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18/09/1998 | FRANCE | N°1997-2939

France | France, Cour d'appel de Versailles, 18 septembre 1998, 1997-2939


Monsieur Jean Claude X... s'est, par 3 actes de 1992 et de 1993, porté caution solidaire des prêts consentis par la banque B.R.O. à la société EUROCARTON (contrat d'ouverture de crédit de 195.000 Francs, conclu le 18 mars 1993).

La SARL EUROCARTON a été mise en état de liquidation judiciaire et la banque B.R.O. a déclaré sa créance, puis a obtenu contre la caution une injonction de payer.

Sur opposition à cette injonction, formée par Monsieur X..., le tribunal d'instance de RAMBOUILLET statuant par jugement du 17 décembre 1996, a rendu la décision suivante

:

- reçoit Monsieur X... en son opposition en la forme,

- au fon...

Monsieur Jean Claude X... s'est, par 3 actes de 1992 et de 1993, porté caution solidaire des prêts consentis par la banque B.R.O. à la société EUROCARTON (contrat d'ouverture de crédit de 195.000 Francs, conclu le 18 mars 1993).

La SARL EUROCARTON a été mise en état de liquidation judiciaire et la banque B.R.O. a déclaré sa créance, puis a obtenu contre la caution une injonction de payer.

Sur opposition à cette injonction, formée par Monsieur X..., le tribunal d'instance de RAMBOUILLET statuant par jugement du 17 décembre 1996, a rendu la décision suivante :

- reçoit Monsieur X... en son opposition en la forme,

- au fond, la déclare mal fondée,

Et statuant à nouveau,

- condamne Monsieur X... à payer à la B.R.O. la somme principale de 418.925,75 Francs en deniers ou quittances, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la sommation du 23 juin 1994,

- rejette la demande présentée au titre de l'article 1154 du code civil,

- condamne Monsieur X... à payer à la B.R.O. la somme de 4.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- le condamne aux entiers dépens.

Le 14 mars 1997, Monsieur X... a interjeté appel. Il demande à la Cour de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de RAMBOUILLET le 17 décembre 1996,

- constater l'irrégularité de fond de la déclaration de créance effectuée par la B.R.O. et la déclarer nulle,

- dire que la créance est éteinte et l'acte de caution sans effet,

- en conséquence, débouter la B.R.O. de son action dirigée contre Monsieur X...,

Subsidiairement,

Vu l'article 2037 du code civil,

- constater la perte d'une sûreté par la B.R.O.,

En conséquence,

- dire que la caution doit être dégagée de son engagement,

- très subsidiairement, constater que la B.R.O. a vendu le matériel pour un montant de 45.000 Francs,

Vu le contrat d'assurance,

- donner acte au concluant de ce qu'il se réserve de conclure plus abondamment,

- donner acte de ce que Monsieur X... a saisi la Commission de surendettement d'une demande de recommandation,

- condamner la B.R.O. au paiement de la somme de 5.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, lesquels seront directement recouvrés par la SCP LAMBERT DEBRAY CHEMIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Dans ses écritures du 7 mai 1998 (cote 15 du dossier de la Cour), Monsieur X... indique qu'il aurait obtenu un jugement du juge de l'exécution, du 15 janvier 1998 (mais il n'a pas communiqué cette décision).

La BANQUE REGIONALE DE L'OUEST "B.R.O." demande à la Cour de :

- débouter Monsieur X... de son appel principal,

- l'y déclarer mal fondé,

En conséquence,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a refusé l'anatocisme des intérêts dûs à la B.R.O.,

- déclarer la B.R.O. recevable et bien fondée en son appel incident,

- ordonner la capitalisation des intérêts dûs à la B.R.O. par Monsieur X... à compter du 23 juin 1994, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner Monsieur X... à verser à la B.R.O. la somme de 5.000 Francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés directement par Maître Y..., avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

En réponse, Monsieur X... demande à la Cour, ajoutant à ses précédentes conclusions, de :

- constater que la B.R.O. n'a pas satisfait à la sommation de communiquer l'ensemble des pièces qui lui a été régulièrement faite, le 18 décembre 1997,

- constater que celle-ci n'a pas non plus déféré à cette demande, malgré une itérative injonction de communiquer en date du 2 avril 1998,

- faire injonction à la B.R.O. de produire l'ensemble des conditions générales, ainsi que les conditions spécifiques du contrat d'assurance groupe et échéancier du contrat, qu'elle n'a pas cru devoir communiquer, sous astreinte de 2.000 Francs par jour de retard, à compter de la signification de l'arrêt,

A défaut,

- débouter la B.R.O. de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- constater qu'il y a lieu de décharger la caution en vertu de l'article 2037 du code civil,

Subsidiairement,

- dire que la B.R.O. sera condamnée à payer à Monsieur X... à titre de dommages-intérêts, l'ensemble des sommes qui aurait dû être pris en charge par les assurances, à compter du 21 juin 1994, date à laquelle Madame X... a informé la banque de la maladie de son époux,

Vu la décision rendue par le juge de l'exécution,

- débouter la B.R.O. de toute demande au titre des intérêts,

Subsidiairement,

- prendre acte de ce que la B.R.O. ne sollicite le règlement d'intérêts qu'au taux légal,

- la débouter de sa demande au titre de capitalisation des intérêts,

Très subsidiairement,

- dire que cette capitalisation ne peut intervenir que lorsqu'un délai d'un an s'est écoulé et donc à compter du 25 juin 1995,

- statuer comme précédemment requis sur les dépens.

