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22/05/1998 | FRANCE | N°1997-1711

France | France, Cour d'appel de Versailles, 22 mai 1998, 1997-1711


Le 5 février 1996, la Société ALBIZ INTERNATIONAL a déposé une requête au greffe du tribunal d'instance de VERSAILLES aux fins de convocation de Monsieur X... à une audience de conciliation en matière de saisie des rémunérations, aux fins de paiement de la somme de 184.683,74 Francs, sur le fondement d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de PARIS le 17 mai 1995.

Monsieur X... a exposé qu'il avait formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt susvisé ; qu'après vérifications, il est apparu que la Société ALBIZ INTERNATIONAL n'exerce plus aucune activité et n'

a plus de siège social ; que par conséquent, il craint que dans l'hypothès...

Le 5 février 1996, la Société ALBIZ INTERNATIONAL a déposé une requête au greffe du tribunal d'instance de VERSAILLES aux fins de convocation de Monsieur X... à une audience de conciliation en matière de saisie des rémunérations, aux fins de paiement de la somme de 184.683,74 Francs, sur le fondement d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de PARIS le 17 mai 1995.

Monsieur X... a exposé qu'il avait formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt susvisé ; qu'après vérifications, il est apparu que la Société ALBIZ INTERNATIONAL n'exerce plus aucune activité et n'a plus de siège social ; que par conséquent, il craint que dans l'hypothèse où l'arrêt serait cassé, il ne puisse obtenir restitution des sommes réglées par lui en exécution de cette décision ; que de surcroît, la somme mise à sa charge ne constitue qu'une provision susceptible d'être révisée, notamment à la baisse.

Il a donc demandé au tribunal de dire que les sommes prélevées sur ses rémunérations seront versées sur un compte séquestre dans l'attente de la décision de la Cour de cassation et ce, en application des dispositions de l'article L.145-5 du Code du travail qui attribue au juge d'instance les pouvoirs du juge de l'exécution. La Société ALBIZ INTERNATIONAL a maintenu sa demande et précisé

qu'elle était régulièrement immatriculée au registre du commerce et que le Kbis confirmait la réalité de son siège social situé 17 rue des Petits Carreaux 75002 PARIS.

Par jugement en date du 2 mai 1996, le tribunal d'instance de VERSAILLES a rejeté la demande de séquestre de Monsieur X..., aux motifs qu'il ressort des dispositions de l'article L.145-5 du Code du travail qu'en matière de saisie des rémunérations, le juge compétent est le juge d'instance qui agit en tant que tel et non en qualité de juge de l'exécution, de sorte qu'il ne bénéficie des pouvoirs de celui-ci que dans le cadre limité de cette saisie particulière, que les textes qui relatifs à cette saisie ne comportent aucune disposition autorisant le juge à ordonner le séquestre des sommes saisies et, qu'au surplus, les possibilités de séquestre offertes au juge de l'exécution lui-même sont prévues dans l'intérêt du ou des créanciers et non dans celui du débiteur.

Le tribunal a également ordonné la réouverture des débats afin de permettre aux parties de s'expliquer sur les modalités de paiement de la dette que pourrait proposer Monsieur X....

Par jugement en date du 27 juin 1996, le tribunal d'instance de VERSAILLES, constatant que la Société ALBIZ INTERNATIONAL dispose d'un titre exécutoire et qu'aucune conciliation n'est intervenue

entre les parties, a autorisé la saisie des rémunérations de Monsieur X... pour la somme de 162.073,20 Francs.

Le 4 février 1997, M. X... a interjeté appel.

Il reprend les arguments développés en première instance, notamment quant à l'arrêt de ses activités par la Société ALBIZ INTERNATIONAL et à son absence de siège social, ainsi que relativement au caractère de provision de la somme allouée par l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS en date du 17 mai 1995.

