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11/02/1998 | FRANCE | N°1996-23066

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11 février 1998, 1996-23066


Monsieur X... a relevé appel d'un jugement contradictoire rendu le 22 mai 1996 par le Conseil des Prud'homme de SAINT GERMAIN EN LAYE qui l'a condamné à payer à Monsieur Y... les sommes de : - 1 516,41 F à titre de rappel de salaires, - 15 000 F à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, - 3 500 F en application de l'article 700 du NCPC. et qui a débouté Monsieur Y... Z... du surplus de ses demandes.

Monsieur Y... a été engagé à compter du 1er novembre 1984 en qualité de barman par Monsieur A..., exploitant un fonds de commerce d'hôtel-restaurant sous l'enseigne

"Le Pavillon Bleu".

Monsieur A... a fait l'objet d'une procédure d...

Monsieur X... a relevé appel d'un jugement contradictoire rendu le 22 mai 1996 par le Conseil des Prud'homme de SAINT GERMAIN EN LAYE qui l'a condamné à payer à Monsieur Y... les sommes de : - 1 516,41 F à titre de rappel de salaires, - 15 000 F à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, - 3 500 F en application de l'article 700 du NCPC. et qui a débouté Monsieur Y... Z... du surplus de ses demandes.

Monsieur Y... a été engagé à compter du 1er novembre 1984 en qualité de barman par Monsieur A..., exploitant un fonds de commerce d'hôtel-restaurant sous l'enseigne "Le Pavillon Bleu".

Monsieur A... a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire et le fonds a été cédé à Monsieur X..., par ordonnance du Tribunal de Commerce de VERSAILLES, en date du 9 décembre 1994.

Suite à la cession, le fonds à réouvert le 12 février 1995 avec reprise du contrat de travail de Monsieur Y....

Fin février 1995, Monsieur X... a informé verbalement Monsieur Y... de la modification de ses horaires de travail.

Par courrier du 21 mars 1995, Monsieur Y... a refusé cette modification.

Par lettre recommandée en date du même jour, son employeur lui a notifié un avertissement en raison de son refus d'accepter les nouveaux horaires.

Par lettre du 20 avril 1995, Monsieur X... a confirmé à son salarié la modification de ses horaires de travail, les nouveaux horaires étant de 11 heures à 15 heures et de 19 heures à 21 heures (21 heures 30 les vendredis et samedis).

Par courrier du 10 mai 1995, Monsieur Y... a réîtéré son refus d'accepter la modification de ses horaires de travail.

C'est dans ces conditions que, convoqué le 22 mai 1995 à un entretien préalable fixé au 30 mai suivant, Monsieur Y... a été licencié

par lettre recommandée en date du 13 juin 1995 pour "refus de la modification substantielle de son contrat de travail pour motif économique".

Monsieur Y... a accepté le 19 juin 1995 la convention de conversion proposée par son employeur.

Contestant le bien-fondé de son licenciement, Monsieur Y... a saisi le 12 juillet 1995 la juridiction prud'homale pour voir condamner son ex-employeur à lui régler, dans le dernier état de ses demandes, les sommes de : - 1 516,41 F à titre de rappel de salaires de mars, avril, mai, juin 1995, - 1 793,54 F à titre de congés payés, - 734,91 F à titre de rappel d'indemnité de licenciement, - 7 697 F à titre d'indemnité pour non respect de la procedure de licenciement, - 92 364 F à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, - 7 000 F en application de l'article 700 du NCPC.

Le conseil a estimé que le licenciement de Monsieur Y... n'était pas fondé sur un motif réel et sérieux du fait que la lettre de licenciement ne comportait pas l'énoncé des motifs économiques inhérents à l'entreprise de nature à justifier la modification des horaires de travail.

Devant la Cour, Monsieur X... soutient verbalement que la modification des horaires de travail de Monsieur Y... trouve son origine dans la constatation que la clientèle était plus importante le soir plutôt que le matin à l'ouverture.

Déclarant avoir réglé à Monsieur Y... toutes ses indemnités de rupture, l'appelant demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et de débouter Monsieur X... de ses demandes.

