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12/03/1999 | FRANCE | N°1997-1670

France | France, Cour d'appel de Versailles, 12 mars 1999, 1997-1670


FAITS ET PROCEDURE,

Par acte sous seing privé en date du 27 avril 1989, avec effet au 15 mai, les Sociétés CAPIM et PERIMETRO ont donné à bail à la Société "ERCA GEC" divers locaux à usage de bureau et un emplacement de stationnement sis ....

Les 23 et 31 juillet 1996, les sociétés bailleresses ont fait assigner devant le Tribunal d'Instance d'ASNIERES, d'abord à mairie puis en vertu d'un procès-verbal de recherches infructueuses établi conformément aux dispositions de l'article 659 du Nouveau Code de Procédure Civile, la SARL"ERCA GEC".

Elles ont fait v

aloir que la SARL "ERCA GEC" a délaissé, courant juillet 1994, les locaux donnés ...

FAITS ET PROCEDURE,

Par acte sous seing privé en date du 27 avril 1989, avec effet au 15 mai, les Sociétés CAPIM et PERIMETRO ont donné à bail à la Société "ERCA GEC" divers locaux à usage de bureau et un emplacement de stationnement sis ....

Les 23 et 31 juillet 1996, les sociétés bailleresses ont fait assigner devant le Tribunal d'Instance d'ASNIERES, d'abord à mairie puis en vertu d'un procès-verbal de recherches infructueuses établi conformément aux dispositions de l'article 659 du Nouveau Code de Procédure Civile, la SARL"ERCA GEC".

Elles ont fait valoir que la SARL "ERCA GEC" a délaissé, courant juillet 1994, les locaux donnés à bail après avoir manifesté son intention de mettre fin au bail par courrier en date du 26 juillet 1994 ; que cette résiliation unilatérale est nulle et que la SARL "ERCA GEC" leur est redevable au titre de la période comprise entre le 1er novembre 1991 et le mois de juillet 1996 inclus de la somme de 432.672,48 francs, au titre des loyers et charges impayées. Elle a réclamé, en outre, la condamnation de la SARL "ERCA GEC" à leur payer la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civil et du coût de commandement de payer délivré le 31 janvier 1995.

La Société "ERCA GEC" a demandé au tribunal de se déclarer incompétent au profit du Tribunal de Grande Instance et, à titre subsidiaire, de débouter les demanderesses de leurs prétentions et de les condamner à lui payer les sommes de 324.459,90 francs à titre de dommages et intérêts pour trouble de jouissance et celle de 10.000

francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout avec le bénéfice de l'exécution provisoire.

Le 12 décembre 1996 le Tribunal d'Instance d'ASNIERES, statuant par jugement contradictoire, a rendu la décision suivante : - prononce la jonction des procédures enrôlées sous les numéros 532/1996 et 545/1996, - se déclare compétent pour connaître du litige, - condamne la Société "ERCA GEC" à payer aux Sociétés CAPIM et PERIMETRO la somme de 197.246 Francs, outre intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 1995, date du commandement de payer, et celle de 5.000 Francs (HT) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - assortit la présente décision de l'exécution provisoire, - déboute les parties du surplus de leurs prétentions, - condamne la Société "ERCA GEC" aux dépens et au coût du commandement de payer (1.289,11 francs).

Le 7 février 1997, les Sociétés CAPIM et PERIMETRO ont interjeté appel de cette décision. Le 12 et le 14 février 1997, la SARL "ERCA GEC" a fait de même.

Par ordonnance en date du 24 juin 1997, le Conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des trois dossiers.

Les Sociétés CAPIM et PERIMETRO font valoir que la lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 juillet 1994 émanant de la SARL "ERCA GEC" ne peut valoir congé puisqu'il résulte d'une jurisprudence de la haute cour (Civ. 3ème 24 janvier 1996) que les parties ne peuvent déroger à l'obligation d'établir un acte extrajudiciaire et qu'un congé donné par lettre recommandée est donc nul ; que le courrier en date du 1er juin 1995 adressé par la société

locataire ne pouvait valoir congé pour le 1er juillet 1995 faute d'avoir été signifié par exploit d'huissier avant le 15 novembre 1994, une nouvelle période triennale ayant été entamée le 15 mai 1998, en tout état de cause les loyers sont dus jusqu'à cette date ; que la SARL "ERCA GEC" est redevable de la somme de 579.129,48 Francs représentant les loyers échus pour la période du novembre 1991 à juin 1997 sous réserve des loyers échus jusqu'au terme du bail le 15 mai 1998.

