La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/1998 | FRANCE | N°1997-21568

France | France, Cour d'appel de Versailles, 25 mars 1998, 1997-21568


Monsieur X... a relevé appel d'un jugement contradictoire, rendu le 28 janvier 1997 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE, qui a condamné l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA à lui payer la somme de 227.900 francs à titre de complément d'indemnité de licenciement et qui l'a débouté du surplus de ses demandes.

Monsieur Claude X... a été engagé à compter du 28 août 1988 par l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA en qualité de directeur administratif adjoint et responsable d'établissement.

Créée en 1925, l'ETACA (ECOLE TECHNIQUE D'AERONAUTIQUE ET

DE CONSTRUCTION AUTOMOBILE) avait été rachetée en 1967 par L'ASSOCIATION DE...

Monsieur X... a relevé appel d'un jugement contradictoire, rendu le 28 janvier 1997 par le Conseil de Prud'hommes de NANTERRE, qui a condamné l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA à lui payer la somme de 227.900 francs à titre de complément d'indemnité de licenciement et qui l'a débouté du surplus de ses demandes.

Monsieur Claude X... a été engagé à compter du 28 août 1988 par l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA en qualité de directeur administratif adjoint et responsable d'établissement.

Créée en 1925, l'ETACA (ECOLE TECHNIQUE D'AERONAUTIQUE ET DE CONSTRUCTION AUTOMOBILE) avait été rachetée en 1967 par L'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ETACA. En juin 1978, l'école a changé de dénomination et est devenue l'ESTACA.

L'administration et le fonctionnement de l'association sont assurés par un comité de direction qui choisit un bureau dont le président a le titre de président de l'association.

L'administration et la gestion de l'ESTACA sont confiées à un conseil de gestion qui, aux termes de l'article 15 des statuts, "dispose des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de l'association" et "nomme un directeur administratif auquel il peut déléguer ses pouvoirs".

Monsieur X... a succédé à Monsieur Y... en qualité de directeur administratif le 30 juin 1989.

Fin juin 1995, le conseil de gestion a changé de secrétaire, Monsieur Z... ayant succédé à Monsieur A....

Après une réunion du conseil de gestion du 19 juillet 1995, Monsieur X... a été convoqué le 19 juillet 1995 à un entretien préalable fixé au 28 juillet suivant et licencié par lettre recommandée en date du 1er août 1995 ainsi libellée:

" A la suite de notre entretien du 28 juillet 1995, en présence de Monsieur Pierre DU B..., conseiller des salariés CFE-CGC, nous

vous informons que nous sommes contraints de vous licencier pour les motifs exposés ci-après:

En premier lieu, nous avons à déplorer de votre part un non-respect des dispositions des statuts de l'association. En effet, vous considérez que vos fonctions de directeur administratif vous autorisent à prendre les décisions et, seulement lorsque vous le jugez utile, à les faire avaliser par le conseil de gestion.

Cette conception, réaffirmée par vous-même lors de l'entretien préalable, est totalement contraire aux statuts qui prévoient que le conseil de gestion prend les décisions alors que le directeur administratif assiste à ce conseil sans droit de vote et ne dispose que des pouvoirs délégués par le conseil de gestion.

A de nombreuses reprises depuis plusieurs mois, vous avez entendu faire valoir votre conception, violant ainsi les statuts, ainsi qu'en attestent les faits suivants: - dossier présenté à la conférence des grandes écoles sans en informer le conseil de gestion, - absence de retour d'information et de discussion sur les prises de position futures faites au nom de l'ESTACA à l'UGEI, - fixation unilatérale de la liste des membres du conseil de perfectionnement, - décisions unilatérales concernant la création de l'option ferroviaire non discutée en conseil de gestion, - décisions unilatérales sur les nouveaux conseillers techniques non discutées en conseil de gestion, - signature, révélée au cours de l'entretien préalable, d'un accord avec l'université de GENES sans en parler au conseil de gestion, - travaux et réparations à l'école proposés sans discussion préalable dans les mois précédents.

De surcroît, il apparaît que les conditions dans lesquelles votre salaire a évolué (54% en 6 ans), notamment en raison de la création de l'ISTAE, en dehors de toute discussion en réunion de conseil de gestion, démontrent la liberté totale que vous avez entendu prendre

au mépris des règles élémentaires de fonctionnement de l'association et de l'esprit de ses statuts.

