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29/01/1999 | FRANCE | N°1997-595

France | France, Cour d'appel de Versailles, 29 janvier 1999, 1997-595


FAITS ET PROCEDURE,

Suivant acte sous seing privé en date du 26 janvier 1994, Monsieur X... a contracté un crédit auprès de la Société DIAC, en vue de l'achat d'un véhicule, d'un montant de 67.000 Francs, au taux de 13,60 % l'an, remboursable en 60 mensualités de 1.571,69 Francs. Par le même acte, Madame Y... s'est portée caution solidaire de Monsieur X....

Le 18 avril 1996, la Société DIAC a fait assigner respectivement Monsieur X... et Madame Y... devant le tribunal d'instance de NOGENT LE ROTROU, afin d'obtenir le paiement, outre les dépens, de la somme de 61.40

9,40 Francs avec intérêts conventionnels à dater du 16 mars 1996 et de c...

FAITS ET PROCEDURE,

Suivant acte sous seing privé en date du 26 janvier 1994, Monsieur X... a contracté un crédit auprès de la Société DIAC, en vue de l'achat d'un véhicule, d'un montant de 67.000 Francs, au taux de 13,60 % l'an, remboursable en 60 mensualités de 1.571,69 Francs. Par le même acte, Madame Y... s'est portée caution solidaire de Monsieur X....

Le 18 avril 1996, la Société DIAC a fait assigner respectivement Monsieur X... et Madame Y... devant le tribunal d'instance de NOGENT LE ROTROU, afin d'obtenir le paiement, outre les dépens, de la somme de 61.409,40 Francs avec intérêts conventionnels à dater du 16 mars 1996 et de celle de 2.500 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et ce, avec le bénéfice de l'exécution provisoire.

La Société DIAC a précisé que l'offre ayant été acceptée le jour même, soit le 26 janvier 1994, le contrat est devenu définitif à cette date, raison pour laquelle la livraison du véhicule a pu se faire ce même jour ; que Monsieur X... n'a plus honoré ses échéances à compter de fin 1994; que le 2 août 1995, il a signé un procès-verbal de transaction, par lequel il a reconnu lui devoir la somme de 85.588,80 Francs remboursable, au taux contractuel, par mensualités de 1.426,48 Francs, à partir du 15 septembre 1995, cet acte se référant à l'article 2044 du Code civil ; que Monsieur X... a commencé à effectué les versements convenus.

Monsieur X... a répliqué qu'il n'avait pas fait de demande expresse de livraison immédiate et qu'aucun délai de rétractation n'avait été respecté, ce qui emporte la nullité de la vente contrat principal et partant, du contrat de crédit accessoire à la vente. Il a signalé l'absence de mentions obligatoires, celles reproduisant les dispositions des articles L.311-15 et L.311-16 du Code de la consommation. A titre subsidiaire, il a donc sollicité l'application de l'article L.311-33 du même code, à savoir la déchéance du droit aux intérêts et la restitution des intérêts perçus à tort par la Société DIAC. Enfin, il a fait valoir que compte tenu de la faiblesse de ses ressources, la Société DIAC n'aurait jamais dû accepter le crédit.

A titre reconventionnel, il a sollicité 3.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Madame Y... a repris les arguments développés par Monsieur X.... Elle a ajouté qu'eu égard à son insolvabilité, son engagement de caution ne pouvait être accepté ; que le préjudice causé par la Société DIAC, par l'octroi fautif du prêt, s'élevait à

la somme réclamée par celle-ci. Elle a donc sollicité la compensation des créances respectives et le paiement de la somme de 3.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement contradictoire en date du 25 octobre 1996, le tribunal d'instance de NOGENT LE ROTROU a rendu la décision suivante :

- déboute la Société DIAC de l'intégralité de ses demandes, - dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, - condamne la Société DIAC à payer à Monsieur X... Z... la somme de 3.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamne la Société DIAC à payer à Madame Y... A... la somme de 1.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamne la Société DIAC aux dépens.

Le 27 décembre 1996, la Société DIAC a interjeté appel.

