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03/04/1998 | FRANCE | N°1996-1943

France | France, Cour d'appel de Versailles, 03 avril 1998, 1996-1943


La Société TIKG a licencié Monsieur X..., l'un de ses salariés, le 02 janvier 1993.

Le GROUPEMENT DES ASSEDIC DE LA REGION PARISIENNE (G.A.R.P.) lui a demandé paiement de la contribution supplémentaire prévue par l'article L.321.13 du Code du Travail.

La Société TIKG a refusé en invoquant une cause d'exonération prévue par la loi du 31 décembre 1992.

Le G.A.R.P. a alors émis une contrainte à laquelle la S.A.R.L. TIKG a formé opposition.

Monsieur Y... est intervenu dans la procédure en qualité de liquidateur amiable de la société.

Par

jugement du 09 janvier 1996, le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE a : - annulé la contraint...

La Société TIKG a licencié Monsieur X..., l'un de ses salariés, le 02 janvier 1993.

Le GROUPEMENT DES ASSEDIC DE LA REGION PARISIENNE (G.A.R.P.) lui a demandé paiement de la contribution supplémentaire prévue par l'article L.321.13 du Code du Travail.

La Société TIKG a refusé en invoquant une cause d'exonération prévue par la loi du 31 décembre 1992.

Le G.A.R.P. a alors émis une contrainte à laquelle la S.A.R.L. TIKG a formé opposition.

Monsieur Y... est intervenu dans la procédure en qualité de liquidateur amiable de la société.

Par jugement du 09 janvier 1996, le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE a : - annulé la contrainte délivrée par le G.A.R.P., le 07 mars 1995, - débouté le G.A.R.P. de ses demandes, - débouté la Société TIKG de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts, - condamner le G.A.R.P. à lui payer 6.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le G.A.R.P. a interjeté appel de ce jugement.

Il demande à la Cour de : - infirmer cette décision, - décharger le G.A.R.P. de toutes condamnations, - valider la contrainte et condamner Monsieur Y..., ès qualités de liquidateur amiable de la S.A.R.L. TIKG, à payer au G.A.R.P. la somme de 81.369,09 francs comprenant les majorations de retard mais hors pénalités, - dire que sur ces sommes s'appliquera la majoration de 1,40 % par mois de retard, - dire que cette majoration sera cumulative avec la majoration de 10 % en application des articles 16 et 17 de la convention UNEDIC du 1er janvier 1994, - condamner Monsieur Y..., ès qualités, à payer au G.A.R.P. la somme de 5.000 francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et celle de 6.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le G.A.R.P. soutient que la cause d'exonération invoquée par la Société TIKG est inapplicable car instaurée par la loi du 31 décembre 1992, entrée en vigueur après la rupture du contrat de travail.

Il explique que la date de la rupture du contrat de travail se situe au jour où la lettre de licenciement a été remise au salarié, soit en l'espèce le 02 janvier 1993, et qu'à cette date la loi du 31 décembre 1992 n'était pas entrée en vigueur car elle a été publiée au journal officiel le 1er janvier 1993 et est entrée en vigueur un jour franc après sa publication, soit le 03 janvier 1993.

Monsieur Y..., ès qualités de liquidateur amiable de la Société TIKG, demande à la Cour de : - confirmer le jugement entrepris, - en cas de réformation sur le fondement juridique, dire que la date de rupture du contrat de travail est celle de l'exception de son préavis, soit le 02 avril 1993, - constater que la Société TIKG répond ainsi au huitième cas d'exonération de la contribution supplémentaire, - déclarer nulle la contrainte délivrée le 07 janvier 1995, - condamner le G.A.R.P. à payer à Monsieur Y..., ès qualités, 50.000 francs à titre de dommages-intérêts et 10.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il fait valoir, d'une part, que la loi est entrée en vigueur le 02 janvier 1993, soit un jour franc après sa promulgation intervenue le 31 décembre 1992 et, d'autre part, que la rupture du contrat est intervenue à l'expiration du préavis de trois mois.

Il en exclut qu'il peut se prévaloir des dispositions de la loi du 31 décembre 1992 et que l'attitude du G.A.R.P. lui a causé un préjudice important.

