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04/06/1998 | FRANCE | N°1996-856

France | France, Cour d'appel de Versailles, 04 juin 1998, 1996-856


Par jugement en date du 31 octobre 1990, le tribunal de commerce de NANTERRE a, sur une demande formulée par la banque OBC à l'encontre de Messieurs X... et Y..., pris l'un et l'autre en tant que cautions de la société COOP ASSISTANCE, statué en les termes suivants :

" Condamne Messieurs Christian X... et Antoine Y... à payer chacun à la BANQUE OBC une somme de 250.000 francs avec intérêts conventionnels de 13,50 %.

[* Dit la BANQUE OBC mal fondée sur le surplus de sa demande, l'en déboute.

*] Dit Monsieur Christian X... mal fondé en ses demandes, à toute f

in qu'elle comporte, l'en déboute".

Le dispositif de ce jugement ne précisai...

Par jugement en date du 31 octobre 1990, le tribunal de commerce de NANTERRE a, sur une demande formulée par la banque OBC à l'encontre de Messieurs X... et Y..., pris l'un et l'autre en tant que cautions de la société COOP ASSISTANCE, statué en les termes suivants :

" Condamne Messieurs Christian X... et Antoine Y... à payer chacun à la BANQUE OBC une somme de 250.000 francs avec intérêts conventionnels de 13,50 %.

[* Dit la BANQUE OBC mal fondée sur le surplus de sa demande, l'en déboute.

*] Dit Monsieur Christian X... mal fondé en ses demandes, à toute fin qu'elle comporte, l'en déboute".

Le dispositif de ce jugement ne précisait ainsi pas la date du point de départ des intérêts.

La BANQUE OBC a présenté le 29 mai 1995 une requête en rectification d'erreur matérielle au motif que le tribunal aurait fixé, dans les motifs, le point de départ des intérêts à une date antérieure à celle du prononcé du jugement mais que cette mention n'aurait pas été reprise dans le dispositif.

Dans les motifs du jugement figure en effet la mention suivante :

"qu'il échet de condamner Monsieur X... et Monsieur Y... à payer chacun la somme de 250.000 francs à la BANQUE OBC, avec intérêts au taux de fonctionnement du compte, soit 13,50 % l'an, comme prévu dans les actes de cautionnement et ce, à compter du 02 décembre 89, déboutant la BANQUE du surplus de sa demande".

Monsieur X... a demandé au tribunal de commerce de requalifier la requête et la dire irrecevable dans la mesure où il n'était pas demandé une simple rectification d'erreur matérielle mais une modification du jugement portant atteinte à l'autorité de la chose jugée et subsidiairement, estimant qu'il s'agissait en fait d'une

requête en réparation d'omission de statuer irrecevable car présentée au-delà d'un an prévu par l'article 463 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile.

Par le jugement déféré, en date du 26 octobre 1995, le tribunal de commerce de NANTERRE a rectifié le jugement du 31 octobre 1990 en précisant que le 5ème alinéa de celui-ci devenait : "condamne Messieurs Christian X... et Antoine Y... à payer chacun à la banque ODIER BUNGENER COURVOISIER dite OBC une somme de 250.000 francs avec intérêts conventionnels de 13,50 % à dater du 2 décembre 1989."

Au soutien de l'appel qu'il a interjeté contre cette décision, Monsieur X... réitère l'argumentation développée devant les premiers juges et considère que la décision qu'il frappe d'appel porte atteinte à l'autorité de la chose jugée. Aussi en demande-t-il la nullité, subsidiairement l'infirmation.

Il estime que la voie de l'appel lui est ouverte, nonobstant les dispositions de l'article 462 dernier alinéa du nouveau code de procédure civile, ce texte n'étant applicable qu'aux seules rectifications d'erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée. Peu importe la qualification que les premiers juges ont cru devoir donner à leur décision.

Sur la nullité, il souligne que la décision n'est pas motivée ou comporte une contradiction de motifs. Il relève, qu'en effet, les motifs du jugement du 31 octobre 1990 faisaient partir les intérêts à compter du "2 décembre 89". Or, le dispositif du jugement prétendument rectificatif les fait partir du 02 décembre 1989 modifiant, sans le moindre motif, le millénaire et le siècle de la date de point de départ des intérêts.

Sur la requalification de la requête qui était présentée aux premiers

juges, Monsieur X... rappelle que ne saurait constituer une erreur matérielle le fait que le juge n'ait pas tiré toutes les conséquences de son raisonnement, l'absence, dans le dispositif de dispositions relatives à l'exécution provisoire pourtant visée dans les motifs.

Il estime que la demande tendait à la réparation d'une omission de statuer. Il souligne que le motif, ci-dessus reproduit, sur lequel les juges se sont fondés pour prétendre rectifier la décision du 31 octobre 1990 ne saurait conduire à une telle conséquence, dès lors que l'an 89 après JC ne correspond à aucune date du dossier et que le 2 décembre 1989 -seulement mentionné dans le résumé de la demande de la banque OBC- ne correspond, non plus, à aucune date du dossier.

Ainsi le tribunal, pour faire droit à la demande, aurait dû ajouter une motivation spéciale et donc dépasser le strict cadre de l'omission matérielle, portant atteinte à l'autorité de la chose jugée.

Subsidiairement, Monsieur X... considère que la demande constituait, en fait, une demande en réparation d'omission de statuer. Le jugement du 31 octobre 1990 avait été signifié le 13 décembre 1990. Dès lors cette demande, présentée plus d'un an après que la décision soit passée en force de chose jugée, était irrecevable par application de l'article 463 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile.