Par conséquent, elles prient la Cour de : - infirmer le jugement déféré, et statuant à nouveau, - dire et juger que le courrier adressé par la Société "ERCA GEC" le 26 juillet 1994 ne s'analyse pas comme un congé et qu'au demeurant, ce congé serait nul pour non-respect des dispositions de l'article 3-1, alinéa 2 du décret du 30 septembre 1953, - dire et juger que le courrier adressé par la Société "ERCA GEC" le 1er juin 1995 ne pouvait valoir congé dans la mesure où, pour être valable, il aurait dû être délivré avant le 15 novembre 1994 et par exploit d'huissier, - dire et juger, en conséquence, que la Société "ERCA GEC" est redevable des loyers jusqu'au 15 mai 1998, - condamner, en conséquence, et en l'état, la Société "ERCA GEC" à payer aux Sociétés CAPIM ET PERIMETRO les sommes suivantes : * 579.129,48 Francs en principal au titre des loyers relatifs à la période comprise en novembre 1991 et juin 1997 inclus et sous réserve des loyers à échoir jusqu'au terme du bail le 15 mai 1998, - les intérêts suivants : a) sur la somme de 206.683,67 Francs depuis le 31 janvier 1995, date du commandement de payer, b) sur la somme de 392.864,43 Francs depuis le 15 avril 1996, c) sur la somme de 472.617,48 Francs depuis le 14 novembre 1996, date de l'audience devant le tribunal d'instance d'ASNIERES, d) sur la somme de 579.129,48 Francs à compter de ce jour, - 20.000 Francs au titre de

l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner la Société "ERCA GEC" en tous les dépens, - dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile,

La Société "ERCA GEC" expose, quant à elle, qu'en raison de nombreux désordres affectant sa jouissance paisible des locaux donnés à bail, elle a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 juillet 1994, conformément aux stipulations de celui-ci (notamment respect d'un préavis de six mois et possibilité de donner congé par lettre recommandée avec accusé de réception), lesdites sociétés ayant donc renoncé par anticipation à se prévaloir de la nullité du congé fondée sur le non-respect des formes prescrites par les dispositions du décret du 30 septembre 1953 ; que la résiliation a donc produit tous ses effets le 15 mai 1995 ; que, dès lors, les loyers ne peuvent être réclamés que jusqu'à cette date ; qu'elle est fondée à réclamer la somme de 324.458,90 Francs de dommages et intérêts en raison du préjudice de jouissance par elle subi.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré valable le congé délivré le 26 juillet 1994 pour le 15 mai 1995, - infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la Société "ERCA GEC" de ses demandes formées au titre de la réparation du préjudice subi, - condamner, en conséquence, la Société CAPIM ET PERIMETRO à payer à la Société "ERCA GEC" la somme en principal de 324.459,90 Francs à ce titre outre 10.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens, - condamner enfin la Société CAPIM ET PERIMETRO aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement

sera effectué pour ceux la concernant par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL, société titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 7 janvier 1999 et l'affaire plaidée à l'audience du 11 février 1999.

SUR CE, LA COUR,

I/ Considérant en ce qui concerne les courriers adressés par la société locataire "ERCA GEC", le 26 juillet 1994 puis le 1er juin 1995, qu'il sera d'abord souligné que le bail liant les parties ne parle pas expressément de "congé" ; que cependant, en sa première page, il contient la clause suivante :

"... avec faculté de résiliation triennale pour le PRENEUR seul,

à charge pour lui de prévenir le BAILLEUR de ses intentions,

par lettre recommandée avec accusé de réception, au moins six

mois à l'avance,... " ;

Considérant que le premier courrier, du 26 juillet 1994 exprime en termes clairs et précis dénués de toute ambigu'té l'intention certaine de la société locataire de "mettre un terme au bail.." et de "libérer" les locaux loués ; qu'il est donc patent que ce courrier vaut congé, au sens de l'article 5 du décret du 30 septembre 1953 ;