Votre refus d'accepter d'appliquer les statuts s'est doublé récemment d'un désaccord profond sur la stratégie du conseil de gestion. A cet égard, ce désaccord peut s'illustrer par: - demande de subvention au Ministère de l'Enseignement Supérieur malgré le désaccord de plusieurs membres du conseil de gestion, - désaccord sur la stratégie vis-à-vis de la tutelle (lettre du 19 juin 1995) illustré par la position du Ministère de Tutelle qui a considéré que la demande de subvention ne pouvait être signée que par le secrétaire du conseil de gestion et non pas par le directeur administratif, - choix d'un conseiller et décision d'une formation pour les concessions automobiles sans proposition préalable au conseil.

De surcroît, vous refusez avec persistance de suivre les instructions de travail données par le conseil de gestion: - tableau de bord demandé en novembre 1994 et non fourni jusqu'à présent, - rapports périodiques d'activité non fournis en 1994-1995, par exemple rapport à remettre avant l'assemblée générale, - état et grilles de salaires non communiqués au conseil de gestion avant juillet 1995, - signature d'un accord avec l'université de BERLIN malgré les demandes expresses réitérées verbalement de ne rien faire dans cette affaire sans impliquer le président.

Enfin, de graves négligences ont dû être déplorées durant l'exercice de vos fonctions: - pas d'inventaire exhaustif des immobilisations, - absence de proposition ou de plan en matière de communication (salons, expositions, etc...), - communication en retard du planning des vacances, - certains engagements de dépenses dont la justification n'est pas établie (Ernst etamp; Young ...).

En conséquence de ce qui précède, il apparaît que, malgré les nombreuses remarques qui vous ont été faites quant au respect des

statuts, votre comportement récent caractérise une divergence très marquée avec le conseil de gestion qui, cumulée à votre persistance à ne pas suivre les instructions et directives, ainsi que vos négligences, justifie la rupture de votre contrat de travail pour motifs graves et légitimes.

Bien que ces faits portent gravement atteinte au fonctionnement de l'ensemble des structures de l'association, nous renonçons à invoquer la faute grave, toutefois, votre comportement ne vous permettant pas de poursuivre vos activités, nous vous dispensons d'effectuer votre préavis qui vous sera néanmoins rémunéré, celui-ci commençant à compter de la première présentation de la présente lettre".

Contestant le bien-fondé de son licenciement, Monsieur X... a saisi, le 3 octobre 1995, la juridiction prud'homale pour voir condamner son ex-employeur à lui régler, dans le dernier état de ses demandes, les sommes de: - 427.066,66 frs à titre de solde d'indemnité de préavis, - 42.706,66 frs à titre de congés payés sur préavis, - 227.900 frs à titre de solde d'indemnité de licenciement, - 1.026.039 frs à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 10.000 frs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le Conseil a estimé que le licenciement de Monsieur X... était fondé sur un motif réel et sérieux, du fait que celui-ci aurait excédé les pouvoirs qu'il tenait des statuts de l'association et de son contrat de travail.

Le Conseil a par ailleurs considéré que pour le calcul de l'indemnité de licenciement, il convenait d'appliquer la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Dans ses conclusions d'appel, Monsieur X... soutient qu'il n'a fait qu'exécuter les instructions de Monsieur A..., sous l'autorité hiérarchique duquel il travaillait, et que les griefs

allégués dans la lettre de licenciement s'adressent en réalité à l'ancien secrétaire du conseil de gestion et concrétisent les désaccords profonds qui existaient entre ce dernier et le président de l'association.

Faisant valoir que son licenciement est nul du fait qu'il a été décidé par un conseil de gestion ne comportant que trois membres sur cinq et qu'il n'a pas été inscrit à l'ordre du jour, l'appelant ajoute qu'en tout état de cause, les griefs allégués par son employeur concernent des faits tous antérieurs de plus de deux mois à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement et donc prescrits en application de l'article L.122-44 du code du travail.

Faisant également observer qu'il rendait compte régulièrement au conseil de gestion dont il sollicitait l'accord pour toutes les décisions importantes, Monsieur X... estime son licenciement mal fondé, n'ayant jamais reçu de reproches de la part du conseil de gestion et de l'association.

