La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/1999 | FRANCE | N°1996-6161

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11 mars 1999, 1996-6161


FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 09 septembre 1993, enregistré le 06 octobre 1993, la BANQUE MONETAIRE ET FINANCIERE (B.M.F.) a consenti à l'EURL CASTOR D'ASNIERES (ci-après EURL CASTOR), un prêt d'un montant de 1.300.000 francs en principal, au taux de 11,75 % l'an, d'une durée de 7 ans, remboursable en 84 mensualités de 24.006,13 francs.

Aux termes du même acte, Monsieur Mouloud X... et Madame Farida Y... se sont portés caution solidaire de l'EURL CASTOR à concurrence de 1.300.000 francs en principal, plus intérêts, frais et accessoires.



Suite à des incidents de paiement et à une sommation en date du 1er ...

FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 09 septembre 1993, enregistré le 06 octobre 1993, la BANQUE MONETAIRE ET FINANCIERE (B.M.F.) a consenti à l'EURL CASTOR D'ASNIERES (ci-après EURL CASTOR), un prêt d'un montant de 1.300.000 francs en principal, au taux de 11,75 % l'an, d'une durée de 7 ans, remboursable en 84 mensualités de 24.006,13 francs.

Aux termes du même acte, Monsieur Mouloud X... et Madame Farida Y... se sont portés caution solidaire de l'EURL CASTOR à concurrence de 1.300.000 francs en principal, plus intérêts, frais et accessoires.

Suite à des incidents de paiement et à une sommation en date du 1er février 1995, la B.M.F. a constaté la déchéance du terme et mis en demeure la société CASTOR de régler la somme de 1.324.818,10 francs. Le 30 septembre 1995, une mise en demeure identique a été adressée aux cautions de même qu'à Monsieur Hocine Y..., époux de Madame Farida Y....

Ces mises en demeure étant demeurées sans effet, la B.M.F. a engagé une action en paiement tant à l'encontre de l'EURL CASTOR que des cautions, ainsi qu'à l'encontre de Monsieur Hocine Y.... *

Par jugement en date du 12 mars 1996, le Tribunal de Commerce de NANTERRE a statué dans les termes ci-après : "- Dit irrecevable l'action de la SA LA BANQUE MONETAIRE ET FINANCIERE dite B.M.F. à l'encontre de Monsieur Hocine Y... ; - Condamne solidairement l'EURL CASTOR D'ASNIERES, Monsieur Mouloud X... et Madame Farida Z... épouse Y... à payer à la SA BANQUE MONETAIRE ET FINANCIERE dite B.M.F. la somme de 1.258.990,93 francs avec intérêts au taux conventionnel de 15,75 % à compter du 30 mars 1995 ; - Ordonne l'exécution provisoire sans constitution de garantie ; - Condamne

solidairement l'EURL CASTOR D'ASNIERES, Monsieur Mouloud X... et Madame Farida Z... épouse Y... à payer à la SA LA BANQUE MONETAIRE ET FINANCIERE dite B.M.F. la somme de 5.000 francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; - Reçoit les parties dans le surplus de leurs demandes, les dit mal fondées, les en déboute ; - Condamne solidairement l'EURL CASTOR D'ASNIERES, Monsieur Mouloud X..., Mme Farida Z... épouse Y... en tous les dépens. *

Appelants de cette décision, Monsieur X... et Madame Y... exposent tout d'abord que l'EURL CASTOR a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire prononcée par le Tribunal de Commerce de NANTERRE le 06 décembre 1995 et que cette situation, bien que connue de la banque, n'a pas été portée à la connaissance des premiers juges, de sorte que ces derniers ont prononcé condamnation à l'encontre du débiteur principal.

A cet égard, ils prévalent de l'irrégularité de la deuxième déclaration de créance à laquelle a fait procéder la banque le 13 août 1996, faute de pouvoir du déclarant, et estiment à titre principal la dette éteinte pour ce premier motif. Subsidiairement, ils soutiennent que la banque n'a pas mis en ouvre les sûretés qu'elle détenait et que, plus particulièrement, elle a laissé perdre le droit au bail. Ils en déduisent, qu'en application de l'article 2037 du Code Civil, ils doivent être déchargés de leurs engagements. Plus subsidiairement, ils reprochent à la banque de ne pas avoir satisfait à l'obligation d'information à laquelle elle était tenue et demandent que celle-ci soit déboutée du paiement des intérêts contractuels.

