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30/04/1998 | FRANCE | N°1996-1028

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 avril 1998, 1996-1028


Par acte d'huissier en date du 22 août 1995, la SA CREDIT LYONNAIS a fait citer Monsieur Olivier X... devant le Tribunal d'Instance de VERSAILLES, afin de l'entendre condamner, avec exécution provisoire, à lui payer les sommes suivantes : * 36.904,72 Francs avec intérêts au taux contractuel depuis la mise en demeure, * 30.047,51 Francs avec intérêts au taux légal depuis la mise en demeure, * 3.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il a exposé que, suivant acte sous seing privé en date du 23 octobre 1992, il avait consenti un prêt

de 60.000 Francs à Monsieur Olivier X..., remboursable par mensua...

Par acte d'huissier en date du 22 août 1995, la SA CREDIT LYONNAIS a fait citer Monsieur Olivier X... devant le Tribunal d'Instance de VERSAILLES, afin de l'entendre condamner, avec exécution provisoire, à lui payer les sommes suivantes : * 36.904,72 Francs avec intérêts au taux contractuel depuis la mise en demeure, * 30.047,51 Francs avec intérêts au taux légal depuis la mise en demeure, * 3.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il a exposé que, suivant acte sous seing privé en date du 23 octobre 1992, il avait consenti un prêt de 60.000 Francs à Monsieur Olivier X..., remboursable par mensualités de 1.800 Francs, moyennant un taux effectif global de 14,15 % l'an.

Que Monsieur Olivier X... avait cessé de rembourser les échéances à compter du 1er juillet 1993 ; que s'agissant d'un crédit consenti sous forme de découvert en compte, le délai biennal de forclusion courait à compter de la date à laquelle le solde débiteur devenait exigible ; que la mise en demeure entraînant l'exigibilité des sommes (selon lui) était intervenue le 21 février 1994.

De plus, il a ajouté que Monsieur Olivier X... était ainsi titulaire d'un compte de dépôt n° 46432-E, lequel présentait un solde débiteur de 30.047,51 Francs au 31 janvier 1994.

Monsieur Olivier X... a conclu à l'irrecevabilité des demandes formulées par la SA CREDIT LYONNAIS à son encontre, par suite de la forclusion biennale selon lui.

Le tribunal d'instance statuant par jugement du 26 octobre 1995, a

rendu la décision suivante : - déclare irrecevable par suite de forclusion la demande en paiement du solde du prêt consenti le 23 octobre 1992, - déclare recevable l'action en paiement du solde du compte bancaire, - condamne Monsieur X... à payer à la SA CREDIT LYONNAIS la somme de 24.867,02 Francs avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 février 1994, - juge que la SA CREDIT LYONNAIS est déchue du droit aux intérêts, - ordonne l'exécution provisoire, - condamne Monsieur X... aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1.500 Francs en vertu des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le 18 décembre 1995, la SA CREDIT LYONNAIS (SA FINALION) a interjeté appel.

Il demande à la Cour de : - infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la forclusion acquise à la demande de la SA CREDIT LYONNAIS concernant le solde du prêt permanent, Statuant à nouveau, - condamner Monsieur X... à payer au titre du prêt permanent la somme de 36.904,78 Francs augmentée des intérêts au taux contractuel depuis la mise en demeure, - confirmer le jugement entrepris pour le surplus, - condamner Monsieur X... à payer à la SA CREDIT LYONNAIS la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - le condamner aux dépens lesquels seront recouvrés par Maître DELCAIRE, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur Olivier X... n'a pas expressément formé d'appel incident. Il demande à la Cour de :

1) En ce qui concerne le solde du prêt CREDILION du 23 octobre 1992 :

- confirmer la décision rendue par le Tribunal d'Instance de VERSAILLES le 26 octobre 1995, - constater, en effet, que la mise en demeure du 16 juillet 1993 émise par la banque constituait bien un incident de paiement faisant courir le délai biennal de forclusion, - de ce chef, condamner la banque au paiement d'une somme de 5.000 Francs pour appel abusif et de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, 2) En ce qui concerne le solde du compte n° 46432-E : - infirmer la décision rendue par le tribunal de ce chef, - constater que, suite à la mise en demeure du 16 juillet 1993 et à celle du 26 juillet 1993 tous les prélèvements tant de CREDILION que tous les autres prélèvements notamment commissions d'assurance ont tous été refusés, impliquant une rupture de compte, A titre subsidiaire, - constater que depuis le 2 août 1993, il n'y a eu aucune réciprocité de remise confirmant ainsi la rupture de la relation de compte, A titre subsidiaire, - constater que la SA CREDIT LYONNAIS reconnaissait l'application de la loi SCRIVENER du 10 janvier 1978 et la déchéance du droit aux intérêts, - condamner la SA CREDIT LYONNAIS aux dépens lesquels seront recouvrés par la SCP MERLE CARENA DORON, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par arrêt rendu contradictoirement et en dernier ressort le 21 mars 1997, la Cour de céans a rendu la décision suivante : 1) déboute la SA CREDIT LYONNAIS (SA FINALION des fins de ses demandes relatives au prêt permanent CREDILION, II/ Vu les articles 15 et 16 du Nouveau Code de Procédure Civile : - ordonne la réouverture des débats et enjoint : A Monsieur X..., de former expressément un appel incident et de conclure à nouveau sur cette qualité pour critiquer les