Il demande, en conséquence, à la Cour de condamner l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA à lui payer les sommes de: - 375.760 frs à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions du contrat relatives au préavis, - 1.180.877 frs à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 100.000 frs à titre d'indemnité pour préjudice moral supplémentaire, - 20.000 frs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'appelant conclut par ailleurs à la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué la somme de 227.900 frs à titre de complément d'indemnité de licenciement, en application de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie, ajoutant que dans l'esprit des rédacteurs de son contrat de travail, l'intention des parties était, en visant la convention collective des

industries minières et métallurgiques de la région parisienne ( C.C.I.M.R.P), de se référer en réalité à l'avenant cadre applicable à l'industrie métallurgique de la région parisienne.

L'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA, intimée, forme appel incident en ce qu'elle a été condamnée à payer à Monsieur X... un complément d'indemnité de licenciement de 227.900 frs, faisant valoir qu'elle n'a jamais adhéré à l'une des organisations signataires de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie et que, par suite, cette convention collective ne lui est pas applicable.

Estimant par ailleurs que Monsieur X... ne saurait prétendre à une durée de préavis supérieure à celle prévue par les dispositions légales, l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA fait observer à cet égard que Monsieur X... est mal fondé à réclamer des dommages et intérêts pour violation de l'article 8 du contrat de travail alors qu'il a été libre de tout engagement avant le début de l'année scolaire suivante et qu'il a repris en fait une activité professionnelle dans le courant de ladite année scolaire.

Sur le bien-fondé du licenciement, l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA soutient qu'elle ne pouvait conserver plus longtemps Monsieur X... à son service en raison des divergences de vue de celui-ci très marquées avec le conseil de gestion ayant entraîné, selon elle, des dysfonctionnement graves, comme la présentation du dossier de l'ESTACA à la conférence des grandes écoles non approuvée préalablement par le conseil de gestion ou diverses autres démarches personnelles de l'intéressé sans en informer le conseil de gestion, comme la création de l'option ferroviaire, les accords pris avec les universités de GENES et de BERLIN ou d'importants travaux à l'école

SUR CE

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions du contrat relatives au préavis

Considérant que l'article 8 du contrat de travail de Monsieur X... stipulait, en matière de délai-congé, que "le préavis de rupture donné par le directeur administratif ou le secrétaire du conseil de gestion le sera par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à Monsieur X... avant le premier mai de l'année scolaire pour le trente septembre de la même année";

Considérant qu'il résulte de cette disposition claire et précise que le licenciement de Monsieur X..., notifié le 1er août 1995, ne pouvait prendre effet qu'au 30 septembre 1996, dès lors qu'il n'était pas intervenu avant le 1er mai 1995;

Considérant que l'ASSOCIATION DES ELEVES DE L'ESTACA n'a réglé à Monsieur X... qu'une indemnité de préavis pour la période du 2 août au 10 décembre 1995;

Considérant que cette inobservation par l'employeur de cette clause dépourvue de toute ambiguïté a causé à Monsieur X... un préjudice égal au montant des rémunérations que celui-ci aurait perçues pour la période du 10 décembre 1995 au 30 septembre 1996, soit la somme de 375.760 frs ( compte-tenu d'un salaire mensuel brut de 39.490 frs);

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de son contrat de travail, Monsieur X... a droit à une indemnité de licenciement égale au moins à trois mois de salaire et qui "ne pourra être inférieure à celle prévue par la CCIMRP", soit la convention collective des industries métallurgiques de la région parisienne;

Considérant qu'aucun élément du dossier ne démontre que l'intention des parties aurait été, en visant la CCIMRP, de voir calculer l'indemnité de licenciement sur la base de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972

alors que l'ESTACA n'entre pas dans le champ d'application de cette dernière convention collective et n'a adhéré à aucune des organisations signataires de ladite convention;

Considérant, dans ces conditions, qu'il convient de s'en tenir aux stipulations précitées du contrat de travail de Monsieur X...;

Considérant qu'aux termes de l'article 33 de la CCIMRP, l'indemnité de licenciement devait être fixée à 1/5ème de mois par année d'ancienneté, soit 8/5ème de mois compte-tenu de l'ancienneté de 8 ans de Monsieur X... à l'expiration de la période de préavis contractuelle; que, par suite, une telle indemnité de 8/5ème de mois étant inférieure à trois mois, il convient d'allouer à Monsieur X... une indemnité de licenciement égale à trois mois de salaire, soit la somme de 118.470 frs, de laquelle doit être déduite celle de 28.785 frs réglée à Monsieur X..., d'où un solde dû de 89.685 frs;

