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10/09/1998 | FRANCE | N°1996-7640

France | France, Cour d'appel de Versailles, 10 septembre 1998, 1996-7640


Une loterie intitulée "la symphonie des foulards" et une autre intitulée "l'envol des foulards" ont été organisées, respectivement du 15 mars au 16 mai 1994 et du 1er avril au 1er juin 1994, par la société LA REDOUTE CATALOGUE, au profit de ses clients qui pouvaient gagner, à la suite d'un tirage au sort, différents foulards portant les marques suivantes : HERMES, YVES SAINT-LAURENT, LANVIN, GUY LAROCHE, BALMAIN, TORRENTE, et enfin CARTIER.

Par jugement rendu le 25 juin 1996, le tribunal de grande instance de VERSAILLES, statuant sur l'action en contrefaçon de marques et en r

esponsabilité introduite par les sociétés CARTIER et CARTIER IN...

Une loterie intitulée "la symphonie des foulards" et une autre intitulée "l'envol des foulards" ont été organisées, respectivement du 15 mars au 16 mai 1994 et du 1er avril au 1er juin 1994, par la société LA REDOUTE CATALOGUE, au profit de ses clients qui pouvaient gagner, à la suite d'un tirage au sort, différents foulards portant les marques suivantes : HERMES, YVES SAINT-LAURENT, LANVIN, GUY LAROCHE, BALMAIN, TORRENTE, et enfin CARTIER.

Par jugement rendu le 25 juin 1996, le tribunal de grande instance de VERSAILLES, statuant sur l'action en contrefaçon de marques et en responsabilité introduite par les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV à l'encontre de la société anonyme LA REDOUTE CATALOGUE, les a déclarées bien fondées en leur demande en usage illicite de la marque CARTIER, a condamné la société LA REDOUTE CATALOGUE à leur payer la somme de 100.000,00 frs à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l'atteinte portée à la marque, a interdit à la société LA REDOUTE CATALOGUE tout usage des marques CARTIER sous quelque forme que ce soit sous peine d'astreinte de 10.000,00 frs par infraction constatée, et a ordonné la publication des motifs et du dispositif de la décision sur toute la page 3 du catalogue de LA REDOUTE, avec exécution provisoire des mesures d'interdiction et de publication.

Le tribunal a essentiellement retenu que "si le propriétaire d'une marque ne peut pas s'opposer à ce que cette marque soit utilisée pour la commercialisation de ses produits, il est parfaitement fondé à s'opposer à tout usage abusif qui n'entrerait pas dans ce cadre", et que, "en fait, la société LA REDOUTE CATALOGUE s'est rendue coupable

d'un détournement d'usage de marque parfaitement illicite dans le but de promouvoir ses propres produits".

Sur l'appel formé par la société LA REDOUTE CATALOGUE, la cour s'est d'abord trouvée saisie, en l'état des conclusions des parties, de la seule question du renvoi de l'affaire devant la cour d'appel de PARIS au motif, allégué par l'appelante, de la connexité existant avec les appels pendants devant cette juridiction et interjetés à l'encontre de deux jugements du tribunal de grande instance de PARIS dans des instances ayant opposé la société LA REDOUTE CATALOGUE respectivement aux sociétés Guy LAROCHE, Jeanne LANVIN, Pierre BALMAIN et Yves SAINT-LAURENT, et à la société HERMES. La société LA REDOUTE CATALOGUE, appelante, indiquait alors que les trois jugements évoqués l'ont condamnée sur le fondement d'un usage illicite de marque à raison des concours ou loteries, intitulés "la symphonie des foulards" et "l'envol des foulards", qu'elle avait organisés, dont les sept premiers prix étaient constitués des foulards de marques prestigieuses. Elle se disait fondée à soulever une exception de litispendance en raison des liens de connexité existant entre les différentes affaires compte tenu de l'identité des faits et des problèmes juridiques posés.

Par arrêt rendu le 12 février 1998, la cour de céans a rejeté les exceptions de litispendance et de connexité soulevées par la société LA REDOUTE, et a enjoint aux parties de conclure au fond.

