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07/04/1998 | FRANCE | N°1998-789

France | France, Cour d'appel de Versailles, 07 avril 1998, 1998-789


RAPPEL DE LA PROCEDURE Le 24 Décembre 1997, Monsieur BELLANCOURT, Juge d'Instruction au Tribunal de Grande Instance de NANTERRE a rendu une ordonnance de refus d'informer ; Ladite ordonnance a été notifiée : - à la partie civile et à son avocat par lettre recommandée le 24 Décembre 1997; Appel de cette ordonnance a été interjeté le 2 Janvier 1998 par Maître Didier SEBAN enregistré au greffe du Tribunal de Grande Instance de NANTERRE le 02/01/1998; Conformément aux dispositions des articles 194 et 197 du Code de procédure pénale, Monsieur le Procureur Général : - a notifié le

12/03/1998 la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience...

RAPPEL DE LA PROCEDURE Le 24 Décembre 1997, Monsieur BELLANCOURT, Juge d'Instruction au Tribunal de Grande Instance de NANTERRE a rendu une ordonnance de refus d'informer ; Ladite ordonnance a été notifiée : - à la partie civile et à son avocat par lettre recommandée le 24 Décembre 1997; Appel de cette ordonnance a été interjeté le 2 Janvier 1998 par Maître Didier SEBAN enregistré au greffe du Tribunal de Grande Instance de NANTERRE le 02/01/1998; Conformément aux dispositions des articles 194 et 197 du Code de procédure pénale, Monsieur le Procureur Général : - a notifié le 12/03/1998 la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience à la partie civile et à son avocat par lettre recommandée le 12/03/1998 ; - a déposé le 10/03/1998 le dossier comportant ses réquisitions écrites au greffe de la Chambre d'Accusation, pour être tenu à la disposition de l'avocat de la partie civile; Le 31 mars 1998 à 10 H 30, Maître SEBAN et Maître HONNORAT ont déposé au greffe de la chambre d'accusation un mémoire, lequel a été visé par le greffier et communiqué à la Cour.

DEROULEMENT DES DEBATS A l'audience en chambre du conseil le 1 Avril 1998 ont été entendus : Monsieur RIQUIN, Conseiller, en son rapport, Maître SEBAN, Avocat de la partie civile, en ses observations; Madame GHESQUIERE-DIERICKX , Substitut Général, en ses réquisitions ; Puis l'affaire a été mise en délibéré au 7 avril 1998

DECISION

Rendue après en avoir délibéré conformément à l'article 200 du Code de Procédure Pénale, par arrêt prononcé en chambre du conseil :

En la forme,

Considérant que cet appel, régulier en la forme, interjeté dans le délai légal, est recevable ;

Au fond,

Considérant qu'il résulte de l'enquête et de l'information présomption des faits suivants :

Le 11 juin 1997, Madame TC déposait plainte avec constitution de partie civile contre X... pour empoisonnement, abstention délictueuse et non assistance à personne en danger auprès du doyen des magistrats instructeurs du tribunal de grande instance de Nanterre.

A l'appui de sa plainte, elle exposait qu'elle avait subi le 26 août 1976 à la polyclinique Ambroise Paré de Bourg la Reine (92) une hystérectomie et qu'elle avait dû ensuite faire l'objet d'une transfusion sanguine le 6 septembre 1976 ; que 40 jours plus tard était apparu un ictère avec asthénie, anorexie et élévation des transaminases et que, de 1977 à 1979, un traitement par cortico'des lui avait été administré.

La partie civile ajoutait qu'au mois de juin 1993, des examens avaient révélé qu'elle était atteinte d'une hépatite active chronique et que, suite à une biopsie du foie pratiquée en novembre 1994, des médecins dont le Professeur X... avaient conclu qu'elle présentait une hépatite C depuis 18 ans, avaient établi un lien avec la transfusion subie le 6 septembre 1976.

Madame TC soutenait que le point de départ du délai de prescription des faits dénoncés devait se situer au mois de novembre 1994, date à laquelle le diagnostic de l'hépatite C avait été posé ainsi que le lien avec la transfusion du 6 septembre 1976.

Madame TC déposait à l'appui de sa plainte quarante huit pièces dont des comptes-rendus d'analyses et d'examens médicaux, des courriers, des articles de presse versés à la procédure aux cotes D.22 à D.298. Le 18 juillet 1997, le Procureur de la République requérait l'ouverture d'une information, soulevait l'éventuelle prescription des faits dénoncés.

Le 26 septembre 1997, Monsieur BELLANCOURT, magistrat instructeur désigné par le délégué du président du tribunal procédait à

l'audition de la partie civile qui confirmait les termes de sa plainte, précisait qu'elle avait su courant juin 1993 par des examens sanguins qu'elle était atteinte de l'hépatite C, étant auparavant soignée pour une hépatite "non A, non B" ; elle indiquait que son conseil comme l'y invitait le magistrat allait déposer une note relative à la prescription de l'action publique.

Dans une note du 4 novembre 1997, le conseil de la partie civile soutenait que la prescription avait commencé à courir non pas du jour de la transfusion le 6 septembre 1976 mais du jour où le diagnostic d'hépatite C avait été posé et également celui de contamination par voie transfusionnelle, soit courant novembre 1994.

Il joignait deux arrêts de la chambre criminelle relatifs au point de départ de la prescription concernant le délit de blessures involontaires.

Le 18 décembre 1997, le Procureur de la République estimant l'action publique éteinte, prenait des réquisitions aux fins de non informer. Le 24 décembre 1997 intervenait, conformément aux réquisitions du Ministère Public une ordonnance de refus d'informer motivée par la prescription, après avoir écarté la qualification d'empoisonnement.

