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08/10/1998 | FRANCE | N°1996-5399

France | France, Cour d'appel de Versailles, 08 octobre 1998, 1996-5399


Monsieur DE X... est locataire d'un local depuis 1986 consenti verbalement par Mademoiselle Y..., aux droits de laquelle se trouve la SCI AVRE 77.

La SCI a entendu se prévaloir du droit de reprise de l'article 15-1 de la loi du 06 juillet 1989 et a fait signifier un congé aux époux DE X... le 09 décembre 1994 pour le 30 juin 1995. Ces derniers ont contesté la validité. Aussi, la SCI les a-t-elle assigné devant le tribunal d'instance de BOULOGNE BILLANCOURT afin de le voir valider et de voir autoriser l'expulsion

Monsieur DE X... a soulevé l'incompétence du tribunal d'i

nstance en revendiquant l'application du statut des baux commerciaux...

Monsieur DE X... est locataire d'un local depuis 1986 consenti verbalement par Mademoiselle Y..., aux droits de laquelle se trouve la SCI AVRE 77.

La SCI a entendu se prévaloir du droit de reprise de l'article 15-1 de la loi du 06 juillet 1989 et a fait signifier un congé aux époux DE X... le 09 décembre 1994 pour le 30 juin 1995. Ces derniers ont contesté la validité. Aussi, la SCI les a-t-elle assigné devant le tribunal d'instance de BOULOGNE BILLANCOURT afin de le voir valider et de voir autoriser l'expulsion

Monsieur DE X... a soulevé l'incompétence du tribunal d'instance en revendiquant l'application du statut des baux commerciaux du décret du 30 septembre 1953.

Par un jugement avant dire droit en date du 07 septembre 1995, le tribunal a ordonné la réouverture des débats afin de permettre aux parties de fournir, contradictoirement, les éléments de faits nécessaires.

Par un jugement du 11 avril 1996, cette juridiction constatant le caractère commercial du bail a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à renvoyer devant le tribunal de grande instance puisque le congé délivré visait les dispositions de la loi du 06 juillet 1989. En outre, il estime que le congé était nul puisque ne s'appliquant pas aux baux commerciaux.

La SCI AVRE 77 a interjeté appel de cette décision et soutient que le bail litigieux est un bail d'habitation. L'argument suivant lequel Monsieur DE X... exerçait depuis son entrée dans les lieux une activité artisanale ne saurait, selon elle, résister à l'examen. Il ressort des faits que Monsieur et Madame DE X... habitent les locaux, qu'une déclaration de travaux effectués par Monsieur DE X... fait état d'une pièce d'habitation supplémentaire. En droit, il n'a pas pu avoir substitution pure et simple d'une affectation

d'habitation à une affectation artisanale domiciliée à cette adresse. Il s'agit d'une activité exercée de manière occulte. D'autre part, il ne saurait y avoir exploitation du fonds par Monsieur DE X..., or il s'agit d'une condition fondamentale de l'application du décret de 1953. L'activité de Monsieur DE X... s'exerce chez ses clients et en tout état de cause, quand bien même le bailleur aurait donné son autorisation pour la transformation de locaux à usage d'habitation, le bail serait nul et de nul effet par application de l'article L 631-7 alinéa 1 du code de la construction.

La SCI AVRE 77 s'estime dès lors bien fondée à solliciter la validation du congé reprise.

A titre subsidiaire, elle sollicite la résiliation du bail pour défaut d'autorisation du bailleur au changement d'affectation et au surplus sur le fondement de l'article L 631-7 alinéa 1 du code de la construction.

En outre, la SCI sollicite l'allocation de 20.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les époux DE X... soulèvent in limine litis le défaut de qualité du gérant de la SCI AVRE 77, certains actes de procédure émanant de Monsieur Z... et d'autres de Madame A....

En second lieu, ils sollicitent l'application du statut des baux commerciaux dès lors que Monsieur DE X... est inscrit au répertoire des métiers. Il dispose d'un titre locatif qui n'est pas discuté et ce dernier revêt une destination artisanale comme en attestent les pièces comptables et fiscales produites.

Au surplus, la location comportant plusieurs pièces, accessoires du local commercial, l'argument que l'appelante, relatif à la déclaration de travaux, n'est pas pertinent.

En conséquence, les époux DE X... soutiennent que le congé délivré est nul car il fait référence à des dispositions inapplicable à

l'espèce.

