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08/01/1999 | FRANCE | N°1997-424

France | France, Cour d'appel de Versailles, 08 janvier 1999, 1997-424


FAITS ET PROCEDURE :

Le 07 septembre 1994, Monsieur X... a signé avec la société FRANCE TERRE un contrat de réservation portant sur l'acquisition d'une parcelle à bâtir dans le lotissement "Les Hauts des Grands Champs" à MONCHY SAINT ELOI (OISE).

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 08 octobre 1994, Monsieur X... a demandé à la société FRANCE TERRE l'annulation du contrat et le remboursement de la somme de 10.000 francs, ce que la société a refusé par lettre du 23 octobre 1994, au motif que le délai de rétractation était expiré.
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FAITS ET PROCEDURE :

Le 07 septembre 1994, Monsieur X... a signé avec la société FRANCE TERRE un contrat de réservation portant sur l'acquisition d'une parcelle à bâtir dans le lotissement "Les Hauts des Grands Champs" à MONCHY SAINT ELOI (OISE).

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 08 octobre 1994, Monsieur X... a demandé à la société FRANCE TERRE l'annulation du contrat et le remboursement de la somme de 10.000 francs, ce que la société a refusé par lettre du 23 octobre 1994, au motif que le délai de rétractation était expiré.

Le 05 avril 1996, Monsieur X... a fait assigner la société FRANCE TERRE devant le tribunal d'instance de VANVES, afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 15.000 francs à titre de dommages-intérêts pour manquement à ses obligations d'information et de conseil en ayant omis de lui préciser, conformément à la loi du 26 juillet 1993 (article L.113.3 du code de la consommation), l'existence du délai de rétractation de l'article 20 de la loi du 31 décembre 1989 et celle de 4.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société FRANCE TERRE a répliqué qu'elle avait parfaitement respecté les termes du contrat, qu'elle n'avait pas à préciser dans celui-ci la faculté de rétractation dans les 7 jours et que l'article L. 113.3 du code de la consommation n'était pas applicable aux ventes de terrains à construire. Elle a conclu au rejet des demandes de

Monsieur X... et reconventionnellement, a réclamé 4.000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par jugement en date du 21 novembre 1996, le tribunal d'instance de VANVES a rendu la décision suivante : - condamne la société FRANCE TERRE à payer à Monsieur X... une somme de 10.000 francs à titre de dommages et intérêts avec intérêts légaux à compter du 05 avril 1996, - condamne la société FRANCE TERRE à payer à Monsieur X... la somme de 4.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - déboute FRANCE TERRE de toutes ses demandes, - déboute Monsieur X... de sa demande d'exécution provisoire, - condamne la société FRANCE TERRE aux dépens.

Le 10 janvier 1997, la société FRANCE TERRE a interjeté appel.

Elle soutient qu'elle-même a satisfait à ses propres obligations contractuelles, alors qu'il appartenait à Monsieur X... de dénoncer le contrat dans les 7 jours et avant le 25 septembre 1994, de sorte qu'il est seul responsable de l'inexécution du contrat; que Monsieur X..., qui a déclaré percevoir un salaire mensuel net de 9.800 francs lors de la signature du contrat, a indiqué dans sa lettre de résiliation qu'en réalité, il ne gagnait que 7.800 francs par mois ; qu'il n'a jamais déposé de dossier de financement auprès d'un organisme financier et n'a jamais eu aucune intention de donner suite au contrat de réservation du 7 septembre 1994 ; qu'enfin, contrairement à ce que prétend l'intimé, la restitution du dépôt de garantie n'était pas automatique du simple fait de la rétractation.

Elle demande à la Cour de : - la recevoir en son appel et l'y déclarant bien fondée, Y faisant droit, - infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, - et statuant à nouveau, - condamner Monsieur X... à lui payer la somme de 7.000 francs en vertu des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamner Monsieur X... en tous les dépens et dire qu'ils pourront être recouvrés directement par la SCP BOMMART-MINAULT, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Monsieur X... répond que la société FRANCE TERRE ne conteste donc pas avoir omis de lui indiquer qu'il bénéficiait d'un délai légal de rétractation de 7 jours ; qu'elle a ainsi manqué à son obligation générale d'information et de conseil du consommateur profane ; qu'il importe peu de s'attacher aux raisons qui ont pu le conduire à se désister de son engagement, puisque l'article 20 de la loi de la loi du 31 décembre 1989 ne prévoit aucune autre condition de mise en oeuvre du délai de rétractation que le délai dans lequel il doit être exercé ; que l'exercice du droit de rétractation emporte nécessairement restitution du dépôt de garantie, puisque le consommateur fait ainsi échec à la formation du contrat ; qu'en tout état de cause, il n'a commis aucune fausse déclaration concernant ses revenus, quand bien même cette circonstance est étrangère au litige; que le défaut d'information par l'appelante lui a causé un préjudice financier, puisqu'il est privé depuis 3 ans de la somme de 10.000 francs, ce qui a pesé sur le budget familial alimenté par son seul salaire, alors qu'il a un enfant à charge.