Elle soutient que le tribunal ne pouvait annuler le contrat de prêt, souscrit plus de deux ans avant la demande de nullité, en application de l'article L.311-37 du Code de la consommation ; que par ailleurs,

toute livraison anticipée est à la charge du vendeur, lequel n'a pas été appelé en la cause ; que le tribunal ne pouvait donc la tenir pour responsable du non-respect du délai de rétractation.

Concernant le procès-verbal de transaction du 2 août 1995, elle fait grief au tribunal de lui avoir imputé un dol, alors qu'aucune manoeuvre de sa part n'a été caractérisée, la transaction faisant suite à deux courriers de Monsieur X... proposant de régler sa dette.

Elle demande à la Cour de :

- recevoir la Société DIAC en son appel, - l'y déclarer bien fondée, - infirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de NOGENT LE ROTROU le 25 octobre 1996, - dire que le tribunal était forclos conformément à l'article L.311-37 du Code de la consommation pour annuler le contrat de prêt signé par Monsieur X... le 12 janvier 1994, En conséquence, déclarer valable l'acte de prêt, - constater que le comportement de la Société DIAC n'est pas constitutif d'un dol au sens de l'article 1116 du Code civil lors de la signature de la transaction le 2 août 1995, En conséquence, infirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de NOGENT LE ROTROU en ce qu'il a annulé ce protocole d'accord, - condamner Monsieur X... et Madame

Y... au paiement d'une somme de 61.409,40 Francs augmentée des intérêts au taux contractuel du 16 mars 1996, jusqu'au jour du parfait paiement, - condamner Monsieur X... et Madame Y... en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP LAMBERT DEBRAY CHEMIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur X..., assigné et réassigné selon actes signifiés à la mairie de son domicile les 21 mars 1997 et 20 février 1998 n'a pas constitué avoué.

Madame Y... a fait conclure à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de l'appelante aux dépens d'appel, dont le montant sera recouvré directement par la SCP DELCAIRE BOITEAU, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 15 octobre 1998 et l'affaire a été plaidée pour l'appelante à l'audience du 15 décembre 1998, tandis que l'intimée faisait déposer son dossier.

SUR CE, LA COUR,

1) Sur la validité du contrat de prêt,

Considérant qu'il est constant qu'en application de l'article L. 311-37 du code de la consommation, le point de départ du délai de forclusion opposable à l'emprunteur qui conteste la régularité de l'offre préalable, par voie d'action ou d'exception, est la date à laquelle le contrat de crédit est définitivement formé ; que néanmoins, en application de l'article L. 311-21 du même code, l'annulation du contrat de crédit consécutive à celle du contrat principal n'est pas soumise au délai biennal de forclusion ;

Considérant qu'en l'espèce, Monsieur X... a invoqué devant le premier juge, à la fois la nullité du contrat principal de vente

entraînant celle du crédit accessoire, et l'irrégularité de l'offre préalable de prêt ;

Considérant qu'il résulte de l'article L. 311-24 du Code de la consommation que le défaut de demande expresse, rédigée, datée et signée de la main même de l'acheteur entraîne la nullité de la vente en cas de livraison anticipée par rapport à la date d'expiration du délai de rétractation de 3 à 7 jours : que cette circonstance de l'espèce invoquée par Monsieur X... devant le premier juge n'est pas déniée par l'appelante ; que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a, à bon droit, prononcé la nullité du contrat de vente principal et par conséquent, celle du contrat accessoire de prêt et de son acte de cautionnement ;

Considérant que certes, le même article L.311-24 énonce, in fine, que toute livraison ou fourniture anticipée est à la charge du vendeur qui en supporte tous les risques; que l'article L.311-22 précise qu'en cas d'annulation du contrat principal du fait du vendeur, celui-ci pourra être condamné à garantir l'emprunteur du remboursement du prêt ; que cependant, faute d'appel en garantie du vendeur devant le tribunal, ces dispositions n'ont pas à s'appliquer et ce, d'autant plus que la Société DIAC ne réclame pas la répétition des sommes versées à Monsieur X... en vertu du crédit annulé ;