Enfin, ils réclament les plus larges délais pour s'acquitter de leur dette éventuelle et une indemnité de 10.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La B.M.F. réfute point par point l'argumentation adverse et conclut "à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré" sauf à se voir allouer une indemnité complémentaire de 10.000 francs en couverture des frais qu'elle a été contrainte d'exposer devant la Cour.

Enfin, il convient de relever que Maître OUIZILLE, pris en qualité de liquidateur de l'EURL CASTOR, bien que régulièrement assigné et réassigné par les appelants, n'a pas constitué avoué. [*

MOTIFS DE LA DECISION

*] Sur la déclaration de créance

Considérant que la caution peut opposer au créancier, en vertu de l'article 2036 du Code Civile, toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérents à la dette ; que, entre dans le champ d'application de ce texte, une déclaration de créance effectuée par une personne non habilitée ;

Considérant qu'en l'espèce, il apparaît des pièces des débats que la banque a procédé à une première déclaration de créance le 20 décembre 1993, sans la signature de Madame A... responsable du contentieux et dont il est justifié de l'habilitation ; que, à la demande de Maître OUIZILLE, désigné en qualité de mandataire liquidateur de l'EURL CASTOR, la banque a procédé le 13 avril 1996 à une déclaration de créance rectificative "annulant et remplaçant la précédente" sous la signature de Madame Caroline B... également responsable du contentieux, la lettre d'accompagnement précisant qu'était jointe l'habilitation de ladite Madame B... ; que cette déclaration de créance rectificative a été prétendument "admise" au passif de la liquidation judiciaire de l'EURL CASTOR comme il ressort d'un courrier de Maître OUIZILLE daté du 17 octobre 1997 ; que toutefois, il n'est pas produit la décision d'admission définitive pas plus que n'est versé, comme cela a été fait pour Madame A..., une copie de

l'habilitation de Madame B... malgré la sommation adressée à cette fin à la banque ; qu'il se déduit de là que la seconde déclaration de créance effectuée par la banque doit être tenue pour irrégulière à défaut de justification de l'habilitation du préposé qui l'a déposée ;

Mais considérant que la dette des créanciers ne saurait être éteinte pour autant dès lors que la première déclaration de créance a été régularisée dans des conditions qui ne souffrent aucune critique et que Madame B..., qui n'avait pas qualité pour déposer une déclaration de créance rectificative, n'avait pas à l'évidence davantage qualité pour demander que cette deuxième déclaration "annule et remplace la précédente", laquelle ne peut être tenue que pour valable, sous réserve qu'en soit apprécié les montants qui y sont portés ; que le moyen invoqué par les cautions, tenant à l'irrégularité de la déclaration de créance, ne peut dès lors être qu'écarté ;

* Sur la perte de sûretés imputées à la banque

Considérant que les cautions reprochent à la banque d'avoir laissé résilier le droit au bail du fonds de commerce nanti à son profit et de ne pas les avoir informés de la procédure de résiliation de bail initiée par le bailleur à l'encontre de l'EURL CASTOR pour défaut de paiement de loyer ; qu'ils en déduisent que, en application de l'article 2037 du Code Civil, ils doivent à être déchargés de leur engagement de caution ;

Mais considérant qu'il apparaît en l'espèce que la perte du droit au bail relève de la carence manifeste du seul débiteur principal, à savoir l'EURL CASTOR qui n'a pas satisfait à un commandement de payer qui lui a été délivré le 09 février 1999, étant observé que ce commandement a été dénoncé à la même date à Madame Y... prise tant en sa qualité de caution que d'associée unique de l'EURL, et que

celle-ci n'a rien fait pour y satisfaire de sorte qu'elle est mal venue de reprocher à la banque qui n'a été avisée, en sa qualité de créancier nanti, que le 12 mai 1995 de l'assignation délivrée à l'EURL en vue de la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire alors que les conditions d'acquisition de ladite clause se trouvaient déjà réunies, de n'avoir effectué aucune diligence ou d'avoir manqué à son devoir d'information ;

Que, de surcroît, les cautions ne justifient d'aucun préjudice correspondant à la valeur du droit qui aurait dû prétendument leur être transmis par subrogation alors qu'ils reconnaissent, dans leurs écritures que la banque détient d'autres sécurités susceptibles de préserver l'intégralité de leurs droits et notamment une hypothèque sur les murs d'un café exploité 20 boulevard du Général de Gaulle à COLOMBES .

