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07/05/1998 | FRANCE | N°1994-9050

France | France, Cour d'appel de Versailles, 07 mai 1998, 1994-9050


Par acte sous seing privé en date du 7 novembre 1989, la Société SOFI SOVAC a consenti une ouverture de crédit d'un montant maximum de 40.000 Francs à Monsieur X... Y.... Après un réechelonnement des sommes dues intervenu le 7 août 1991, de nouvelles échéances sont restées impayées.

Par exploit en date du 3 mai 1994 la Société SOFI SOVAC a fait assigner Monsieur X... aux fins d'obtenir paiement des sommes de : . 40.967,18 Francs pour solde de crédit, . 2.500 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout assorti de l'exécution provi

soire. Monsieur X... a répliqué que l'action introduite par la Société...

Par acte sous seing privé en date du 7 novembre 1989, la Société SOFI SOVAC a consenti une ouverture de crédit d'un montant maximum de 40.000 Francs à Monsieur X... Y.... Après un réechelonnement des sommes dues intervenu le 7 août 1991, de nouvelles échéances sont restées impayées.

Par exploit en date du 3 mai 1994 la Société SOFI SOVAC a fait assigner Monsieur X... aux fins d'obtenir paiement des sommes de : . 40.967,18 Francs pour solde de crédit, . 2.500 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout assorti de l'exécution provisoire. Monsieur X... a répliqué que l'action introduite par la Société SOVAC était forclose.

Par jugement contradictoire et en premier ressort en date du 7 juillet 1994, le Tribunal d'Instance de SAINT GERMAIN EN LAYE, faisant grief au demandeur de ne produire qu'un décompte postérieur au rééchelonnement opéré le 7 août 1991, a rendu la décision suivante : - déboute en l'état la Société SOFI SOVAC de ses demandes, - la condamne aux dépens.

Le 28 novembre 1994, la Société SOFI SOVAC a interjeté appel. Elle fait valoir que, conformément aux exigences des premiers juges, elle verse aux débats un décompte complet des sommes dues et établit ainsi l'existence et le montant de sa créance.

Elle sollicite également le versement de la somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la Société SOFI SOVAC, Y faisant

droit, - infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau, - condamner Monsieur X... à payer à la Société SOFI SOVAC la somme de 40.967,18 Francs, outre les intérêts de retard au taux contractuel de 17,90 % l'an à compter du 14 février 1994, - dire que les intérêts ayant couru depuis plus d'une année entière produiront eux-mêmes intérêts par application de l'article 1154 du Code Civil à compter de l'assignation, - condamner Monsieur Y... X... à porter et payer à la concluante la somme de 5.000 Francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner Monsieur Y... X... en tous les dépens, - dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur X... réplique que la Société SOFI SOVAC, en s'abstenant de présenter des comptes compréhensibles et d'informer la Cour des avenants aux conventions conclues avec son client le 16 novembre 1992, ne justifie pas sa créance.

Par conséquent, il demande à la Cour de : - constater que la Société SOFI SOVAC ne présente à l'appui de sa demande aucune pièce conforme aux accords contractuels, - confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, - condamner la Société SOFI SOVAC aux entiers dépens qui seront recouvrés pour ceux le concernant par Maître BINOCHE, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans des conclusions complémentaires Monsieur X... ajoute que le prêt qui lui a été consenti a fait l'objet d'un réaménagement constituant une novation, le 16 novembre 1992, que la Société SOVAC,

n'ayant formulé aucune réclamation fondée sur le nouveau contrat de prêt, se heurte en application de l'article L311-37 alinéa 2 du Code la consommation à la forclusion de son action en paiement.

Par conséquent, il demande à la Cour de : - adjuger au plus fort au concluant le bénéfice de ses précédentes écritures, Vu l'article L 311-37 alinéa 2 du Code de la consommation : - déclarer forclose l'action de la Société SOFI SOVAC, - statuer sur les dépens comme précédemment requis.