Il demande à la Cour de : - dire la société FRANCE TERRE irrecevable

et en tout cas mal fondée en son appel, - la débouter de ses demandes, fins et conclusions, - confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a constaté que la société FRANCE TERRE a manqué à son obligation d'information et ainsi retenu le principe de sa responsabilité, - recevoir Monsieur X... en son appel incident, - l'y dire bien fondé, - y faisant droit, infirmer la décision entreprise du chef du quantum des condamnations prononcées à l'encontre de la société FRANCE TERRE, - et statuant à nouveau : condamner la société FRANCE TERRE à payer à Monsieur X... la somme de 15.000 francs à titre de dommages et intérêts au taux légal à compter du 05 avril 1996, - condamner la société FRANCE TERRE à payer au concluant la somme de 8.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au titre des frais irrépétibles, - la condamner enfin aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué pour ceux la concernant par la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL, société titulaire d'un office d'avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 15 octobre 1998 et l'affaire a été plaidée le 27 novembre 1998.

SUR CE LA COUR :

Considérant que la société FRANCE TERRE indique dans ses écritures qu'elle serait actuellement dénommée AFL, mais sans s'expliquer davantage sur ce point et sans en justifier ;

Considérant, ainsi que l'a rappelé le premier juge, que l'article 20 de la loi du 31 décembre 1989 énonce que "Tout acte sous seing privé ayant pour objet l'acquisition ou la construction d'un immeuble neuf d'habitation, la souscription de parts donnant vocation à l'attribution en jouissance ou en propriété d'immeubles neufs d'habitation, les contrats préliminaires de ventes d'immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, ne devient définitif qu'au terme d'un délai de 7 jours pendant lequel l'acquéreur non professionnel a la faculté de se rétracter, chaque fois que la loi ne lui donne pas un délai plus long pour exercer cette faculté" ;

Considérant que dans l'hypothèse d'une rétractation faite dans le délai légal, l'acquéreur n'a pas à motiver celle-ci ; qu'alors, le contrat ne se forme pas, de sorte qu'aucune de ses dispositions ne peut s'appliquer; que les sommes versées à titre d'acompte doivent être restituées, leur versement devenant sans cause du fait de la non formation du contrat ;

Considérant qu'il est constant que Monsieur X..., signataire d'un contrat de réservation pour l'achat d'une parcelle de terrain à bâtir, devait bénéficier de cette faculté de rétractation sans autre

condition que celle du délai pour l'exercer; que même si la loi du 31 décembre 1989 ne précise pas que ce court délai de rétractation doit figurer expressément dans les contrats visés, il n'en demeure pas moins, ainsi que l'a relevé le premier juge, qu'il est de droit constant que le vendeur d'un terrain, professionnel de l'immobilier comme l'est la société venderesse, est tenu d'une obligation générale de conseil et d'information envers l'acheteur non professionnel ;

Considérant que l'appelante ne prétend ni ne démontre avoir informé Monsieur X... de cette faculté de rétractation sans condition; qu'à défaut de l'avoir fait dans le contrat de réservation signé le 7 septembre, elle aurait dû le faire dans son courrier accompagnant l'envoi, recommandé avec accusé de réception, de l'original du contrat conformément à la loi ; qu'au contraire, dans ce courrier, elle demande seulement à Monsieur X... de lui communiquer les coordonnées de l'organisme bancaire choisi par lui pour le prêt et ce, avant le 25 septembre 1994 ; que cette omission est d'autant plus fautive que le contrat précisait en son article 7 intitulé "Durée" "3 mois à compter des présentes, soit au plus tard le 7 décembre 1994", termes dont l'ambigu'té doit s'interpréter en faveur de l'acquéreur non professionnel, ainsi que l'a retenu le premier juge ;

Considérant que par ailleurs, l'appelante ne démontre pas la mauvaise foi de Monsieur X..., dont les déclarations de revenus lors de la signature du contrat correspondaient à ses fiches de paye concomitantes ; qu'en tout état de cause, du fait du manquement de la société FRANCE TERRE à son obligation contractuelle d'information quant aux conditions légales de formation du contrat, Monsieur X...

n'a pas été mis en mesure d'exercer la faculté de rétractation prévue en sa faveur par une loi d'ordre public ; que le préjudice en résultant pour Monsieur X... a été l'impossibilité de se faire restituer, sans condition, la somme de 10.000 francs versée lors de la signature du contrat; que par conséquent, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société FRANCE TERRE à payer à Monsieur X... la somme de 10.000 francs à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation devant le tribunal, soit le 5 avril 1996 ;

Considérant que Monsieur X... ne rapporte pas la preuve d'un préjudice spécifique, distinct de celui occasionné par le retard dans le paiement déjà réparé par les intérêts de droit ; que la Cour le déboute de sa demande en paiement de dommages et intérêts complémentaires par rapport à ceux alloués par le tribunal ;

Considérant qu'eu égard à l'équité, il y a lieu d'allouer à Monsieur X... la somme de 6.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS ; La COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions;

Et y ajoutant :

DEBOUTE Monsieur X... du surplus de sa demande et la société FRANCE TERRE des fins de toutes ses demandes ;

CONDAMNE la société FRANCE TERRE à payer à Monsieur X... la somme de SIX MILLE FRANCS (6.000 francs) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

LA CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Et ont signé le présent arrêt : Le Greffier,

Le Président, Marie-Hélène EDET.

Alban CHAIX.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-424
Date de la décision : 08/01/1999

Analyses

CONSTRUCTION IMMOBILIERE


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-01-08;1997.424 ?
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