Il demande donc à la Cour de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Et statuant à nouveau, surseoir à statuer sur toutes les condamnations prononcées à l'encontre du concluant dans l'attente de l'issue de la procédure pendante devant la Cour de Cassation, - ordonner l'établissement d'un séquestre chargé de recueillir les sommes qui pourraient être prélevées dans le cadre de la saisie-arrêt sur salaires dont Monsieur Bruno X... est l'objet, A titre subsidiaire, accorder les plus larges délais à Monsieur Bruno X... pour s'acquitter de sa dette en applciation des dispositions de l'article 1244-1 du Code civil, - condamner la Société ALBIZ INTERNATIONAL à

régler à Monsieur Bruno X... la somme de 15.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner la Société ALBIZ INTERNATIONAL aux entiers dépens de première instance et d'appel lesquels pourront être recouvrés par Maître TREYNET, avoué, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La Société ALBIZ INTERNATIONAL rappelle que par l'arrêt précité, qui constitue un titre exécutoire, Monsieur X... a été condamné à lui verser la somme provisionnelle de 150.000 Francs pour concurrence déloyale à son préjudice ; l'expert désigné par la Cour d'Appel de PARIS a déposé son rapport, aux termes duquel il évalue son préjudice à la somme de 252.310 Francs, de sorte qu'elle a déposé des conclusions sollicitant la condamnation solidaire de Monsieur X... et de la société IDBH, aujourd'hui en liquidation judiciaire, à lui verser la somme de 500.000 Francs à titre de dommages-intérêts.

Elle ajoute que Monsieur X... a laissé périmer son pourvoi en cassation contre l'arrêt du 17 mai 1995 et que par ordonnance du Premier Président de la Cour de cassation du 20 août 1996, l'instance a été retirée du rôle en application des dispositions de l'article 1009-1 du nouveau code de procédure civile.

En réponse aux moyens de l'appelant, elle déclare être réellement

domiciliée 17 rue des Petits carreaux à Paris 2ème, où elle bénéficie d'un bail précaire qui lui a été consenti par la Société GRENE et qu'elle a fait enregistrer une boîte postale mentionnant cette adresse au bureau de la poste Paris Sentier, où elle reçoit ses divers avis de charges (Trésor public, URSSAF, etc..)

Elle demande donc à la Cour de : - lui donner acte de ce que son siège social est 17 rue des Petits carreaux à Paris 2ème,

- déclarer Monsieur X... irrecevable et mal fondé en son appel, - le débouter de toutes ses demandes, - confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, - condamner Monsieur X... à lui payer la somme de 20.000 Francs en vertu des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- condamner Monsieur X... en tous les dépens et dire qu'ils pourront être recouvrés directement par la SCP GAS, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 19 février 1998 et l'affaire a été plaidée pour l'intimée à l'audience du 7 avril 1998, tandis que l'appelant faisait déposer son dossier.

SUR CE, LA COUR,

1) Sur la demande de sursis à statuer,

Considérant que l'intimée verse aux débats l'arrêt rendu par la Cour d'appel de PARIS le 17 mai 1995 condamnant solidairement Monsieur X... à lui verser la somme de 150.000 Francs à titre de provision sur dommages-intérêts et celle de 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que nonobstant le pourvoi en cassation formé par Monsieur X... contre cet arrêt, cette décision constitue un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible ; qu'à titre surabondant, par ordonnance du 20 août 1996 versée au dossier par la Société ALBIZ INTERNATIONAL, le Premier Président de la Cour de cassation a retiré du rôle l'instance ouverte sur la déclaration de pourvoi de Monsieur X... et de la Société IDBH, en application des dispositions de l'article 1009-1 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant que le créancier justifiant des conditions requises par l'article R. 145-1 du Code du travail pour faire procéder à la saisie des rémunérations de son débiteur, il n'y a pas lieu à sursis à statuer dans l'attente de la procédure pendante devant la Cour de cassation ; qu'il convient de cofirmer le jugement déféré qui a autorisé la saisie des rémunérations pour la somme de 162.073,20

Francs ;