Sur l'irrégularité du licenciement

Considérant que le licenciement de Monsieur X... a été diligenté par Monsieur Vincent Z..., secrétaire du conseil de gestion, en vertu d'une délibération du conseil de gestion du 19 juillet 1995;

Considérant, toutefois, qu'il résulte du procès-verbal de la réunion du conseil de gestion du 19 juillet 1995 que Monsieur C..., directeur des études, n'assistait pas à cette réunion alors qu'aux termes de l'article 17 des statuts de l'école les décisions du conseil de gestion "ne peuvent être prises valablement qu'en présence du directeur des études et du directeur administratif, sauf cas de force majeure alléguée par l'un d'eux";

Considérant que le procès-verbal de ladite réunion, rédigé par Monsieur Z..., a mentionné que Monsieur C... était excusé, alors que ce dernier a protesté dans un courrier adressé le 31 juillet 1995 au secrétaire contre le fait de n'avoir pas été prévenu

en temps utile de la réunion et indiqué qu'il considérait ainsi, selon les termes suivants, les décisions prises nulles et non avenues:

"Ces dernières semaines, les réunions du conseil de gestion se sont multipliées et j'ai été avisé de leur convocation tellement tardivement qu'il ne m'a pas été possible d'y assister, sans même souvent pouvoir m'excuser.

Ceci concerne en particulier une réunion de ce 19 juillet 1995 où j'apprends que se sont traitées en mon absence des questions extrêmement graves pour la direction et donc l'avenir de l'école. Dûment prévenu, j'aurais sans aucun doute participé à la réunion.

En conséquence, et en fonction de l'article 17 des statuts de l'association, je considère que les décisions qui ont été prises ne l'ont pas été valablement et sont donc nulles et non avenues";

Considérant qu'il convient d'ajouter que la question du licenciement de Monsieur X... n'était pas inscrite à l'ordre du jour de la réunion du 19 juillet 1995 et que le conseil de gestion n'a délibéré sur cette question qu'à la demande de son secrétaire, Monsieur Z...;

Considérant, à cet égard, que la nomination de Monsieur Z... comme secrétaire est intervenue lors de la réunion du conseil de gestion du 24 juin 1995, à laquelle le directeur des études n'assistait d'ailleurs pas, ce qui constituait une irrégularité au regard de l'article 17 précité des statuts que l'ancien secrétaire, Monsieur A..., avait dénoncée dans un courrier du 27 juin 1995 en indiquant que la réunion avait été "organisée en dehors de la présence du directeur pédagogique ou des études et du directeur administratif";

Considérant, de plus, qu'aux termes de l'article VII du règlement intérieur du conseil de gestion, Monsieur Z... ne pouvait cumuler

les fonctions de membre du comité de direction et de membre du conseil de gestion;

Considérant qu'il apparaît ainsi que le licenciement de Monsieur X... a été décidé par le conseil de gestion dans des conditions irrégulières au regard des statuts et que la procédure de licenciement a été diligentée par un secrétaire désigné irrégulièrement par le conseil de gestion;

Sur l'absence de motif réel et sérieux de licenciement

Considérant, d'abord, qu'il ressort des statuts et du contrat de travail de Monsieur X... que celui-ci exerçait ses fonctions de directeur administratif sous le contrôle du conseil de gestion auquel il devait rendre compte; que, toutefois, les réunions du conseil de gestion n'étaient prévues que trois ou quatre fois par an de sorte que le secrétaire du conseil de gestion avait pouvoir, aux termes de l'article 17 des statuts, de représenter l'association pour tous les actes ressortant de la compétence du conseil de gestion;

Considérant qu'il en résulte qu'entre les réunions du conseil de gestion, Monsieur X... travaillait normalement, sous le contrôle et la direction du secrétaire du conseil de gestion;

Considérant, en outre, qu'il résulte du dossier que la plupart des griefs énoncés dans la lettre de licenciement précitée de Monsieur X... sont relatifs à des faits antérieurs de plus de deux mois à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement, soit avant le 19 mai 1995, et qui étaient connus par le conseil de gestion ou son secrétaire antérieurement audit délai de deux mois;