dispositions du jugement en ce qui concerne le solde de son compte n° 46432-E, Au CREDIT LYONNAIS, de conclure pour répondre expressément aux moyens et aux demandes de Monsieur X..., appelant-incident, III/ réserve les dépens et sursoit à statuer sur les autres demandes. La SA CREDIT LYONNAIS fait valoir, à l'appui de sa demande de confirmation du jugement de première instance, que l'action en paiement par elle introduite le 22 août 1995 n'était pas prescrite (loi du 10 janvier 1978) ; qu'en effet, le courrier envoyé à Monsieur X..., le 26 juillet 1993, ne constituait pas une interpellation suffisante pour être qualifiée de mise en demeure, au sens de l'article 1139 du Code civil, et ne pouvait, de ce fait, valoir point de départ du délai de forclusion biennale prévu par la loi du 10 janvier 1978.

Elle ajoute qu'en revanche, seule la lettre en date du 21 février 1994 est susceptible de recevoir une telle qualification, de sorte que la forclusion n'est pas acquise.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - donner acte à la SCP DELCAIRE ET BOITEAU, associés, de ce qu'elle se constitue aux lieu et place de Maître DELCAIRE, avoué, Vu l'arrêt de la Cour de céans en date du 21 mars 1997 : - confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré recevable la demande en paiement de la SA CREDIT LYONNAIS relative au solde débiteur du compte de dépôt de Monsieur X... numéro 46432-E, pour avoir été introduite dans le délai de deux années suivant la mise en demeure de paiement, - la confirmer encore en ce qu'elle a condamné Monsieur X... à payer à la SA CREDIT LYONNAIS la somme de 24.867,02 Francs à ce titre, assortie des

intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 février 1994, Y ajoutant, ordonner la capitalisation des intérêts, année par année, en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil, - condamner Monsieur X... à régler à la SA CREDIT LYONNAIS une somme de 6.000 Francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - le condamner aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par la SCP DELCAIRE ET BOITEAU, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur X... réplique, dans ses conclusions d'appel incident, que la lettre du 26 juillet 1993 par laquelle la SA CREDIT LYONNAIS réclamait à Monsieur X... le solde débiteur du compte n° 46432-E qui faisait l'objet d'une autorisation de découvert à durée indéterminée, constitue le point de départ du délai biennal de forclusion, en ce qu'elle manifestait, sans équivoque, la volonté de la banque de résilier le crédit. Dès lors, l'action en paiement introduite par la SA CREDIT LYONNAIS le 22 août 1995 était forclose. Monsieur X... ajoute, qu'en tout état de cause, le point de départ du délai biennal de forclusion doit être fixé, au plus tard, le 3 août 1993, date à laquelle il a cessé d'utiliser son compte et confirmé ainsi la résiliation du contrat l'unissant à la banque.

Par conséquent, il demande à la Cour de : . Sur le solde débiteur du compte 464321 : - infirmer la décision rendue par le tribunal de ce chef, - constater que la résiliation du crédit par caisse consenti à Monsieur X... doit être fixée au 26 juillet 1993, - constater que depuis le 3 août 1993, il y a eu aucune réciprocité de remise,

confirmant ainsi la rupture de la relation de compte, - constater, par conséquent, que la forclusion biennale est acquise au concluant, - condamner la banque aux dépens lesquels seront recouvrés par la SCP MERLE CARENA DORON, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 19 mars 1998, soit le jour même de l'audience à laquelle l'affaire a été plaidée pour l'intimé, tandis que l'appelante faisait déposer son dossier.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que selon les dispositions de l'article 1139 du Code civil, la mise en demeure d'un débiteur résulte d'une sommation ou d'un acte équivalent "telle une lettre missive lorsqu'il ressort de ses termes une interpellation suffisante" ; que l'article 1153 alinéa 3 du Code civil contient, lui aussi, une définition identique de la sommation de payer ;