Par conclusions récapitulatives signifiées le 21 avril 1998, puis, en

dernier lieu, le 9 juin 1998, la société LA REDOUTE FRANCE, venant aux droits de la société LA REDOUTE CATALOGUE, invoque l'irrecevabilité des demandes des sociétés CARTIER, sur le fondement des articles 9 et 15 du NCPC, et de l'article 10 du code civil, en ce que les sociétés demanderesses ont procédé à un exposé lapidaire de leurs moyens et prétentions, et ont refusé de communiquer les éléments qui leur avaient été demandés par son conseil, propres à établir la qualité et la notoriété des foulards CARTIER et la participation de ces sociétés à d'autres concours. Elle invoque également la violation par le tribunal des articles L 121-36 et L 121-37 du code de la consommation en ce qu'il a dit que la réglementation des loteries n'imposait pas la reproduction des marques des produits constituant les lots mais simplement leur identification, alors que l'application combinée de ces textes contraint l'organisateur d'une loterie à identifier de façon précise et lisible les lots mis en jeu afin d'éviter toute confusion dans l'esprit du public. Elle fait valoir qu'en opérant une distinction entre l'utilisation commerciale et l'utilisation publicitaire d'une marque, le tribunal a méconnu les dispositions de l'article L 713-4 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel le propriétaire d'une marque ne peut invoquer la protection dont il bénéficie à ce titre pour empêcher la diffusion de son produit par un tiers, que ce soit à des fins commerciales ou publicitaires. Elle ajoute que, tant au regard des articles L 713-2 et L 713-4 du code de la propriété intellectuelle d'interprétation stricte qu'en considération de l'arrêt DIOR c/ EVORA de la Cour de Justice des Communautés, en date du 4 novembre 1997, elle était en droit d'utiliser la marque CARTIER, même si elle ne commercialisait pas les produits CARTIER, la présentation des foulards portant cette marque sur les prospectus incriminés n'étant en rien dénigrante. Elle en déduit que le tribunal

a violé l'article L 713-4 du code de la propriété intellectuelle et les articles 5 et 7 de la première directive du 21 décembre 1988. Elle indique aussi que le concours incriminé ne vise pas à tromper le consommateur. Elle invoque l'inapplicabilité de l'article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle, en relevant que les marques des sociétés CARTIER sont des marques de barrage dont les dépôts sont abusifs, et donc nuls, et qui sont inexploitées, et donc frappées de déchéance pour non-usage. Elle conteste avoir utilisé la marque CARTIER pour promouvoir, sous cette marque, d'autres produits que ceux habituellement commercialisés par les sociétés CARTIER, et soutient que celles-ci, qui ont épuisé leur droit de marques, ne sont pas fondées à limiter l'usage qu'elle peut faire des foulards qu'elle a régulièrement acquis pour les offrir en cadeaux d'une loterie. Elle précise que, à la différence de la situation en matière de droits d'auteur, aucun texte ne confère un droit de destination aux titulaires de marques, et que, au contraire, la Cour de Justice des Communautés a admis que l'épuisement des droits s'entend "propter rem" en sorte qu'il est applicable à la publicité, ajoutant que les sociétés CARTIER s'arrogent indûment un droit de suite quant à l'utilisation de leurs produits, dont, en l'occurence, il a été fait un usage conforme à leur destination. En raison de son droit de propriété sur les foulards, elle prétend pouvoir en faire l'usage qu'elle entend, et revendique une garantie d'éviction, en ajoutant que les sociétés CARTIER ne peuvent s'opposer à son droit d'accession sur les marques incorporées aux foulards, dont elle fait une utilisation licite et non dénigrante. Elle expose que le tribunal a omis de satisfaire sa demande conservatoire tendant à interdire aux sociétés CARTIER d'utiliser leurs produits comme primes ou cadeaux, et ce faisant, leur a permis de se livrer à des pratiques discriminatoires à l'égard de ses concurrents. Elle fait valoir

qu'aucun élément ne permet une évaluation du préjudice allégué par les sociétés CARTIER, lesquelles ne sont pas fondées à alléguer deux préjudices distincts pour des marques identiques. Elle expose que la mesure de publication ordonnée est ultra petita et contraire à l'article 5 du NCPC et à l'article 51 du code pénal devenu 131-35 du nouveau code pénal. En outre, elle soulève un incident de communication de pièces pour vérifier la qualité et la notoriété des foulards CARTIER. Elle conclut à l'absence d'atteinte à la renommée de ces foulards et à l'inapplicabilité de l'article 1382 du code civil, dès lors qu'aucune faute n'est établie à son encontre et qu'aucune atteinte n'a été portée à la notoriété ou à la réputation de la marque CARTIER. Elle demande à la cour de :

DIRE ET JUGER QUE :

- le tribunal de grande instance de VERSAILLES, par jugement rendu le 25.06.1996, a omis de répondre aux conclusions de la société LA REDOUTE en ce qui concerne l'application des textes sus-visés ;

- le tribunal de grande instance de VERSAILLES, dans le même jugement, a violé les dispositions des articles L 121-1 et L 121-37 du code de la consommation qui imposent la reproduction des marques des produits constituant des lots ;

- le tribunal de grande instance de VERSAILLES n'a pas donné de base légale à sa décision en interprétant de façon extensive l'article L 713-2 du Code de la Propriété Intellectuelle (C.P.I.) alors qu'il est

d'interprétation stricte et en refusant d'appliquer l'article L 713-4 et suivants du CPI, alors que l'arrêt rendu par la cour de justice dans l'affaire DIOR C/ EVORA, n° C-337/95, en date du 04.11.1997, a dit pour droit que :

"Les articles 5 et 7 de la Directive 89/104 doivent être interprétés en ce sens que, lorsque des produits revêtus d'une marque ont été mis sur le marché communautaire par le titulaire de la marque ou avec son consentement, un revendeur a, en outre la faculté de revendre ces produits, également celle d'employer la marque afin d'annoncer au public la commercialisation ultérieure desdits produits.

