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05/02/1998 | FRANCE | N°JURITEXT000006935026

France | France, Cour d'appel de Versailles, 05 février 1998, JURITEXT000006935026


La société AUTOS HOME 95 exerce une activité d'achat, vente, réparation et courtage de véhicules d'occasion sur un terrain clos situé à PIERRELAYE (95).

Désireuse de protéger ses installations, elle s'est adressée à la société ALARM EXPO, qui a procédé à la pose, au mois d'avril 1993, d'un système d'alarme prétendument adapté au site pour un prix initial de 30.836 francs TTC, porté par la suite en raison de certains aménagements supplémentaires à 43.723,07 francs TTC.

Ayant été victimes de plusieurs vols ou dégradations sur des véhicules exposés et e

n tirant pour conséquence que le système de protection s'avérait inefficace, la société...

La société AUTOS HOME 95 exerce une activité d'achat, vente, réparation et courtage de véhicules d'occasion sur un terrain clos situé à PIERRELAYE (95).

Désireuse de protéger ses installations, elle s'est adressée à la société ALARM EXPO, qui a procédé à la pose, au mois d'avril 1993, d'un système d'alarme prétendument adapté au site pour un prix initial de 30.836 francs TTC, porté par la suite en raison de certains aménagements supplémentaires à 43.723,07 francs TTC.

Ayant été victimes de plusieurs vols ou dégradations sur des véhicules exposés et en tirant pour conséquence que le système de protection s'avérait inefficace, la société AUTOS HOME 95 a sollicité en référé la désignation d'un expert.

Par ordonnance du 15 septembre 1994, Monsieur François X... a été désigné aux fins susindiquées et il a déposé un rapport le 05 avril 1995 concluant à l'inadaptation du dispositif.

Au vu des conclusions de l'expert, la société AUTOS HOME 95 a engagé une action au fond et par jugement en date du 26 septembre 1995, le Tribunal de Commerce de PONTOISE a statué dans les termes ci-après :

- Vu le rapport d'expertise de Monsieur François X....

- Ordonne la résolution de la vente du système d'alarme installé par la société d'Exploitation ALARM EXPO.

- Condamne la société d'Exploitation ALARM EXPO à rembourser à la société AUTOS HOME 95 le montant de cette vente, soit la somme de 43.723,07 francs TTC.

- Dit que la société d'Exploitation ALARM EXPO déposera à ses frais le matériel, et emportera à ses frais le matériel répertorié sur ses différentes factures.

- Déboute la société AUTOS HOME 95 de ses demandes de remboursement des vols des 23 avril 1993, 13 avril 1994 et du sinistre du 22

novembre 1994.

- Déboute la société AUTOS HOME 95 de sa demande de remboursement des frais de gardiennage.

- Condamne la société d'Exploitation ALARM EXPO à payer à la société AUTOS HOME 95 la somme de 5.930 francs TTC représentant le montant des interventions injustifiées des Sociétés de Surveillance.

- Condamne la société d'Exploitation ALARM EXPO à payer à la société AUTOS HOME 95 la somme de 4.000 francs à titre de dommages et intérêts.

- Condamne la société d'Exploitation ALARM EXPO à payer à la société AUTOS HOME 95 la somme de 2.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

- Déboute la société AUTOS HOME 95 de sa demande de remboursement des frais d'expertise du CABINET FRANCILIEN.

- Ordonne l'exécution provisoire du jugement à l'exception des condamnations portant sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens.

- Condamne la société d'Exploitation ALARM EXPO aux dépens, en ce inclus les frais d'expertise judiciaire.

*

Appelante de cette décision, la société ALARM EXPO soutient que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle a effectué les travaux qui lui ont été commandés dans les règles de l'art et que l'inefficacité alléguée du système de protection résulte de sa mauvaise utilisation par la société AUTOS HOME 95.

Elle demande, en conséquence, à être déchargée de toutes les condamnations prononcées à son encontre, étant précisé que la société ALARM EXPO ne dépose aucun dossier et qu'elle n'a communiqué aucune

pièce.

*

La société AUTOS HOME 95, actuellement en liquidation judiciaire, et régulièrement représentée par son mandataire liquidateur Maître Yannick MANDIN, conclut pour sa part à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a ordonné la résolution de la vente et en ce qu'il a condamné la société ALARM EXPO à lui payer les sommes de :

- 43.723,07 francs représentant le prix de l'installation,

- 5.930 francs représentant le montant des interventions injustifiées des sociétés de surveillance,

- 4.000 francs à titre de dommages et intérêts,

- 2.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle fait grief, en revanche, aux premiers juges d'avoir rejeté ses autres chefs de demandes, ou ces compléments de demandes, pourtant selon elle justifiés et elle sollicite, dans le cadre d'un appel incident, que la société ALARM EXPO soit condamnée à lui payer un montant total de 44.925,20 francs en couverture des différents sinistres qu'elle a eu à subir du fait de la défaillance du système d'alarme. Elle demande également que les frais de gardiennage soient portés à 10.368,81 francs, que lui soient remboursés les frais d'expertise du Cabinet Francilien à hauteur de 3.558 francs et que les dommages et intérêts qui lui ont été alloués soient élevés à 50.000 francs, le tout avec intérêts de droit à compter du 21 mars 1995 et avec capitalisation desdits intérêts.