Considérant qu'il n'est démontré aucun grief sérieux dont le conseil de gestion ou son secrétaire aurait eu connaissance dans les deux derniers mois précédant la procédure de licenciement;

Considérant que c'est ainsi qu'il ne saurait être reproché à Monsieur X... d'avoir été en retard pour communiquer le planning des

vacances au conseil de gestion alors que cette demande lui a été faite seulement le 11 juillet 1995 et visait essentiellement, après les changements intervenus fin juin 1995, la permanence pendant les vacances et que Monsieur X..., qui était alors en congé, a donné suite à la demande du conseil de gestion dès sa réunion suivante du 19 juillet 1995;

Considérant, en ce qui concerne le grief concernant un prétendu accord avec l'université de GENES, qu'aucun élément du dossier ne démontre l'existence d'un tel accord; qu'il s'agissait seulement d'un partenariat datant de la mise en place, en 1993, du master européen en ingénierie automobile et sur lequel le conseil de gestion avait délibéré; que, de même, le conseil de gestion et Monsieur D..., président de l'association, était parfaitement au courant depuis 1994 de ce partenariat avec l'université de GENES;

Considérant qu'il est établi que l'état et les grilles des salaires avaient été communiqués au secrétaire du conseil de gestion bien avant le mois de juillet 1995 de sorte que le grief tenant au défaut de communication de ces état et grilles n'est pas fondé;

Considérant, sur l'absence d'inventaire exhaustif des immobilisations, que cette tâche incombait au cabinet d'expert comptable CONSTANTIN qui en avait été chargé par le conseil de gestion et son secrétaire;

Considérant, par ailleurs, qu'il ne saurait être reproché à Monsieur X... de n'avoir pas présenté un plan de communication alors qu'aucune demande ne lui avait été faite à cet égard; qu'en tout état de cause, Monsieur X... produit aux débats divers documents et attestations dont il résulte qu'il a, sous le contrôle du secrétaire du conseil de gestion, beaucoup agi pour faire connaître l'ESTACA auprès des étudiants;

Considérant que les griefs concernant le tableau de bord 1995 et le

rapport d'activité 1994-1995 sont non seulement prescrits puisque déjà évoqués lors de la réunion du conseil de gestion de mars 1995, mais également mal fondés puisque Monsieur X... avait fait le nécessaire et remis ces documents au secrétaire du conseil de gestion qui en a reçu quitus par l'assemblée générale du 24 juin 1995;

Considérant que le grief concernant les décisions sur les nouveaux conseillers techniques qui n'auraient pas été discutées en conseil de gestion est à la fois prescrit et sans fondement puisqu'il ressort d'un courrier du secrétaire du 14 avril 1995 que ces conseillers avaient été nommés depuis plusieurs années et que Monsieur X... en avait informé le conseil de gestion;

Considérant qu'il est établi qu'en matière de travaux et réparations, Monsieur X... a toujours agi selon les instructions du secrétaire du conseil de gestion et n'a pris aucune décision personnelle, n'ayant eu qu'un rôle de transmission des devis au secrétaire, comme le démontrent les pièces versées aux débats;

Considérant que lors de sa réunion du 4 mars 1995, le conseil de gestion a été dûment informé de la présentation du dossier de l'ESTACA à la conférence des grandes écoles avec d'ailleurs l'accord antérieur dudit conseil; que ce grief est donc à la fois prescrit et mal fondé;

Considérant, de même, que lors de la réunion du 4 mars 1995 et d'autres réunions antérieures, le conseil de gestion a été informé et a discuté des prises de position futures faites au nom de l'ESTACA à l'UGEI ( Union des Grandes Ecoles Indépendantes); que ce grief est ainsi autant prescrit que mal fondé puisque lors de l'assemblée générale de juin 1995, le président de l'association, Monsieur D..., s'est félicité du "rôle moteur" joué par l'ESTACA dans la création de l'UGEI;

Considérant, en ce qui concerne la fixation de la liste des membres

du conseil de perfectionnement, que Monsieur D..., président de l'association, en a fait état dans un courrier du 22 mars 1995 adressé au secrétaire du conseil et a reçu une réponse par courrier du secrétaire du 14 avril 1995 duquel il résulte que cette question relève des attributions du directeur des études et non pas de Monsieur X...;