Le titulaire d'une marque ne peut s'opposer, au titre de l'article 7 2 de la Directive 89/104 à ce qu'un revendeur, qui commercialise habituellement des articles de même nature, mais pas nécessairement de même qualité, que les produits revêtus de la marque, emploie, conformément aux modes qui sont usuelles dans son secteur d'activités, la marque afin d'annoncer au public la commercialisation ultérieure de ces produits, à moins qu'il ne soit établi que, compte tenu des circonstances propres à chaque espèce, l'utilisation de la marque à cette fin porte une atteinte sérieuse à la renommée de ladite marque".

Et que la cour de justice a admis l'épuisement des droits d'auteur portant sur des flacons de parfums.

- le tribunal n'a pas caractérisé les éléments d'abus d'usage de marque alors qu'il a relevé le caractère authentique des foulards proposés en cadeau et l'environnement prestigieux desdits foulards au sein de la publicité incriminée.

- le tribunal a violé les dispositions combinées de l'article 1690 du code civil et les dispositions du code de la propriété intellectuelle - livre 7, titre premier - en décidant que la garantie d'éviction ne portait que sur la seule propriété du bien corporel alors que cette garantie porte sur toute éviction du fait personnel du vendeur sans distinction.

- le tribunal a violé ainsi les dispositions de l'ordonnance n°86-1243 du 01.12.1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence combinée avec les articles 9 et 15 du N.C.P.C. en permettant aux sociétés CARTIER de ne pas préciser les coordonnées des concours auxquels elles ont accepté de participer ainsi que les critères de sélection des sociétés organisatrices desidits concours afin de permettre au juge du fond de contrôler l'objectif de ces critères.

- le tribunal n'a donné aucun élément d'évaluation du préjudice allégué par les sociétés CARTIER, alors que la réparation du préjudice civil ne saurait constituer une sanction que seules les juridictions répressives peuvent prononcer.

- en ordonnant la publication à intervenir en page 3 du catalogue alors qu'elle n'avait pas été demandée, le tribunal a violé les dispositions de l'article 5 du N.C.P.C. et a statué ultra petita et qu'il a également violé, en statuant ainsi, les dispositions de l'article 51 du code pénal et L 716-13 du Code de Propriété Intellectuelle.

EN CONSEQUENCE :

- INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions et,

STATUANT A NOUVEAU :

- déclarer les sociétés CARTIER irrecevables en leur action tant qu'elles n'auront pas précisé les coordonnées des concours auxquels elles ont accepté de participer ainsi que les critères de sélection des sociétés organisatrices desdits concours, afin de permettre à la cour de contrôler l'objectivité de ces critères ;

- déclarer les sociétés CARTIER mal fondées en leur demande portant sur la reproduction illicite des foulards incriminés,

- accueillir la société LA REDOUTE SA en son incident de communication de pièces portant sur les coordonnées des concours auxquels les sociétés CARTIER ont accepté de participer ainsi que les critères de sélection des sociétés organisatrices desdits concours, et les coordonnées des fabricants des foulards CARTIER.

- enjoindre aux sociétés CARTIER de communiquer les éléments destinés à établir la très haute qualité des foulards en cause par la communication des coordonnées des fabricants desdits foulards.

Constatant que les sociétés CARTIER ne contestent pas qu'elles acceptent de participer à des concours :

- enjoindre aux sociétés CARTIER de communiquer les coordonnées des concours auxquels elles ont accepté de participer et les critères de sélection des sociétés organisatrices desdits concours afin de permettre à la cour d'en contrôler l'objectivité.

- déclarer les sociétés CARTIER mal fondées en leur demande portant sur la reproduction illicite des foulards incriminés,

- débouter les sociétés CARTIER de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions, notamment fondées sur une utilisation prétendument illicite de leurs droits de marques,

- dire et juger que les foulards régulièrement acquis par la société LA REDOUTE ont été utilisés d'une façon conforme au droit de destination du droit de marque.