La Société SOVAC soutient que le réaménagement de la dette de Monsieur X..., opéré le 16 novembre 1992, avait pour objet un report des échéances impayées au-delà du terme initial et la modification de la durée des remboursements, de sorte qu'il ne saurait constituer une novation. Dès lors, le délai biennal de forclusion, dont le point de départ est, en vertu de l'article L311-37 du Code de la consommation, fixé à la première échéance impayée postérieure audit réaménagement, n'est nullement expiré.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - adjuger à la concluante l'entier bénéfice de ses précédentes écritures, - constater que l'action de la société SOFI SOVAC n'est pas forclose, - débouter Monsieur Y... X... de toutes ses demandes, fins et conclusions. A titre subsidiaire et en toute hypothèse, condamner Monsieur X... à payer à la concluante la somme de 28.540,02 Francs au taux de 14,50 % l'an à compter du 16 novembre 1992, - condamner Monsieur Y... X... en tous les dépens, - dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS etamp;

ASSOCIES, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Dans ses dernières conclusions, Monsieur X... fait valoir, au cas où la Cour de céans déclarerait l'action de la Société SOVAC recevable, que le contrat d'ouverture de crédit, destiné à l'acquisition d'un véhicule, n'était pas adapté à l'opération ainsi financée et, partant, frauduleux ; que la déchéance de tout droit à intérêts doit être prononcée à l'encontre de la Société SOVAC, tant en raison de la fraude susvisée qu'en raison de la méconnaissance par cette dernière de l'obligation d'information annuelle, et ce conformément à l'article L 311-9 du Code la consommation.

Par conséquent, il demande à la Cour de : - adjuger au plus fort au concluant le bénéfice de ses précédentes écritures, Subsidiairement, constater que le contrat d'ouverture de crédit du mois de novembre 1989 est par nature un contrat amortissable et donc inadapté à l'opération litigieuse. Que s'agissant d'une ouverture de crédit, il obéit aux dispositions d'ordre public de l'article L 311-9 du Code de la consommation. - constater qu'aucune information annuelle n'a été adressée au concluant, En conséquence, dire SOFI SOVAC déchue de tout droit à intérêts, - constater que Monsieur X... a d'ores et déjà versé la somme de 44.380,38 Francs, - condamner, en conséquence, la Société SOFI SOVAC au paiement de la somme de 4.380,38 Francs au titre du trop-perçu et ce, avec intérêts de droit à compter du mois d'avril 1993, - Statuer sur les dépens comme précédemment requis.

Dans ses dernières conclusions, la Société SOVAC soutient que la contestation relative à l'offre préalable, qui doit être formulée dans un délai de deux ans à compter du jour de sa signature ou, au

plus tard, du jour où elle est devenue parfaite, est tardive et conclut à la forclusion de Monsieur X....

Elle fait valoir, en outre, que, contrairement aux allégations de l'intimé, elle a dispensé les informations auxquelles elle est légalement tenue.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - adjuger à la concluante l'entier bénéfice de ses précédentes écritures, Vu l'article L 311-37 du Code de la consommation : - constater que Monsieur X... est irrecevable en ses contestations, - le débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions, Sur les dépens, statuer ce que précédemment requis.

L'ordonnance de clôture a enfin été signée, le 26 mars 1998 après six renvois, c'est-à-dire le jour des plaidoiries ; les deux parties ont fait déposer leurs dossiers.

SUR CE, LA COUR,

I/ Considérant que Monsieur X... Y... a attendu le 25 juin 1997 pour invoquer, pour la première fois, une prétendue forclusion biennale qui atteindrait l'action au fond engagée contre lui, devant le Tribunal d'Instance de SAINT GERMAIN EN LAYE, le 22 mars 1994, et que, pour ce faire, il soutient à tort, que le réaménagement de sa dette, le 7 août 1991, constituerait, selon lui, une novation ; qu'en réalité, en droit, le réaménagement de l'article L.311-37 alinéa 2 du Code de la consommation n'a pour but que de fixer les modalités de règlement des échéances impayées, sans que, pour autant, il n'y avait une nouvelle dette se substituant à l'ancienne, ni aucun changement

de débiteur, ni aucun nouveau créancier ; que les conditions de l'article 1271 du Code civil relatif à la novation ne sont donc pas remplies en l'espèce et que le débiteur-emprunteur est donc débouté des fins de ce moyen ; qu'il est ajouté, à toute fins utiles, que pas davantage, ces modalités de réaménagement de paiement des échéances impayées ne pourraient constituer une quelconque remise de dette, au sens de l'article 1287 du Code civil ;

