z... à payer à Madame D... la somme de 10.000 Francs en application de l'article 700 modifié du Nouveau Code de Procédure Civile, - les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître BOMMART et Maître MINAULT, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans leurs conclusions signifiées le 14 août 1998, les époux C... font valoir des arguments similaires à ceux de Madame D... tant sur la condamnation in solidum que sur le montant de l'indemnité d'occupation qui ne peut excéder le montant du loyer prévu par le contrat de location.

Ils prient dont la Cour de : - déclarer l'appel interjeté par les époux C... tant recevable que bien fondé, Y faisant droit, infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné in solidum les époux C... et Madame D... à payer à Monsieur DE Y... et Madame Z... une indemnité mensuelle égale à 31.000 Francs à compter du 1er septembre 1996 jusqu'à libération des lieux, Et statuant à nouveau, - dire et juger que chacun des sous-locataires étant tenu qu'à raison du seul dommage qu'il a causé personnellement,

le principe de la condamnation "in solidum" doit être exclu, - dire et juger que l'indemnité d'occupation venant en réparation du préjudice de Monsieur DE Y... et de Madame Z... ne saurait excéder la valeur locative de l'appartement occupé par les époux C..., En conséquence, dire et juger que Monsieur et Madame C... ne sont redevables que d'une somme de 7.600 francs à titre d'indemnité d'occupation mensuelle à compter du 1er septembre 1996 et jusqu'à leur départ des lieux, - condamner Monsieur DE Y... et Madame Z... à verser à Monsieur et Madame C... la somme de 5.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - les condamner aux entiers dépens, dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP MERLE CARENA DORON, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur DE Y... et Madame Z..., intimés et appelants incident font valoir que :

. les conclusions signifiées par les époux C... sont irrecevables en application de l'article 961 du Nouveau Code de Procédure Civile et d'une jurisprudence constante, celle-ci faisant état d'un domicile qu'ils ont quitté,

. selon une jurisprudence constante, la condamnation in solidum des sous-locataires doit avoir lieu, celle-ci supposant l'existence d'un seul et même dommage et non une unité ou identité des parties commises ce qui est le cas en l'espèce (l'occupation irrégulière des lieux par chaque sous-locataire a été à l'origine d'un même et unique préjudice résidant par le locataire principal dans le fait de verser une indemnité d'occupation au bailleur, la taille des surfaces occupée étant sans incidence),

. l'indemnité d'occupation est fonction non seulement de la valeur

des locaux mais aussi de l'indemnisation du préjudice résultant de l'occupation sans bail,

. Madame D... ne justifie pas du trop-perçu de loyers qu'elle invoque.

En conséquence, elle prie la Cour de : - dire irrecevables les conclusions signifiées par Monsieur et Madame C..., Subsidiairement, dire Madame D... et Monsieur et Madame C... mal fondés en leurs demandes, - débouter Madame D... et Monsieur et Madame C... de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, - confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné in solidum Madame D... et les époux C... à payer à Monsieur DE Y... et Madame Z... une indemnité d'occupation mensuelle de 31.000 Francs à compter du 1er septembre 1996 et jusqu'à parfaite libération des lieux, - recevoir Monsieur DE Y... et Madame Z... en leur appel incident, - les y dire bien fondés, Y faisant droit, - infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné Monsieur DE Y... et Madame Z... à payer à Madame D... la somme de 39.106 Francs à titre de loyers trop perçus de janvier 1994 à août 1996, Et statuant à nouveau, - débouter Madame D... de sa demande en restitution d'un trop-perçu, En toute hypothèse, condamner solidairement Madame D... et Monsieur et Madame C... à payer aux concluants la somme de 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, au titre des frais irrépétibles d'appel, - les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué pour ceux la concernant par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL, société titulaire d'un office d'avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans ses conclusions signifiées le 4 février 1999, Monsieur F... A..., Madame H... G... née A..., Monsieur I... A..., Madame K... J... née A..., intimés, prient la Cour de : - confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Y ajoutant, - condamner tout succombant à verser aux consorts A... une somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés directement par la SCP KEIME ET GUTTIN, titulaire d'un office d'avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans ses conclusions signifiées le 4 février 1999, les époux C... rétorquent que :

. leurs conclusions sont au contraire recevables au regard de l'article 962 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile au motif qu'à la date de leur dépôt, ils étaient toujours domiciliés dans les lieux litigieux,

