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14/01/1999 | FRANCE | N°1999-576P

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14 janvier 1999, 1999-576P


DÉCISION La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant: RAPPEL DES FAITS Le 27 août 1997, NA Sénateur Maire de la Commune de M. a fait citer directement devant le Tribunal correctionnel de VERSAILLES EV en sa qualité de responsable de l'édition d'un tract intitulé " Ecole : les leçons d'instruction incivique du maire de la commune ". Dans sa citation il exposait que ce document non signé à l'en tête de l'association O dont le président était EV avait été largement publié et diffusé le samedi 7 juin 1997 dans les boi

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DÉCISION La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant: RAPPEL DES FAITS Le 27 août 1997, NA Sénateur Maire de la Commune de M. a fait citer directement devant le Tribunal correctionnel de VERSAILLES EV en sa qualité de responsable de l'édition d'un tract intitulé " Ecole : les leçons d'instruction incivique du maire de la commune ". Dans sa citation il exposait que ce document non signé à l'en tête de l'association O dont le président était EV avait été largement publié et diffusé le samedi 7 juin 1997 dans les boites aux lettres de la commune, sur les pare-brise des véhicules en stationnement, et par distribution devant l'école, lors de la manifestation du même jour. L'article incriminé était ainsi rédigé " La décision par la Mairie de fermer l'Ecole s'est accompagnée d'une incroyable série d'irrégularités, de dissimulations et de manipulations : " " Mépris des acteurs de l'Ecole " " Outre les enfants et les maîtres, ATSEM, animateurs et parents n'ont jamais été pris en compte, consultés. Toutes les décisions ont été prises à la hussarde; plaçant enseignants et parents devant le fait accompli, dans la volonté de réduire les uns et les autres à l'impuissance " " Mépris de la loi sur les collectivités territoriales " " Refus de donner la parole aux conseillers municipaux d'opposition et même d'appeler leur vote sur la délibération proposée " " Mépris par le pouvoir local des règles à lui même édictées " " Commissions Municipales dédaignées. Mépris aussi du droit des élus d'opposition à prendre connaissance des dossiers suffisamment de temps avant le conseil municipal pour les approfondir " Estimant que le contenu de ce tract portait atteinte à son honneur et à sa considération, NA demandait au Tribunal de déclarer EV, en sa qualité de responsable de la publication, coupable du délit de diffamation envers lui même Sénateur-Maire de M. citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public, par application des

articles 23, 29 alinéa 1, 30, 31, 42, 43 et 48 de la loi du 29 juillet 1881. Il demandait au Tribunal de condamner EV à lui payer la somme de 50.000 francs à titre de dommages intérêts, d'ordonner la publication aux frais de ce dernier dans les journaux, le Figaro, le Monde, le Parisien "éditions Yvelines", et les Nouvelles de VERSAILLES, du jugement à intervenir, de condamner en outre EV à lui payer la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, et aux entiers dépens. C'est dans ces conditions qu'a été rendu le jugement frappé d'appel. Devant la Cour, NA, seul appelant, est comparant et assisté de son conseil. Il demande à la Cour dans ses conclusions écrites : - de dire réunis à l'encontre d'EV les éléments constitutifs du délit de diffamation envers un citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public, en imprimant le tract précité ; - de constater que le Ministère Public n'ayant pas interjeté appel du jugement déféré l'action publique se trouve éteinte. Il ne reprend pas ses demandes formulées devant le Tribunal quant aux dommages intérêts, limitant ceux-ci à la somme de 1 franc et abandonne ses demandes relatives la publication dans la presse. Il sollicite en outre une indemnité de 8.000 francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. EV, non appelant, est comparant et assisté de son conseil et demande la confirmation de la décision entreprise. Il reprend les motifs déjà développés devant les premiers juges: 1° NA ne serait pas habilité par la commune à agir en justice alors qu'il agit "Es qualités de sénateur-Maire de M. "; dés lors la citation directe serait entachée de nullité. 2° S'il est effectivement le président de l'association O, il n'a pris aucune part active et personnelle à la rédaction et à la diffusion du tract et ne peut en cette seule qualité être considéré comme responsable de l'édition au sens de l'article 42 de la loi du 29 Juillet 1881; 3° Le tract critiqué ne comprend aucun

