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24/09/1998 | FRANCE | N°1997-3340

France | France, Cour d'appel de Versailles, 24 septembre 1998, 1997-3340


Le 10 décembre 1992, la société IBM FRANCE a reçu commande de la société "la Commande Electronique" (ci-après désignée LCE), d'un matériel informatique dont le financement devait être assuré par la société ECONOCOM LOCATION.

Le même jour, IBM FRANCE a accusé réception de cette commande et, par fax du 24 décembre 1992, la société ECONOCOM LOCATION a confirmé son intention de financer l'opération.

Ce matériel a été livré au mois de mars 1993 et par jugement en date du 08 avril 1993, la société LCE a été placée en redressement judiciaire.

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Le 10 décembre 1992, la société IBM FRANCE a reçu commande de la société "la Commande Electronique" (ci-après désignée LCE), d'un matériel informatique dont le financement devait être assuré par la société ECONOCOM LOCATION.

Le même jour, IBM FRANCE a accusé réception de cette commande et, par fax du 24 décembre 1992, la société ECONOCOM LOCATION a confirmé son intention de financer l'opération.

Ce matériel a été livré au mois de mars 1993 et par jugement en date du 08 avril 1993, la société LCE a été placée en redressement judiciaire.

Prétextant un retard de livraison n'ayant pas permis de mettre en place le financement prévu, la société ECONOCOM LOCATION a refusé de régler le prix du matériel.

C'est dans ces conditions que la société IBM FRANCE a saisi d'une action en paiement le Tribunal de Commerce de PARIS dont la compétence a été aussitôt contestée par ECONOCOM LOCATION.

Par jugement en date du 05 octobre 1995, le Tribunal de Commerce de PARIS s'est déclaré compétent et a enjoint la société ECONOCOM LOCATION de conclure au fond.

Sur contredit formé par la société ECONOCOM LOCATION, la Cour d'Appel de PARIS a dit que le litige relevait de la compétence du Tribunal de Commerce de NANTERRE et, par jugement en date du 28 janvier 1997, auquel il est renvoyé pour plus ample exposé des éléments de la cause, cette juridiction a :

- Condamné la société ECONOCOM LOCATION à verser à la société IBM FRANCE la somme de 453.052 francs, majorée des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 1993,

- Débouté la société ECONOCOM LOCATION de l'ensemble de ses prétentions et la société IBM FRANCE de sa demande en dommages et

intérêts.

- Ordonné l'exécution provisoire des dispositions qui précèdent,

- Et condamné la société ECONOCOM LOCATION à payer à la société IBM FRANCE une indemnité de 15.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

*

Appelante de cette décision, la société ECONOCOM LOCATION, reprenant et développant son argumentation de première instance, soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, le contrat de vente ne lui a pas été transféré dans la mesure où la mise en service du matériel n'a pas été effectuée le 1er janvier 1993 comme elle l'avait expressément spécifié dans son fax du 24 décembre 1992. Elle ajoute que, toujours comme elle l'avait précisé dans son fax du 24 décembre 1992, l'ensemble des documents contractuels n'ont pas été régularisés et plus particulièrement que le contrat de transfert de propriété n'a jamais été signé par IBM, comme le prévoit au demeurant expressément les conditions générales de cette société. Elle déduit de là qu'elle ne saurait être tenue aux obligations de LCE.

Subsidiairement, elle relève que la vente n'est pas parfaite dès lors que le délai de livraison n'a pas été respecté et qu'elle n'a pas eu connaissance des documents contractuels avant l'engagement de la présente procédure.

Plus subsidiairement encore, elle fait observer que IBM n'a pas déclaré sa créance, ni mis en oeuvre la clause de réserve de propriété dans le cadre de la procédure collective de LCE, la privant ainsi de toute action subrogatoire, à supposer même la relation contractuelle établie. Elle estime, en conséquence, qu'elle ne peut être que déchargée de toute condamnation "ou que IBM doit être

condamnée à lui payer, en réparation, la somme de 453.052 francs à titre de dommages et intérêts".

Enfin, elle réclame 50.000 francs pour procédure abusive et vexatoire et une indemnité de 20.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

*

La société IBM réfute point par point l'argumentation adverse et conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré, sauf à se voir allouer une indemnité complémentaire de 20.000 francs en couverture des frais qu'elle a été contrainte d'exposer devant la Cour. MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que le contrat de crédit-bail s'analyse en une opération complexe comprenant à la fois un contrat de vente, conclu entre le crédit bailleur et le fournisseur du matériel, et un contrat de location conclu entre le crédit bailleur et le locataire ayant pour objet le même matériel ; qu'il est également d'usage, dans ce type d'opération, que le matériel soit choisi et acheté en vue de la location par le locataire, qui agit au nom et pour le compte du bailleur, dont la fonction est purement financière.

