La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/01/1999 | FRANCE | N°1996-8732

France | France, Cour d'appel de Versailles, 22 janvier 1999, 1996-8732


FAITS ET PROCEDURE,

Suivant acte sous seing privé en date du 30 juin 1980, Madame X... a donné en location à Mademoiselle Y... un appartement situé à MONTROUGE ....

Par acte du 18 décembre 1991, Madame X... a fait délivrer à sa locataire un congé pour vendre, pour le 30 juin 1992.

Le 17 décembre 1992, Madame X... a fait assigner Mademoiselle Y... devant le tribunal d'instance d'ANTONY, afin de voir valider le congé du 18 décembre 1991, ordonner son expulsion et obtenir sa condamnation à lui payer les sommes de 1.000 Francs à titre de dommages-intérêts et

de 3.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure c...

FAITS ET PROCEDURE,

Suivant acte sous seing privé en date du 30 juin 1980, Madame X... a donné en location à Mademoiselle Y... un appartement situé à MONTROUGE ....

Par acte du 18 décembre 1991, Madame X... a fait délivrer à sa locataire un congé pour vendre, pour le 30 juin 1992.

Le 17 décembre 1992, Madame X... a fait assigner Mademoiselle Y... devant le tribunal d'instance d'ANTONY, afin de voir valider le congé du 18 décembre 1991, ordonner son expulsion et obtenir sa condamnation à lui payer les sommes de 1.000 Francs à titre de dommages-intérêts et de 3.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'une indemnité d'occupation égale à deux fois le montant du loyer, charges en sus, à compter du 1er juillet 1992 et ce, avec le bénéfice de l'exécution provisoire.

Mademoiselle Y..., concluant à l'application de la loi du 1er septembre 1948 au bail litigieux, a sollicité la désignation d'un expert afin de déterminer le montant du loyer légal et celui des loyers trop-perçus sur trois ans, afin que la restitution en soit ordonnée. Elle a également demandé au tribunal d'annuler le congé délivré et de condamner Madame X... à lui payer la somme de 3.000

Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Madame X... a répliqué que Mademoiselle Y... n'avait jamais remis en cause le contrat de location conclu au visa de l'article 3 quinquiès de la loi du 1er septembre 1948 et avait de ce fait renoncé à se prévaloir des dispositions de cette loi.

Par jugement avant-dire-droit en date du 7 juin 1993, le tribunal a ordonné une mesure d'expertise confiée à Monsieur Z.... L'expert a déposé son rapport le 7 juin 1994.

Madame X... en a contesté les conclusions en ce qu'il a classé le local en catégorie 3A alors que le classement en catégorie 2C était envisageable.

Mademoiselle Y... a sollicité l'entérinement des conclusions de ce rapport, la suspension du contrat en cours et la condamnation de Madame X... à lui payer les sommes de 50.318,28 Francs au titre du trop-perçu de loyers et de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 23 janvier 1995, le tribunal d'instance d'ANTONY a rendu la décision suivante :

- déboute Madame X... A... de l'ensemble de ses demandes, - entérine le rapport d'expertise de Monsieur Z..., - constate que le bail conclu entre les parties le 30 juin 1980 est soumis aux dispositions de la loi du 1er septembre 1948, - fixe à la somme de 338,30 Francs le loyer mensuel, hors charge dû par Mademoiselle DEBAT B... à compter du 17 décembre 1989 (local de catégorie 3A), et à la somme de 629,86 Francs, le loyer mensuel dû à compter du 1er janvier 1993 (local de catégorie 2C), - condamne Madame X... A... à rembourser à Mademoiselle Y... la somme de 50.318,28 Francs au titre d'un trop-perçu de loyers et droit au bail entre le 17 décembre 1989 et le 30 avril 1994, - ordonne l'exécution provisoire du présent jugement, - condamne Madame X... A... à payer à Mademoiselle Y... la somme de 1.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - déboute Mademoiselle Y... B... du surplus de sa demande, - condamne Madame X... A... aux dépens.