2) Sur la demande de désignation d'un séquestre,

Considérant qu'ainsi que l'a relevé le premier juge dans son premier jugement du 2 mai 1996, auquel se réfère expressément le jugement déféré, les textes législatifs et réglementaires spécifiques à la saisie des rémunérations ne comportent aucune disposition autorisant le juge d'instance à ordonner le séquestre des sommes prélevées sur les rémunérations du débiteur ; qu'en effet, cette possibilité de séquestre n'est expressément prévue par le décret du 31 juillet 1992 que pour la saisie-attribution, la saisie-vente, la saisie conservatoire des créances et celle des biens placés dans un coffre fort ; qu'il ne peut donc être fait droit à la demande de l'appelant de désignation d'un séquestre;

Considérant à titre surabondant que la Société ALBIZ INTERNATIONAL produit un extrait K bis du 4 décembre 1995 qui atteste de l'existence de cette société et de son siège social au 17 rue des Petits Carreaux à Paris 12ème ; qu'elle produit également le bail précaire concernant un bureau de 20 m à cette adresse, qui lui a été consenti le 31 octobre 1995 par la Société GRANEK, le contrat d'abonnement à une boîte postale du bureau de la poste de PARIS SENTIER en date du 25 janvier 1996, une facture émise par elle (sans date) et un bordereau d'avis de versement du Trésor public pour l'exercice 1996 ; que l'ensemble de ces documents, qui portent l'adresse de l'intimée, justifient de la réalité de son siège social

; qu'il convient donc de lui en donner acte; que la demande de Monsieur X... en désignation de séquestre n'en est que davantage dénuée de fondement ;

3) Sur la demande de délais de paiement,

Considérant que Monsieur X... ne produit aucun élément relatif à ses ressources et à ses charges ; qu'ayant d'ores et déjà bénéficié de délais de fait en raison de la durée de la procédure, il ne formule aucune offre précise de paiement et n'indique pas comment il entend régler sa dette dans le délai de deux ans prévu par l'article 1244-1 du Code civil, ni même à l'issue de ces deux ans dans l'hypothèse d'un report ; que la Cour le déboute donc de sa demande de délais de paiement ; qu'en tout état de cause, la saisie des rémunérations ne peut porter que sur leur proportion saisissable ;

4) Sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Considérant qu'eu égard à l'équité, il y a lieu d'allouer à la Société ALBIZ INTERNATIONAL la somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

5) Sur le caractère abusif de l'appel,

Considérant qu'il est patent que l'appel contre une décision ne tranchant pas le fond, mais seulement relative à l'exécution d'une décision de justice exécutoire, fondé sur des moyens totalement inopérants, n'a eu pour but que de retarder l'exécution de l'arrêt du 17 mai 1995; qu'il est donc purement et clairement dilatoire ; qu'en application de l'article 559 du Nouveau Code de Procédure Civile, la Cour condamne Monsieur X... à une amende civile de 3.000 Francs ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

CONFIRME en son entier le jugement déféré ;

ET Y AJOUTANT :

DONNE acte à la société ALBIZ INTERNATIONAL de ce que son siège

social est 17 rue des Petits Carreaux à PARIS 2ème ;

DEBOUTE Monsieur X... des fins de toutes ses demandes ;

CONDAMNE Monsieur X... à payer à la Société ALBIZ INTERNATIONAL la somme de 5.000 Francs (CINQ MILLE FRANCS) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Monsieur X... à une amende civile de 3.000 Francs (TROIS MILLE FRANCS) sur le fondement de l'article 559 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

LE CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP GAS, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Et ont signé le présent arrêt :

Le Greffier,

Le Président, Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-1711
Date de la décision : 22/05/1998

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Saisie et cession des rémunérations - Procédure

En matière de saisie des rémunérations les textes législatifs et réglementaires n'autorisent pas le juge d'instance à ordonner le séquestre des sommes prélevées sur les rémunérations du débiteur, sauf dans les cas expressément prévus par le décret du 31 juillet 1992 : saisie-attribution, saisie-vente, saisie conservatoire des créances et saisie des biens placés dans un coffre-fort. Il en résulte qu'en l'espèce, un débiteur objet d'une demande en saisie de ses rémunérations n'est pas fondé à solliciter la mise sous séquestre des sommes prélevées


Références :

Décret du 31 juillet 1992

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-05-22;1997.1711 ?
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