Considérant que les comptes-rendus des réunions du conseil de gestion démontrent que l'option ferroviaire a été discutée à plusieurs reprises devant ledit conseil en 1993 et 1994 et qu'elle a été décidée de manière collégiale par ledit conseil;

Considérant, sur la stratégie du conseil de gestion et la demande de subvention, qu'il résulte du dossier que Monsieur X... a agi sous les instructions de Monsieur A..., secrétaire, que cette demande de subvention a été faite en 1994 et que le conseil de gestion en a été amplement informé; que le grief est donc à la fois prescrit et mal fondé;

Considérant que le choix d'un conseiller et la décision d'une formation pour les concessions automobiles a été traité par le conseil de gestion le 5 mars 1995 et a fait l'objet ensuite d'un échange de lettres entre Messieurs D... et A..., hors de toute intervention de Monsieur X... à l'égard duquel le grief est autant prescrit que mal fondé;

Considérant, enfin, que Monsieur X... a bénéficié des augmentations de salaire décidées par le secrétaire, Monsieur A..., au nom du conseil de gestion;

Considérant que s'agissant des griefs plus généraux de non-respect des statuts et de divergence avec le conseil de gestion, aucun élément du dossier ne démontre que Monsieur X... aurait pris de décision sans l'accord du conseil de gestion; que, de plus, il rendait compte plusieurs fois par semaine de sa gestion au secrétaire

du conseil de gestion ainsi que cela ressort de l'attestation de Monsieur A..., secrétaire:

"Plusieurs fois par semaine, je passais à l'école et avait de fréquents contacts avec Monsieur X... Lorsqu'une question importante et urgente, ayant reçu l'accord de la direction, nécessitait une réponse du conseil de gestion, je réunissais mes collègues et le président élu de l'association dans le strict respect des statuts (en mon domicile tant que nous n'avions pas de local) et transmettais ensuite les décisions prises à Monsieur X... qui s'y est toujours soumis";

Considérant qu'il résulte par ailleurs de nombreuses attestations produites aux débats que Monsieur X... s'est toujours attaché à agir au mieux des intérêts de l'école et de son développement, à tel point qu'il a reçu, le 22 juin 1995, les remerciements personnels de son supérieur hiérarchique, Monsieur A..., dans les termes suivants:

"Votre coopération et votre esprit d'équipe que j'ai appréciés dans vos relations avec le directeur pédagogique, les enseignants, le personnel, le conseil de gestion et au cours de problèmes importants que nous avons eus à résoudre pour l'école,

- votre dévouement et vos efforts pour la promotion de l'école auprès des services officiels et industriels. Tous à ce jour reconnaissent l'ESTACA comme grande école d'ingénieurs, malgré son statut d'école privée appartenant à l'association de ses anciens élèves, régime juridique admis avec la plus grande réserve et sous certaines conditions par le Ministère de l'Enseignement Supérieur, la commission des titres d'ingénieur ainsi que par les administrations d'état en général,

- votre gestion financière rigoureuse, conformément aux bases mises en place par Monsieur Robert Y..., ancien directeur administratif

(promo 35), et supervisée par les experts comptables du cabinet CONSTANTIN,

- votre collaboration avec la direction pédagogique pour adapter les salles de cours et créer les laboratoires nécessaires au maintien du haut niveau des matières enseignées à l'école ...";

Considérant que, de même, Monsieur C..., directeur des études, a loué le travail accompli par Monsieur X... dans les termes suivants:

"... De plus, après 7 ans de travail avec Monsieur X..., je ne peux que me louer des contacts plus qu'amicaux que j'ai eu avec lui et que le travail qu'il a effectué à l'intérieur de l'école avec l'ensemble du personnel et du corps professionnel pédagogique, un travail d'équipe qui a permis à l'école d'obtenir de la part de l'ensemble des industriels une opinion très favorable et des résultats excellents.

Les contacts qu'il a pu nouer pendant cette période avec l'ensemble de l'industrie a permis de développer la renommée de l'école.

Je tiens à préciser que dans les trois derniers mois, une évolution très importante du rôle du conseil de gestion par suite du changement de certaines personnes dont le secrétaire du conseil de gestion et l'affectation du président des anciens élèves comme membre du conseil de gestion et que j'ai ressenti comme un coup de force, a totalement modifié à la fois le bon fonctionnement et le respect des statuts de l'école.

