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30/10/1998 | FRANCE | N°1996-7606

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 octobre 1998, 1996-7606


Le 16 novembre 1995, la société FRANCINTERIMAIRE a déposé une requête aux fins de voir pratiquer une saisie-arrêt des rémunérations de Monsieur X... en vertu d'une ordonnance de référé du tribunal de commerce de PARIS du 08 mars 1990, par obtenir le paiement de la somme de 165.095,97 francs en principal intérêts et accesssoires. A l'audience du 15 avril 1995, Monsieur X... a contesté la demande exposant principalement que l'ordonnance précitée n'aurait pas pu valablement intervenir en raison d'un jugement d'ouverture de redressement judiciaire prononcé antérieurement à l'enc

ontre de la société CERB dont il avait avalisé la lettre de change...

Le 16 novembre 1995, la société FRANCINTERIMAIRE a déposé une requête aux fins de voir pratiquer une saisie-arrêt des rémunérations de Monsieur X... en vertu d'une ordonnance de référé du tribunal de commerce de PARIS du 08 mars 1990, par obtenir le paiement de la somme de 165.095,97 francs en principal intérêts et accesssoires. A l'audience du 15 avril 1995, Monsieur X... a contesté la demande exposant principalement que l'ordonnance précitée n'aurait pas pu valablement intervenir en raison d'un jugement d'ouverture de redressement judiciaire prononcé antérieurement à l'encontre de la société CERB dont il avait avalisé la lettre de change. Par jugement contradictoire en date du 03 juin 1996, le tribunal d'instance de PONTOISE a : - dit que la contestation soulevée par Monsieur X... n'était pas fondée, - dit que les intérêts contractuels n'étaient pas dus depuis l e 08 mars 1990, en application de l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 1994, - en conséquence, autorisé la saisie-arrêt sur les rémunérations de Monsieur X... au profit de la société FRANCINTERIMAIRE à hauteur de la somme de 97.776,47 francs, - rejeté la demande pour le surplus, - condamné Monsieur X... aux dépens. Le 15 juillet 1996, Monsieur X... a interjeté appel de cette décision. A l'appui de son appel, Monsieur X... reprend les mêmes arguments que devant le premier juge, notamment concernant les conséquences d'un jugement d'ouverture de redressement judiciaire du 08 mars 1990 et a fait valoir, à titre subsidiaire, que si les formalités de l'article 478 du nouveau code de procédure civile avaient bien été accomplies en ce qui le concerne, il n'en avait pas été de même pour la société CERB et que par conséquent, selon lui, l'ordonnance précitée était devenue caduque envers ladite société et donc pouvait lui être opposée à lui, caution. Par conséquent, il demande à la Cour de : - le recevoir en

ses conclusions d'appel et y faisant droit, - infirmer la décision déférée, en conséquence - dire que la demande de saisie des rémunérations formée par la société FRANCINTERIMAIRE ne pourra prospérer, - la débouter de l'ensemble de ses demandes, - condamner la société FRANCINTERIMAIRE à une indemnité de 4.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par la SCP KEIME ET GUTTIN, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. La société FRANCINTERIMAIRE, quant à elle, fait valoir, concernant la suspension des poursuites, que le tribunal a, à bon droit, rappelé qu'avant la loi du 10 juin 1994 -modifiant l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985- le redressement judiciaire ne suspendait pas les poursuites contre la caution solidaire. Elle expose ensuite que Monsieur X... fait preuve d'une mauvaise foi manifeste en invoquant que l'impossibilité d'accomplir une signification d'une ordonnance en raison de la mise en redressement judiciaire du débiteur principal déchargerait, de fait, les cautions ; qu'en l'espèce l'ordonnance rendue par le tribunal de commerce le 08 mars 1990 tant à l'encontre du débiteur principal que de la caution solidaire, constitue un titre exécutoire à l'encontre de cette dernière. Enfin, elle soutient que le jugement entrepris a, à tort, prononcé l'arrêt du cours des intérêts alors que ceci n'a pas lieu au profit de la caution. Par conséquent, il est demandé à la Cour de : - recevoir la société FRANCINTERIMAIRE en ses écritures, et y faisant droit, - confirmer la décision dont appel quant au rejet de la contestation de Monsieur X... et en ce que la saisie-arrêt de ses rémunérations a été autorisée pour 97.776,47 francs, en principal, - l'infirmer en ce que le jugement dont appel a estimé que la concluante n'avait pas droit aux intérêts sur ces fonds, - et y