Il demande annulation ou infirmation du jugement rendu le 26 octobre 1995 et, condamnation de la banque OBC aux dépens et à lui payer 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La banque OBC soulève l'irrecevabilité de l'appel de Monsieur X... en se fondant sur les dispositions de l'article 462 dernier alinéa du nouveau code de procédure civile.

Subsidiairement, elle considère les prétentions de l'appelant comme

mal fondées. La raison commande, en effet, de rechercher dans les termes sans équivoques des motifs de la décision l'expression de la volonté des juges puis, par une analyse de la construction des phrases concernées des motifs et du dispositif, de considérer qu'il y avait bien, dans cette dernière partie du jugement, une erreur matérielle.

En aucune manière, considère OBC, l'absence de précision au dispositif ne peut constituer une omission de statuer.

Elle demande condamnation de Monsieur X... aux dépens et à lui payer la somme de 15.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

* SUR CE LA COUR

Attendu que selon l'article 462 du nouveau code de procédure civile les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande ;

Attendu que la discordance entre les motifs et le dispositif d'un jugement peut, selon les cas, résulter d'une erreur matérielle ou d'un vice intellectuel constitutif d'une contrariété entre les motifs et le dispositif ;

Attendu qu'en l'espèce, les juges du tribunal de commerce de NANTERRE, après avoir exposé les prétentions de la banque OBC, consistant notamment en une demande de condamnation de Messieurs X... et Y... "à payer chacun à la banque OBC une somme de 250.000 francs, outre les intérêts sur cette somme à compter du 2 décembre 89 au taux de fonctionnement du compte de la société..." ont motivé le jugement en date du 31 octobre 1990 de la sorte : "il échet de

condamner Monsieur X... et Monsieur Y... à payer chacun la somme de 250.000 francs à la banque OBC, avec intérêts au taux de fonctionnement du compte, soit 13,50 % l'an, comme prévu dans les actes de cautionnement et ce, à dater du 2 décembre 89, déboutant la banque du surplus de sa demande" puis, par ces motifs, ont condamné Messieurs X... et Y... "à payer chacun à la banque OBC une somme de 250.000 francs avec intérêts conventionnels de 13,50 %" et "dit la banque OBC mal fondée en le surplus de sa demande" ;

Attendu que la discordance entre les motifs et le dispositif s'explique par la simple absence, dans le dispositif, d'une précision qui figurait aux motifs ; qu'une telle absence, dès lors qu'elle n'est pas autrement expliquée, résulte d'un simple oubli et constitue, dès lors, une omission matérielle ;

Attendu que la rectification opérée, si elle fait courir les intérêts au taux de 13,50 % du 2 décembre 1989 et non du 2 décembre de l'an 89 après JC est conforme aux prescriptions de l'article 462 du nouveau code de procédure civile dès lors que l'omission doit être réparée selon ce que la raison commande, la raison commandant que les motifs ci-dessus rappelés doivent être lus comme faisant partir les intérêts du 2 décembre 1989 ;

Attendu que la discussion de Monsieur X... sur l'insuffisance des motifs du jugement du 31 octobre 1990 est vaine, dès lors que les motifs ci-dessus rapportés sont existants, peu important au regard de l'article 462 du nouveau code de procédure civile qu'ils soient, ou non, suffisants, la critique d'une insuffisance de motif ne pouvant constituer un moyen permettant de s'opposer à la rectification d'erreur matérielle ;

Attendu dans ces conditions que le jugement rectificatif du 26 octobre 1995, frappé d'appel, est exactement qualifié ;

Attendu que le jugement rectifié du 31 octobre 1990 a, aux dires

mêmes de Monsieur X..., été signifié le 13 décembre 1990; que dès lors cette décision étant passée en force de chose jugée, la décision rectificative en date du 26 octobre 1995 ne pouvait être attaquée que par la voie du recours en cassation ;

Attendu que l'équité s'oppose à condamnation sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

* PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

- Dit irrecevable l'appel de Monsieur Christian X...,

- Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- Condamne Monsieur Christian X... aux dépens,

- Admet la SCP JULLIEN etamp; LECHARNY etamp; ROL au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR MARON, CONSEILLER ET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT qui a assisté au prononcé C. DAULTIER

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-856
Date de la décision : 04/06/1998

Analyses

JUGEMENTS ET ARRETS - Rectification - Erreur matérielle - Définition

Aux termes de l'article 462 alinéa 1 du nouveau Code de procédure civile " les erreurs ou omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle auquel il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande ". Si la discordance entre les motifs et le dispositif d'un jugement peut, selon les cas, résulter d'une erreur matérielle ou d'un vice intellectuel constitutif d'une contrariété entre les motifs et le dispositif, l'absence dans le dispositif d'une précision figurant dans les motifs, en l'occurrence la date à laquelle les intérêts d'une dette commencent à courir, relève d'un simple oubli constitutif d'une omission matérielle. En l'espèce, une rectification portant inscription dans le dispositif de la date du "2 décembre 1989 ", au lieu de " 2 décembre 89 " figurant dans les motifs, est conforme aux prescriptions de l'article 462 précité dès lors que l'omission doit être réparée selon ce que la raison commande, la raison commandant de lire " 89 " comme signifiant " 1989 "


Références :

Code de procédure civile (Nouveau), article 462 alinéa 1er

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-06-04;1996.856 ?
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