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25/03/1999 | FRANCE | N°1999-266

France | France, Cour d'appel de Versailles, 25 mars 1999, 1999-266


Par jugement en date du 26 septembre 1994, le Tribunal de commerce de Pontoise a ouvert la procédure de redressement judiciaire de la SA UNIVACIER, et a désigné Maître HAMAMOUCHE en qualité d'administrateur judiciaire et Maître MANDIN en qualité de représentant des créanciers.

Par jugement en date du 27 octobre 1995, le Tribunal de commerce de Pontoise a arrêté le plan de redressement par voie de continuation de la SA UNIVACIER, et a désigné Maître HAMAMOUCHE en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Le 28 octobre 1998, Maître HAMAMOUCHE, es qualités d

e commissaire à l'exécution du plan a déposé devant le Président du Tribunal d...

Par jugement en date du 26 septembre 1994, le Tribunal de commerce de Pontoise a ouvert la procédure de redressement judiciaire de la SA UNIVACIER, et a désigné Maître HAMAMOUCHE en qualité d'administrateur judiciaire et Maître MANDIN en qualité de représentant des créanciers.

Par jugement en date du 27 octobre 1995, le Tribunal de commerce de Pontoise a arrêté le plan de redressement par voie de continuation de la SA UNIVACIER, et a désigné Maître HAMAMOUCHE en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Le 28 octobre 1998, Maître HAMAMOUCHE, es qualités de commissaire à l'exécution du plan a déposé devant le Président du Tribunal de commerce un rapport rédigé en application des articles 67 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985 et 94 du décret 85-1388 du 27 décembre 1985, aux termes duquel il estimait que les dispositions de l'article 80 devaient recevoir application en l'espèce, et ce dans leur rédaction antérieure à la modification apportée par la loi du 10 juin 1994.

Maître MANDIN, appelé en la cause es qualités, a soutenu que l'article 80 devait s'appliquer dans sa rédaction applicable au jour du jugement et qu'en conséquence cet article interdisait d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire et imposait de prononcer la liquidation judiciaire.

Par jugement en date du 20 novembre 1998, le Tribunal de commerce de Pontoise, faisant application de l'article 80, dans sa rédaction en vigueur le 26 septembre 1994, a prononcé la résolution du plan de continuation de la SA UNIVACIER et a ouvert une procédure de redressement judiciaire à son égard en désignant Maître HAMAMOUCHE en

qualité d'administrateur judiciaire et Maître MANDIN en qualité de représentant des créanciers.

Maître MANDIN, es qualités, a interjeté appel de ce jugement et demande à la Cour de prononcer la liquidation judiciaire de la SA UNIVACIER.

Au soutien de son appel, Maître MANDIN, es qualités, fait notamment valoir que doit être appliqué l'article 80 dans sa rédaction applicable au jour du jugement d'ouverture de la seconde procédure, et qu'en conséquence seule la liquidation judiciaire est possible.

Maître HAMAMOUCHE, es qualités, demande à la Cour de déclarer l'appel irrecevable, et subsidiairement mal fondé.

Maître HAMAMOUCHE, es qualités, fait notamment valoir que l'article 171-1° n'ouvre la voie de l'appel des jugements prononçant une procédure collective qu'au débiteur, au créancier poursuivant et au ministère public, et qu'en conséquence ce recours n'est pas ouvert au représentant des créanciers.

Maître MANDIN, es qualités, réplique que le jugement déféré a prononcé la résolution du plan, qu'aucune disposition de la loi de 1985 ne limite l'appel d'une telle décision, et qu'en conséquence ce recours est ouvert à toutes les parties en application des dispositions de l'article 543 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SA UNIVACIER conclut à la confirmation du jugement.

Monsieur X..., représentant des salariés, est intervenu

volontairement à l'instance, et demande à la Cour de confirmer le jugement et de condamner tout contestant à lui payer la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

DISCUSSION Sur les cas d'ouverture d'une procédure collective à l'encontre d'une personne qui bénéficie d'un plan de continuation en cours

Considérant que lorsqu'une personne bénéficie d'un plan de continuation mais ne respecte pas ses engagements, l'article 80 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985 prévoit que le plan est résolu, et qu'une procédure collective est ouverte;

Considérant toutefois que ce cas d'ouverture fait l'objet de limitations, que ce soit avant ou après la modification apportée à l'article 80 par la loi du 10 juin 1994;

Considérant que, pour échapper à ces limitations, lorsque vraisemblablement elles se trouvent trop étroites au cas d'espèce, la jurisprudence admet que la personne qui bénéficie d'un plan de continuation en cours peut également faire l'objet d'une procédure collective ouverte selon le droit commun, lorsque l'état de cessation des paiements est constaté; que dans ce cas, c'est l'ouverture de la procédure collective qui entraîne la résolution du plan, ou plus exactement sa caducité;