substituant, autoriser la saisie précitée également quant aux intérêts au taux contractuel à compter du 08 mars 1990 et étendre d'autant ladite saisie, - débouter Monsieur X... de toutes ses demandes, fins et conclusions s'opposant aux présentes, - condamner Monsieur X... à 8.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre les dépens, lesquels pourront être directement recouvrés par la SCP LAMBERT-DEBRAY-CHEMIN, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. L'ordonnance de clôture a été signée le 17 septembre 1998 et l'affaire plaidée à l'audience du 02 octobre 1998, pour l'appelant.

SUR CE LA COUR : -I- Considérant, en droit, qu'aux termes de l'article L 145-5 du code du travail, la procédure de saisie des rémunérations dues par un employeur est ouverte à tout créancier "muni d'un titre exécutoire constatant sa créance liquide et exigible" ; Considérant que la suspension des poursuites individuelles édictée par l'article 47 de la loi 85-98 du 25 janvier 1985 à l'égard des actions dirigées contre le débiteur, n'empêche pas le créancier d'agir contre d'autres personnes qui ne sont pas dans la même situation, et notamment contre la caution solidaire, et que cette solution de droit est applicable en la présente instance, puisqu'il s'agit d'un cautionnement qui a été souscrit avant la date de publication de la loi du 10 juin 1994 (JORF du 11 juin 1994) ; que Monsieur X... n'est donc pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 (issu de la loi n° 94-475 du 10 juin 1994) qui, désormais, comprend toute action contre les cautions personnelles, personnes physiques ; Considérant que la SARL FRANCINTERIMAIRE, créancière, est donc recevable à agir contre la caution, en vertu d'une ordonnance de référé en date du 08 mars 1990 (condamnant solidairement la société CERB et Monsieur X... à lui payer en principal 91.603,54 francs) et que le

jugement déféré est confirmé en ce qu'il a, à bon droit, retenu que cette ordonnance constituait un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible ; -II- Considérant, par ailleurs, que cette ordonnance de référé du 08 mars 1990, réputée contradictoire, a été signifiée le 04 mai 1990 à Monsieur X... (par acte remis en mairie, conformément aux dispositions des articles 656, 657 et 658 du nouveau code de procédure civile) ; que l'intéressé, à l'égard de qui les poursuites n'étaient pas suspendues, n'est donc pas en droit de prétendre que cette ordonnance, non signifiée à la débitrice puisque la société CERB (alors en redressement judiciaire) serait non avenue à son égard (à lui), et ce en vertu de l'article 478 du nouveau code de procédure civile ; que certes aucune signification de cette ordonnance n'était plus possible à l'encontre de la débitrice principale, en vertu de la suspension des poursuites individuelles édictée par l'article 47 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, mais que les poursuites et actions en paiement demeuraient possibles contre la caution solidaire (non bénéficiaire, alors, de suspensions d'actions et de poursuites) ; que la signification de l'ordonnance qui lui a été personnellement faite, le 04 mai 1990 est donc régulière et qu'elle ne tombe pas sous le coup de la sanction de non-avenu édictée par l'article 478 du nouveau code de procédure civile ; que l'appelant est donc débouté de ce moyen ; Considérant par conséquent que cette ordonnance de référé du 08 mars 1990, régulièrement signifiée à la caution solidaire, le 04 mai 1990, constitue bien un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, au sens de l'article L 145-5 du code du travail alors surtout que cette somme a fait l'objet d'une déclaration entre les mains du représentant des créanciers ; que c'est donc à bon droit que le premier juge l'a retenue à la charge de la caution solidaire pour fonder la saisie des rémunérations qu'il a exactement ordonnée ;

