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25/06/1998 | FRANCE | N°1998-1113

France | France, Cour d'appel de Versailles, 25 juin 1998, 1998-1113


Le 7 mai 1991, le tribunal de grande instance de NANTERRE a délégué l'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant Ja'r Samuel MENDES PEREIRA, né le 22 septembre 1984 à BISSAU (Guinée), à Monsieur X... et à son épouse, née Y..., en accueillant la requête conjointe des intéressés et du père de l'enfant.

Le divorce du couple a été prononcé le 2 avril 1993 par le tribunal de grande instance de NANTERRE, qui a dit que l'autorité parentale sur l'enfant mineur Ja'r sera exercée en commun par les époux X....

Remarié depuis lors, Monsieur X... a en charge trois e

nfants et n'a revu l'enfant Ja'r que très rarement depuis sa séparation avec Mada...

Le 7 mai 1991, le tribunal de grande instance de NANTERRE a délégué l'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant Ja'r Samuel MENDES PEREIRA, né le 22 septembre 1984 à BISSAU (Guinée), à Monsieur X... et à son épouse, née Y..., en accueillant la requête conjointe des intéressés et du père de l'enfant.

Le divorce du couple a été prononcé le 2 avril 1993 par le tribunal de grande instance de NANTERRE, qui a dit que l'autorité parentale sur l'enfant mineur Ja'r sera exercée en commun par les époux X....

Remarié depuis lors, Monsieur X... a en charge trois enfants et n'a revu l'enfant Ja'r que très rarement depuis sa séparation avec Madame Y..., intervenue en 1991.

Par requête du 28 mai 1997, il a saisi le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE en vue de voir révoquer la délégation d'autorité parentale qui lui avait été accordée sur l'enfant Ja'r et d'entendre ordonner le transfert de cette délégation à Madame Y....

Par jugement du 17 octobre 1997, le tribunal a déclaré Monsieur X... irrecevable en sa demande.

Appelant de cette décision, Monsieur X... demande à la Cour, en l'infirmant et en statuant à nouveau, de prononcer la révocation de la délégation de l'autorité parentale qui lui a été consentie.

Le MINISTERE PUBLIC, intimé, demande à la Cour, par adjonction de motifs, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de révocation de la délégation de l'autorité parentale accordée à Monsieur X... sur l'enfant Ja'r.

Madame Y..., dûment convoquée selon lettre recommandée dont l'avis de réception a été signé le 9 mars 1992, n'a pas comparu.

Il sera dans ces conditions statué par arrêt réputé contradictoire.

SUR CE,

Considérant que pour déclarer irrecevable la demande de Monsieur X..., qui demandait de révoquer la délégation d'autorité parentale qui lui avait été accordée sur l'enfant Ja'r MENDES PEREIRA et d'ordonner le transfert de cette délégation d'autorité parentale à Madame Y... (à laquelle l'exercice de l'autorité parentale avait été délégué, conjointement avec Monsieur X..., alors son mari, par jugement du 7 mai 1991), le premier juge a retenu que Monsieur X... ne pouvait demander la révocation ou la délégation de ses droits, une telle mesure ne pouvant être prononcée dans le seul intérêt de l'enfant que par le tribunal de grande instance, à l'initiative du MINISTERE PUBLIC, d'un membre de la famille ou d'un tuteur pour protéger l'enfant ;

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions de confirmation de la décision déférée, le MINISTERE PUBLIC expose qu'il n'existe pas, "dans le cadre civil", de procédure de "révocation" de la délégation de l'autorité parentale, mais que sont seules prévues à l'article 377-2 du code civil une procédure de "fin" et une procédure de "transfert" de la délégation de l'autorité parentale, s'il est justifié de circonstances nouvelles ;

Qu'il soutient qu'en l'espèce la procédure de "fin" de délégation n'est pas applicable, puisqu'elle aurait pour conséquence la restitution de l'autorité parentale aux parents de l'enfant, alors qu'ils ne la demandent pas, et ajoute que l'article 1210 du nouveau code de procédure civile réserve la demande en restitution de l'autorité parentale aux seuls père et mère, mais exclut (s'entend implicitement) l'action du délégataire qui ne souhaiterait plus assumer la charge de l'enfant ;

Qu'il fait valoir encore que la procédure de "transfert" de délégation de l'autorité parentale est tout autant inapplicable en l'occurrence, dans la mesure où la demande de Monsieur X... vise