- dire et juger que le droit de marque est un droit de propriété incorporelle accessoire au droit de propriété portant sur l'objet dans lequel il est incorporé.

- dire et juger que la société LA REDOUTE n'a pas porté atteinte aux marques invoquées et n'a pas nui à l'image de marque des produits en cause.

- dire qu'en qualité de venderesses des foulards incriminés, les sociétés CARTIER doivent garantir contre l'éviction la personne qui les a acquis, et ce notamment en raison de leur fait personnel.

Vu l'article 51 du code pénal tel que reproduit à l'article 131-35 du nouveau code pénal et repris par l'article L 176-13 du code de la propriété intellectuelle,

- dire et juger que les intimées sont irrecevables et mal fondées en leurs moyens tirés de l'application des articles L 713-2 et L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, et ce en raison de l'authenticité des produits litigieux offerts en cadeaux.

- dire et juger que l'interprétation de l'arrêt DIOR C/ EVORA rendu par la cour de justice en matière d'importation parallèle et de publicité est applicable en l'espèce en ce qu'il donne une interprétation portant sur l'article 5 de la première directive lequel requiert l'appréciation par les juridictions nationales d'une

"atteinte sérieuse à la réputation d'une marque de haute renommée".

- dire et juger qu'en l'espèce, aucune atteinte sérieuse à la réputation des marques CARTIER n'est constituée.

- dire et juger que les intimées sont irrecevables à soulever concomittament l'application des dispositions de l'article 1382 du code civil qui ne peut être invoqué pour tenter de faire sanctionner les mêmes faits que ceux qualifiés au regard des textes santionnant la contrefaçon de marque.

- dire et juger qu'en tout état de cause, les sociétés CARTIER n'ont nullement allégué ni, à fortiori établi de faits caractérisant une atteinte à l'image des marques invoquées, et sont donc infondées à invoquer les dispositions de l'article 1382 du code civil.

- débouter en conséquence les intimées de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que la garantie d'éviction du fait personnel est due sur les objets industriels incorporant des droits de marques, notamment au regard de l'interprétation de la cour de justice dans l'arrêt DIOR C/ EVORA en matière de publicité portant sur des produits marqués.

- dire et juger que les sociétés CARTIER ne peuvent alléguer l'existence d'un double préjudice fondé sur la multiplication de leurs droits de marques et le partage de ceux-ci entre elles.

- dire et juger que la mesure de publication ordonnée par le tribunal est contraire à l'article 51 du code pénal et que les sociétés CARTIER ne peuvent exciper d'une décision par laquelle le tribunal a statué "ultra petita" en novant leur demande de première instance.

- condamner en conséquence solidairement les sociétés CARTIER à payer à la société LA REDOUTE la somme de 100.000 F à titre de dommages et intérêts en raison de leurs faits personnels.

- ordonner la publication du jugement à intervenir aux frais des sociétés CARTIER dans les publications choisies par la défenderesse sans que le coût total de la publication puisse dépasser la somme de 80.000 F H.T.

TRES SUBSIDIAIREMENT, dans l'hypothèse où la cour permettrait aux sociétés CARTIER d'interdire d'offrir des foulards comme cadeaux :

- prendre acte du fait que les sociétés CARTIER interdisent l'utilisation de leurs produits à titre de primes ou cadeaux, notamment d'entreprises,

- leur interdire en conséquence de proposer leurs produits comme cadeaux sous astreinte définitive de 10.000 F par infraction constatée à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,

- condamner solidairement les sociétés CARTIER à payer la somme de 80.000 F à la société LA REDOUTE au titre de l'article 700 du N.C.P.C.,

- les condamner aux entiers dépens par application de l'article 699 du N.C.P.C. dont le recouvrement sera effectué par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL, société titulaire d'un office d'avoués.

Par conclusions signifiées le 5 mai 1998, les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV, rappelant avoir adopté un mode de distribution sélectif, font valoir que les informations demandées par la société LA REDOUTE FRANCE sont sans intérêt pour la solution du litige. Elles soutiennent que, faute d'avoir sollicité leur autorisation préalable, la société LA REDOUTE CATALOGUE a bien commis les actes d'usage illicite de marques. Elles soutiennent que ces fautes ont généré un préjudice en portant atteinte à son image. Elles contestent l'application de la règle de l'épuisement du droit, notamment parce qu'il n'y a pas eu commercialisation des produits. Elle écarte la garantie d'éviction alléguée par l'appelante. Elles demandent à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de VERSAILLES le 25.06.1996,

Et y ajoutant,

- dire et juger qu'en ayant organisé une loterie à l'occasion de laquelle elle a utilisé les marques des sociétés CARTIER et Cartier International BV, et un foulard revêtu de ses marques pour promouvoir la vente de ses propres produits, la société LA REDOUTE a commis une faute qui engage sa responsabilité civile au sens de l'article 1382 du code civil ;