Considérant que l'action en paiement de la S.A SOFI SOVAC n'est donc pas forclose ;

II/ Considérant, quant au fond de la créance alléguée par cette société, que Monsieur X... fait état d'un "avenant" qui est constitué par un document contractuel du 16 novembre 1992 par lequel la Société SOFI SOVAC lui a expressément accordé un nouvel échéancier portant sur un solde de 28.540,02 Francs, remboursable par 1.300 Francs par mois, avec intérêt ramené de 17,90 % à 14,50 %, soit 26 échéances restant dues, du 10 novembre (semble-t-il) 1992 au 10 janvier 1995 ;

Considérant qu'en réalité, cet "avenant" (sic) est lui aussi un réaménagement (au sens de l'article L311-37 alinéa 2) et qu'il a trait simplement aux modalités de règlement des échéances impayées, mais sans qu'il y ait pour autant une quelconque novation, notamment par création d'une nouvelle dette qui se serait substituée à l'ancienne (laquelle se trouverait ainsi éteinte) ;

Considérant, par ailleurs, que l'assignation en paiement devant le Tribunal d'Instance du 22 mars 1994 a bien été formée dans le délai de deux années de l'article L311-37 et que cette seconde convention

de réaménagement du 16 novembre 1992 n'est donc pas "caduque" (sic) comme le prétend Monsieur X... ;

III/ Considérant que pour la première fois, le 9 février 1998, Monsieur X... a contesté la régularité du contrat initial dont il dit maintenant qu'il serait "frauduleux" au motif, selon lui, qu'il ne serait "pas adapté à l'opération à laquelle il (était) destiné" ; que par la voie de ce moyen, pratiquement non développé et en tous cas infondé et injustifié, l'emprunteur prétend ensuite que cette "fraude" (sic) devait entraîner une déchéance du droit aux intérêts (article L.311-33 du Code de la consommation) ;

Considérant qu'en tout état de cause, il est de droit constant que le point de départ du délai biennal de forclusion opposable à l'emprunteur qui conteste la régularité de l'offre préalable -par voie d'action ou d'exception- est la date à laquelle le contrat de crédit est définitivement formé ; qu'il est donc certain que, dans la présente espèce, le contrat étant du 7 novembre 1989 et l'exception ayant été soulevée le 9 février 1998, la forclusion biennale est acquise et peut donc être, à bon droit opposée à Monsieur X... ; que ses contestations de la régularité et ses demandes en déchéance du droit aux intérêts sont donc irrecevables ;

IV/ Considérant, quant au montant de la créance alléguée par la Société SOFI SOVAC, que Monsieur X... a, dans ses conclusions du 9 février 1998 (cote 13 du dossier de la Cour) explicité les paiements qu'il avait fait, soit : . virements et prélèvements à partir des comptes de la caisse d'épargne pour un total de 30.238,49 Francs et sur le C.I.C. pour un montant de 1.141,89 Francs, . compte-courant Trésor Public pour 11.700 Francs.

Considérant que l'intéressé a communiqué plusieurs documents justificatifs (notamment de 1992 et 1993) le 6 février 1998 (cote 11 du dossier de la Cour), qui n'ont pas été discutés ni critiqués par la société appelante qui a pourtant conclu à nouveau et en dernier le 19 mars 1998 ;