Le 18 octobre 1996, Madame X... a interjeté appel.

A titre principal, elle soutient que la loi du 1er septembre 1948

n'est pas applicable, en raison de la renonciation de la locataire à s'en prévaloir ; que celle-ci est déchue du droit au maintien dans les lieux, car elle s'est abstenue de régler les loyers fixés contractuellement dès réception de l'assignation en validation de congé et a ensuite quitté subrepticement les lieux, sans laisser ses nouvelles coordonnées.

A titre subsidiaire, elle fait valoir qu'il y a lieu à réduction des sommes allouées à Mademoiselle Y... au titre du trop-perçu de loyers ; qu'en effet, le logement doit être classé en catégorie 2C et non 3A ; que par ailleurs, la locataire n'a formulé sa demande de restitution des loyers que par conclusions le 18 février 1993, de sorte que le compte entre les parties a pour point de départ le 18 février 1990 et non le 17 décembre 1989, ainsi qu'il a été retenu par l'expert et le premier juge.

Elle demande à la Cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions, - débouter Mademoiselle Y... de toutes ses demandes Et statuant à nouveau, - dire et juger que Mademoiselle Y... a tacitement renoncé à se prévaloir de l'application de la loi de 1948 pour son contrat de location conclu le 30 juin 1980 avec Madame X..., - dire et juger que Mademoiselle Y... était, en tout état de cause, déchue de son droit au maintien dans les lieux à compter du mois de septembre 1992

pour défaut de paiement des loyers et non-occupation, à titre personnel des lieux, Subsidiairement, - dire que l'appartement sis ... à MONTROUGE est soumis à la catégorie IIC, - dire que le trop-versé par Mademoiselle Y... est de 39.250,51 Francs, - condamner Mademoiselle Y... en tous les dépens de première instance et d'appel lesquels seront recouvrés par Maître TREYNET, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Mademoiselle Y..., assignée selon procès-verbal de recherches infructueuses en date du 1er avril 1997, n'a pas constitué avoué.

L'ordonnance de clôture a été signée le 15 octobre 1998 et l'affaire a été plaidée pour l'appelante à l'audience du 8 décembre 1998.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que le bail d'habitation du 30 juin 1980 a été conclu au visa des articles 3bis et 3 quinquiès de la loi du 1er septembre 1948 ; qu'il y est expressément mentionné qu'afin de "garantir l'existence des conditions de confort exigées par les articles 2 et 3 du décret du 22 août 1978 et conformément à l'article 4 dudit décret", est annexé au bail un constat d'huissier établi le 2 juillet 1980 ;

Considérant que pendant la durée de ce bail initial, fixée à 6 ans, Mademoiselle Y... a exécuté ses obligations de locataire telles que fixées contractuellement, sans émettre aucune protestation ni réserve quant à l'état des lieux, ni à fortiori quant à la régularité du bail dérogatoire ; que le bail s'est ainsi renouvelé tacitement à la date du 30 juin 1986 ; que se sont alors appliquées de plein droit les dispositions de l'article 3 sexiès de la loi du 1er septembre 1948, (lequel n'a été abrogé que par la loi postérieure du 23 décembre 1986), ainsi que celles de l'article 77 de la loi du 22 juin 1982 ; qu'en vertu de l'article 3 sexiès, le local n'était donc plus soumis aux dispositions de la loi du 1er septembre 1948 ; qu'il n'y avait donc pas lieu, en principe, à application des dispositions transitoires des articles 25 et suivants de la loi du 23 décembre 1986 ;

Considérant que, pour établir l'irrégularité du bail dérogatoire à la loi du 1er septembre 1948, il aurait donc fallu établir la non conformité des locaux lors de la conclusion du contrat (et de son

renouvellement le 30 juin 1986) aux conditions prévues par le décret pris en application de l'article 3 sexiès, à savoir celui du 22 août 1978 ;