MOTIFS DE L'ARRET

Attendu qu'en application de l'article L.321-13 du Code du Travail, la rupture du contrat de travail d'un salarié, dans certaines

conditions, entraîne pour l'employeur l'obligation de verser une cotisation complémentaire ;

Que certains cas d'exonération sont prévus par la loi ;

Que la loi n° 92.1446 du 31 décembre 1992 dispose que la cotisation n'est pas due pour la première rupture d'un contrat de travail intervenant au cours d'une même période de 12 mois dans une entreprise employant habituellement moins de 20 salariés ;

Attendu qu'il n'est pas discuté que le licenciement de Monsieur X... par la Société TIKG remplit les conditions sus-énoncées ;

Que le seul problème est de déterminer si, à la date où la rupture du contrat de travail est intervenue, la loi du 31 décembre 1992 était applicable ;

Attendu d'abord sur la date de la rupture du contrat de travail, que la S.A.R.L. TIKG a remis à son salarié la lettre de licenciement le 02 janvier 1993;

Attendu que le licenciement s'analyse comme étant un acte unilatéral de rupture du contrat à l'initiative de l'employeur qui entraîne à l'égard de son auteur des effets de droit ;

Que la lettre de licenciement constitue l'événement déterminant pour justifier le motif de la rupture et cerne le motif de celle-ci ;

Qu'elle est irrévocable sans l'accord du salarié ;

Que le préavis permet seulement au contrat de poursuivre ses effets pour une période déterminée malgré la rupture des relations contractuelles décidée par l'une des parties et dans le seul but de limiter les inconvénients engendrés par la brutalité d'une telle résiliation ;

Que dès lors, seule la notification de la lettre de licenciement est un acte juridique qui crée une situation nouvelle et qui, de ce fait, matérialise la rupture définitive du contrat de travail ;

Que la rupture du contrat de travail est, en l'espèce, intervenue le

02 janvier 1993, date de la réception de la lettre de licenciement, et non le 02 avril 1993, date d'expiration du délai de préavis ;

Attendu ensuite sur la date d'entrée en vigueur de la loi du 31 décembre 1992, que si les lois sont exécutoires dès le jour de leur promulgation par le Président de la République, elles ne sont obligatoires qu'après leur publication qui seule permet aux sujets de droit qui doivent les appliquer d'en connaître la teneur ;

Attendu que l'article 2 du décret du 05 décembre 1870 dispose que les lois et décret ne seront obligatoires à PARIS qu'un jour franc après leur promulgation (en fait leur publication) et partout ailleurs, qu'un jour franc après que le journal officiel qui les contient sera parvenu au chef lieu de l'arrondissement ;

Attendu qu'en l'espèce, la loi n° 92.1446 a été publiée au journal officiel du 1er janvier 1993 ;

Que la première date à laquelle elle peut présenter un caractère obligatoire est celle du 03 janvier 1993 puisque, en toutes hypothèses, le délai d'un jour franc doit être respecté ;

Que dès lors, le 02 janvier 1993, date de la rupture du contrat de travail, la loi n° 92.1446 n'était pas entrée en vigueur ;

Que la Société TIKG ne peut s'en prévaloir pour être exonérée de la cotisation supplémentaire prévue par l'article L.321.13 du Code du Travail ;

Qu'elle sera déboutée à son opposition à contrainte ;

Attendu que le montant de la somme réclamée n'est pas discuté, pas plus que les majorations sollicitées par le G.A.R.P. ;

Qu'il sera fait droit à la demande ;

Attendu que la preuve du caractère abusif de la résistance de Monsieur Y..., ès qualités, n'est pas rapportée ;

Que le G.A.R.P. sera débouté de sa demande de dommages-intérêts ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du G.A.R.P.

les frais irrépétibles qu'ils a exposés ;

Attendu que Monsieur Y..., ès qualités, qui succombe, ne peut prétendre à des dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Déboute Monsieur Y..., ès qualités, de son opposition à la contrainte signifiée le 07 mars 1995 par le G.A.R.P. à la Société TIKG,

Condamne Monsieur Y..., ès qualités, à payer au G.A.R.P. la somme de 81.369,09 francs,

Dit que s'appliquera la majoration de 1,40 % par mois de retard à compter de la date d'exigibilité des cotisations jusqu'à parfait paiement en sus de la majoration de 10 % déjà appliquée ;

Déboute le G.A.R.P. de sa demande de dommages-intérêts,

Condamne Monsieur Y..., ès qualités, à payer au G.A.R.P. une indemnité de 6.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne Monsieur Y..., ès qualités, aux dépens de première instance et d'appel. Dit qu'ils seront recouvrés par la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS et ASSOCIES, Avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Arrêt prononcé par Monsieur FALCONE, Président,

Assisté de Monsieur Z..., Greffier Divisionnaire,

Et ont signé le présent arrêt,

Monsieur FALCONE, Président,

Monsieur Z..., Greffier Divisionnaire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-1943
Date de la décision : 03/04/1998

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Formalités légales - Lettre de licenciement - Notification - Effet - /

Dès lors que le préavis de licenciement permet seulement au contrat de poursuivre ses effets pour une durée déterminée malgré la rupture des relations contractuelles décidées par l'une des parties et que seule la notification de la lettre de licenciement est un acte juridique qui crée une situation nouvelle et, de ce fait, matérialise la rupture définitive du contrat de travail, il convient de prendre en compte la date de réception de la lettre de licenciement pour déterminer si une loi nouvelle s'applique au licenciement


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-04-03;1996.1943 ?
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