Considérant qu'il apparaît en l'espèce que, conformément au schéma théorique précédemment décrit, la société LCE a, par télécopie du 10 décembre 1992, confirmé auprès de la compagnie IBM FRANCE son intention de commander le matériel litigieux, ce document précisant expressément que "Monsieur X... de Y... (société ECONOCOM) se mettra en rapport avec vous pour ce qui concerne le financement de l'opération d'un montant global de 382 KF" ; que, par fax du même jour, la société IBM FRANCE a accusé réception de cette commande référencé sous le numéro 702.175.88 ; que par télécopie du 24 décembre 1992, la société ECONOCOM a confirmé à IBM son intention

d'acquérir à son nom le matériel pour le compte de la société LCE, ledit fax comprenant en outre les précisions ci-après :

- adresse de livraison ; la commande électronique - La Mare à Jouys Douains - 27120 PACY SUR EURE.

- adresse de facturation : Econocom Location, 42-46 rue Médéric 92110 Clichy.

- date de livraison : pour une date de mise en marche au 1er janvier 1993.

- date de règlement : par chèque à réception de l'ensemble des documents contractuels.

Que le matériel a été livré par IBM, pour partie le 05 janvier 1993 et, pour la partie restante, le 26 janvier 1993 ; que le crédit bailleur (ECONOCOM) a signé le contrat de transfert, dit T01, le 15 février 1993 et le crédit preneur (LCE) le 19 février 1993.

Considérant qu'il suit de ces constatations que, contrairement à ce qui est prétendu par l'appelante, la vente du matériel par IBM à ECONOCOM est parfaite dès lors qu'il y a eu accord des parties (vendeur et acheteur) sur la chose et sur le prix et que, conformément aux prévisions du contrat, le matériel a été délivré à LCE, client d'ECONOCOM ; qu'à cet égard, la société ECONOCOM ne saurait utilement se prévaloir de l'absence de signature par IBM du document de transfert T01 alors que ledit document a été signé d'elle-même et de la société LCE, ce qui suffit à rapporter la preuve de l'adhésion de l'appelante, professionnelle du crédit-bail, à ce document, laquelle adhésion d'ailleurs est dépourvue en l'espèce de toute équivoque dans la mesure où les bons de livraison, signés du client, faxés par IBM à ECONOCOM LOCATION, attestent de la réalité de ladite livraison, qui n'est au demeurant pas contestée.

Que le retard de livraison allégué par l'appelante ne saurait davantage être d'une quelconque influence en la cause ; qu'en effet,

si comme il est prétendu la date de livraison était une condition substantielle de la vente, ou une condition suspensive (ce qui ne résulte en rien de l'analyse des documents produits), l'appelante n'aurait pas opposé son cachet sans réserve sur le bon de transfert. Considérant que les griefs de non déclaration de créance et d'absence de revendication par IBM du matériel après l'ouverture de la procédure collective de la société LCE sont également dépourvus de tout fondement dès lors que la vente était parfaite et la propriété déjà transférée au crédit bailleur à la date du dépôt de bilan du crédit preneur ; que le jugement dont appel qui a fait une juste appréciation des éléments de la cause, ne peut être que confirmé en toutes ses dispositions et la société ECONOCOM LOCATION déboutée de l'ensemble de ses prétentions.

Considérant qu'il serait inéquitable, eu égard à ce qui vient d'être exposé, de laisser à la charge de la société IBM FRANCE les frais qu'elle a été contrainte d'exposer devant la Cour ; que la société ECONOCOM LOCATION sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 8.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ladite indemnité s'ajoutant à celle déjà allouée au même titre par le premier juge.

Considérant enfin que la société appelante, qui succombe, supportera les entiers dépens. PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- REOEOIT la société ECONOCOM LOCATION SA en son appel, mais dit celui-ci mal fondé et l'en déboute,

- CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Y AJOUTANT,

- CONDAMNE la société ECONOCOM LOCATION SA à payer à la société IBM

FRANCE SA une indemnité complémentaire de 8.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- CONDAMNE également la société ECONOCOM LOCATION SA aux entiers dépens et autorise la SCP d'Avoués LAMBERT etamp; DEBRAY etamp; CHEMIN à poursuivre directement le recouvrement de la part la concernant, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT qui a assisté au prononcé M.T. GENISSEL

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-3340
Date de la décision : 24/09/1998

Analyses

CREDIT-BAIL

Un contrat de crédit-bail s'analyse en une opération complexe comprenant à la fois un contrat de vente, conclu entre le crédit bailleur et le fournisseur du matériel, et un contrat de location conclu entre le crédit bailleur et le locataire avec pour objet le même matériel dont il est d'usage qu'il soit choisi et acheté, en vue de la location, par le locataire lui-même agissant au nom et pour le compte du bailleur qui n'assume qu'une fonction purement financière.Dès lors que la vente du matériel est parfaite quand l'accord sur la chose et le prix est intervenu entre le fournisseur du matériel et le crédit bailleur, et que, conformément aux prévisions du contrat, le matériel a été livré au locataire, comme en attestent les bons de livraison signés par ce dernier et transmis par le fournisseur au crédit bailleur, ce professionnel du crédit ne peut se prévaloir utilement de l'absence de signature du contrat de transfert par le fournisseur, document signé sans réserve par lui-même et le locataire, pour soutenir que le transfert de propriété n'avait pas eu lieu et reprocher au fournisseur de ne pas avoir produit à la procédure collective postérieurement ouverte à l'encontre du locataire


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-09-24;1997.3340 ?
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