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26/02/1998 | FRANCE | N°1995-5258

France | France, Cour d'appel de Versailles, 26 février 1998, 1995-5258


La SOCIETE FRANCAISE POUR L'ASSISTANCE TECHNIQUE A DOMICILE (SFATD), filiale du groupe ORGANISATION DE SERVICES ENTREPRISES (OSE), qui a son siège social à MARSEILLE, est spécialisée dans l'intervention technique au domicile des particuliers.

Ayant diverses agences en province, elle est propriétaire des marques "OK SERVICE" et "ATOUT CONFORT". Elle a mis en place un contrat d'assistance par abonnement commercialisé sous la marque "ATOUT CONFORT" et elle exploite sous la marque "OK SERVICE" une activité de "franchiseur".

La société ATOUTS SERVICE, ayant son siège socia

l aux CLAYES SOUS BOIS (Yvelines), a été créée en 1993 entre Monsieur...

La SOCIETE FRANCAISE POUR L'ASSISTANCE TECHNIQUE A DOMICILE (SFATD), filiale du groupe ORGANISATION DE SERVICES ENTREPRISES (OSE), qui a son siège social à MARSEILLE, est spécialisée dans l'intervention technique au domicile des particuliers.

Ayant diverses agences en province, elle est propriétaire des marques "OK SERVICE" et "ATOUT CONFORT". Elle a mis en place un contrat d'assistance par abonnement commercialisé sous la marque "ATOUT CONFORT" et elle exploite sous la marque "OK SERVICE" une activité de "franchiseur".

La société ATOUTS SERVICE, ayant son siège social aux CLAYES SOUS BOIS (Yvelines), a été créée en 1993 entre Monsieur Jean-Luc X..., Madame Martine Y..., son épouse et Monsieur Eric Z....

Elle a pour activité les dépannages à domicile en plomberie, électricité, télévision, électroménager.

Statuant par jugement du 13 mars 1995, le tribunal de grande instance de NANTERRE a débouté la société SFATD de ses demandes dirigées contre la société ATOUTS SERVICE et ses associés, sur l'action en contrefaçon de marques, concurrence déloyale et parasitisme qu'elle avait engagée.

Le tribunal a débouté les défendeurs de leur demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive et rejeté les demandes réciproques au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

La société SFATD a déclaré appel de ce jugement.

Concluant à l'infirmation du jugement entrepris, elle demande à la Cour de :

- condamner solidairement la société ATOUTS SERVICE, Monsieur Z..., Monsieur X... et Madame X..., au paiement de diverses sommes (1.600.000 francs + 250.000 francs + 250.000 francs),

à titre de dommages-intérêts, ainsi que d'une somme de 20.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Elle soutient qu'il est indéniable que la dénomination "ATOUTS SERVICE" constitue une contrefaçon par imitation des marques "OK SERVICE" et "ATOUT CONFORT" alors qu'elle est utilisée dans le même secteur d'activité.

Elle fait valoir que cette contrefaçon a été perpétrée en connaissance de cause puisque Monsieur X..., avant de créer la société ATOUTS SERVICE, est entré en contact avec la société OK SERVICE, en a obtenu la documentation et a rencontré les dirigeants au prétexte d'un projet d'installer une activité sous la franchise "OK SERVICE" ; que Monsieur Eric Z... qui était salarié de la société OK SERVICE a démissionné pour entrer dans la société ATOUTS SERVICE.

Elle soutient que Messieurs Z... et X... ont détourné à leur profit les méthodes et le concept de franchise "OK SERVICE".

Elle soutient qu'elle a subi un important préjudice et qu'elle est fondée à réclamer une indemnisation à hauteur de 1.600.000 francs représentant le chiffre d'affaires prévisionnel annuel proposé par la franchise "OK SERVICE" à ses "franchisés" ; qu'en outre, au titre de l'atteinte à l'image de sa marque, elle est fondée à réclamer une somme de 250.000 francs ; qu'en réparation des actes de parasitisme ayant consisté pour ATOUTS SERVICE à profiter de sa clientèle et du développement de sa notoriété, elle demande encore une somme complémentaire de 250.000 francs.