Considérant, par ailleurs, que les sociétés bailleresses qui sont des professionnelles de la location commerciale ont délibérément, et en toute connaissance de cause, accepté de signer ce contrat de bail du 27 avril 1989 qui prévoyait explicitement la faculté d'une résiliation triennale, par lettre recommandée avec accusé de

réception, sans qu'il soit besoin de recouvrir à un acte extra-judiciaire ; que ces deux sociétés doivent donc exécutés de bonne foi ce bail qui fait la loi des parties (article 1134 du Code civil) et qu'elles ne sont pas en droit, de prétendre maintenant que le courrier du 26 juillet 1994 ne vaudrait pas congé ; qu'il est à souligner que les deux appelantes ne contestent pas expressément la régularité de ce congé, au regard des exigences de l'article 5 du décret du 30 septembre 193 et qu'elles ne demandent même pas que soit prononcée sa nullité, mais qu'elles se bornent à contester "l'existence et la validité de ce congé" et qu'elles dénient à ce courrier la valeur d'un congé ; qu'en tout état de cause, les bailleresses ne discutent pas les énonciations mêmes de ce congé et qu'elles ne prétendent pas qu'il y aurait eu une inobservation des dispositions du décret relatives à l'énoncé des motifs (article 5 in fine), ce qui aurait dû être sanctionné par une nullité ; que de plus, le premier juge a très pertinemment retenu que ces deux sociétés ne justifiaient d'aucun préjudice qui serait résulté pour elles de cette irrégularité formelle (à supposer celle-ci établie) ; que devant la Cour les deux bailleresses ne font toujours pas état su grief que leur aurait causé cette prétendue irrégularité de forme ;

Considérant que le jugement déféré est, par conséquent, confirmé en ce qu'il a exactement retenu que la lettre recommandée, avec accusé de réception de la Société "ERCA GEC", du 26 juillet 1994 valait congé ;

Considérant, en outre, que le premier a justement retenu que les propres écritures des deux sociétés bailleresses avait indiqué que les locaux loués litigieux avaient été libérés par la Société "ERCA GEC" au mois de juillet 1994 ; que toute l'argumentation développée

au sujet du second courrier de la Société "ERCA GEC" du 1er juin 1995 devient donc surabondante et qu'elle ne sera pas davantage analysée par la Cour ;

II/ Considérant en ce qui concerne les sommes qui seraient dues par l'ancienne société locataire et en ce qui concerne les 324.459,90 Francs que celle-ci réclame en réparation du préjudice qu'elle allègue, que la Cour tiendra compte du dernier état de la procédure résultant des indications mêmes que les deux appelants ont fournies dans leurs dernières conclusions du 5 mars (cote 9 du dossier de la Cour n° 1670/97), dans lesquelles elles ont précisé que, par acte d'huissier du 18 décembre 1997, elles avaient assigné en redressement judiciaire la Société "ERCA GEC", devant le tribunal de commerce de PARIS ; que cependant les deux appelantes n'ont plus rien dit sur l'état actuel de cette instance devant e tribunal de commerce, et que la Cour ordonne donc d'office un sursis à statuer en attendant qu'il soit définitivement statué sur cette action en redressement judiciaire (articles 46 et 47 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985) ;

Considérant que la Cour sursoit donc à statuer sur toutes les demandes en paiement des parties et réserve les dépens ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

VU l'article 5 du décret du 30 septembre 1953 et l'article 1134 du Code civil :

I/ CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a retenu la validité du congé donné pour la Société "ERCA GEC", le 26 juillet 1994 ;

II/ VU les articles 46 et 47 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 :

. SURSOIT à statuer jusqu'à décision définitive sur l'action en redressement judiciaire engagée devant le tribunal de commerce de PARIS contre la Société "ERCA GEC" par les Sociétés CAPIM ET PERIMETRO ;

. SURSOIT à statuer sur toutes les actuelles demandes des parties et RESERVE les dépens.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, Marie Hélène Y...

Alban X...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-1670
Date de la décision : 12/03/1999

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Congé - Forme

Un bailleur, professionnel de la location commerciale, qui a délibérément et en toute connaissance de cause, signé un bail prévoyant une faculté de résiliation triennale par lettre recommandée avec accusé de réception, sans qu'il soit besoin de recourir à un acte extrajudiciaire, a l'obligation d'exécuter de bonne foi ce bail et ne peut prétendre qu'un courrier ne vaut pas congé dès lors qu'il respecte ce formalisme, qu'il exprime en termes clairs et précis, dénués de toute ambigu'té, l'intention certaine du locataire de mettre un terme au bail et de libérer les lieux loués, et qu'il est patent que ce courrier vaut congé au sens de l'article 5 du décret du 30 septembre 1953


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-03-12;1997.1670 ?
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