Monsieur Y..., intimé, conclut à la confirmation du jugement et au débouté de l'appel, faisant observer que la lettre de licenciement n'a pas énoncé la nature économique de la modification du contrat de travail imposée par l'employeur et n'a pas permis ainsi au salarié

d'être informé sur la réalité et le sérieux du motif allégué. Subsidiairement, l'intimé fait valoir que l'appelant ne produit aux débats aucun élément de preuve permettant d'apprécier le bien-fondé de la modification apportée à son contrat de travail. L'intimé réclame enfin une somme de 5 000 F en application de l'article 700 du NCPC. SUR CE

Considérant que Monsieur X... a notifié son licenciement à Monsieur Y... dans les termes suivants :

"A la suite de notre entretien du 22 mai 1995, au cours duquel vous a été remise la documentation établie par les ASSEDIC sur la convention de conversion qui vous est proposée, je vous informe que je suis contraint de procéder désormais à votre licenciement pour le motif économique suivant : - Refus de la modification substantielle de votre contrat de travail pour motif économique.

Cette décision vous est notifiée sous réserve de vos droits à adhérer à une convention de conversion sachant que votre délai de réflexion n'expire que le 19 juin 1995.

En conséquence, si à cette date du 19 juin 1995, au plus tard, vous n'avez pas fait connaître votre réponse sur la proposition de convention de conversion, ou bien, si vous l'avez expressément refusée, la présente lettre constituera la notification de votre licenciement telle que requise par l'article L 122-14-1 alinéa premier du code du travail.

Votre préavis d'une durée du 2 mois débutera à la date de première présentation de cette lettre.

Aucours de préavis, vous pourrez vous absenter 2 heures par jour pour rechercher un nouvel emploi.

Vous bénéficierez d'une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de votre contrat a condition que vous m'informiez de votre désir d'user de cette priorité dans un

délai de 4 mois commençant à courrir à compter de la rupture de votre contrat.

Au contraire, dans l'hypothèse ou postérieurement à ce courrier, mais avant le 19 juin 1995, vous adhérez à la convention de conversion qui vous a été proposée, la rupture de votre contrat de travail, conformément à l'article L 321-6 du code du travail aura lieu automatiquement d'un commun accord des parties. La présente lettre deviendra sans objet";

Considérant qu'en application de l'article L 122-14-2 du code du travail, lorsque le licenciement est prononcé pour un motif économique, la lettre de licenciement doit énoncer les motifs économiques ou de changement technologique invoqués par l'employeur, et que cette disposition étant applicable au salarié qui adhére à une convention de conversion et dont le licenciement a été décidé, la lettre de licenciement notifiant au salarié son licenciement tout en lui proposant une convention de conversion doit être motivée;

Considérant, en l'espèce, qu'en se bornant à énoncer dans la lettre de rupture comme seul motif de licenciement "refus de la modification substantielle de votre contrat de travail pour motif économique" sans indiquer la nature du motif économique l'ayant conduit à proposer la modification litigieuse, l'employeur n'a en fait énoncé aucun motif réel et sérieux, la simple référence au refus du salarié d'accepter la modification substantielle du contrat de travail ne répondant pas à l'exigence légale de motivation prévue par l'article L 122-14-2 précitée;

Considérant qu'il en résulte que les premiers juges ont estimé à juste titre que le licenciement de Monsieur Y... n'était pas fondé sur un motif réel et sérieux;

Considérant que compte-tenu de ce que Monsieur Y..., qui percevait un salaire mensuel de l'ordre de 7 000 F, est resté

plusieurs mois sans emploi, le jugement sera confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 15 000 F à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive;

Considérant que le rappel de salaires de 1 516,41 F sera également confirmé, du fait de la suppression à tort par l'employeur d'un repas par jour pour les mois de mars à juin 1995, soit : 26+26+19+16 =

87X17,43 F = 1 516,41 F;

Considérant, en définitive, qu'il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter Monsieur X... de son appel, en le condamnant aux dépens, ainsi qu'à participer aux frais et honoraires non inclus dans les dépens que l'intimé a dû exposer pour faire assurer sa défense; PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déboute Monsieur X... de son appel,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur X... à payer à Monsieur Y... la somme de 3 000 F (TROIS MILLE FRANCS) en application de l'article 700 du NCPC,

Condamne Monsieur X... aux dépens,

Et ont signé le présent arrêt, Madame BELLAMY, Président de Chambre, et Madame B..., Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-23066
Date de la décision : 11/02/1998

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Défaut - Lettre de licenciement non motivée - /

En application de l'article L 122-14-2 du Code du travail, en cas de licenciement prononcé pour un motif économique, la lettre de licenciement doit énoncer les motifs économiques invoqués par l'employeur ; Cette disposition étant applicable au salarié qui adhère à une convention de conversion, alors que son licenciement a déjà été décidé, il en résulte que la lettre par laquelle un employeur notifie à un salarié son licenciement tout en lui proposant une convention de conversion doit être motivée


Références :

article L.122-14-2 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-02-11;1996.23066 ?
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