- condamner sur ce fondement, la société LA REDOUTE à payer à la société CARTIER une somme supplémentaire de 200.000 F à titre de dommages-intérêts,

- dire que la société LA REDOUTE sera tenue de publier les motifs et le dispositif du jugement du 25.06.1996 en page 3 de son catalogue, en mentionnant que ce jugement a été confirmé par la cour,

- débouter la société LA REDOUTE de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société LA REDOUTE à payer à la société CARTIER International BV et à la société CARTIER ensemble, une somme de

50.000 F au titre de l'article 700 du N.C.P.C.,

- la condamner aux entiers dépens de l'instance et dire que ceux-ci pourront être recouvrés pour ceux la concernant par la SCP LAMBERT DEBRAU CHEMIN, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du N.C.P.C.

La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 16 juin 1998, et l'affaire a été évoquée à l'audience du 10 septembre 1998.

SUR CE, LA COUR

SUR CE, LA COUR

1 - Considérant que, par acte du 7 avril 1998, la société LA REDOUTE CATALOGUE a fait sommation aux sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV de lui communiquer les coordonnées des concours auxquels ces dernières ont accepté de participer ainsi que les critères de sélection des sociétés organisatrices desdits concours, et les coordonnées des fabricants des foulards CARTIER ;

Que l'appelante ne saurait faire grief aux intimées de n'avoir pas déféré à ladite sommation, dès lors que les renseignements demandés sont sans pertinence et sans incidence au regard de l'objet du présent litige qui, étranger à des pratiques anti-concurrentielles ou discriminatoires, concerne un éventuel usage illicite de marque,

étant ajouté que la notoriété des marques CARTIER n'est pas sérieusement contestable, que la qualité des foulards CARTIER n'est pas en cause, et que la participation des sociétés CARTIER à la pratique des cadeaux d'entreprise, alléguée et justifiée par la société LA REDOUTE CATALOGUE, est éventuellement un élément d'appréciation de la politique commerciale des sociétés CARTIER, versé aux débats et soumis à la cour à laquelle il appartient de tirer les conséquences de la suffisance ou de l'insuffisance des preuves proposées par les parties, au vu de leurs positions respectives ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de considérer que les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV ont manqué à l'obligation de loyauté de la procédure ;

2 - Considérant qu'il ressort des certificats, non contestés par la société LA REDOUTE FRANCE, produits par les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV, que ces dernières ont déposé et sont titulaires de, respectivement, la marque MUST (enregistrée le 12 mai 1989), la marque CARTIER (enregistrée le 22 février 1988 et renouvelée le 4 février 1998), la marque CARTIER (enregistrée le 29 octobre 1982 et renouvelée le 10 juin 1992) et la marque CARTIER PARIS (enregistrée le 5 juillet 1983 et renouvelée le 3 juin 1993), en ce qui concerne la première, la marque MUST DE CARTIER (enregistrée aux PAYS-BAS, le 22 novembre 1982, pour une durée de 20 ans), en ce qui concerne la seconde, qui ont fait régulièrement l'objet de renouvellements et sont en cours de validité ; qu'il n'est pas démontré, ni même allégué, que la déchéance en ait été prononcée pour tout ou partie des produits et services désignés dans les

enregistrements, en particulier les vêtements, expressément visés ; qu'il n'est pas davantage établi que ces marques ne sont pas exploitées et constituent des marques de barrage, notamment en ce qui concerne les vêtements, alors que, au contraire, il résulte des faits mêmes de l'espèce qu'il en est fait un usage sérieux pour des foulards ; que les dépôts correspondants ne revêtent aucun caractère abusif prouvé ;

Qu'en outre, il n'est pas contesté que les marques CARTIER et MUST DE CARTIER jouissent d'une très haute renommée ;

Qu'il suit de ces développements, d'une part, qu'il n'y a pas lieu, au regard des moyens discutés ci-dessus, de déclarer irrecevables les demandes des sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV, et, d'autre part, que celles-ci sont titulaires des droits qu'elles tiennent des enregistrements des marques dont elles sont propriétaires ;

3 - Considérant que les articles L 713-2 et L 713-3 du code de la propriété intellectuelle prohibent l'usage illicite de marque, "..., sauf autorisation du propriétaire" ; que l'article L 716-1 du même code dispose :"L'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits de la marque, la violation des interdictions prévues aux articles L 713-2, L 713-3....." ;

Considérant aussi que l'article L 713-4 du code de la propriété intellectuelle, qui transpose en droit interne les dispositions de l'article 7 de la première directive n° 89-104 du Conseil des Communautés européennes du 21 décembre 1988, prévoit que :

"Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire l'usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la Communauté économique européenne ou de l'Espace économique européen sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.