Considérant que le découvert du compte de dépôt n°46432-E, toléré par la banque pendant plusieurs mois, s'analyse comme un concours bancaire soumis aux dispositions de la loi du 10 janvier 1978, ainsi que l'a retenu le premier juge; que cette analyse n'est d'ailleurs plus contestée par aucune des parties ; que dès lors, le point de

départ du délai de forclusion de l'action en paiement, prévu par l'article L.311-37 du Code de la consommation, se situe à la date à laquelle le solde débiteur est devenu exigible, soit celle de la clôture du compte, qui est en l'espèce, l'événement qui donne naissance à l'action ;

Considérant que la lettre du 26 juillet 1993, invoquée par Monsieur X... comme courrier lui signifiant la clôture du compte, outre le fait qu'elle ne lui a pas été adressée en recommandé, ne comporte aucune mise en demeure de payer le solde débiteur, mais seulement une invitation à régulariser la situation du compte, en mentionnant la possibilité de prendre contact avec son correspondant à la banque ; que cette lettre n'a donc pas entraîné la clôture du compte et partant, l'exigibilité du solde débiteur, au contraire de celle, recommandée avec accusé de réception en date du 21 février 1994, par laquelle l'appelante a mis en demeure Monsieur X... de lui verser les sommes restant dues au titre du prêt et l'a avisé du montant du solde débiteur de son compte de dépôt, en précisant qu'à défaut de paiement, elle serait dans l'obligation de recourir à son service contentieux ;

Considérant que le rejet des échéances du prêt postérieurement à la lettre du 26 juillet 1993, implique que la banque avait décidé alors de laisser impayées ces échéances et de ne pas augmenter le découvert

du compte, mais nullement qu'elle a voulu clôturer le compte ; que Monsieur X... a continué à recevoir des relevés de compte jusqu'en janvier 1994, versés aux débats de première instance ; qu'il était donc toujours en mesure d'utiliser ce compte ;

Considérant que, par conséquent, la clôture du compte n'a eu lieu que par l'effet de la lettre du 21 février 1994, comportant mise en demeure d'avoir à payer sous huitaine le solde débiteur ; que le délai biennal de forclusion n'étant pas expiré à la date de l'assignation délivrée par la SA CREDIT LYONNAIS, c'est à juste titre que le premier juge l'a déclarée recevable en son action en paiement, tout en énonçant qu'elle était déchue du droit aux intérêts pour n'avoir pas satisfait aux formalités requises par la loi concernant l'offre préalable de crédit et ce, par application de l'article L.311-33 du Code de la consommation ;

Considérant que la Cour confirme donc le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur X... à payer à la SA CREDIT LYONNAIS la somme de 24.867,02 Francs avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 février 1994 ; qu'en outre, la Cour ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;

Considérant que la SA CREDIT LYONNAIS, qui a interjeté appel du jugement uniquement en ce qu'il a déclaré la forclusion acquise concernant le solde du prêt, a été déboutée de ses demandes au titre de ce prêt ; que par conséquent, la Cour la déboute également de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et la condamne aux dépens ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

VU l'arrêt de la Cour de céans 1ère chambre 2ème section en date du 13 février 1997 .

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur X... à

payer à la SA CREDIT LYONNAIS la somme de 24.867,02 Francs (VINGT QUATRE MILLE HUIT CENT SOIXANTE SEPT FRANCS DEUX CENTIMES) avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 février 1994 ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil ;

DEBOUTE Monsieur X... de son appel incident ;

DEBOUTE la SA CREDIT LYONNAIS de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

LA CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP MERLE CARENA DORON, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, Marie Hélène EDET

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-1028
Date de la décision : 30/04/1998

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Défaillance de l'emprunteur - Action - Délai de forclusion - Point de départ - Découvert en compte bancaire - Date d'exigibilité du solde débiteur

Si en application de l'article L. 311-37 du Code de la consommation le point de départ du délai de forclusion biennale de l'action en paiement du découvert d'un compte de dépôt se situe au jour où le solde débiteur est devenu exigible, c'est-à-dire à la date de clôture du compte, un courrier simple invitant le débiteur à régulariser la situation de son compte ne peut s'analyser en une mise demeure par sommation de payer ou acte équivalent, au sens des articles 1139 ou 1153 alinéa 3 du Code civil. En l'espèce, l'envoi d'un tel courrier manifeste le souci de l'établissement bancaire de ne pas laisser croître le montant du découvert à l'exclusion de toute volonté de clôturer le compte. Partant, le solde débiteur n'étant pas exigible, le délai biennal de forclusion de l'action en paiement n'a pu commencer à courir


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-04-30;1996.1028 ?
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