La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/03/1999 | FRANCE | N°1996-9240

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19 mars 1999, 1996-9240


FAITS ET PROCEDURE,

Madame X... est locataire d'un appartement situé à CHATILLON 17, rue Etienne Deforges depuis le 1er janvier 1983 en vertu d'un contrat signé le 27 décembre 1982 et obtenu par l'intermédiaire de son employeur, la Société AIR LIQUIDE, bénéficiaire d'un contrat de réservation en date du 7 juin 1967 auprès du CILIF.

L'OPHLM DE CHATILLON est devenue propriétaire de l'appartement loué par Madame X... en juillet 1992.

Cette dernière refusant d'acquitter l'augmentation de loyer fixée par le nouveau propriétaire, a assigné l'OPHLM DE CHATILLO

N devant le tribunal d'instance de VANVES.

Par jugement rendu le 17 mars 1994, c...

FAITS ET PROCEDURE,

Madame X... est locataire d'un appartement situé à CHATILLON 17, rue Etienne Deforges depuis le 1er janvier 1983 en vertu d'un contrat signé le 27 décembre 1982 et obtenu par l'intermédiaire de son employeur, la Société AIR LIQUIDE, bénéficiaire d'un contrat de réservation en date du 7 juin 1967 auprès du CILIF.

L'OPHLM DE CHATILLON est devenue propriétaire de l'appartement loué par Madame X... en juillet 1992.

Cette dernière refusant d'acquitter l'augmentation de loyer fixée par le nouveau propriétaire, a assigné l'OPHLM DE CHATILLON devant le tribunal d'instance de VANVES.

Par jugement rendu le 17 mars 1994, cette juridiction a : - dit que Madame X... est locataire d'un appartement situé xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx à CHATILLON en vertu d'un bail prenant effet au 1er janvier 1983 et jusqu'au 31 décembre 1994, - dit que le montant du loyer est celui du bail initial révisé entre la Société AIR LIQUIDE et le CILIF le 7 juin 1967, - rejeté les autres demandes plus amples ou contraires, - condamné l'OPHLM DE CHATILLON au paiement de la somme de 3.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'OPHLM DE CHATILLON a relevé appel de cette décision et demande à la Cour de : - constater la validité à l'égard de Madame X... du congé qui lui a été délivré pour le 31 décembre 1991, - dire et juger que Madame X... est occupante sans droit ni titre depuis le 31 décembre 1991, - prononcer, en conséquence, son expulsion sous

astreinte de 1.000 Francs par jour de retard, - autoriser le bailleur à faire séquestrer le cas échéant les meubles se trouvant dans les lieux, - condamner Madame X... à payer une indemnité d'occupation de 6.000 Francs mensuels à compter du 1er janvier 1992 arrêtée au 30 août 1994.

Dans l'hypothèse où le jugement serait confirmé : - fixer le montant du loyer à la somme de 2.900 Francs par mois à compter du 1er janvier 1992, En conséquence, - condamner Madame X... à payer à l'OPHLM DE CHATILLON une somme mensuelle de 1.124 Francs par mois à compter du 1er janvier 1992 jusqu'à la décision définitive au titre du rappel du loyer, - condamner Madame X... à payer à l'OPHLM DE CHATILLON la somme de 10.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Madame X... conclut à la confirmation du jugement entrepris et sollicite les sommes de : 10.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'OPHLM DE CHATILLON, en réplique, prie notamment la Cour de débouter Madame X... de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Par arrêt contradictoire en date du 6 septembre 1996 la Cour de céans a rendu la décision suivante : vu le jugement rendu par le tribunal d'instance de VANVES le 17 mars 1994 : - confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que Madame X... est locataire de l'appartement situé à CHATILLON 17, rue Etienne Deforges, en vertu d'un bail en date du 27 décembre 1982 prenant effet au 1er janvier

1983, Le modifiant pour le surplus, - fixe à la somme mensuelle de 2.900 Francs le montant du loyer, Par conséquent, - condamne Madame X... à payer à l'OPHLM DE CHATILLON une somme mensuelle de 1.124 Francs à compter du 1er janvier 1992, - déboute les parties du surplus de leurs demandes, - condamne Madame X... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par Maître JUPIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par acte d'huissier en date du 15 septembre 1996, le GIPEC a formé tierce-opposition de cette décision. Il fait valoir, qu'en vertu des deux contrats de réservation qui lui confèrent pour l'un d'eux, la qualité de bénéficiaire du droit de réservation et pour l'autre, la qualité de titulaire de l'obligation de réservation il a qualité pour agir en tierce-opposition. Il expose, quant au fond, que, suivant les stipulations des contrats conclus entre la SCIC LE CHATILLON ETIENNE DEFORGES et le CILIF (aux droits duquel se trouve le GIPEC) et les dispositions de la loi du 23 décembre 1986, le loyer de Madame X... ne pouvait pas être augmenté par l'OPMHLM.