Toutefois, faculté reste alors ouverte au propriétaire de s'opposer à tout nouvel acte de commercialisation s'il justifie de motifs légitimes, tenant notamment à la modification ou à l'altération, ultérieurement intervenue, de l'état des produits." ;

Considérant, en l'espèce, qu'il est constant, comme ressortant, notamment, du modèle de contrat de distribution sélective qu'elles ont versé aux débats, que les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV commercialisent les produits des marques CARTIER, MUST et MUST DE CARTIER, par l'intermédiaire d'un réseau de distributeurs sélectionnés et agréés ;

Que la société LA REDOUTE CATALOGUE a organisé, successivement, du 15 mars au 16 mai 1994, une première loterie intitulée "la symphonie des foulards", et, du 1er avril au 1er juin 1994, une seconde loterie intitulée "l'envol des foulards", au profit de ses clients qui

pouvaient gagner, à la suite d'un tirage au sort, différents foulards portant différentes marques prestigieuses dont un de la marque CARTIER pour chacune des loteries ; qu'il est admis qu'elle a régulièrement acquis les deux foulards, objet des lots, auprès de l'une des boutiques CARTIER, ainsi qu'elle en justifie par la production de la facture relative à l'un des foulards, en date du 29 janvier 1994 ;

Qu'il est tout aussi constant que la société LA REDOUTE CATALOGUE, qui n'est pas distributeur agréé des produits des marques CARTIER et qui n'en commercialise pas, a, à l'occasion de l'annonce des loteries, dans des dépliants diffusés auprès de sa clientèle, fait usage de ces marques sans l'autorisation de ses propriétaires, pour désigner la composition et l'origine des lots correspondants offerts à ses clients participant à l'une et l'autre des loteries ;

Mais considérant que les dispositions des articles L 713-2, L 713-3 et L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, ci-dessus évoqués, doivent recevoir une interprétation stricte ; que l'alinéa premier de l'article L 713-4 du même code, ci-dessus rappelé, instaure l'épuisement des droits conférés par la marque, dès lors que les produits qui en sont revêtus ont été mis sur le marché communautaire par le titulaire de la marque ou avec son consentement ;

Qu'il s'ensuit que le titulaire d'une marque ne peut en interdire l'usage à un détenteur légitime de produits authentiques revêtus de cette marque, déjà commercialisés sur le territoire des Communautés

européennes, régulièrement acquis, afin d'annoncer au public et d'assurer la diffusion de ces produits dans le cadre d'une loterie ; Que, dès lors que le texte ne comporte aucune précision ni distinction, mais est, au contraire, rédigé en termes généraux propres à l'énoncé d'un principe, l'épuisement des droits conférés par la marque, qu'il consacre, ne peut être limité à une diffusion effectuée dans le cadre d'une opération de commercialisation ; qu'à cet égard, l'alinéa 2 de l'article L 713-4, qui réserve la faculté de s'opposer à tout nouvel acte de commercialisation, ne saurait être considéré comme servant à l'interprétation de l'alinéa précédent, mais constitue une exception au principe de l'épuisement des droits qui en exclut l'application et réserve les droits conférés par la marque, dans les limites qu'il pose ;

Qu'au demeurant, s'agissant de foulards authentiques, dont il n'est pas discuté que la première commercialisation a eu lieu sur le territoire communautaire, par les titulaires des marques CARTIER et MUST DE CARTIER, la question, en l'espèce, n'est pas celle de l'atteinte aux droits eux-mêmes conférés par ces marques mais celle de l'atteinte à la valeur de celles-ci ;

Qu'en conséquence, l'usage fait par la société LA REDOUTE CATALOGUE des marques CARTIER et MUST DE CARTIER ne constitue pas une contrefaçon ;

4 - Considérant, cependant, que la société LA REDOUTE CATALOGUE doit répondre de la faute susceptible de résulter de l'usage qu'elle a fait des marques CARTIER et MUST DE CARTIER à des fins autres que celles de distinguer ou promouvoir les produits concernés ou encore d'en garantir l'origine, si l'usage de ces marques, sans juste motif, tire indûment profit de leur caractère distinctif ou de leur renommée ;