Elle réclame également une indemnité complémentaire de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. MOTIFS DE LA DECISION

- Sur la résolution de la vente

Considérant que le fournisseur d'un système d'alarme est tenu de proposer à l'acquéreur une installation conforme et adaptée aux besoins de ce dernier ; qu'il est donc à la fois tenu d'une obligation préalable de conseil et d'une obligation de résultat qui consiste à garantir l'acquéreur qu'en cas de réalisation d'une circonstance prévue au contrat, le signal d'alerte se déclenchera automatiquement, sauf au vendeur de prouver que la défaillance du système d'alarme provient d'une cause étrangère qui ne lui est pas imputable ou d'une mauvaise utilisation de celui-ci par l'acquéreur. Considérant qu'en l'espèce, il apparaît des pièces des débats que la société ALARM EXPO a vendu à la société AUTOS HOME 95 un système "clé en main" sensé répondre aux besoins de sécurité exprimés par cette société ; que très rapidement il s'est avéré que le système ne remplissait pas la fonction pour laquelle il était destiné, puisque plusieurs intrusions ont été constatées et que le système s'est à plusieurs reprises déclenché de manière intempestive.

Considérant que l'expert désigné pour donner son avis sur les causes de ces dysfonctionnements a relevé que le système présentait de nombreuses insuffisances ; qu'à cet égard, il a plus particulièrement noté, après des investigations approfondies :

- un nombre de déclenchements anormal,

- des malfaçons dans la mise en oeuvre du matériel,

- une efficacité réduite de l'installation du fait de la hauteur insuffisante des détecteurs, de la présence d'un dispositif "BIV" inadapté et de l'absence de l'alarme lumineuse pourtant contractuellement prévue.

Qu'il se déduit de là que le système n'était pas adapté à l'usage auquel il était destiné et que la société ALARM EXPO a gravement

manqué à la fois à ses obligations de conseil et de résultat, même si le mur d'enceinte, aux dires de l'expert, était aisément franchissable ; que la société appelante est donc mal venue à affirmer, en quelques lignes de conclusions non étayées par le moindre élément de preuve, qu'elle a respecté les règles de l'art et satisfait à ses obligations et à imputer les défaillances du système à la société AUTOS HOME 95 ; que, dans ces conditions, et dès lors que le résultat promis n'a pas été atteint et que l'installation s'est révélée non conforme à l'usage contractuellement prévu, c'est à bon droit que, par de justes motifs que la Cour s'approprie, les premiers juges ont prononcé la résolution de la vente et condamné la société ALARM EXPO, après avoir déposé à ses frais le matériel, à rembourser à la société AUTOS HOME 95 la somme de 43.723,07 francs TTC, représentant le prix payé pour ce matériel.

- Sur les préjudices complémentaires subis par la société AUTOS HOME 95

Considérant qu'il résulte des constatations de l'expert que, du fait de la défaillance ou de l'insuffisance du système, des vols de véhicules et d'accessoires automobiles ont pu être commis ou facilités.

Considérant que la société AUTOS HOME 95 a effectué auprès du commissariat de police de PONTOISE, le 23 avril 1993, une déclaration de vol d'un véhicule Renault 5 Turbo immatriculé 883 AFM 95 avec effraction de clôture ; que la société AUTOS HOME 95 a dû exposer des frais de réparation dudit véhicule de 24.243,54 francs et de 6.226,50 francs pour la clôture ; que cependant, une compagnie d'assurance a pris à sa charge sur ces frais 24.623,70 francs , qu'il en résulte une différence de 5.846,34 francs que la société ALARM EXPO sera condamnée à payer à la société AUTOS HOME 95 dès lors que ce chef de préjudice subi est directement lié à l'insuffisance du système

d'alarme qui a permis aux voleurs d'opérer en toute tranquillité ; que le jugement dont appel sera infirmé de ce chef.

Considérant que l'expert fait par ailleurs état d'un autre sinistre lié au vol de pièces détachées sur un véhicule Wolkswagen et d'une facture de remise en état de 4.322,06 francs TTC, non prise en charge par l'assureur ; que, pour les mêmes motifs que ci-dessus, la société ALARM EXPO sera condamnée à prendre en charge ce sinistre et le jugement encore infirmé de ce chef ; qu'en ce qui concerne les autres sinistres, la défaillance du système d'alarme n'est pas suffisamment établie de même que la réalité du préjudice subi.