. qu'ils n'ont commis aucune faute, leur maintien dans les lieux s'étant effectué avec l'accord tacite des propriétaires qui se sont abstenus d'user de l'action directe qui leur était ouverte sur le fondement de l'article 1753 du Code civil,

. la preuve d'un préjudice, actuel et certain subi par Monsieur DE Y... et Madame Z... en relation directe avec une prétendue faute de leur part n'est pas établie. A l'appui de cette prétention, ils allèguent que l'appréciation du préjudice subi par ces derniers dépend de celle du préjudice subi par le propriétaire, or, la preuve de ce dernier n'a jamais été rapportée,

. enfin, s'agissant du montant de la condamnation, ils sollicitent

l'indulgence de la Cour eu égard à leur situation matérielle depuis plus d'un an et demi.

En conséquence, ils prient la Cour de : - leur allouer l'entier bénéfice de leurs conclusions d'appel, - rejeter la fin de non recevoir soulevée par les intimés sur le fondement de l'article 961 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile, - rejeter au surplus les demandes formulées par les intimés sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans ses conclusions signifiées le 15 février 1999, Madame D... reprend à son compte les arguments des époux C... ci-dessus relatés. Elle ajoute, pour justifier l'exclusion de la condamnation in solidum, que la jurisprudence dont font état les intimés est inapplicable au cas d'espèce, étant donné qu'elle n'a pas la qualité de coauteur et qu'il n'y a pas un même dommage mais deux dommages distincts tant dans l'espace que dans le temps. A l'appui de sa présence, elle fait valoir que l'indivision A... doit être analysée comme une propriété contenant deux bâtiments (villa et maison du gardien) de sorte que chaque sous-locataire n'est responsable que d'une habitation déterminée du dommage correspondant au bâtiment immobilisé par lui.

Très subsidiairement, elle souligne qu'une condamnation in solidum serait particulièrement inéquitable au motif qu'elle a rendu les clefs avant que les époux C... ne le fassent ; qu'après la condamnation, elle a réglé à Monsieur DE Y... et Madame Z... la quote-part lui incombant en fonction du lieu et du temps de son occupation et qu'elle se trouve dans une situation financière particulièrement précaire.

En conséquence, elle prie la Cour de : A titre principal, d'infirmer le jugement entrepris et débouter Monsieur DE Y... et Madame Z... de toutes leurs demandes, faute par eux d'avoir interjeté appel du jugement à l'encontre des propriétaires et faute par ces derniers de justifier du préjudice réellement subi, Subsidiairement, infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné in solidum Madame D... et les époux C... à payer à Monsieur DE Y... et Madame Z... une indemnité d'occupation mensuelle de 31.000 Francs à compter du 1er septembre 1996 et jusqu'à parfaite libération des lieux, - dire que Madame D... n'est redevable que d'une somme de 6.200 Francs par mois jusqu'à sa libération des lieux qu'elle occupait, - constater que Madame D... a intégralement désintéressé Monsieur DE Y... et Madame Z... du préjudice qu'ils ont subi du fait de son occupation sans droit ni titre, pour la maison de gardien et pendant le temps qui l'ont concernée, - confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne le montant des sous-loyers trop versés par Madame D... pour la période de janvier 1994 à août 1996, - condamner Monsieur DE Y... et Madame Z... à payer à Madame D... une indemnité de 20.000 Francs en application de l'article 700 modifié du Nouveau Code de Procédure Civile, Et les condamner en tous les dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP BOMMART MINAULT, avoués associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans ses conclusions signifiées le 17 février 1999, Monsieur DE Y... et Madame Z... allèguent :

. qu'en dépit des termes de la convention de sous-location, de la notification du congé délivré par le bailleur principal et du

commandement de quitter les lieux du 30 mai 1996, les époux C... et Madame D..., en se maintenant irrégulièrement dans les lieux ont commis une faute engageant leur responsabilité,

. que l'indemnité d'occupation mensuelle mise à leur charge suffit à établir la réalité du préjudice qu'ils subissent du fait du maintien dans les lieux des sous-locataires sans que la preuve du paiement effectif de celle-ci (bien qu'établie) soit nécessaire,

. s'agissant de l'obligation in solidum, ils reprennent la même argumentation et en déduisant que les époux C... et Madame D... doivent être tenus de réparer intégralement le préjudice qu'ils subissent en application des règles de la condamnation in solidum et d'un principe général de demande sans que leur prétendue bonne foi en l'existence de difficultés financières pour le moins douteuses de Madame D... (contrairement aux époux M...) puissent influer,

. enfin, ils ajoutent que Madame D..., en dépit de la sommation de communiquer en date du 26 janvier 1999 n'ayant communiqué aucune pièce ne rapporte pas la preuve du trop-perçu de loyer allégué.

