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02/10/1998 | FRANCE | N°1996-6588

France | France, Cour d'appel de Versailles, 02 octobre 1998, 1996-6588


Suivant acte sous seing privé en date du 22 novembre 1989, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'OISE a consenti à Monsieur et Madame X... une offre préalable de crédit permanent d'un montant de 23.000 Francs.

Le 5 octobre 1995, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'OISE a fait assigner respectivement Monsieur et Madame X..., devant le tribunal d'instance de PONTOISE, afin de les voir condamner à lui payer la somme de 27.895,12 Francs avec intérêts à compter du 10 novembre 1993 et celle de 2.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code

de Procédure Civile.

La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE...

Suivant acte sous seing privé en date du 22 novembre 1989, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'OISE a consenti à Monsieur et Madame X... une offre préalable de crédit permanent d'un montant de 23.000 Francs.

Le 5 octobre 1995, la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'OISE a fait assigner respectivement Monsieur et Madame X..., devant le tribunal d'instance de PONTOISE, afin de les voir condamner à lui payer la somme de 27.895,12 Francs avec intérêts à compter du 10 novembre 1993 et celle de 2.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'OISE a exposé que par jugement du 19 novembre 1992, le tribunal d'instance de BEAUVAIS a mis en place un plan de surendettement en faveur des époux X... ; que ceux-ci s'étant montrés défaillants dans leur obligations de paiement, le même tribunal, par jugement du 18 octobre 1993, a prononcé la caducité de ce plan d'apurement ; qu'elle a adressé une sommation de payer aux débiteurs le 4 février 1994 ; qu'une injonction de payer déposée le 2 février 1994 a fait l'objet d'un rejet au motif que l'adresse des débiteurs était inconnue ; qu'en tout état de cause, deux ans ne sont pas écoulés entre la date à laquelle le tribunal a autorisé la reprise des poursuites et la demande en paiement.

Monsieur et Madame X..., cités régulièrement à la mairie de leur domicile certifié certain, n'ont pas comparu ni fait comparaître pour eux.

Par jugement réputé contradictoire en date du 26 mars 1996, le tribunal d'instance de PONTOISE a rendu la décision suivante :

- condamne Monsieur et Madame Claude X... à payer à la Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'OISE la somme de 26.423,82 Francs étant précisé que l'indemnité légale est réduite à 1 franc, avec intérêts au taux légal à compter du 10 novembre 1993, la déchéance du terme étant intervenue, - déboute la société requérante du surplus de ses demandes, - condamne les défendeurs aux dépens.

Le 9 juillet 1996, Monsieur et Madame X... ont interjeté appel.

Ils reprochent au premier juge une application inexacte des dispositions de l'article L.311-37 du Code de la consommation. Ils soutiennent en effet qu'en cas de règlement judiciaire civil du débiteur, le délai de forclusion prévu par ce texte court à compter du premier incident de paiement non régularisé intervenu après l'adoption du plan et non à compter du jour où le juge constatant la

caducité du plan, autorise la reprise des poursuites ; que par ailleurs, un jugement de redressement judiciaire civil n'empêche pas les créanciers d'agir en paiement contre leur débiteur à seule fin d'obtenir un titre exécutoire ; qu'aucune disposition n'interdit aux créanciers d'introduire une action avant même que le délai de forclusion n'ait commencé à courir.

Ils font valoir qu'en l'espèce, ils n'ont effectué aucun versement suite au jugement mettant en place le plan de remboursement, de sorte que le délai de 2 ans a couru à compter du 19 décembre 1992 jusqu'au 19 décembre 1994 et était expiré à la date de l'assignation. Ils ajoutent que par jugement du 3 décembre 1996, le tribunal d'instance de PONTOISE, dans une instance les opposant au CREDIT UNIVERSEL, a retenu comme point de départ du délai de forclusion le premier incident de paiement intervenu après rééchelonnement de la dette, sans tenir compte de la date du jugement prononçant la caducité du plan.

Ils demandent à la Cour de : - déclarer Monsieur et Madame X... recevables en leur appel, y faire droit et les y dire bien fondés, - infirmer la décision entreprise sauf en ce qu'elle a débouté la société requérante du surplus de ses demandes, Et statuant à nouveau, Vu l'article 311-37 du Code de la consommation : - déclarer la C.R.C.A.M DE L'OISE forclose en son action, - condamner la C.R.C.A.M au paiement de la somme de 3.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner la C.R.C.A.M DE L'OISE en tous les dépens, dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Bernard JOUAS, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE DE L'OISE réplique que le jugement du 19 novembre 1992 établissant le plan d'apurement des dettes des appelants a précisé en son dispositif "qu'il était sursis à toutes voies d'exécution de la part des créanciers pendant la durée du plan d'apurement des dettes, à moins de manquement du débiteur" ; que le juge a, de ce fait, suspendu la liberté individuelle d'action des créanciers que seule une nouvelle décision du juge pouvait leur rendre ; que le point de départ du délai de forclusion est donc bien la décision du juge rendant caduc le plan d'apurement du passif.