La société ATOUTS SERVICE, Monsieur X..., Madame X... et Monsieur Eric Z..., intimés, concluent à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté la société SFATD de toutes ses demandes ;

Formant appel incident, ils reprennent devant la Cour leur demande de

dommages-intérêts pour procédure abusive, réclamant une somme de 100.000 francs, et sollicitent en outre une somme de 20.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Les intimés exposent pour l'essentiel que Monsieur X..., a certes pris contact avec la société SFATD, mais n'a pas été convaincu par les renseignements qu'il a obtenus sur une possibilité de créer à VERSAILLES une entreprise "franchisée" OK SERVICES ; que Monsieur Z..., plombier à COURBEVOIE dans l'entreprise OK SERVICE, a démissionné en raison d'un désaccord avec cet employeur sur un nouveau contrat de travail qui lui était proposé et que dans ces conditions, il a recherché naturellement un nouvel emploi dans son secteur d'activités.

Ils soutiennent que la dénomination "ATOUTS SERVICE" n'est pas une contrefaçon de "ATOUT CONFORT" et "OK SERVICE" ; que le prétendu savoir-faire et le concept que la société SFATD revendique n'ont rien d'original.

Enfin, ils répliquent que la société SFATD n'apporte aucune preuve des actes de concurrence qu'elle allègue et encore moins d'un quelconque préjudice.

Ils font valoir que l'action engagée par la société SFATD visait en réalité à déstabiliser leur entreprise dans une phase délicate de développement de clientèle et d'un chiffre d'affaires, et à se débarrasser d'un concurrent gênant ; que la procédure est particulièrement abusive et leur a occasionné un préjudice matériel et moral qui mérite réparation.

Aux termes de ses dernières écritures, la société SFATD présente ses demandes différemment.

Elle demande à la Cour de :

- à titre principal, condamner solidairement la société ATOUTS SERVICES, Monsieur X..., Madame X... et Monsieur

Z... au paiement d'une somme de 1.600.000 francs au titre d'indemnisation de la contrefaçon qu'elle subit de leur fait,

- à titre subsidiaire, condamner solidairement les intimés au paiement d'une somme de 1.600.000 francs à titre d'indemnisation du préjudice résultant de la concurrence déloyale,

- condamner les intimés solidairement au paiement de la somme de 20.000 francs.

SUR CE,

SUR LA CONTREFACON,

Considérant qu'il est constant que la société SFATD est titulaire des deux marques "OK SERVICE" et "ATOUT CONFORT" ;

Qu'elle prétend que la dénomination sociale "ATOUTS SERVICE" est une imitation de ses marques en ce qu'elle utilise pour son propre compte des éléments protégés par le droit des marques et en ce qu'elle les applique au même secteur d'activité ;

Que selon son analyse, l'enregistrement des marques protège non seulement la marque prise dans son ensemble mais encore ses éléments isolés qui sont protégeables en eux-mêmes ; que les termes "ATOUT" et "SERVICE" sont arbitraires et distinctifs pour désigner les services de dépannage à domicile ;

Mais considérant que les marques déposées par la société SFATD sont des marques complexes composées, contrairement à ce que soutient l'appelante, d'éléments non protégeables séparément ;

Que le mot "SERVICE" est banal et utilisé couramment dans le domaine d'activité considérée ;

Que le mot "ATOUT", évocateur de l'idée de chance et de réussite, n'a pas de caractère original ; qu'il n'est pas un élément essentiel pour désigner le type d'activité ; qu'à lui seul, il n'exerce pas la fonction distinctive de la marque "ATOUT CONFORT" ;

Qu'une recherche effectuée par l'INPI en juin 1993 au fichier du

registre national du commerce et des sociétés sur la dénomination "ATOUTS SERVICE" donne les appellations incluant entre autre :

ATOUT : 225,

SERVICE : 29033 ;

Que les éléments séparés, "ATOUT" et "SERVICE" n'ont pas de caractère distinctif au sens de l'article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle ;

Considérant que dans ces conditions c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la dénomination "ATOUTS SERVICE" n'était pas une imitation illicite des deux marques déposées par la société SFATD, lesquelles ne sont protégeables que dans leur combinaison "OK SERVICE" et "ATOUT CONFORT" ;

SUR LA CONCURRENCE DÉLOYALE ET LES ACTES DE PARASITISME,

Considérant que si l'action en contrefaçon est mal fondée, l'action en concurrence déloyale tirée de la prétendue contrefaçon ne peut qu'être rejetée ;

Considérant qu'il convient cependant d'examiner cette demande en ce que sont invoqués des actes fautifs distincts de la contrefaçon ;

Considérant que s'il est établi que Monsieur X... a pris des renseignements auprès de la direction de la société SFATD, il résulte des courriers versés aux débats qu'il a agi clairement en informant cette dernière qu'il avait l'intention de créer sa propre entreprise ;