Considérant, quant aux intérêts contractuels réclamés, qu'en application de l'article 55 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 94-475 du 10 juin 1994), applicable en l'espèce, la caution solidaire Monsieur X... n'est pas tenue des intérêts au delà de la date du jugement prononçant le redressement judiciaire du débiteur principal ; que ce redressement judiciaire a été prononcé par jugement du 08 mars 1990 et que c'est donc à bon droit, par une exacte application de l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 (en sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 10 juin 1994), que le premier juge a décidé que les intérêts contractuels n'étaient pas dus après le 08 mars 1990 ; que le jugement est donc confirmé de ce chef ; -III- Considérant que, subsidiairement et en termes généraux, l'appelant sollicite, en dernier, "les plus larges délais de paiement", mais sans formuler la moindre offre de paiement et surtout, pas préciser ni démontrer quelle était sa situation actuelle puisqu'il est constant qu'il n'a rien précisé et qu'il n'a communiqué aucune pièce au sujet de ses revenus et de ses charges, ni à propos de ses déclarations fiscales de revenus et de ses avis d'imposition ; qu'il est donc débouté de ce chef de demande, en vertu des articles 1244-1 à 1244-3 du code civil ; Considérant enfin que, compte tenu de l'équité, l'appelant qui succombe est condamné à payer à la société FRANCINTERIMAIRE la somme de 5.000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS ; La COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ; DEBOUTE Monsieur Gérard X... des fins de son appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ; CONFIRME en son entier le jugement déféré ; Et y ajoutant : CONDAMNE Monsieur X... à payer à l'intimée la somme de CINQ MILLE FRANCS (5.000 francs) en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; LE

CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP d'avoués LAMBERT-DEBRAY-CHEMIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Et ont signé le présent arrêt :

Le Greffier,

Le Président, Marie-Hélène EDET.

Alban CHAIX.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-7606
Date de la décision : 30/10/1998

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Saisie et cession des rémunérations - Conditions - Titre exécutoire.

En vertu de l'article L. 145-5 du Code du travail, la procédure de saisie des rémunérations dues par un employeur est ouverte à tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible. Si en application des articles 47 et 55 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction issue de la loi n° 94-475 du 10 juin 1994, la suspension individuelle des poursuites s'oppose à l'exercice de toute action contre les cautions personnelles, personnes physiques, une caution qui a souscrit son engagement antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1994, dont est issu l'article 55 précité, n'est pas fondée à soulever l'irrecevabilité de l'action dirigée contre elle par le créancier du débiteur principal. Il en résulte que c'est à bon droit que le tribunal d'instance, ordonnant la saisie des rémunérations de la caution, retient qu'une ordonnance de référé, condamnant solidairement le débiteur principal et la caution, constitue un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible

JUGEMENTS ET ARRETS PAR DEFAUT - Décision réputée contradictoire - Signification - Absence de signification dans le délai prescrit par l'article 478 du nouveau Code de procédure civile.

Si, en application de l'article 478 du nouveau Code de procédure civile, le jugement réputé contradictoire qui n'a pas été notifié dans les six mois de la date de son prononcé est non avenu, la caution, à l'égard de laquelle les poursuites ne sont pas suspendues par la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre du débiteur principal, ne peut se prévaloir de l'absence de notification au débiteur principal de la décision la condamnant solidairement avec celui-ci, pour soutenir que la signification qui lui en a été personnellement faite en qualité de caution ne serait pas régulière


Références :

Code du travail 145-5
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 47, art. 55
Loi 94-475 du 10 juin 1994
Nouveau Code de procédure civile 478

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-10-30;1996.7606 ?
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