En outre, l'appelant a sollicité, subsidiairement, les plus larges délais pour payer.

L'ordonnance de clôture a été enfin signée le 4 juin 1998 après 4 reports de cette date, et l'affaire plaidée à l'audience du 19 juin 1998.

SUR CE LA COUR

I) Considérant, en ce qui concerne l'assurance de groupe souscrite auprès de l'assureur le GAN qu'il est certain que c'est Monsieur X..., en tant que caution de l'emprunteur, qui est l'assuré, et que c'est donc à lui qui incombe la charge de donner avis à cet assureur de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de celui-ci, et ce en application de l'article L.113-2-4° du code des assurances ; que de plus, cette déclaration de sinistre doit se faire conformément à ce que prévoient les conditions particulières et les conditions générales de ce contrat d'assurances ;

Considérant qu'il sera d'abord souligné, à cet égard, que la banque B.R.O. n'a procédé, spontanément, à aucune communication de pièces, méconnaissant ainsi les exigences de l'article 132 du nouveau code de procédure civile et que ce n'est qu'à la suite de sommations de communiquer qui lui ont été faites le 18 décembre 1997 et le 2 avril 1998 (cotes 7 et 9 du dossier de la Cour) qu'elle a enfin communiqué certaines pièces ;

Considérant cependant, qu'en l'état de ces pièces communiquées, il apparaît que le bulletin individuel d'admission (du GAN), signé par Monsieur X... le 23 février 1993 et auquel s'attache la force probante prévue par l'article 1322 du code civil, porte la mention suivante :

"Je reconnais avoir reçu un extrait du contrat passé entre le GAN-VIE et la BANQUE REGIONALE DE L'OUEST et en avoir pris connaissance" ;

Considérant que la banque B.R.O. communique une "notice d'information" éditée par le GAN qui a été remise à Monsieur X... - ce que celui-ci ne conteste d'ailleurs pas expressément - cette notice correspond à l'"extrait du contrat" d'assurance dont il a été parlé ci-dessus ; que cette notice, connue donc de l'assuré, précisait en sa dernière page et en ses derniers paragraphes les formalités et les conditions de délais de déclaration de sinistre incombant à l'assuré, ainsi que les pièces nécessaires à produire par celui-ci (article L 311-12 du Codes des assurances) ;

Considérant que l'appelant ne fait état d'aucune déclaration de sinistre qu'il aurait adressée au GAN, dans le délai contractuel de 3 mois , et qu'il se borne à invoquer deux lettres de 1994, l'une envoyée à la B.R.O. le 21 juin 1994, par son épouse, pour signaler qu'il "était hospitalisé depuis avril 1994 pour dépression nerveuse, pour quelques mois encore", et l'autre, du 7 juillet 1994, envoyée par lui à la B.R.O. pour indiquer qu'il était toujours hospitalisé ; qu'il est patent que ces deux courriers ne constituent pas une déclaration de sinistre, telle que prévue par le contrat d'assurance du GAN et que de plus, et en tout état de cause, Monsieur X... n'a jamais attrait dans la cause cet assureur, et qu'il est constant, enfin, qu'il ne lui a jamais adressé les documents médicaux nécessaires ;

Considérant que l'appelant n'est donc pas fondé à prétendre que la banque B.R.O. aurait, selon lui, commis "une faute dans l'absence de mise en oeuvre de l'assurance-groupe", et qu'il est, par conséquent, débouté de ce moyen ;

II) Considérant en ce qui concerne la déclaration de créance faite par la B.R.O., qu'il est constant que celle-ci a été définitivement admise pour un montant de 765.472,22 Francs par le juge-commissaire, le 17 novembre 1995, et que l'appelant n'est donc plus fondé, maintenant, a en contester la régularité, au vague motif, selon lui, que l'auteur de cette déclaration n'aurait pas reçu une délégation de pouvoir pour le faire ; que l'appelant est donc débouté de ses moyens, de ce chef ;

III) Considérant en ce qui concerne les engagements de caution de Monsieur X... et l'application de l'article 2037 du code civil qu'il invoque, qu'il est de droit constant que la caution ne peut être libérée lorsque la subrogation aux droits, privilèges et hypothèques du créancier ne peut plus s'opérer en sa faveur, que si ces garanties existaient antérieurement au contrat de cautionnement ou si le créancier s'était engagé à les prendre ;

Considérant, dans la présente espèce, qu'il est constant - ainsi que le relate l'appelant lui-même dans ses conclusions du 11 juillet 1997 (cote 5 du dossier de la Cour) où il expose toute la chronologie des actes conclus - que Monsieur X... avait signé un engagement de caution solidaire de la société EUROCARTON, dès le 2 mars 1993, à concurrence de 195.000 Francs et un précédent engagement de caution solidaire, dès le 12 décembre 1992, pour un montant de 50.000 Francs, alors que le nantissement sur le matériel au profit de la B.R.O. n'aurait été pris que postérieurement à ces actes de cautionnement ;