Le 2 janvier 1998, la partie civile relevait appel de cette décision. [*

Dans ses réquisitions écrites, le Procureur Général conclut à l'infirmation de la décision.

La partie civile a fait déposer un mémoire à l'appui de son appel.

*]

Sur la qualification d'empoisonnement

Considérant tout d'abord s'agissant de la qualification criminelle invoquée d'empoisonnement, qu'à supposer ses éléments constitutifs

réunis à savoir l'administration volontaire de substances dont le caractère mortifère aurait été connu de l'auteur, que la prescription de ce crime court du jour où les substances mortifères auraient été administrées ;

Que l'on ne saurait, contrairement aux énonciations du mémoire de la partie civile, raisonner concernant ce crime par analogie avec la construction jurisprudentielle relative au délit de blessures involontaires, les élements constitutifs de ces infractions étant radicalement distincts ;

Considérant que la plainte invoque expressément la date du 6 septembre 1976, jour de la transfusion sanguine incriminée ;

Considérant que plus de dix ans s'étant écoulés entre le 6 septembre 1976 et le jour du dépôt de la plainte et aucun acte interruptif n'étant invoqué, il y a lieu de constater par application des articles 6 et 7 du code de procédure pénale l'acquisition de la prescription de ce chef, cause affectant l'action publique ;

Sur une qualification des faits de nature délictuelle

Considérant sans doute, comme avancé par la partie civile, que le point de départ du délai de prescription de l'action publique relative au délit de blessures involontaires ou d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne au sens de l'article 222-19 du code pénal peut être fixé non pas au jour du fait délictueux mais de celui où s'est révélé la conséquence dommageable permettant la qualification de l'infraction ;

Considérant plus précisément que Madame TC soutient que le point de départ du délai de prescription des faits dénoncés doit être situé au mois de novembre 1994, date à laquelle le diagnostic de l'hépatite C avait été posé ainsi que le lien avec la transfusion du 6 septembre 1976, qu'elle fait référence au compte rendu du 12 décembre 1994 relatif à l'hospitalisation subie les 23 et 24 novembre 1994 pour une

nouvelle biopsie du foie, ce compte-rendu mentionnant qu'elle présentait une hépatite C depuis 18 ans et dont l'histologie ne montrait pas d'aggravations majeures depuis 1973 ;

Mais considérant qu'il résulte des documents produits par la partie civile qu'elle a toujours su avoir subi le 6 septembre 1976 une transfusion sanguine ; que dès le 4ème trimestre 1976 un diagnostic d'hépatite "non A, non B" était alors posé avec une surveillance ; qu'elle avait été ainsi suivie jusqu'en 1993 par le Professeur Y... à l'hôpital Broussais ;

Qu'en février 1993, une seconde biopsie du foie avait révélé une hépatite chronique active peu fibrosante avec un score de Knodel à 6 ; que l'interféron, médicament prescrit dans le traitement des malades atteints du virus de l'hépatite C, n'avait pas été ordonné à cette époque car la patiente était sous antidépresseur ;

Qu'en outre, les résultats d'analyse du 24 juin 1993 démontraient sans ambiguïté la présence dans le sang de Madame TC d'anti corps anti-hépatite C et en RIBA un profil positif concernant l'hépatite C ;

Considérant que selon les propres déclarations de la partie civile au magistrat, elle avait su courant juin 1993 qu'elle était ainsi atteinte de l'hépatite C ;

Considérant qu'à cette date, le lien entre cette affection et une éventuelle transfusion était une donnée acquise de la science connue de l'ensemble du corps médical ;

Considérant que le point de départ du délai de prescription doit donc être situé au 24 juin 1993, date à laquelle a été révélée la circonstance dommageable permettant de qualifier l'infraction ;

Considérant, qu'à les supposer établies, l'action publique relative aux infractions délictuelles visées dans la plainte se prescrit par trois ans en application de l'article 8 du code de procédure pénale ;

Qu'il y a lieu en conséquence de constater l'extinction de l'action publique par prescription par application des articles 6 et 8 du code de procédure pénale, plus de trois ans s'étant écoulés entre la date de révélation du fait dommageable et le dépôt de la plainte en date du 11 juin 1997 ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Vu les articles 177, 183, 185, 186, 194, 198, 199, 200, 211, 213, 216, 217 et 801 du Code de Procédure Pénale;

En la forme, reçoit l'appel ;

Au fond, confirme l'ordonnance entreprise ;

Laisse à la diligence du ministère public, l'exécution du présent arrêt ; LE GREFFIER, LE PRESIDENT, PROCEDURE SOUMISE A UN DROIT FIXE DE PROCEDURE DE HUIT CENTS FRANCS.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-789
Date de la décision : 07/04/1998

Analyses

PRESCRIPTION - Action publique - Délai - Point de départ

Le point de départ du délai de prescription de l'action publique en matière de blessures involontaires ou d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne, au sens de l'article 222-19 du Code pénal, peut être fixé au jour où s'est révélée la conséquence dommageable permettant la qualification de l'infraction. Ainsi, lorsque des résultats d'analyse sanguine démontrent, sans ambiguïté, la présence d'anticorps anti-hépatite C dans le sang d'une victime, qui se savait ainsi atteinte de cette affection, et qu'à cette même époque le lien entre l'hépatite C et une éventuelle transfusion sanguine était une donnée acquise de la science connue de l'ensemble du corps médical, il résulte de ces éléments que c'est à la date de l'analyse sanguine précitée que s'est révélée la conséquence dommageable permettant de qualifier l'infraction et que le point de départ du délai de prescription de l'action publique doit donc être situé au même jour


Références :

Code pénal 222-19

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-04-07;1998.789 ?
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