A un travail d'équipe et de liaison permanente avec le secrétaire du conseil de gestion, Monsieur A..., a succédé une structure hiérarchique lourde et des décisions unilatérales qui ont gravement perturbé le fonctionnement et l'esprit de l'équipe pédagogique allant jusqu'à la décision brutale d'éviction non justifiée et sans aucune concertation avec moi de Monsieur X..., le responsable de

l'établissement..";

Considérant qu'il résulte ainsi de l'ensemble de ces énonciations que le licenciement de Monsieur X... n'est manifestement pas fondé sur un motif réel et sérieux, ce qui oblige l'employeur, en application de l'article L.122-14-4 du code du travail, à indemniser son ex-salarié du préjudice consécutif au licenciement;

Considérant que compte-tenu des pièces justificatives produites aux débats desquelles il résulte notamment que l'intéressé a perçu des indemnités ASSEDIC de l'ordre de 850 francs par jour, une indemnité égale à six mois de salaire, soit la somme de 236.940 frs, apparaît suffisante pour réparer de manière juste et équitable le préjudice de Monsieur X... consécutif à son licenciement, compte-tenu également du fait que l'indemnité de 375.760 frs allouée à l'appelant pour non-respect des dispositions du contrat de travail relatives au préavis est équivalente au paiement des salaires jusqu'au 30 septembre 1996;

Considérant qu'il n'est pas démontré un préjudice moral distinct du licenciement;

Considérant que l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA doit supporter les dépens et participer en outre aux frais et honoraires que l'appelant à dû exposer pour faire assurer sa défense tant devant le Conseil qu'en cause d'appel;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement etlant à dû exposer pour faire assurer sa défense tant devant le Conseil qu'en cause d'appel; PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à Monsieur X... la somme de 227.900 frs à titre de complément d'indemnité de licenciement,

Et, statuant à nouveau,

Condamne l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA à payer à ce titre à Monsieur Claude X... la somme de 89.685 frs (QUATRE VINGT NEUF MILLE SIX CENT QUATRE VINGT CINQ FRANCS);

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses autres demandes,

Et, statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Monsieur X... n'est pas fondé sur un motif réel et sérieux;

En conséquence,

Condamne l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA à payer à Monsieur X... les sommes de: - 375.760 frs ( TROIS CENT SOIXANTE QUINZE MILLE SEPT CENT SOIXANTE FRANCS) à titre d'indemnité pour non-respect des dispositions contractuelles relatives au préavis, - 236.940 frs (DEUX CENT TRENTE SIX MILLE NEUF CENT QUARANTE FRANCS) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, - 8.000 frs ( HUIT MILLE FRANCS) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

Déboute Monsieur X... du surplus de ses demandes;

Ordonne le remboursement par l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA des indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de trois mois;

Condamne l'ASSOCIATION DES ANCIENS ELEVES DE L'ESTACA aux dépens;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-21568
Date de la décision : 25/03/1998

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Délai-congé - Exécution - Modalités.

Lorsque la disposition d'un contrat de travail stipule, en matière de délai congé, que le préavis de rupture doit être adressé par lettre recommandée avec accusé de réception avant le premier mai de l'année scolaire pour le trente septembre de la même année, il résulte nécessairement de cette disposition claire et précise qu'un licenciement notifié un premier août ne prendra effet qu'au trente septembre de l'année suivante, et non à la fin septembre de l'année en cours faute d'avoir été notifié avant le premier mai. En l'espèce, l'inobservation par l'employeur d'une clause dépourvue d'ambiguïté cause au salarié un préjudice égal au montant des rémunérations que l'intéressé aurait perçues si ladite clause avait été respectée

CONTRAT DE TRAVAIL - RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Défaut - Applications diverses - Lettre de licenciement non motivée.

Lorsque les pièces produites aux débats, notamment, des procès-verbaux de réunions des organes de gestion interne de l'établissement employeur et plusieurs attestations, établissent que les griefs allégués dans une lettre de licenciement sont à la fois prescrits et non fondés ou encore non établis, il en résulte que le licenciement n'est manifestement pas fondé sur un motif réel et sérieux, ce qui oblige l'employeur, en application de l'article L 122-14-4 du code du travail, à indemniser son ex-salarié du préjudice consécutif au licen- ciement


Références :

Code du travail L122-14-4

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : Mme Bellamy

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-03-25;1997.21568 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award