En outre, ils sollicitent l'allocation de 5.000 francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par des conclusions supplémentaires, les époux DE X... font état du refus de la SCI d'encaisser les loyers. C'est en toute mauvaise foi que la SCI tente de rappeler le paiement des loyers qu'elle désigne à tort "indemnité d'occupation". SUR CE LA COUR

* Sur la nature du bail

Attendu que le bail dont bénéficient les époux DE X... est seulement verbal ; qu'ils se prévalent du caractère commercial qu'aurait celui-ci ; qu'il leur appartient d'en apporter la preuve ;

Attendu que Mademoiselle Y..., qui n'est pas partie à l'instance et qui a consenti le bail litigieux aux époux DE X... n'avoir "jamais fait de bail commercial que ce soit écrit ou verbal à Monsieur B... DE X... et à aucun membre de sa famille" ;

Attendu que la SCI AVRE 77 justifie que les loyers étaient payés par chèque tirés sur le compte de "Monsieur ou Madame DE X... B..." ; qu'en 1986, les époux DE X... ont demandé à leur bailleresse, Mademoiselle Y..., l'autorisation "d'agrandir (leur) logement du fait qu'il(s) n'en trouv(aient) pas d'autre", autorisation que celle-ci leur a accordée (pièce n°2) ; que la déclaration de travaux qu'ils ont alors faite portait : "pièce d'habitation supplémentaire, superficie 19,80 m " ;

Attendu qu'il résulte de l'extrait d'inscription de M. DE X... au registre des métiers que celui exerce son activité sans enseigne ou nom commercial ;

Attendu que si les photographies versées aux débats montrent la présence de matériel de travaux entreposé en vrac sur le terrain loué, ce seul matériel n'est nullement révélateur de l'exercice d'une

activité professionnelle ; qu'au contraire, sa relativement faible importance et le peu de soin avec lequel il est entreposé donnent plutôt à penser à un dépôt effectué par un particulier effectuant du bricolage domestique ;

Attendu qu'il résulte de ces éléments que le bailleur n'a pas consenti de bail commercial à Monsieur DE X... et qu'à aucun moment il n'a eu connaissance de ce que celui-ci exercerait une activité artisanale dans les lieux loués ;

Attendu que si l'article 1er du décret du 30 septembre 1953 dispose que les dispositions de ce texte s'appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité notamment par un chef d'une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, la seule immatriculation au répertoire des métiers d'une personne ne confère pas une nature commerciale à un bail qui aurait été consenti dans l'ignorance par le bailleur de cet élément, ce texte ne dérogeant pas, sur ce point, aux règles générales de formation des conventions par la rencontre des volontés et l'affectation des locaux devant s'entendre de celle convenue par la commune intention des parties ;

Attendu qu'il résulte de ces éléments que le bail dont bénéficient les époux DE X... est un bail civil ;

* Sur la validité du congé

Attendu que les époux DE X... font valoir que les différentes pièces versées aux débats manifestent l'existence d'un "problème dé gérance" et un défaut de qualité du gérant de la SCI qui a délivré congé dès lors qu'un acte (le procès-verbal de constat) indique que le gérant de la SCI est Monsieur Z... alors que les actes de procédure et en particulier le congé révèlent que Madame A... est gérante" ;

Attendu que ces allégations sont peu précises mais que la SCI n'y apporte pas de réponse ;

Attendu qu'il est nécessaire à la solution du litige de déterminer si

le congé a été délivré par une personne ayant qualité à le faire ; PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

- Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,

- Dit que le bail dont bénéficient les époux DE X... est un bail civil,

- Avant dire plus ample droit,

- Réouvre les débats et invite les parties à apporter toutes pièces justifiant de la qualité ou de l'absence de qualité de Madame A... à agir au nom de la SCI AVRE 77,

- Réserve les dépens. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR MARON, CONSEILLER ET PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE CONSEILLER FAISANT qui a assisté au prononcé

FONCTION DE PRESIDENT M.T. GENISSEL

F. LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-5399
Date de la décision : 08/10/1998

Analyses

BAIL COMMERCIAL

Si l'article 1er du décret du 30 septembre 1953 prévoit que les dispositions de ce texte s'appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, notamment, par un chef d'entreprise immatriculé au répertoire des métiers, la seule immatriculation du bénéficiaire d'un bail ne peut avoir pour effet de conférer une nature commerciale à un bail consenti dans l'ignorance, par le bailleur, de cet élément, dès lors que ce texte ne déroge pas, sur ce point, aux règles générales de formation des conventions par la rencontre des volontés et que l'affectation des locaux doit s'entendre de celle convenue par la commune intention des parties


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-10-08;1996.5399 ?
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