Mais considérant qu'il demeure que le solde visé dans la convention de réaménagement du 16 novembre 1992, a nécessairement pris en compte tous les paiements faits antérieurement à cette date ; qu'en ce qui concerne le solde de 28.540,02 Francs arrêté par ce second réaménagement, qu'il appartient à l'emprunteur de faire la preuve des paiements qu'il a faits pour respecter cet échéancier comportant 26 mensualités ; que parmi les pièces communiquées par Monsieur X... (cote 6 du dossier de la Cour) seuls sont à retenir les justificatifs de paiement suivants, effectués par virements de la Caisse d'Epargne, après ce 16 novembre 1992 : . 1.300 francs (le 11 mars 1993), . 1.300 francs (le 12 janvier 1993), . 1.300 francs (le 11 décembre 1992), . 1.300 francs (le 14 avril 1993), . 1.300 francs (le 12 novembre 1993), Soit un total de : 6.500 Francs qui est à imputer sur le solde de 28.540,02 Francs ; que, compte tenu de ces 6.500 Francs payés, Monsieur X... reste donc devoir la somme de 22.040,02 Francs qui portera intérêts au taux conventionnel de 14,50% à compter du 12 mai 1993, date de la première échéance demeurée impayée ; qu'aucun prétendu trop-perçu ne peut donc être invoqué par l'intimé qui n'est débouté de ses demandes de ce chef ;

Considérant que l'intimé est, par conséquent, condamné à payer cette somme justifiée et ces intérêts conventionnels à la Société SOFI SOVAC ; que de plus, les intérêts conventionnels échus seront

capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;

V/ Considérant que, compte tenu de l'équité, Monsieur X... est condamné à payer à la Société SOFI SOVAC la somme de 5.000 Francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

I/ VU l'article L311-37 alinéa 2 du Code de la consommation ;

DEBOUTE Monsieur Y... X... de son exception de forclusion biennale qu'il oppose aux demandes en paiement de la Société SOFI SOVAC ;

II/ LE DEBOUTE de son moyen tendant à faire juger que la convention de réaménagement du 16 novembre 1992 serait "caduque" (sic) ;

III/ DECLARE forcloses et irrecevables les demandes et exceptions de Monsieur X... au sujet de la régularité (et de ses conséquences) du contrat de crédit du 7 novembre 1989 ;

IV/ CONDAMNE Monsieur Y... X... à payer à la Société SOFI SOVAC la somme de 22.040,02 Francs (VINGT DEUX MILLE QUARANTE FRANCS DEUX CENTIMES) avec intérêts au taux conventionnel de 14,50 % à compter du 12 mai 1993 ; DIT ET JUGE que ces intérêts à taux conventionnels, échus, seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article

1154 du Code civil ;

DEBOUTE Monsieur X... de ses demandes au sujet d'un prétendu "trop-perçu" ;

V/ CONDAMNE Monsieur X... à payer à la société appelante la somme de 5.000 Francs (CINQ MILLE FRANCS) en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Monsieur Y... X... à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP d'avoués LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1994-9050
Date de la décision : 07/05/1998

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Défaillance de l'emprunteur - Action - Délai de forclusion - Point de départ - Réaménagement ou rééchelonnement de la dette - Définition.

Le réaménagement des échéances impayées prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation n'a pour but que de fixer les modalités des échéances impayées d'une dette. Un tel réaménagement n'emporte aucune substitution de dette, ni aucun changement de créancier susceptible d'entraîner une quelconque novation au sens de l'article 1271 du Code civil. En outre, le réaménagement ne portant que sur les modalités de paiement des échéances impayées ne peut constituer, en application de l'article 1287 du Code civil, une quelconque remise de dette. En l'espèce, un "avenant" par lequel un organisme de crédit consent un nouvel échéancier de règlement des échéances impayées constitue un réaménagement, au sens de l'article L. 311-37 du Code de la consommation, n'impliquant aucune novation par substitution de dette

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Défaillance de l'emprunteur - Action - Délai de forclusion - Point de départ - Contestation de la régularité de l'offre préalable - Date de formation du contrat - Portée - /.

S'agissant de la contestation de la régularité d'une offre préalable de crédit, le point de départ du délai biennal de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation, se situe à la date à laquelle le contrat de crédit est définitivement formé


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-05-07;1994.9050 ?
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