Elle demande à la Cour de : - dire et juger les époux X... mal fondés en leur appel, les en débouter, En conséquence, confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré la C.R.C.A.M DE L'OISE recevable en son action, - la confirmer encore en ce qu'elle a condamné les époux X... au paiement de la somme en principal de 26.422,82 Francs, - l'infirmant du chef du montant de la clause pénale, porter celle-ci à la somme contractuellement fixée par les parties, soit 8 % du capital dû, ce qui représente la somme de 1.472,30 Francs, - dire et juger que ces sommes porteront intérêts légaux à compter du 10 novembre 1993, - ordonner la capitalisation des intérêts par application des dispositions de l'article 1154 du Code civil, - condamner les époux X... à régler à la C.R.C.A. DE L'OISE une somme de 6.000 Francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - la condamner en tous les dépens dont le montant sera recouvré par Maître DELCAIRE, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 28 mai 1998 et les dossiers des parties ont été déposés à l'audience du 30 juin 1998.

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L.311-37 du Code de la consommation, dans l'hypothèse d'un réaménagement ou d'un rééchelonnement des échéances impayées, le point de départ du délai de forclusion prévu par l'alinéa premier de ce même article est reporté au premier incident non régularisé après l'adoption du plan conventionnel de redressement ou après décision du juge fixant les modalités du plan judiciaire de redressement ;

Considérant ce texte clair et précis quant au point de départ du délai de forclusion ne souffre aucune interprétation ; qu'en l'espèce, le plan de redressement a été mis en place par un jugement du tribunal d'instance de BEAUVAIS en date du 19 novembre 1992, lequel précisait que les créanciers opéreraient leurs prélèvements dès le prononcé du jugement, exécutoire de plein droit à titre provisoire ; qu'il est indiqué dans les motifs du jugement du même tribunal rendu le 18 octobre 1993 et prononçant la caducité du plan, que le CREDIT AGRICOLE a affirmé, sans être démenti, que le plan n'avait jamais été respecté à son endroit ; qu'en la présente instance, l'intimé ne prétend pas que des règlements auraient été effectués en application du plan de redressement judiciaire ; que le

jugement du 18 octobre 1993 n'a fait que constater la défaillance des débiteurs survenue antérieurement et ne peut avoir eu pour effet de retarder le point de départ du délai de forclusion, fixé par une disposition d'ordre public ;

Considérant qu'en tout état de cause, l'intimée se méprend sur la portée du jugement du 19 novembre 1992, lorsqu'elle prétend qu'il lui interdisait d'engager une action en paiement contre ses débiteurs ; qu'il était en effet indiqué au dispositif de cette décision qu'il était sursis aux voies d'exécution, à moins de manquement du débiteur, sans qu'il soit précisé que ce manquement dût être constaté par une nouvelle décision ; que surtout, ce jugement du 30 août 1993 vise les voies d'exécution, c'est-à-dire les mesures d'exécution tendant au recouvrement forcé des créances et non les actions en justice permettant au créancier d'obtenir un titre exécutoire, que ne leur confère pas le jugement fixant le plan de redressement judiciaire civil ; que certes, le titre exécutoire ainsi obtenu ne peut recevoir exécution pendant la durée d'exécution du plan; que néanmoins, il est de droit constant que de les actions en paiement sont recevables, en raison de l'intérêt pour le créancier à disposer d'une titre qui soit exécutoire dans l'hypothèse de défaillance du débiteur, sans avoir à attendre l'issue d'une procédure engagée postérieurement ;

Considérant que les époux X... n'ont jamais respecté le plan de redressement judiciaire civil mis en place par le jugement du 19

octobre 1992 ; que par conséquent, la date du premier incident de paiement non régularisé doit être fixée au 19 Novembre 1992, de sorte que le délai de forclusion prévu par l'article L.311-37 du Code de la consommation était expiré à la date de l'assignation délivrée par la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE L'OISE le 5 octobre 1995, dont l'action se trouve forclose ; que par conséquent, la Cour constate cette forclusion et infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Considérant qu'il n'apparaît pas contraire à l'équité de laisser à la charge des appelants, les frais irrépétibles de présente instance ; que la Cour les déboute de leur demande sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

ET STATUANT A NOUVEAU :

CONSTATE la forclusion de l'action de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT

AGRICOLE DE L'OISE et DECLARE irrecevable ses demandes ;

DEBOUTE Monsieur et Madame X... de leur demande sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE DE L'OISE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par Maître JOUAS, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Et ont signé le présent arrêt :

Le Greffier,

Le Président,

Marie hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-6588
Date de la décision : 02/10/1998

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Défaillance de l'emprunteur - Action - Délai de forclusion - Point de départ

En application des dispositions claires, précises et non susceptibles d'interprétation de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, le point de départ du délai biennal de forclusion est reporté au premier incident non régularisé après décision du juge fixant les modalités du plan judiciaire de redressement. Le jugement postérieur, prononçant la caducité du plan judiciaire, ne faisant que constater la défaillance du débiteur survenue antérieurement, ne peut avoir pour effet de reporter le point de départ du délai de forclusion biennal. Au surplus, le jugement de redressement judiciaire civil ne conférant pas de titre exécutoire, il est de principe que les actions en paiements demeurent recevables en raison de l'intérêt pour le créancier à disposer d'un titre exécutoire. Le point de départ du délai de forclusion de l'action du créancier se situe donc au jour de la première échéance impayée du plan de redressement, et non au jour du jugement ayant prononcé la caducité du plan


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-10-02;1996.6588 ?
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