Que les documents contractuels, non confidentiels, qui lui ont été remis l'ont été en connaissance de cause par la société SFATD ;

Qu'il faut relever qu'il n'a pas effectué le stage de formation destiné aux candidats à la franchise "OK SERVICE" ;

Que la remise de quelques documents et l'accueil dans les locaux d'une agence OK SERVICE pendant deux demi-journées n'ont pu permettre

à Monsieur X... d'acquérir les méthodes et le savoir-faire de cette entreprise ;

Que Monsieur X..., en prenant des renseignements sur la franchise "OK SERVICE", n'avait aucune obligation de contracter avec le franchiseur ;

Qu'il n'a pas agi avec déloyauté ;

Qu'il apparaît en outre que, ni l'intervention urgente radioguidée, ni le contrat d'assistance par abonnement, ne peuvent être considérés comme des méthodes et des concepts originaux dans le domaine du dépannage à domicile ;

Considérant que la démission de Monsieur Z..., plombier salarié, et son embauche par la société ATOUTS SERVICE, ne peut être considérée comme un acte de concurrence déloyale ;

Considérant enfin que la société SFATD ne produit aucune pièce de nature à établir que la société ATOUTS SERVICE est responsable d'agissements de parasitisme économique, a détourné un ou plusieurs de ses clients, ou qu'elle a été victime, dans le secteur géographique concerné, d'une baisse sensible de ses interventions et donc de son chiffre d'affaires ;

Considérant que le jugement déféré sera également confirmé en ce qu'il a débouté la société SFATD de ses demandes d'indemnisation ;

SUR L'APPEL INCIDENT,

Considérant que dans le contexte ci-dessus décrit, il n'est pas établi que la présente instance a été engagée dans l'intention de nuire et qu'elle a un caractère abusif ;

Que si le bilan versé aux débats révèle que la société ATOUTS SERVICE a commencé à se développer en 1995, postérieurement au jugement prononcé par le tribunal, il ne ressort pas de ce seul élément que son moindre développement entre 1993 et 1995 soit lié, par un rapport de causalité, à la procédure en contrefaçon engagée à son encontre

par la société SFATD ;

Considérant que la demande de dommages-intérêts pour préjudice matériel et moral sera rejetée ;

Considérant que succombant en son appel, la société SFATD sera condamnée aux entiers dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Considérant qu'il sera alloué aux intimés une somme de 20.000 francs en indemnisation de leurs frais non taxables ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties le 13 mars 1995 par le Tribunal de grande instance de NANTERRE ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la SOCIETE FRANCAISE POUR L'ASSISTANCE TECHNIQUE A DOMICILE (SFATD) à verser à la société ATOUTS SERVICE, Monsieur X..., Madame X... et Monsieur Z..., ensemble, la somme de VINGT MILLE FRANCS (20.000 francs) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

CONDAMNE la société SFATD aux dépens d'appel, lesquels pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du Nouveau Code de procédure civile.

ARRET REDIGE PAR :

Madame Marie-France MAZARS, Président,

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

Madame Marie-France MAZARS, Président,

Madame Catherine A..., Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-5258
Date de la décision : 26/02/1998

Analyses

MARQUE DE FABRIQUE - Eléments constitutifs - Caractère distinctif - Appréciation.

Dès lors que des marques, régulièrement déposées, sont composées de deux mots, elles constituent des marques complexes dont les éléments ne sont pas protégeables séparément. Le mot " service " est banal et couramment employé dans le domaine du dépannage à domicile et le mot " atout ", dépourvu de caractère original, ne désigne pas une activité et ne peut à lui seul exercer la fonction distinctive de la marque " Atout confort ".Il en résulte que les éléments séparés " atout " et " service " n'ont pas de caractère distinctif au sens de l'article L 711-2 du Code de la propriété intellectuelle et, qu'en conséquence, il ne peut être reproché à la dénomination " Atouts service " de constituer une imitation illicite des deux marques déposées par le demandeur

CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Faute - Parasitisme.

Un demandeur qui ne produit aucune pièce de nature à établir qu'un tiers est responsable de parasitisme économique, a détourné un ou plusieurs de ses clients, ou qu'il a été victime dans un secteur géographique donné, d'une baisse sensible de son activité et donc de son chiffre d'affaires, est mal fondé à invoquer des agissements fautifs distincts de la contrefaçon


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-02-26;1995.5258 ?
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