à transférer à Madame Y... (son ex-épouse) la délégation de l'autorité parentale sur l'enfant Ja'r MENDES PEREIRA, alors que celle-ci en est déjà doublement investie, conjointement avec l'appelant, d'une part en vertu du jugement du 7 mai 1991, et d'autre part aux termes du jugement de divorce du 2 avril 1993, qui a prévu l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur l'enfant Ja'r par Monsieur X... et Madame Y... ;

Considérant toutefois que l'article 377-2 du code civil - énonçant que "la délégation pourra, dans tous les cas, prendre fin ou être transférée par un nouveau jugement, s'il est justifié de circonstances nouvelles", et précisant que "dans le cas où la restitution de l'enfant est accordée aux père et mère, le juge aux affaires familiales met à leur charge, s'ils ne sont indigents, le remboursement de tout ou partie des frais d'entretien" - ne réserve pas aux parents de l'enfant ou au MINISTERE PUBLIC, voire à un tiers, l'action qu'il ouvre en cas de circonstances nouvelles, et n'exclut pas en tout cas du bénéfice de cette action le délégataire de l'autorité parentale ;

Qu'en outre, s'il est vrai que le nouveau code de procédure civile n'a pas prévu, au profit du délégataire de l'autorité parentale, une action spécifique qui lui permette de solliciter la révocation de la délégation effectuée à son profit en vertu d'un jugement, aucune disposition du même code non plus qu'aucun principe ne conduisent cependant à priver le délégataire de l'autorité parentale de la possibilité de s'adresser au juge pour solliciter la fin ou le transfert de la délégation, en cas de circonstances nouvelles qui empêcheraient l'exercice de l'autorité parentale qui lui a été confié ;

Que dès lors, Monsieur X... doit être déclaré recevable en son action, le jugement déféré devant être infirmé en ses dispositions

contraires ;

Considérant, quant au fond, que les "circonstances nouvelles" invoquées par Monsieur X... à l'appui de sa demande de révocation de la délégation d'autorité parentale - à savoir sa situation familiale actuelle, issue de son remariage et de la charge de l'entretien de trois enfants, dont deux légitimes -, non seulement procèdent de son fait personnel, mais encore ne constituent pas un obstacle réel à l'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant Ja'r ;

Qu'en outre, la demande de Monsieur X... se heurte au pacte conclu avec Madame Y..., agréé par le juge, dont il déjoue les prévisions, sans motif légitime, puisqu'il tend à imposer à Madame Y... la charge exclusive de la délégation qu'elle avait acceptée en commun avec lui ;

Qu'en conséquence, il convient de débouter Monsieur X... de sa demande, les dépens de l'action devant rester à sa charge ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant après débats en chambre du conseil, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

RECOIT Monsieur X... en son appel ;

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il l'a déclaré irrecevable en son action ;

STATUANT A NOUVEAU,

DECLARE Monsieur X... recevable en son action ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

Y AJOUTANT,

DECLARE Monsieur X... mal fondé en sa demande et l'en déboute ;

LAISSE les dépens d'appel à la charge de Monsieur X...

ARRET REDIGE PAR :

Monsieur Gérard MARTIN, Conseiller,

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

Monsieur Gérard MARTIN, Conseiller, en remplacement de Madame Marie-France MAZARS, Président, empêché,

Madame Catherine Z..., Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-1113
Date de la décision : 25/06/1998

Analyses

AUTORITE PARENTALE

L'article 377-2 du Code civil -énonçant que "la délégation pourra, dans tous les cas, prendre fin ou être transféré par un nouveau jugement, s'il est justifié de circonstances nouvelles"- ne réserve pas aux parents de l'enfant ou au ministère public, voire à un tiers, l'action qu'il ouvre en cas de circonstances nouvelles, et n'exclut pas en tout cas du bénéfice de cette action le délégataire de l'autorité parentale. IL en résulte que le délégataire de l'autorité parentale qui ne souhaite plus assumer la charge de l'enfant doit être déclaré recevable en son action sollicitant la révocation de la délégation prononcée à son profit.Ne constitue pas de circonstance nouvelle, au sens de l'article 377-2 précité, la situation familiale actuelle d'un délégataire de l'autorité parentale, en l'occurrence son remariage et la charge de trois enfants, dès lors que cette situation, qui procède du fait personnel du délégataire, n'est pas un obstacle réel à l'exercice de l'autorité parentale, et qu'en outre, elle tend à imposer à un codélégataire la charge exclusive de la délégation que celui-ci avait accepté en commun avec lui.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-06-25;1998.1113 ?
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