Considérant que dans la mission impartie à l'expert par le jugement avant-dire-droit du 7 juin 1993, il est indiqué qu'il devra vérifier si le logement en cause répond aux conditions requises par le décret du 6 mars 1987 ayant abrogé le décret du 22 août 1978, alors que s'agissant d'un bail 3 sexiès en cours, ce sont les dispositions de ce décret en vigueur lors du bail et du renouvellement qui auraient dû s'appliquer ; que l'expert a répondu aux questions qui lui étaient posées et n'a pas vérifié la conformité des locaux lors de la conclusion du contrat et de son renouvellement aux conditions prévues par le décret du 22 août 1978 ; qu'il a retenu deux éléments de non conformité aux normes énoncées par le décret du 6 mars 1987, une aération et surtout un éclairement non suffisants de la chambre, ainsi que l'absence d'ouvrant ou de système d'évacuation débouchant à l'extérieur du bâtiment dans la salle de bains ;

Considérant que néanmoins, les deux décrets diffèrent sur certains points ; qu'en particulier, le décret du 6 mars 1987 exige que toute pièce d'habitation soit pourvue d'un ouvrant donnant à l'extérieur du bâtiment permettant une aération et un éclairement suffisants, alors que le décret antérieur ne visait qu'une aération satisfaisante ; que ce point correspond précisément à l'une des non conformités relevées par l'expert; que de même, l'expert n'a pas vérifié la conformité du

système d'évacuation de la salle de bains par rapport aux conditions moins strictes du décret du 22 août 1978 ;

Considérant que, par conséquent, à défaut d'examen de la régularité du bail litigieux par rapport aux dispositions légales et réglementaires qui lui étaient applicables, c'est à tort que le premier juge s'est appuyé sur les constatations de l'expert pour dire qu'il était resté soumis aux dispositions de la loi du 1er septembre 1948 ;

Considérant enfin que, par ailleurs, et surtout, le premier juge n'a pas statué sur l'éventuelle renonciation de la locataire à se prévaloir des dispositions de la loi du 1er septembre 1948, alors que ce moyen avait été clairement invoqué devant lui par la bailleresse ; qu'effectivement, Madame Y... a laissé le bail initial s'écouler et se renouveler, a accepté le montant du loyer et ses augmentations contractuelles annuelles, sans jamais émettre de réclamations ni de protestations, quant aux conditions d'habitabilité et de confort du logement, notamment en ce qui concerne le système d'évacuation ; que ce n'est que lorsqu'elle a été assignée en validité de congé qu'elle s'est prévalue pour la première fois, d'une prétendue irrégularité du bail dérogatoire ; que tout au long de l'exécution régulière du bail, et jusqu'à son assignation, la locataire a ainsi, par des actes positifs, manifesté d'une manière certaine et non équivoque, sa volonté de renoncer à se prévaloir de cette prétendue irrégularité, d'ailleurs non démontrée et partant, des dispositions de la loi du

1er septembre 1948 ;

Considérant que, par conséquent, la cour infirme le jugement déféré en ce qu'il a constaté que le bail était soumis aux dispositions de cette loi et a fixé le loyer en s'y référant ; que la cour déboute Mademoiselle Y... de sa demande de restitution d'un trop-perçu de loyers et de ses autres demandes ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort :

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

ET STATUANT A NOUVEAU :

DIT que le bail litigieux n'était pas soumis aux dispositions de la loi du 1er septembre 1948 ;

DEBOUTE Mademoiselle Y... de toutes ses demandes ;

LA CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par Maître TREYNET, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Et ont signé le présent arrêt :

Le Greffier,

Le Président,

Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-8732
Date de la décision : 22/01/1999

Analyses

BAIL A LOYER (loi du 1er septembre 1948)


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-01-22;1996.8732 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award