En conséquence, ils prient en sus de leurs précédentes prétentions de préciser que la condamnation in solidum prononcée à l'encontre des époux C... et Madame D... interviendra en deniers ou quittances valables.

L'ordonnance de clôture a été signée le 18 février 1999 et l'affaire plaidée à l'audience du 4 mars 1999.

SUR CE, LA COUR,

A/ Considérant que l'indemnité d'occupation dus par Madame D...

divorcée B... a, en droit, une double nature ; qu'elle correspond à la valeur de jouissance des biens indûment occupés et qu'elle constitue également une réparation du préjudice subi par le bailleur ou du locataire principal, du fait de cette occupation sans droit, ni titre (article 8 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989) ; que cette indemnité doit donc être fixée, concrètement et distinctement à l'égard de Madame D..., en tenant compte de son occupation personnelle des seuls locaux compris dans la sous-location qui lui avait été consentie le 22 mars 1981, c'est-à-dire donc la maison de gardien ;

Considérant que, compte tenu du loyer principal renouvelé pour l'ensemble de la propriété litigieuse (voir le jugement du tribunal d'instance de BOULOGNE BILLANCOURT du 12 novembre 1992), la Cour a tous les éléments d'appréciation nécessaires qui lui permettent de fixer cette/indemnité à un montant de 7.000 Francs par mois à la charge de Madame D.../et ce, à compter du 1er septembre 1996, et jusqu'au 30 avril 1998, date de sa libération effective des lieux ; que le jugement déféré est donc réformé sur ce premier point ;

II/ Considérant, en ce qui concerne l'obligation in solidum au bénéfice de Monsieur DE Y... et de madame Z..., telle que retenue par le premier juge contre Madame D... et les époux C..., qu'en droit, chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage des responsabilités auquel il est procédé entre eux et qui n'est pas opposable au tiers lésé ;

Considérant, en la présente espèce, qu'il est constant que les occupations de locaux distincts, sous-loués par conventions

distinctes, à Madame D..., d'une part, et aux époux C..., d'autre part, pour des loyers et des durées différents, ne représentent pas une forme d'indivisibilité dont pourraient se prévaloir contre eux les deux locataires principaux Monsieur DE Y... et Madame Z... ; que le dommage invoqué par ceux-ci du fait de ces deux occupations sans droit, ni titre, ne constitue donc pas un même dommage pouvant donner lieur à une obligation à réparation, in solidum, à la charge des sous-locataires ; que le jugement déféré est, par conséquent, infirmé sur ce point ;

III/ Considérant que, compte tenu de l'équité, Madame D... divorcée B... est déboutée de sa demande en paiement de la somme de 10.000 Francs (puis de 20.000 Francs), en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

B/ Considérant, en ce qui concerne l'appel des époux C..., eux aussi sous-locataires, qu'il sera d'abord souligné que par conclusions signifiées le 4 févier 1999 (cote 17 du dossier de la Cour), ces appelants ont indiqué leur nouveau domicile, à PARIS (6ème arrondissement), 3 Place du 18 Juin 1940, chez Madame N..., et que leurs conclusions sont donc recevables en vertu des articles des articles 960 alinéa 2 et 961 alinéa 1 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant, quant au fond, que la motivation ci-dessus développée à l'égard de l'appelante Madame D..., au sujet de l'obligation in solidum retenue par le premier juge, est également appliquée au cas identique des époux C... qui, eux aussi, ont obtenu une sous-location distincte, en date du 15 octobre 1993 portant sur le deuxième étage de l'hôtel particulier loué, et ce moyennant un loyer

de 7.000 Francs par mois, pour la première année, et de 7.600 Francs par mois pour les années suivantes ;

Considérant qu'aucune obligation in solidum (avec Madame D...) n'est donc retenue à la charge des époux C... et que le jugement déféré est, par conséquent, infirmé sur ce point ;