Mais considérant que la B.R.O. se borne à indiquer, en termes vagues, que ce n'était qu'à compter du contrat de prêt (qui est du 18 mars 1993), qu'elle aurait "entendu renforcer ces cautionnements par un nantissement de matériel", sans cependant préciser la date et la forme de ce nantissement au sujet duquel elle n'a communiqué aucune pièce ; que de plus, lors de sa déclaration de créance, elle n'a pas fait état de ce nantissement ;

Considérant que là encore, il est regrettable que la banque B.R.O. n'ait pas procédé à une communication spontanée de cet acte de nantissement qu'elle invoque explicitement et qui ne faisait pas partie, semble-t-il, des pièces produites devant le premier juge ; que le moyen de droit soulevé au sujet de cette sûreté, va amener la Cour à se pencher sur la régularité de ce nantissement, au regard des prescriptions de la loi n° 51-59 du 18 janvier 1951 et notamment de ses articles 2 et 3 ;

Considérant que la Cour ordonne donc d'office une réouverture des débats et enjoint à la B.R.O. de communiquer cet acte de nantissement et toutes autres pièces probantes utiles au sujet de cette sûreté et de sa mise en application ; que la Cour sursoit donc à statuer et réserve les dépens ;

IV) Considérant, en outre, que la Cour enjoint à Monsieur X... de communiquer ses déclarations fiscales de revenus et ses avis d'imposition pour les années 1993, 1994, 1995, 1996, 1997 et 1998 et tous documents utiles, d'ordre médical, au sujet de son état de santé actuel ;

Considérant, enfin, qu'il est enjoint à l'appelant de communiquer toutes pièces justificatives utiles au sujet de la procédure qu'il dit avoir engagée devant la commission de surendettement, le 18 décembre 1995, ainsi qu'au sujet de la procédure suivie par lui devant le juge de l'exécution, et notamment un jugement qui aurait été prononcé par ce magistrat, le 15 janvier 1998 ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

I) - CONSTATE que Monsieur Jean Claude X... n'a pas déclaré son sinistre à l'assureur le GAN (article L.113-2-4° du code des assurances) et qu'il ne l'a jamais attrait dans la cause ; DEBOUTE l'appelant de ses moyens, de ce chef ;

II) - DIT ET JUGE que la déclaration de créance faite par la banque B.R.O. a été définitivement admise par le juge-commissaire, le 17 novembre 1995 ; DEBOUTE l'appelant de ses moyens de ce chef ;

III) VU l'article 2037 du code civil :

- SURSOIT à statuer sur les moyens et les demandes fondés sur cet article ;

- ORDONNE une réouverture des débats ;

- ENJOINT à la banque B.R.O. de communiquer l'acte de nantissement dont elle fait état, ainsi que toutes pièces probantes utiles au sujet de cette sûreté et de sa mise en application ;

IV) - ENJOINT à Monsieur X... de communiquer :

* ses déclarations fiscales de revenus et ses avis d'imposition pour les années 1993, 1994, 1995, 1996, 1997 et 1998 et tous documents médicaux utiles au sujet de son état de santé actuel ;

* toutes pièces justificatives utiles au sujet de la procédure qu'il dit avoir engagée devant la commission de surendettement, le 18 décembre 1995, ainsi qu'au sujet de la procédure suivie devant le juge d'exécution (et notamment le jugement de ce magistrat du 15 janvier 1998) ;

- RESERVE les dépens.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER LE PRESIDENT

M-H. EDET A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-2939
Date de la décision : 18/09/1998

Analyses

ASSURANCE DE PERSONNES - Assurance de groupe - Bénéficiaire - Obligations

En application de l'article L. 113-2-4° du Code des assurances c'est à l'assuré qu'incombe la charge de donner avis à l'assureur de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de celui-ci ; de plus, la déclaration de sinistre doit intervenir conformément aux conditions générales et particulières applicables au contrat souscrit. Lorsqu'il résulte du bulletin individuel d'admission à une assurance groupe, assortissant un engagement de caution en faveur d'une banque, que la caution " reconnaît avoir reçu un extrait du contrat passé " entre l'assureur et la banque " et en avoir pris connaissance ", qu'il est établi que la banque à remis à la caution la notice d'information éditée par l'assureur, laquelle précisait les formalités et conditions de délais de déclaration de sinistre incombant à l'assuré ainsi que les pièces à produire, l'assuré n'est pas fondé à prétendre que la banque aurait commis une faute en ne mettant pas en ouvre l'assurance groupe, alors que l'assuré ne fait état d'aucune déclaration de sinistre qu'il aurait adressée à l'assureur dans le délai contractuel, et que, par ailleurs, de simples lettres adressées à la banque pour informer de son hospitalisation ne constituent pas une déclaration de sinistre, telle que prévue par le contrat d'assurance


Références :

Code des assurances, article L. 113-2-4°.

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-09-18;1997.2939 ?
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