En conséquence, le GIPEC demande à la Cour de : - déclarer le GIPEC recevable et bien fondé en sa tierce-opposition, En conséquence, rétracter ou réformer partiellement l'arrêt du 6 septembre 1996, - dire et juger que l'OPHLM DE CHATILLON ne pouvait augmenter le loyer à l'expiration du bail, - condamner l'OPHLM DE CHATILLON à payer au GIPEC la somme de 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner l'OPHLM DE CHATILLON aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'OPHLM DE CHATILLON fait valoir que la seule personne concernée par l'augmentation du loyer est Madame X..., que la décision ne remet par en cause le droit de désignation du locataire conféré par les deux contrats mentionnés par le GIPEC ; qu'en l'absence d'un préjudice personnel, et en raison de l'expiration de la période de trente ans pendant laquelle le CILIF était bénéficiaire du droit de réservation et titulaire de l'obligation de réserver, le GIPEC ne présente pas d'intérêt à agir et doit donc être déclaré irrecevable en sa tierce-opposition.

L'OPHLM DE CHATILLON expose sur le fond qu'à compter du 15 août 1990, date du remboursement intégral du prêt contracté auprès du CREDIT FONCIER DE FRANCE et affecté à la construction des appartements dont Madame X... est locataire, l'appartement dont s'agit est sorti du régime d'habitation conventionné et les dispositions de la loi du 23 décembre 1986 ne lui sont donc pas applicables, pas plus que celles de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 ; que donc il était parfaitement en droit, à la date du 1er janvier 1992, de fixer le loyer de Madame X... à la somme de 2.900 francs ce qui n'apparaît pas excessif.

En conséquence, l'OPHLM DE CHATILLON prie la Cour de : - déclarer irrecevable sur le fondement de l'article 583 du Nouveau Code de Procédure Civile, subsidiairement mal fondé le GIPEC en son action afin de tierce-opposition formée à l'encontre de l'arrêt du 6 septembre 1996 de la 1ère chambre 2ème section de la Cour d'appel de VERSAILLES ainsi qu'en toutes ses demandes, fins et conclusions, l'en débouter, - constater que le prêt spécial accordé par le CREDIT FONCIER DE FRANCE a été intégralement remboursé à la date du 15 août

1990, - dire et juger qu'à compter de cette date, l'appartement de Madame X... situé 9-17, rue Etienne Desforges à CHATILLON (92) a cessé de bénéficier du régime d'habitation conventionné, - dire et juger que l'OPHLM DE CHATILLON était en droit d'augmenter le loyer à l'expiration du bail, soit à compter du 1er janvier 1992, - confirmer, en conséquence, le jugement entrepris en ce qu'il a fixé à la somme mensuelle de 2.900 Francs le montant du loyer et condamner Madame X... à payer à l'OPHLM DE CHATILLON une somme mensuelle de 1.124 Francs à compter du 1er janvier 1992, - condamner le GIPEC à payer à l'OPHLM DE CHATILLON la somme de 20.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner le GIPEC en tous les dépens dont le recouvrement sera poursuivi par la SCP JUPIN ALGRIN, avoué conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le GIPEC réplique qu'il est titulaire d'un droit personnel d'exiger que le contrat soit appliqué dans toutes ses dispositions notamment financières ; que le montant du loyer constitue une composante essentielles du droit de réservation ; que la durée de trente ans allèguée par l'OPHLM DE CHATILLON ne court qu'à compter de la livraison des immeubles et non de la signature du contrat, la livraison étant intervenue au printemps 1968 ; qu'en conséquence de tout ce qui précède il a donc bien qualité pour agir.

Il ajoute, ensuite, sur le fond que le remboursement anticipé du prêt contracté auprès du CREDIT FONCIER DE FRANCE ne permettait pas au propriétaire de l'époque, pas plus qu'à son ayant droit, l'OPHLM DE CHATILLON, de passer outre les obligations de modération des loyers.

Madame X... s'appuyant sur l'argumentation développée par le GIPEC demande en dernier à la Cour de : - dire recevable et bien fondée la tierce-opposition formée par le GIPEC, Y faire droit, En conséquence, condamner l'OPHLM DE CHATILLON à restituer à Madame X... la somme de 63.565,27 Francs outre les intérêts à compter de la date de versement de ces sommes, - condamner tout succombant aux dépens dont distraction est requise au profit de la SCP GAS conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 4 février 1999 et l'affaire appelée à l'audience du 19 février 1999 où elle a été plaidée pour l'appelant et pour l'OPHLM DE CHATILLON.