Considérant que Maître MANDIN, es qualités, fait observer qu'il est artificiel d'opérer une telle distinction dans la mesure où le non paiement des échéances du plan, exigibles, implique nécessairement l'état de cessation des paiements, et qu'inversement l'état de

cessation des paiements entraîne inéluctablement l'impossibilité de faire face aux échéances du plan; qu'il ajoute que celui qui n'étant pas en état de cessation des paiements ne paie pas les échéances du plan doit y être contraint, et que celui qui se trouve en état de cessation des paiements ne peut honorer les échéances du plan, sauf à opérer un paiement préférentiel; qu'il en déduit que, non paiement des échéances, et état de cessation des paiements, ne peuvent aller l'un sans l'autre;

Mais considérant que ces arguments, d'une logique théorique indéniable, ne seront pas jugés suffisamment réalistes pour revenir sur l'apport jurisprudentiel qui permet d'appréhender la réalité dans sa complexité en offrant deux cas d'ouverture;

Considérant que la Cour retiendra donc qu'il existe deux cas d'ouverture, l'un fondé sur l'article 80 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985 qui prévoit la résolution du plan et l'ouverture de la procédure, l'autre fondé sur le droit commun des articles 3 et 4, ou 137, ou 148 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985, droit commun qui permet d'ouvrir la procédure en raison de la constatation de l'état de cessation des paiements et qui entraîne la résolution du plan, par voie de conséquence; Sur le cas d'ouverture dans la présente instance Considérant que dans son jugement, le Tribunal de commerce a : - relevé que Maître HAMAMOUCHE, es qualités, sollicite que le Tribunal prononce la résolution du plan de continuation et ouvre une nouvelle procédure de redressement judiciaire, conformément à l'article 80, - constaté que le plan demeure inexécuté, - dit que les nouvelles dispositions de l'article 80 ne sont pas applicables, - et en a

déduit qu'il y a lieu de prononcer la résolution du plan et de prononcer l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire par application de l'article 80 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985 qui ne peut tendre qu'à la cession ou à la liquidation judiciaire;

Considérant qu'il apparaît donc indiscutablement du jugement que la résolution du plan de continuation et l'ouverture de la nouvelle procédure de redressement judiciaire ont été prononcées sur le fondement de l'article L 80, pour non exécution par le débiteur de ses engagements financiers; Sur la recevabilité de l'appel

Considérant que Maître HAMAMOUCHE, es qualités, soutient que l'appel de Maître MANDIN, es qualités, est irrecevable en application des dispositions de l'article 171-1°, selon lesquelles le jugement qui statue sur l'ouverture de la procédure ne sont susceptibles d'appel que de la part du débiteur, du créancier poursuivant ou du ministère public;

Considérant cependant que cet article ne serait applicable que si les premiers juges avaient ouvert la procédure de redressement judiciaire, selon le droit commun;

Considérant qu'en l'espèce les premiers juges ont prononcé la résolution du plan sur le fondement de l'article L 80; que le jugement qu'ils ont rendu n'est donc pas visé par l'article L 171-1°; que cet article ne saurait être étendu au jugement déféré au motif que celui-ci a en outre ouvert une procédure de redressement judiciaire; qu'en effet la limitation du droit d'appel fait échec au principe général du droit d'appel, rappelé par l'article 543 du Nouveau Code de Procédure Civile, et doit être entendue

restrictivement;

Considérant qu'aucun autre texte ne limite l'appel des jugements prononcés sur le fondement de l'article L 80; qu'il s'en déduit que ce recours est ouvert à toutes les parties; que le moyen invoqué par Maître HAMAMOUCHE, es qualités, pour conclure à l'irrecevabilité de l'appel n'est donc pas fondé; qu'en l'absence d'autres moyens, l'appel sera déclaré recevable; Sur la loi applicable

Considérant que les intimés soutiennent que l'article L 80 doit être appliqué dans sa rédaction antérieure à la modification de la loi du 10 juin 1994, tandis que Maître MANDIN, es qualités, estime que l'article L 80 doit être appliqué dans sa rédaction en vigueur au jour de la décision;

Considérant qu'il convient d'observer que la position de Maître MANDIN, es qualités, serait exacte si la nouvelle procédure de redressement judiciaire avait été ouverte sur le fondement du droit commun pour cessation des paiements, sans toutefois que la procédure de liquidation judiciaire soit obligatoire, comme il le soutient par ailleurs;