Que dans ces conditions, le moyen tiré d'une inertie fautive de la banque ne peut être qu'écarté ;

* Sur le montant de la créance de la banque et sur les obligations

respectives des parties

Considérant tout d'abord que la banque sollicite la "confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions" ;

Or considérant que l'EURL CASTOR, régulièrement intimée en la personne de son liquidateur, a fait l'objet d'une procédure collective ; qu'en conséquence la demande de la banque dirigée à l'encontre de ladite société ne peut tendre, sauf à violer les dispositions d'ordre public de la loi du 25 janvier 1985, qu'à une fixation de créance ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites aux débats, que la créance de la banque s'établit en principal à 1.258.990,93 francs outre 136.265,73 francs représentant les intérêts au taux contractuel

de 15,75 % l'an à compter du 30 mars 1995 et jusqu'à la date du jugement déclaratif, soit un total de 1.395.256,66 francs ;

Que c'est donc à ce montant de 1.395.256,66 francs que sera fixée la créance de la banque sur l'EURL CASTOR ;

Que, pour ce qui concerne les cautions, il n'est pas justifié d'une information régulière conforme à l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 ; qu'en effet, la banque ne produit que deux photocopies des lettres prétendument adressées les 28 mars et 13 mars 1997 aux cautions, lettres que celles-ci prétendent n'avoir jamais reçues et qui ne font pas apparaître les frais et intérêts conventionnels comme l'exige le texte précité ; que les cautions ne seront donc condamnées qu'au montant du principal, soit 1.258.990,93 francs augmenté des intérêts de droit à compter du 30 mars 1995, date de la mise en demeure ;

* Sur les délais

Considérant que les cautions ont déjà bénéficié des plus larges délais du seul fait du recours exercé ; qu'elles ne justifient pas de surcroît de leur situation économique actuelle ; qu'elles seront déboutées de leur demande d'octroi de délai supplémentaire ;

* Sur les autres demandes

Considérant que, en raison des nombreux errements de procédure imputables à la banque, il ne paraît pas inéquitable de laisser à sa charge les frais qu'elle a été contrainte d'exposer tant en première instance qu'en cause d'appel ; que la demande formée au même titre par les cautions sera rejetée ; qu'enfin lesdites cautions, qui succombent pour l'essentiel, supporteront les entiers dépens. * PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par décision réputée contradictoire et en dernier ressort,

- REOEOIT Monsieur Mouloud X... et Madame Farida C... en leur appel

principal ;

- INFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau,

- CONSTATE que l'EURL CASTOR D'ASNIERES a fait l'objet le 06 décembre 1995 d'une procédure collective ;

- FIXE en conséquence de cette procédure la créance de la BANQUE MONETAIRE ET FINANCIERE sur l'EURL CASTOR D'ASNIERES à 1.395.256,66 francs ;

- REJETTE les moyens invoqués par les appelants tendant à se voir déchargés de leur engagement de caution et condamne ces dernières solidairement à payer à la BANQUE MONETAIRE ET FINANCIERE la somme en principal de 1.258.990,93 francs avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 1995 ;

- REJETTE la demande de délai de paiement formée par les appelants ; - DIT n'y avoir lieu en la cause à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- CONDAMNE solidairement les appelants aux entiers dépens et autorise la SCP FIEVET-ROCHETTE-LAFON à poursuivre directement le recouvrement de la part la concernant, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT M. Thérèse D...

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-6161
Date de la décision : 11/03/1999

Analyses

CAUTIONNEMENT - Caution - Action des créanciers contre elle - Opposabilité des exceptions inhérentes à la dette

En vertu de l'article 2036 du Code civil, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions appartenant au débiteur principal et inhérentes à la dette ; une déclaration de créance effectuée par une personne non habilitée entrant dans le champ d'application de ce texte. Une déclaration de créance rectifica- tive " annulant et remplaçant la précédente " prétendument " admise " au pas- sif d'une liquidation judiciaire, dont la décision d'admission définitive n'est pas produite, pas plus que n'est versée copie de l'habilitation du préposé qui l'a fai- te, doit être tenue pour irrégulière. Dès lors que la déclaration de créance initiale effectuée par une personne habilitée, ce dont il est justifié, a pu être ré- gularisée par la signature du déclarant, qui avait été omise, la caution ne saurait prétendre que les dettes afférentes se sont éteintes


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-03-11;1996.6161 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award