La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/05/1998 | FRANCE | N°1996-4490

France | France, Cour d'appel de Versailles, 29 mai 1998, 1996-4490


Par acte sous seing privé en date du 16 octobre 1990, la Société HABITAT EN FRANCE a donné à bail à Madame X... un appartement, sis 5 rue Gillet à SANNOIS (VAL D'OISE).

Le 10 janvier 1994, Madame X... a donné congé à la bailleresse pour le 10 avril 1994.

Par acte d'huissier en date du 28 novembre 1994, la Société HABITAT EN FRANCE a fait assigner Madame X... aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement des sommes de : - 20.756,05 francs, avec intérêts de droit, au titre des loyers et charges impayés et des frais de remise en état de l'appartement, - 5.000,00 f

rancs à titre de dommages-intérêts, - 5.000,00 francs sur le fondement de l...

Par acte sous seing privé en date du 16 octobre 1990, la Société HABITAT EN FRANCE a donné à bail à Madame X... un appartement, sis 5 rue Gillet à SANNOIS (VAL D'OISE).

Le 10 janvier 1994, Madame X... a donné congé à la bailleresse pour le 10 avril 1994.

Par acte d'huissier en date du 28 novembre 1994, la Société HABITAT EN FRANCE a fait assigner Madame X... aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement des sommes de : - 20.756,05 francs, avec intérêts de droit, au titre des loyers et charges impayés et des frais de remise en état de l'appartement, - 5.000,00 francs à titre de dommages-intérêts, - 5.000,00 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, outre les dépens, le tout assorti de l'exécution provisoire.

Par jugement contradictoire rendu en date du 23 novembre 1995, le Tribunal d'Instance de SANNOIS a rendu la décision suivante : - condamne Madame Anne Marie X... à payer à la Société HABITAT EN FRANCE la somme de 1.509,99 francs, - déboute la Société HABITAT EN FRANCE de ses autres demandes, - dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, - condamne Madame X... aux dépens.

Le 05 avril 1996, la Société HABITAT EN FRANCE (anciennement Société H.I.F.) a interjeté appel. Elle fait valoir que Madame X..., qui n'a pas pris soin de lui communiquer sa nouvelle adresse et que la bailleresse a tenté en vain de joindre, ne saurait lui reprocher de ne pas l'avoir avisée de la date à laquelle serait réalisé l'état des lieux de sortie.

Elle ajoute que la confrontation des deux états des lieux, dressés respectivement lors de l'entrée et de la sortie des lieux de la locataire, établi l'existence des désordres, auxquels la bailleresse a dû remédier au prix de coûteux travaux de remise en état.

Elle sollicite, enfin, l'allocation de dommages-intérêts, ainsi que le versement de la somme de 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - l'accueillir en son appel et l'y déclarer bien fondée, - infirmer le jugement du Tribunal d'Instance de SANNOIS en date du 23 novembre 1995, - statuant à nouveau, - vu l'article 7 c de la loi du 06 juillet 1989, - vu le décret du 26 août 1987, - condamner Madame Anne Marie X... à lui verser la somme de 20.438,71 francs au titre des loyers et charges ainsi que des frais de remise en état, avec intérêts de droit à compter de la demande du 28 novembre 1994 et capitalisation des intérêts année par année, - la condamner au paiement de la somme de 5.000 francs à titre de dommages-intérêts, - la condamner au paiement de la somme de 5.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - la condamner aux dépens de première instance et d'appel dont recouvrement au profit de Maître DELCAIRE, Avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Madame X..., à laquelle a été accordée l'aide juridictionnelle totale par décision du 20 novembre 1996) réplique que la Société HABITAT EN FRANCE ne peut justifier utilement le caractère non contradictoire de l'état des lieux de sortie puisque, d'une part, elle était en mesure d'établir un pré-état des lieux durant les trois mois de préavis, et, d'autre part, elle a réussi, contrairement à ses allégations, à joindre la locataire après son départ, afin de l'informer de la prolongation des effets du bail jusqu'à ce qu'il soit procédé à l'enlèvement de la cuisine équipée restée dans l'appartement.

Elle soutient également que la société bailleresse, en dressant deux

états des lieux inégalement détaillés, se ménage la faculté d'imputer au locataire des désordres préexistants à son entrée dans les lieux et à lui faire abusivement supporter les frais afférents aux travaux de remise en état.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - déclarer la Société HABITAT EN FRANCE non fondée en son appel, - confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal d'Instance de SANNOIS en date du 23 novembre 1995 sauf en ce qu'il a condamné Madame X... aux dépens de première instance, - rejeter la demande de dommages et intérêts de la Société HABITAT EN FRANCE, - condamner la Société HABITAT EN FRANCE aux dépens de première instance et d'appel de recouvrement au profit de la SCP KEIME-GUTTIN, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

En réponse, la Société HABITAT EN FRANCE fait valoir qu'un état des lieux de sortie ne peut être établi tant que le bien, objet du bail, n'est pas libre de tous occupants et meubles, qu'en l'espèce, la bailleresse a fait réaliser cet état des lieux deux jours après qu'il a été procédé par la locataire à l'enlèvement de la cuisine équipée restée dans l'appartement et qu'il ne saurait, dès lors, lui être reproché un manque de diligence.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - adjuger à la concluante l'entier bénéfice de ses précédentes écritures, - statuer sur les dépens ainsi que précédemment requis.

L'ordonnance de clôture a été signée le 19 mars 1998 et l'affaire plaidée pour l'appelante à l'audience du 30 avril 1998.