SUR CE, LA COUR,

I/ Considérant, en Droit, qu'en application de l'article 583 alinéa 1er du Nouveau Code de Procédure Civile, le GIPEC doit démontrer son intérêt à agir en formant cette tierce-opposition et qu'il doit donc justifier du préjudice que lui aurait causé l'arrêt du 6 septembre 1996 (RG n° 5739/94), ce préjudice devant lui être personnel, certain et direct, et non pas seulement éventuel ;

Considérant, d'abord, qu'il sera souligné que l'arrêt du 6 septembre 1996 n'a statué que sur le montant du loyer réévalué dû par Madame X... à l'OPHLM DE CHATILLON, en vertu du contrat de bail du 27 décembre 1982 ayant pris effet au 1er janvier 1983 et ce, -en application de la loi du 6 juillet 1989- et non pas sur l'existence même ou sur la validité des deux contrats de réservation des 7 juin 1967 et 19 juillet 1967, invoqués par le GIPEC ; que la seule

personne qui avait donc un intérêt personnel, actuel et certain à agir en contestation de ce loyer dont la réévaluation était réclamée par l'OPHLM-bailleur, était la locataire Madame X..., elle-même ; Considérant que ce litige n'a donc porté que sur le montant du loyer réévalué, et qu'il n'a aucunement remis en cause le droit de désignation du locataire, conféré par ces deux contrats de réservation de 1967 ; que les dispositions de ces deux contrats ne font pas obstacle au droit que conserve le bailleur d'obtenir une réévaluation du loyer, dans les conditions prévues par les lois applicables, en matière de baux d'habitation, et notamment par la loi du 6 juillet 1989 (articles 17-C) et 19) applicable en l'espèce ; qu'à aucun moment, les deux contrats de réservation dont s'agit -et dont l'objet est bien précis et limité- n'ont prévu que les deux sociétés réservantes auraient la faculté de s'opposer à toute réévaluation du loyer à la demande du bailleur, et ce, pendant 30 années (au plus) ; que les articles V et VI et VII de ces deux contrats ne stipulent pas expressément cette faculté ; qu'en droit, de plus, ces deux contrats de réservation conclus en vertu des articles L.313-1-1 et R.313-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation et qui prévoyaient seulement des loyers qui devaient être "de l'ordre" de 240 Francs pour un deux pièces et de 280 Francs pour un trois pièces, ne peuvent être soustraits à l'application des lois d'ordre public prises en matière de baux d'habitation ; que la loi d'ordre public du 6 juillet 1989, et notamment ses articles 17 et 19, doivent donc recevoir application en l'espèce, sans que les réservants puissent prétendre que la réévaluation des loyers ordonnée leur aurait causé un préjudice personnel, actuel et direct ; que le GIPEC ne justifie pas de ce

préjudice, ni de son intérêt à agir en tierce-opposition, et que celle-ci est donc déclarée irrecevable ; que toutes les présentes demandes du GIPEC sont, par conséquent, irrecevables ;

II/ Considérant que, compte tenu de l'équité, le GIPEC qui succombe en sa tierce-opposition est condamné à payer à l'OPHLM DE CHATILLON la somme de 8.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

III/ Considérant que cette tierce-opposition étant déclarée irrecevable, ainsi que toutes les demandes formées par le GIPEC, Madame X... n'est plus en droit de réclamer contre l'OPHLM DE CHATILLON une restitution de 63.565,27 Francs correspondant à l'augmentation des loyers décidée par l'arrêt du 6 septembre 1996 ; que Madame X... est donc déboutée de cette demande qui n'est fondée sur aucun paiement indu fait par elle ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

VU les articles 583 et suivants du Nouveau Code de Procédure Civile :

VU les articles L.313-1-1 et R.313-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation :

VU l'arrêt de cette Cour (1ère chambre 2ème section) du 6 septembre 1996 (RG n° 5739/94) :

. DECLARE irrecevable la tierce-opposition formée par le GIPEC et irrecevables toutes ses demandes ;

. DEBOUTE Madame X... de sa demande contre l'OPHLM DE CHATILLON en restitution de loyers ;

. CONDAMNE le GIPEC à payer à l'OPHLM DE CHATILLON la somme de 8.000 Francs (HUIT MILLE FRANCS) en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE le GIPEC à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP d'avoués JUPIN-ALGRIN et par la SCP d'avoués GAS, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-9240
Date de la décision : 19/03/1999

Analyses

TIERCE OPPOSITION - Conditions d'exercice - Intérêt - PREJUDICE PERSONNEL

En application de l'article 583, alinéa 1er, du Nouveau code de procédure civile, celui qui forme tierce opposition doit démontrer son intérêt à agir en justifiant d'un préjudice personnel, certain et direct, que lui occasionne la décision contestée. En conséquence, dans un litige entre un locataire et un office d'HLM, ayant pour objet la réévaluation du montant du loyer, un tiers opposant, qui conteste l'existence et la validité des contrats passés avec l'office d'HLM pour agir contre la décision rendue ne justifie d'aucun intérêt personnel, actuel et certain à agir en contestation, la seule ayant un tel intérêt à agir étant la locataire elle-même


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-03-19;1996.9240 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award