Considérant, en l'espèce, qu'il est manifeste que l'organisation de loteries par la société LA REDOUTE CATALOGUE constitue une technique publicitaire pour promouvoir la vente par correspondance à laquelle elle se livre ; que, d'ailleurs, les documents personnalisés envoyés par cette société à certains clients sélectionnés, font état d'une "opération promotionnelle" ; que l'effet recherché d'attraction ou de captation de clientèle est d'autant plus important que la valeur et le prestige des lots proposés sont notoires, comme c'est le cas des produits de marque CARTIER et MUST DE CARTIER ; qu'une telle opération, loin d'avoir un but désintéressé, est appelée à concerner et à favoriser exclusivement les produits commercialisés par la société LA REDOUTE CATALOGUE, à l'exclusion des produits CARTIER dont elle n'est pas distributeur agréé et qu'elle ne vend pas ; qu'ainsi, elle s'analyse en un comportement d'inspiration ou de nature parasitaire, tirant profit de la renommée et de la notoriété des produits marqués CARTIER et MUST DE CARTIER, et permettant à la société LA REDOUTE CATALOGUE de se dispenser d'un effort publicitaire propre ;

Qu'un tel comportement, qui relève de l'abus de droit, constitue une

faute ;

Qu'à cet égard, la société LA REDOUTE CATALOGUE ne peut arguer des dispositions de l'article L 121-37 du code de la consommation, selon lesquelles "les documents présentant une opération publicitaire doivent comporter un inventaire lisible des lots mis en jeu précisant, pour chacun d'eux, leur nature, leur nombre exact et leur valeur commerciale" ; qu'en effet, il convient d'observer que ce texte ne prévoit pas la mention de la marque ou de l'origine des produits offerts à titre de lots ; que cette mention, réitérée, au-delà des exigences de la réglementation des loteries, illustre la stratégie parasitaire de la société LA REDOUTE CATALOGUE ;

Que l'invocation par l'appelante de son droit de propriété sur les foulards litigieux est sans incidence sur la caractérisation de la faute, ci-dessus précisée, étant ajouté que les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV ne tendent pas à "l'éviction" de la société LA REDOUTE CATALOGUE, mais à faire cesser l'abus que cette dernière fait de son droit ;

5 - Considérant que les agissements fautifs de la société LA REDOUTE CATALOGUE engendrent la croyance des destinataires des dépliants d'annonce et des bénéficiaires des lots, que les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV prêtent leur concours à une telle opération promotionnelle ; que celle-ci, qui suscite inévitablement la perception banalisée des produits offerts dans la loterie, est de nature à dévaloriser les marques CARTIER, même si d'autres marques aussi prestigieuses sont également utilisées ; que le préjudice qui

en découle est subi pareillement par l'une et l'autre des deux sociétés propriétaires des marques concernées;

Que, eu égard aux éléments d'appréciation et d'évaluation dont le tribunal disposait et dont la cour dispose, l'allocation de la somme de 100.000,00 frs et la mesure de publication ordonnée par le jugement, sous la réserve des précisions ultérieures, constituent une réparation exacte et appropriée de ce préjudice ; que, s'agissant de la mesure de publication, le tribunal, qui, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation de la réparation complète due aux sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV, pouvait en fixer librement les modalités, n'a pas statué ultra petita en l'ordonnant en page trois du catalogue de LA REDOUTE et non dans cinq journaux comme cela lui était demandé par les sociétés demanderesses ; que, toutefois, il apparaît que cette mesure devra être limitée à une publication, sur un quart de page, de la mention précisée dans le dispositif ;

6 - Considérant, cependant, que, pour les raisons tirées des développements précédents, le tribunal ne pouvait, dans les termes généraux où il l'a fait, "interdire à la société LA REDOUTE CATALOGUE tout usage des marques CARTIER sous quelques formes que ce soit, sous peine d'astreinte", étant noté que l'usage éventuellement fait de ces marques, sans l'autorisation de leurs titulaires, reste évidemment susceptible de fonder une action en contrefaçon ou, comme en l'espèce, une action en responsabilité pour faute, de la part des sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV, selon l'appréciation qu'elles sont libres de faire des nécessités de la protection de leurs droits ;

Qu'il s'ensuit que la demande de la société LA REDOUTE CATALOGUE tendant à l'interdiction faite aux sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV, sous astreinte, de proposer leurs produits comme cadeaux, est sans objet ;

7 - Considérant que l'appelante n'indique pas les moyens tirés des articles 17 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme et 1er du protocole I de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme, auxquels elle se réfère ;

8 - Considérant que l'équité commande que les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV n'aient pas à assumer l'intégralité des frais irrépétibles qu'elles ont dû exposer dans la procédure pour faire valoir leurs droits ; que la cour est en mesure de fixer à 50.000,00 frs la somme que la société LA REDOUTE CATALOGUE devra leur payer à ce titre ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- déclare recevable l'appel formé par la société LA REDOUTE CATALOGUE à l'encontre du jugement rendu le 25 juin 1996 par le tribunal de grande instance de VERSAILLES,

réformant le jugement entrepris quant au fondement retenu,

Vu l'article 1382 du code civil,

- déclare les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV irrecevables en leur action en contrefaçon, mais recevables et bien fondées en leur action en responsabilité civile pour faute,