2) Sur la validité du procès-verbal de transaction,

Considérant que cet acte a été signé par la Société DIAC et Monsieur X... le 2 août 1995 ; qu'il a fait suite à deux courriers adressés par celui-ci à la société de crédit, reçus les 1er février et 16 juin 1996, par lesquels il s'engageait à reprendre ses paiements jusqu'à extinction de sa dette ;

Considérant que l'engagement pris par Monsieur X... de rembourser la somme qu'il a reconnu devoir dans l'acte du 2 août 1995 a pour cause le versement à son profit, par la Société DIAC, de la somme de 67.000 Francs, qui a servi à financer l'achat du véhicule ;

Considérant, que c'est donc à tort, que le premier juge a retenu que la cause de l'obligation de Monsieur X... découlant de cet accord transactionnel était sans cause ; que c'est également à tort qu'il retenu que le comportement de la Société DIAC était constitutif de dol, à défaut d'information donnée à Monsieur X... sur la nature de la transaction, alors que le dol ne se présume pas et qu'il résulte des courriers de Monsieur X... que celui-ci a lui-même demandé un aménagement de son obligation, qu'il a commencé à

l'exécuter et, qu'il ne l'a pas contestée, avant la délivrance de l'assignation ;

Considérant que par conséquent, Monsieur X... ayant ainsi reconnu, sans équivoque, sa dette et s'étant valablement engagé à la rembourser, la Société DIAC est fondée à lui réclamer, et à lui seul, le paiement du capital restant dû, soit 55.427,66 Francs, à l'exclusion de l'indemnité de 8 % et des intérêts prévus au contrat de prêt annulé et non précisés dans le procès-verbal de transaction ; que la somme due portera intérêts au taux légal à compter de l'exploit introductif d'instance ; que la Société DIAC sera déboutée de toutes ses demandes à l'encontre de Madame Y... ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort :

ANNULE le contrat principal de vente et le contrat accessoire de crédit et son acte de cautionnement ;

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Société DIAC de toutes ses demandes à l'encontre de Madame Y... ;

INFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

ET STATUANT A NOUVEAU :

DECLARE valable le procès-verbal de transaction du 2 août 1995 ;

CONDAMNE Monsieur X... à payer à la Société DIAC la somme de 55.427,66 Francs (CINQUANTE CINQ MILLE QUATRE CENT VINGT SEPT FRANCS SOIXANTE SIX CENTIMES), avec intérêts au taux légal à compter du 18 avril 1996 ;

DEBOUTE la Société DIAC de ses autres demandes ;

CONDAMNE Monsieur X... à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par les SCP DELCAIRE BOITEAU et LAMBERT DEBRAY CHEMIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Et ont signé le présent arrêt :

Le Greffier,

Le Président,

Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-595
Date de la décision : 29/01/1999

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Interdépendance du contrat principal et du crédit accessoire - Résolution ou annulation judiciaire du contrat principal - Résolution de plein droit du contrat de crédit

Il résulte de la combinaison des articles L. 311-37 et L. 311-21 du Code de la consommation, que lorsque l'annulation du contrat de crédit est consécutive à celle du contrat principal, l'action en annulation du contrat de crédit n'est pas soumise au délai de forclusion biennal opposable à l'emprunteur qui conteste, par voie d'action ou d'exception, la régularité de l'offre préalable de crédit, lequel court à compter du jour où le contrat de crédit est définitivement formé. Dès lors qu'en application de l'article L. 311-24 du même Code, la livraison anticipée par rapport à la date d'expiration du délai de rétractation, de trois à sept jours, entraîne la nullité de la vente quand elle ne résulte pas d'une demande expresse, rédigée datée et signée de la main même de l'acheteur, c'est à bon droit qu'à défaut d'une telle demande expresse de l'acheteur, le premier juge, saisi d'une double demande tendant, à la fois, à l' annulation du contrat principal et à celle du contrat de crédit, du chef de l'irrégularité de l'offre préalable, prononce la nullité du contrat de vente principal et par conséquent, celle du contrat accessoire de prêt et de son acte de cautionnement


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-01-29;1997.595 ?
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