Considérant que Maître MANDIN, es qualités, souligne à l'appui de son argumentation, que le jugement ouvre une nouvelle procédure collective qui se déroule de manière indépendante de la première;

Mais considérant qu'il convient de distinguer les deux phases qui se succèdent lorsque la juridiction fait application de l'article L 80, la première qui consiste à prononcer la résolution du plan, et la seconde qui consiste à ouvrir une procédure de redressement

judiciaire qui est effectivement une nouvelle procédure, avec de nouveaux organes, et un déroulement futur qui lui sera propre; que l'ouverture de cette nouvelle procédure est sans influence sur le texte applicable pour prononcer, au préalable, la résolution du plan; Considérant que la résolution du plan pour inexécution, sur le fondement de l'article L 80, ne peut être prononcée qu'en application de cet article dans sa rédaction au jour du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ayant abouti à l'adoption du plan de continuation dont la résolution est demandée;

Considérant qu'en l'espèce il s'agit de l'article L 80 dans sa rédaction au 26 septembre 1994, donc antérieure à la modification de la loi du 10 juin 1994 qui n'est entrée en vigueur que le 1er octobre 1994; Sur le fond

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L 80 dans sa rédaction applicable à l'espèce, que si le débiteur n'exécute pas ses engagements financiers, dans les délais fixés par le plan, le commissaire à l'exécution du plan peut saisir le Tribunal aux fins de résolution du plan et d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire qui ne peut tendre qu'à la cession ou à la liquidation judiciaire;

Considérant que la Cour n'est saisie d'aucun moyen s'opposant à l'application de ce texte; qu'il n'est pas contesté que la SA UNIVACIER n'a pas exécuté ses engagements financiers et qu'en conséquence les conditions d'application de l'article L 80 sont remplies; que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a prononcé

la résolution du plan, et ouvert une procédure de redressement judiciaire de la SA UNIVACIER qui ne peut tendre qu'à la cession ou à la liquidation judiciaire;

Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties la totalité des frais irrépétibles exposés en appel;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Rejette l'exception d'irrecevabilité soulevée par Maître HAMAMOUCHE, es qualités,

Confirme le jugement rendu le 20 novembre 1998 par le Tribunal de commerce de Pontoise,

Condamne Maître MANDIN, es qualités, aux dépens d'appel et accorde à la SCP KEIME etamp; GUTTIN, titulaire d'un office d'Avoué, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Et ont signé le présent arrêt : Monsieur BESSE, Président Madame DUCLOS, Premier Greffier. M. DUCLOS

J. BESSE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1999-266
Date de la décision : 25/03/1999

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement judiciaire - Plan - Plan de continuation - Résolution - Redressement judiciaire - Nouveau prononcé.

Une personne physique ou morale qui a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire et bénéficie d'un plan peut faire l'objet d'une nouvelle procédure collective selon deux cas d'ouverture :1/ l'un fondé sur l'article 80 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985 qui prévoit la résolution du plan et l'ouverture de la procédure lorsque le débiteur n'exécute pas ses engagements,2/ l'autre fondé sur le droit commun des articles 3 et 4, ou 137, ou 148 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985, droit commun qui permet d'ouvrir une procédure collective en raison de la constatation de l'état de cessation des paiements et qui entraîne la résolution du plan, par voie de conséquence ; Le régime juridique applicable à ces deux cas d'ouverture est différent en ce qui concerne la recevabilité de l'appel et en ce qui concerne l'application de la loi dans le temps. Sur la recevabilité de l'appel le jugement qui prononce la résolution du plan et ouvre une nouvelle procédure de redressement judiciaire sur le fondement de l'article L 80 peut faire l'objet d'un appel par toutes les parties. Le jugement qui ouvre une nouvelle procédure de redressement judiciaire sur le fondement du droit commun pour cessation des paiements, et qui prononce en conséquence la résolution du plan, est visé par l'article 171-1° de la loi 85-98 du 25 janvier 1985, et ne peut faire l'objet d'un appel que de la part du débiteur, du créancier poursuivant et du ministère public. Sur l'application de la loi dans le temps l'article L 80 applicable pour prononcer la résolution du plan et ouvrir une nouvelle procédure de redressement judiciaire est celui qui est en vigueur au jour du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ayant abouti à l'adoption du plan de redressement dont la résolution est demandée.Les articles 3 et 4, ou 137 ou 148, applicables pour ouvrir selon le droit commun, à raison de l'état de cessation des paiements, une nouvelle procédure collective et pour prononcer par voie de

conséquence la résolution du plan, sont les articles qui sont en vigueur au moment où ils sont appliqués, c'est à dire au jour du jugement d'ouverture de la seconde procédure collective


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-03-25;1999.266 ?
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