propos diffamatoire ; Il reprend sa demande d'indemnisation à hauteur de 60.000 francs sur le fondement de l'article 472 du Code de procédure pénale pour abus de constitution de partie civile. MOTIFS DE LA DÉCISION Considérant que l'appel interjeté dans les formes et délais légaux, est recevable ; Considérant qu'il résulte de la lecture de la citation devant le Tribunal correctionnel d' EV par NA que les dommages intérêts demandés l'étaient bien pour son propre compte; que rien n'indique dans la citation que NA ait entendu agir au nom de la commune; qu'au contraire il apparaît agir en sa qualité de Sénateur Maire de la Commune de M. et donc en tant que citoyen chargé d'un mandat public; que par voie de conséquence la citation n'était entachée d'aucune nullité en raison du défaut d'habilitation donné par la commune à NA pour agir dans cette affaire précise en son nom ; Considérant que la partie civile, estimant le délit de diffamation constitué, a agi à l'encontre d'EV notamment sur le fondement de l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881 en tant que Président de l'association O et par voie de conséquence " responsable de la publication du tract et de sa distribution " ; Considérant que les dispositions de l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881 sont d'interprétation stricte; qu'elles énumèrent les directeurs de publications, à défaut les auteurs, à défaut les imprimeurs, à défaut les vendeurs distributeurs et afficheurs; que cette énumération est limitative ; Considérant qu'en l'espèce, EV, en tant que président de l'association O, ne peut en cette seule qualité être considéré comme entrant dans l'énumération de l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881 sauf à démontrer sa participation effective et personnelle et de quelque manière que ce soit à la confection, à l'impression ou la distribution dudit tract ; Considérant que cette preuve est d'autant moins rapportée qu'il est établi par l'audition en qualité de témoin et sous serment de Monsieur X... à l'audience du Tribunal que la

rédaction l'impression et la diffusion du tract ont été réalisées sans le concours ni l'information d'EV ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les éléments constitutifs du délit de diffamation ne sont pas réunis à l'encontre d'EV ; qu'il convient en conséquence comme l'ont fait les premiers juges de débouter NA de sa demande de dommages intérêts ; Considérant que le jugement est définitif en ce qu'il a rejeté la demande d'EV au titre de l'article 472 du Code de procédure pénale ; Considérant que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; PAR CES MOTIFS La Cour statuant publiquement et contradictoirement EN LA FORME, Déclare l'appel recevable; AU FOND, Sur l'action civile ; Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ; Condamne NA aux entiers dépens de l'instance civile ; Déboute les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires. Et ont signé le présent arrêt Monsieur Y..., conseiller pour le Président empêché et Madame Z..., F.F Greffier. LE GREFFIER,

P/LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1999-576P
Date de la décision : 14/01/1999

Analyses

PRESSE - Responsabilité pénale - Editeur - Président d'une association - /

Dès lors que l'article 42 de la loi du 29 juillet 1881, relative à la liberté de la presse, énumère limitativement les directeurs de publication, à défaut les auteurs, à défaut les imprimeurs, à défaut les vendeurs, distributeurs et afficheurs, comme passibles, en qualité d'"auteurs principaux", des délits de presse prévus par la loi, et que ces dispositions sont d'interprétation stricte, la poursuite du président d'une association signataire d'un tract, en cette seule qualité, n'entre pas dans les prévisions de l'article 42 précité, sauf à démontrer que l'intéressé a participé effectivement et personnellement et de quelque manière que ce soit, à la confection, à l'impression ou à la distribution dudit tract


Références :

Loi du 29 juillet 1881, article 42

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-01-14;1999.576p ?
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