SUR CE, LA COUR,

I - Considérant qu'il est constant que Madame Y... épouse X... avait donné congé pour le 10 avril 1994, et que la

bailleresse, qui est une professionnelle de la location immobilière devait donc prendre toutes mesures utiles pour qu'à cette date -qui devait normalement correspondre au départ des lieux- un état des lieux de parties soit établi contradictoirement, dans les conditions prévues par l'article 3 de la loi du 06 juillet 1989 ; que la Société d'H.L.M. "H.I.F." ne démontre pas avoir convoqué la locataire pour procéder à cet état des lieux, soit le 10 avril 1994, soit pour une date ultérieure convenue entre elles ; qu'en fait, ce n'est que le 02 mai 1994 qu'un état des lieux a été établi, non contradictoirement, par la gardienne de l'immeuble qui n'est pas une "partie" (au sens de l'article 3 de la loi) et qui est la salariée de la Société H.L.M. et non pas sa mandataire ; que cette gardienne n'avait donc pas qualité pour rédiger, seule, ce document dont la valeur probante n'est pas retenue par la Cour ; que la Société de H.L.M. a ensuite fait établir, ce même 02 mai 1994, un procès-verbal de constat des lieux par huissier, mais qu'il est constant que celui-ci n'indique pas quelles diligences il avait faites pour convoquer la locataire sortante et quelle était l'adresse de celle-ci ; qu'en outre, rien ne démontre que ce procès-verbal, établi de manière non contradictoire, aurait ensuite été dénoncé à Madame X..., notamment lorsque l'adresse de celle-ci a été découverte en CORSE ; que ce procès-verbal de constat d'huissier ne répond donc pas aux exigences de l'article 3 de la loi d'ordre public du 06 juillet 1989 puisque, notamment, la Société H.L.M. n'était pas présente et que la gardienne de l'immeuble qui a, seule, assisté aux opérations de l'huissier n'est pas "partie" et n'est pas la mandataire de la bailleresse ; que la valeur probante de ce constat est insuffisante et n'est pas davantage retenue ; que la Société H.I.F. ne fiat donc pas la preuve qui lui incombe de la réalité des dégradations et pertes qu'elle reproche à Madame X... (article 7 - c) de la loi du 06 juillet

1989), et des réparations locatives (décret n° 87-712 du 26 août 1987) qu'elle entend lui réclamer ;

Considérant qu'elle est par conséquent déboutée de ses demandes de réparations, de ces chefs et de capitalisation des intérêts, et que le jugement déféré est confirmé sur ce point ; qu'il est souligné que les travaux invoqués par la Société H.I.F. pour un montant total de 27.890,65 francs, ont été exécutés, dès le 15 mai 1994, c'est-à-dire à peine 13 jours après l'établissement de ce procès-verbal de constat non contradictoire, et non dénoncé à la locataire sortante ; qu'en outre, et en tout état de cause, le propre huissier de la Société H.L.M. n'a parlé que de peintures en état d'usage ou présentant des , alors que la bailleresse a estimé qu'il y avait lieu de refaire des peintures complètes dans la cuisine, la salle de bains et les W.C. (où pourtant l'huissier avait constaté que la peinture des murs et du plafond était "en bon état") ; que, de même, la facture produire par l'appelante indique la dépose et la réfection de 5,50 m2 de carrelage dans une pièce non précisée, alors que l'huissier simplement noté que des carreaux de fa'ence de la salle de bains étaient "décollés du mur-support" ; qu'enfin, cette facture mentionne 455 francs de "repose de ligne E.D.F. piratée", alors qu'aucune mention du constat de l'huissier ne parle de cette ligne ;

II - Considérant que la société appelante ne démontre pas que Madame X... aurait été de "mauvaise foi", comme elle le prétend, et qu'elle est donc déboutée de sa demande en paiement de 5.000 francs de dommages et intérêts de ce chef ;

Considérant que l'appelante succombe en ses demandes et que, compte tenu de l'équité, elle est donc déboutée de sa demande en paiement de 5.000 francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement,

Déboute la S.A. HABITAT EN FRANCE (anciennement H.I.F.) des fins de son appel et de toutes ses demandes que celui-ci comporte,

Confirme en son entier le jugement déféré,

Condamne l'appelante à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP d'Avoués KEIME et GUTTIN conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile et à celles de la loi sur l'aide juridictionnelle.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-4490
Date de la décision : 29/05/1998

Analyses

BAIL A LOYER (loi du 6 juillet 1989)

Ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité des dégradations et des pertes qu'il reproche au preneur en vertu de l'article 7 c de la loi du 6 juillet 1989 et des réparations locatives qu'il entend lui réclamer, le bailleur qui produit un état des lieux établi non contradictoirement par une gardienne d'immeuble qui n'est pas "partie" au sens de l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989, celle-ci étant salariée et non mandataire du bailleur, sans que les mesures utiles ait été prises pour convoquer le locataire sortant. De même, ne saurait être retenu comme preuve un procès-verbal de constat des lieux par huissier qui n'indique pas les diligences accomplies pour convoquer le locataire, ni l'adresse de celui-ci, rien ne démontrant que celui-ci ait été dénoncé au locataire dont l'adresse avait été ultérieurement retrouvée. Ce procès-verbal ne répond pas aux exigences de l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur n'étant pas présent et la gardienne n'ayant pas la qualité de "partie"


Références :

Loi du 6 juillet 1989, articles 3, 7

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-05-29;1996.4490 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award