III/ Considérant quant au principe même (et subsidiairement à son quantum) de l'indemnité d'occupation mise à la charge des époux C..., qu'il est constant que ceux-ci ont reçu de leur locataire un congé pour le 31 août 1996 ; que c'est donc délibérément et en toute connaissance de cause, que ces sous-locataires ont pris la décision de se maintenir indûment dans les lieux, alors qu'ils ne contestaient pas la régularité et le bien fondé de ce congé qu'ils n'ont jamais attaqué en Justice et qu'ils ont ainsi causé aux propriétaires un préjudice certain et direct, puisqu'ils les ont fautivement privés de la possibilité de disposer de leur bien, ce qui a obligé les consorts A... à agir en Justice ; qu'ils ne peuvent se prévaloir de prétendues "discussions transactionnelles" qu'ils auraient eu avec les consorts A..., puisqu'il est manifeste que ces pourparlers ne caractérisent en rien une quelconque volonté certaine et non équivoque des consorts A... de renonçer à voir leur congé du 31 mars 1995 recevoir son plein et entier effet ; que bien au contraire, la saisine d'un huissier, en avril 1998 pour obtenir l'expulsion de ces sous-locataires, démontre bien la volonté certaine des consorts A... d'obtenir la libération des lieux ; que de plus, les prétendues "bonnes relations" qui ont pu exister entre les époux C... et les consorts C... ne sont pas davantage de nature à donner un titre à ces sous-locataires pour se maintenir dans les lieux, alors qu'un congé principal avait été donné

par les bailleurs, dès le 31 mars 1995, et qu'eux-mêmes avaient reçu un congé distinct et personnel, pour le 31 août 1996, ces deux congés n'ayant fait l'objet d'aucune action ni d'aucune contestation en justice ; que rien dans les circonstances de la cause ne démontre que la simple patience des consorts A... ou une simple tolérance de leur part, ait pu constituer un "accord tacite" comme le prétendent à tort les époux C... qui ne sont pas fondés à invoquer une prétendue "négligence" des propriétaires ou des locataires principaux, susceptible d'engager la responsabilité de ces derniers ; Considérant qu'une indemnité d'occupation est donc due par les époux C..., en raison de leur occupation indue des lieux, sans droit ni titre, (article 8 de la loi du 6 juillet 1989), laquelle est prononcée distinctement contre eux, et ce, sans que cette obligation soit in solidum, ainsi qu'il l'a déjà été ci-dessus motivé ; que le jugement est donc infirmé sur ce point ;

Considérant, quant au montant de cette indemnité d'occupation, que la nature mixte a été ci-dessus rappelée à l'égard de Madame D..., et que la Cour à tous les éléments d'appréciation suffisants qui lui permettent de fixer cette indemnité due par les époux C... à 9.000 Francs par mois, à compter du 31 août 1996 et jusqu'à la date de leur libération effective et définitive des lieux qui s'est faite le 8 septembre 1998 ;

Considérant, en définitive que les époux C... doivent leur garantie à leurs locataires, à concurrence de ces 9.000 Francs mensuels, pour la durée ci-dessus fixée, Monsieur DE Y... et Madame Z... étant eux, in solidum, condamnés à payer aux consorts

A... l'indemnité d'occupation exactement fixée à leur charge par le jugement qui est donc confirmé de ce chef ;

Considérant que, compte tenu de l'équité, les époux C... sont déboutés de leur demande en paiement de la somme de 5.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

C/ Considérant en ce qui concerne l'appel incident de Monsieur DE Y... et de Madame Z..., que ceux-ci ne discutent et ne contestent pas expressément ni sérieusement le montant de l'indemnité d'occupation de 31.000 Francs par mois, exactement mise à leur charge par le jugement déféré qui est donc confirmé de ce chef ; qu'ils consacrent l'essentiel de leur argumentation à s'expliquer sur les sommes qu'ils ont versées au titre de cette indemnité mensuelle qu'ils ont payée aux consorts A..., entre le 1er septembre 1996 et le 8 septembre 1998 (date de libération définitive des lieux par les derniers sous-locataires, les époux C...) ; que, par ailleurs, il est à nouveau réaffirmé par la Cour que ce maintien indu dans les lieux, sans droit, ni titre, par les sous-locataires (article 8 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989) a causé aux locataires principaux un préjudice certain, actuel et direct, et qu'ils leur en doivent donc réparation et garantie, dans les limites fixées ci-dessus contre chacun d'eux, sous forme d'indemnités d'occupation, dont les montants et les durées respectifs ont été ci-dessus jugés ;