Considérant que, doivent également être pris en charge par la société ALARM EXPO la somme de 5.930 francs arrêtée par l'expert au titre des frais d'intervention des sociétés de surveillance AEPC et Sécurité Organisation liés au déclenchement intempestif du système, le surplus de réclamation de la société AUTOS HOME 95 de ce chef n'étant pas justifié comme l'a relevé l'expert.

Considérant que, par de justes motifs que la Cour s'approprie, le tribunal a, à bon droit, décidé que ne sauraient être mis à la charge de la société ALARM EXPO les frais supplémentaires de gardiennage et les frais d'expertise amiable du Cabinet Francilien d'expertise dont l'intervention n'apparaissait pas indispensable à la solution du litige ; qu'en revanche, la société ALARM EXPO supportera les frais d'expertise judiciaire.

Considérant, par ailleurs, que la somme de 4.000 francs allouée par les premiers juges apparaît suffisante pour couvrir le préjudice complémentaire subi par la société AUTOS HOME 95, et notamment les frais dont celle-ci a dû faire l'avance pour remédier aux conséquences des sinistres susévoqués ; que s'agissant des dommages et intérêts compensatoires alloués, il n'y a pas lieu à d'autres intérêts de retard que ceux courant à compter du jugement dont appel

en ce qui concerne les dispositions confirmées et à compter du présent arrêt en ce qui concerne les dispositions infirmées, et ce, conformément à l'article 1153-1 du Code Civil.

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société intimée les sommes qu'elle a été contrainte d'exposer devant la Cour ; que la société ALARM EXPO sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 8.000 francs s'ajoutant à celle déjà allouée au même titre par le premier juge.

Considérant enfin que la société appelante, qui succombe dans l'exercice de son recours, supportera les entiers dépens. PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- Reçoit la société d'Exploitation ALARM EXPO SARL en son appel principal et la société AUTOS HOME 95 "EURL", représentée par Maître MANDIN, son mandataire liquidateur, intervenant volontaire en son appel incident,

- Dit le premier mal fondé et faisant droit partiellement au second, - Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, excepté en ce qu'il a rejeté les frais exposés par la société d'Exploitation ALARM EXPO SARL relatifs au vol d'un véhicule survenu le 23 avril 1993 et au vol de pièces détachées sur un véhicule de marque Wolkswagen,

- Infirmant de ces seuls chefs et statuant à nouveau,

- Condamne la société d'Exploitation ALARM EXPO SARL à payer à la société AUTOS HOME 95 "EURL", représentée par Maître MANDIN, es-qualités, les sommes de 5.846,34 francs et 4.322,06 francs,

- Rejette le surplus des réclamations de la société AUTOS HOME 95 "EURL", excepté celle relative à l'article 700 du Nouveau Code de

Procédure Civile,

- Condamne, à ce titre, la société d'Exploitation ALARM EXPO SARL à payer à la société intimée, représentée par Maître MANDIN, une indemnité complémentaire de 8.000 francs s'ajoutant à celle déjà accordée en première instance,

- Condamne également la société d'Exploitation ALARM EXPO SARL aux entiers dépens de première instance et d'appel, comprenant les frais d'expertise judiciaire et autorise Maître DELCAIRE, Avoué, à poursuivre directement le recouvrement de la part le concernant, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER DIVISIONNAIRE

LE PRESIDENT A. PECHE-MONTREUIL

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006935026
Date de la décision : 05/02/1998

Analyses

SOCIETE COMMERCIALE (règles générales)

Le fournisseur d'un système d'alarme est tenu à une double obligation à l'égard de son client. Une obligation préalable de conseil, en proposant à l'acquéreur une installation conforme et adaptée à ses besoins, et une obligation de résultat qui consiste à garantir l'acquéreur qu'en cas de réalisation d'une circonstance prévue au contrat le signal d'alerte se déclenchera automatiquement, sauf au vendeur à s'exonérer en prouvant que la défaillance de l'installation est imputable à une cause étrangère ou résulte d'une mauvaise utilisation par le client.Lorsqu'il résulte des pièces des débats qu'un système " clef en main " s'est avéré, très rapidement, ne pas répondre à la fonction pour laquelle il était destiné, qu'une expertise confirme des malfaçons dans la mise en ouvre, une efficacité limitée du dispositif résultant de sa conception et l'inadaptation des matériels utilisés, il s'en déduit que l'installation n'est pas conforme à l'usage contractuellement prévu et que, à défaut pour le fournisseur de rapporter des éléments de nature à établir que les manquements à ses obligations contractuelles de conseil et de résultat ne lui sont pas imputables, la résolution judiciaire de la vente doit être prononcée.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-02-05;juritext000006935026 ?
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