- dit n'y avoir lieu de leur enjoindre de communiquer les coordonnées des fabricants des foulards en cause pour établir la très haute qualité de ces produits, ni les coordonnées des concours auxquels ces sociétés ont accepté de participer, non plus que les critères de sélection des sociétés organisatrices de ces concours,

- infirme le jugement entrepris en ce qu'il a interdit à la société LA REDOUTE CATALOGUE tout usage des marques CARTIER sous quelques formes que ce soit, sous peine d'astreinte de 10.000,00 frs par infraction constatée, à compter de la signification dudit jugement, et ce pendant un délai de un an au-delà duquel il sera à nouveau statué par le juge compétent,

- confirme les autres dispositions du jugement entrepris, sous la réserve que la publication ordonnée sera limitée à la mention

suivante :

"Par arrêt rendu le 19 novembre 1998, la Cour d'appel de VERSAILLES a déclaré la société LA REDOUTE CATALOGUE responsable du préjudice subi par les sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV et l'a condamnée à leur payer la somme de 100.000,00 frs à titre de dommages et intérêts, à la suite de l'utilisation abusive de foulards portant les marques CARTIER et MUST DE CARTIER et proposés comme lots dans les loteries organisées du 15 mars au 16 mai 1994 et du 1er avril au 1er juin 1994",

sur le quart supérieur de la page trois du prochain catalogue à paraître de la société LA REDOUTE CATALOGUE,

- condamne la société LA REDOUTE CATALOGUE à payer aux sociétés CARTIER et CARTIER INTERNATIONAL BV la somme de 50.000,00 frs en application de l'article 700 du NCPC,

- la condamne aux dépens, qui pourront être recouvrés directement par la SCP LAMBERT-DEBRAY-CHEMIN, conformément à l'article 699 du NCPC,

- déboute les parties de leurs autres conclusions contraires ou plus amples.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M. LE X...

J-L GALLET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-7640
Date de la décision : 10/09/1998

Analyses

MARQUE DE FABRIQUE - Protection - Contrefaçon - Contrefaçon par usage - Importation dans la communauté européenne - Autorisation du titulaire.

Les dispositions des articles L 713-2, L 713-3 et L 716-1 du Code de la propriété intellectuelle doivent recevoir une interprétation stricte. Dès lors que l'article L 713-4 du même code pose en principe général que la mise sur le mar- ché communautaire d'un produit de marque, par son titulaire ou avec son con- sentement, entraîne l'épuisement des droits conférés par la marque, il s'ensuit que ledit titulaire ne peut interdire l'usage d'un produit authentique de sa marque, objet d'une commercialisation dans le cadre communautaire, à un détenteur légitime qui l'a régulièrement acquis pour le diffuser sous forme de lot, et ce, sans que puisse être tiré de l'alinéa 2 de l'article L 713-4, précité, une limitation du principe au seul cas d'une opération de commercialisation, ledit alinéa n'ayant pas de caractère interprétatif, mais posant une exception au principe de l'épuisement des droits. En l'occurrence, l'usage fait par la société de VPC des marques des lots achetés ne constitue pas une contrefaçon

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Loteries publicitaires - Organisateur - Faute.

L'usage de la marque d'un produit à des fins autres que celles tendant à le di- stinguer, le promouvoir ou encore à en garantir l'origine est susceptible d'être constitutive d'une faute, dont devra répondre l'utilisateur, lorsque, sans juste motif, il tire indûment profit de leur caractère distinctif ou de leur renommée. En l'espèce, il est manifeste qu'en citant expressément les marques prestigieuses des produits affectés à " une opération promotionnelle ", en forme de loterie, la valeur et le prestige des lots proposés n'a d'autre but que de favoriser exclusivement les produits vendus par le promoteur de l'opération et non, les produits prestigieux, composant les lots, que celui-ci n'est pas agréé pour distribuer ni commercialiser. Un tel comportement revêt un caractère parasitai- re constitutif d'une faute, sans que l'organisateur de l'opération puisse utilement alléguer des dispositions de l'article L 121-37 du Code de la consommation, dès lors que ce texte ne prévoit pas la mention de la marque ou de l'origine des pro- duits offerts à titre de lots. En l'occurrence, les agissements fautifs de l'entreprise engendrant auprès de la clientèle la croyance que les marques uti- lisées prêtent leur concours à une opération promotionnelle, sont de nature à induire une perception banalisée et une dévalorisation desdites marques con- stitutif d'un préjudice qui doit être réparé


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-09-10;1996.7640 ?
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