Considérant, par ailleurs, que le premier juge faisant une exacte appréciation des documents justificatifs qui lui étaient soumis (voir cote 21 du dossier de la Cour) a, à bon droit, condamné Monsieur DE Y... et Madame Z... à payer à Madame D... la somme justifiée

de 39.106 Francs correspondant à des loyers trop-perçus par eux, de janvier 1994 à août 1996 ; que le jugement est donc confirmé de ce chef ;

Considérant que, compte tenu de l'équité, Monsieur DE Y... et Madame sont déboutés de leur demande en paiement de la somme de 10.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

D/ Considérant quant aux consorts A..., qu'ils n'ont conclu qu'une seule fois (cote 15 du dossier de la Cour), sans développer de moyens particuliers devant la Cour (article 954 alinéa 4 du Nouveau Code de Procédure Civile) ; que compte tenu de l'équité, ils sont déboutés de leurls n'ont conclu qu'une seule fois (cote 15 du dossier de la Cour), sans développer de moyens particuliers devant la Cour (article 954 alinéa 4 du Nouveau Code de Procédure Civile) ; que compte tenu de l'équité, ils sont déboutés de leur demande en paiement de la somme de 5.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort :

A/ . CONDAMNE Madame D... divorcée B... à payer une indemnité d'occupation d'un montant de 7.000 Francs (SEPT MILLE FRANCS) par mois et ce, à compter du 1er septembre 1996 et jusqu'au 30 avril

1998, date de sa libération effective des lieux le jugement déféré étant infirmé de ce chef ;

. DIT ET JUGE que les sous-locataires ne sont pas tenus in solidum, le jugement déféré étant, de chef, réformé ;

. DEBOUTE Madame D... divorcée B... de sa demande en paiement de la somme de 10.000 Francs puis de celle de 20.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

B/ Sur l'appel des époux C...,

VU les articles 960 alinéa 2 et 961 alinéa 1 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

. DECLARE les conclusions des époux C... recevables ;

. DIT ET JUGE qu'aucune obligation in solidum n'est retenue à la charge des époux C..., que le jugement déféré est infirmé sur ce point ;

. CONDAMNE Monsieur et Madame C... à payer une indemnité d'occupation d'un montant de 9.000 Francs par mois à compter du 31 août 1996 et jusqu'à la date de la libération effective des lieux soit le 8 septembre 1998 ;

. DIT ET JUGE que les époux C... doivent une garantie à leurs locataires, à concurrence des 9.000 Francs mensuels, pour la durée ci-dessus fixée, Monsieur DE Y... et Madame Z... étant, in solidum, condamnés à payer aux époux A... l'indemnité

d'occupation exactement fixée à leur charge par le jugement qui est confirmé de ce chef ;

. DEBOUTE les époux C... de leur demande en paiement de la somme de 5.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

C/ Sur l'appel incident de Monsieur DE Y... et de Madame Z...,

. CONDAMNE Monsieur DE Y... et Madame Z... à payer une indemnité d'occupation de 31.000 Francs par mois, le jugement déféré étant confirmé de ce chef ;

. CONDAMNE Monsieur DE Y... et Madame Z... à payer à Madame D... la somme de 39.106 Francs (TRENTE NEUF MILLE CENT SIX FRANCS) correspondant à des loyers trop perçus par eux de janvier 1994 à août 1996, le jugement déféré étant confirmé de ce chef ;

. DEBOUTE Monsieur DE Y... et Madame Z... de leur demande en paiement de la somme de 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

D/ DEBOUTE les consorts A... de leur demande en paiement de la somme de 5.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

FAIT masse de tous les dépens de première instance et d'appel des consorts A... qui seront supportés par moitié, par Madame D... et par les époux C..., et LAISSE tous leurs propres dépens à la charge de Monsieur DE Y... et de Madame Z... ; DIT

que ces dépens seront recouvrés dans ces proportions et directement par la SCP d'avoués KEIME ET GUTTIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier qui a assité

Le Président, au prononcé, E... Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-2937
Date de la décision : 02/04/1999

Analyses

BAIL A LOYER (loi du 6 juillet 1989)


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-04-02;1998.2937 ?
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