La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/04/1998 | FRANCE | N°1996-033

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 avril 1998, 1996-033


La société CORETI a pris l'engagement de rembourser au CREDIT LYONNAIS, selon un plan d'amortissement conventionnellement arrêté entre les parties, le solde débiteur d'un compte courant bancaire.

Le dernier règlement, qui devait intervenir dans le cadre de ce plan dans le courant du mois d'octobre 1991, n'a pas été honoré par la société CORETI.

Après diverses mises en demeure, le CREDIT LYONNAIS a obtenu le 26 août 1994 une injonction de payer à l'encontre de la société CORETI à hauteur de la somme de 28.943,57 francs en principal outre les intérêts de retard

.

Statuant sur l'opposition régulièrement formée à l'encontre de cette ordon...

La société CORETI a pris l'engagement de rembourser au CREDIT LYONNAIS, selon un plan d'amortissement conventionnellement arrêté entre les parties, le solde débiteur d'un compte courant bancaire.

Le dernier règlement, qui devait intervenir dans le cadre de ce plan dans le courant du mois d'octobre 1991, n'a pas été honoré par la société CORETI.

Après diverses mises en demeure, le CREDIT LYONNAIS a obtenu le 26 août 1994 une injonction de payer à l'encontre de la société CORETI à hauteur de la somme de 28.943,57 francs en principal outre les intérêts de retard.

Statuant sur l'opposition régulièrement formée à l'encontre de cette ordonnance, le Tribunal de Commerce de VERSAILLES a, par jugement en date du 27 septembre 1995, reconduit les termes de l'injonction de payer et condamné la société CORETI à régler au CREDIT LYONNAIS la somme de 28.943,57 francs avec des intérêts de retard dont le point de départ n'est pas précisé ainsi qu'une indemnité de 3.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

*

Appelante de cette décision, la société CORETI expose, comme elle l'avait fait devant les premiers juges, qu'elle exerce principalement son activité au Za're et que, en raison d'émeutes survenues dans ce pays les 23 et 24 septembre 1991, lesquelles ont entraîné le pillage de ses biens, elle n'a pu faire face à l'échéance du mois d'octobre suivant.

Elle déduit de là qu'elle est fondée à se prévaloir de la force majeure et demande à la Cour de suspendre toute action de recouvrement entreprise à son encontre aussi longtemps qu'elle n'aura pas été indemnisée par sa compagnie d'assurance. Subsidiairement,

elle sollicite les plus larges délais pour s'acquitter de sa dette et elle réclame au CREDIT LYONNAIS la somme de 5.000 francs à titre de dommages et intérêts de même montant sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

*

Le CREDIT LYONNAIS conclut, pour sa part, à la confirmation par adoption de motifs en toutes ses dispositions du jugement déféré, sauf à ce que le point de départ des intérêts de retard soit fixé au 26 août 1994, date de l'ordonnance d'injonction de payer et à se voir autorisé à capitaliser les intérêts. Estimant, par ailleurs, abusive la résistance que lui a opposé la société CORETI, il lui réclame en réparation la somme de 15.000 francs ainsi qu'une indemnité complémentaire de 10.000 francs en couverture des frais exposés en cause d'appel. MOTIFS DE LA DECISION

Considérant qu'il est de principe que la force majeure ne fait obstacle à l'exécution des obligations qu'autant qu'elle empêche le débiteur de donner ou de faire ce à quoi il était obligé ; qu'il suit de là que, si l'empêchement est momentané, le débiteur n'est pas libéré et l'exécution de l'obligation est seulement suspendue jusqu'au moment où la force majeure vient à cesser.

Considérant qu'en l'espèce, la société CORETI se prévaut, pour établir le cas de force majeure, d'une attestation qui lui a été délivrée le 16 décembre 1991 par l'Association Interprofessionnelle Des Hommes d'Affaires Français - A.I.H.A.F. à Kinshasa (Za're), qui est rédigée en ces termes :

" A la suite des émeutes ayant sévi en premier à Kinshasa (Za're) les 23-24 septembre, et par la suite à l'intérieur du pays, nous avons enregistré la déclaration du responsable de la société CORETI, 25,

rue Claude Y..., 78370 PLAISIR - FRANCE, selon laquelle, vu les pillages dont son établissement avait fait l'objet, il avait été contraint de cesser momentanément toutes ses activités et qu'il avait déposé, en conséquence, un dossier relatif aux dommages subis auprès de l'Association Nationale des Entreprises du Za're (ANEZA).

Ces faits constituent un cas de force majeure.

En conformité avec la jurisprudence correspondante en la matière, il est demandé aux établissements financiers de la place ou à l'étranger, qui sont en relations professionnelles avec la société susnommée, de suspendre toute action en recouvrement, le temps de faire jouer par l'intéressé les assurances qu'il aurait souscrites". Considérant cependant, que cette attestation, qui émane d'une association privée dont le rôle au Za're n'est pas clairement définie et qui relate indirectement des faits qui lui ont été rapportés sous forme de déclaration par le dirigeant de la société CORETI, ne saurait suffire à elle seule à établir la force majeure et l'empêchement actuel de la société CORETI de satisfaire à son obligation ; que, notamment, l'appelante ne justifie pas des conséquences précises que les émeutes dont s'agit auraient pu avoir sur ses activités pas plus qu'elle ne démontre que son fonctionnement aurait été durablement paralysé ; qu'il n'est pas davantage justifié de la souscription d'un quelconque contrat d'assurance ou d'une indemnisation en cours à la suite des évènements précités ; que, dans ces conditions, et faute pour l'appelante de rapporter la preuve qui lui incombe, qu'elle n'est pas en mesure, plusieurs années après les faits dénoncés, et pour des raisons indépendantes de sa volonté, de satisfaire à l'engagement pris envers le CREDIT LYONNAIS, l'appel ne peut être que déclaré mal fondé et le jugement déféré confirmé en ce qu'il a condamné la société CORETI à payer au CREDIT LYONNAIS la

somme de 28.943,57 francs en principal, représentant le montant de la dernière échéance, sauf à réparer l'omission de statuer des premiers juges en précisant que les intérêts de retard courront à compter de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer valant mise en demeure, soit à compter du 29 septembre 1994.

Considérant que le CREDIT LYONNAIS est, par ailleurs, fondé à solliciter le bénéfice de la capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil, à compter du 11 octobre 1996, date de la première demande.

Considérant, en revanche, que la banque n'établit pas que la résistance que lui a opposé la société CORETI, dans le conteste précédemment évoqué, ait dégénéré en abus de droit ; qu'elle sera déboutée de la demande en dommages et intérêts qu'elle forme de ce chef.

Mais considérant qu'il serait inéquitable de laisser à cette dernière la charge des frais qu'elle a été contrainte d'exposer devant la Cour ; que la société CORETI sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 6.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ladite indemnité s'ajoutant à celle déjà allouée au même titre en première instance.

Considérant enfin, que l'appelante, qui succombe, supportera les entiers dépens. PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- Reçoit la société CORETI "Compagnie de Réalisation et d'Etude de Travaux Internationaux" SA en son appel, mais dit celui-ci mal fondé en l'en déboute,

- Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf à le compléter en fixant le point des intérêts de retard au 29 septembre 1994, date de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer,

Y ajoutant,

- Autorise le CREDIT LYONNAIS SA à capitaliser les intérêts, conformément à l'article 1154 du Code Civil, et ce, à compter du 11 octobre 1996,

- Rejette la demande en dommages et intérêts pour résistance abusive formée par le CREDIT LYONNAIS SA,

- Condamne cependant l'appelante à payer au CREDIT LYONNAIS SA une indemnité complémentaire de 6.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Condamne également l'appelante aux entiers dépens et autorise la SCP d'Avoués JULLIEN etamp; LECHARNY etamp; ROL à poursuivre directement le recouvrement de la part la concernant, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT qui a assisté au prononcé CL. DAULTIER

F. X...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-033
Date de la décision : 30/04/1998

Analyses

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Exonération - Force majeure

Il est de principe que la force majeure ne fait obstacle à l'exécution des obligations qu'autant qu'elle empêche le débiteur de donner ou de faire ce à quoi il était obligé. Il s'ensuit que, si l'empêchement est momentané, le débiteur n'est pas libéré et l'exécution de l'obligation est seulement suspendue jusqu'au moment où la force majeure vient à cesser


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-04-30;1996.033 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award