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29/01/1998 | FRANCE | N°1995-9740

France | France, Cour d'appel de Versailles, 29 janvier 1998, 1995-9740


Le 13 janvier 1995, un marché relatif à des travaux d'étanchéité a été conclu entre, d'une part, la S.N.C. CABINET COMPERE, syndic représentant la copropriété du 2/4 Square de la Canche à ELANCOURT (ci-après désigné la Copropriété) et, d'autre part, la SARL E.T.E.P. Le 06 mars 1995, les travaux ont été réceptionnés et un procès verbal de réserves établi.

Un solde de travaux ayant été laissé impayé, la société E.T.E.P. a fait assigner, devant le Tribunal de Commerce de VERSAILLES, la S.N.C. CABINET COMPERE et la Copropriété pour obtenir paiement de la somm

e en principal de 128.177,22 francs outre des dommages et intérêts.

Lors de l'audi...

Le 13 janvier 1995, un marché relatif à des travaux d'étanchéité a été conclu entre, d'une part, la S.N.C. CABINET COMPERE, syndic représentant la copropriété du 2/4 Square de la Canche à ELANCOURT (ci-après désigné la Copropriété) et, d'autre part, la SARL E.T.E.P. Le 06 mars 1995, les travaux ont été réceptionnés et un procès verbal de réserves établi.

Un solde de travaux ayant été laissé impayé, la société E.T.E.P. a fait assigner, devant le Tribunal de Commerce de VERSAILLES, la S.N.C. CABINET COMPERE et la Copropriété pour obtenir paiement de la somme en principal de 128.177,22 francs outre des dommages et intérêts.

Lors de l'audience de plaidoiries du 03 juillet 1995, la société E.T.E.P. s'est désistée de l'instance introduite à l'encontre de la Copropriété mais a maintenu ses demandes à l'encontre de la S.N.C. CABINET COMPERE. [*

Par jugement du même jour, le Tribunal a statué dans les termes ci-après : - donne acte à la SARL E.T.E.P. de son désistement d'instance à l'encontre de la COPROPRIETE DU 2/4 SQUARE DE LA CANCHE ; - constate l'absence de la S.N.C. CABINET COMPERE ; - condamne la S.N.C. CABINET COMPERE à payer à la SARL E.T.E.P., la somme de 128.177,12 francs due pour les causes sus énoncées, en sus les intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1995 ; - la condamne, en outre, à payer une somme de 20.000 francs à titre de dommages et intérêts ; - ordonne l'exécution provisoire du présent jugement nonobstant opposition ou appel ; - condamne, enfin, la partie défenderesse à payer une somme de 10.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi que les dépens. *]

La S.N.C. CABINET COMPERE a relevé appel de cette décision et par

ordonnance du Premier Président de cette Cour, elle a été autorisée à consigner la somme de 148.892,45 francs entre les mains du Président de la Chambre des Avoués.

A l'appui de son recours, l'appelante fait essentiellement valoir qu'elle n'a agi qu'en qualité de mandataire de la Copropriété et qu'elle ne saurait être redevable d'une quelconque somme au titre des travaux exécutés par la société E.T.E.P., et ce, d'autant que son mandat a pris fin et qu'elle a restitué l'intégralité des fonds qu'elle a reçu des copropriétaires, entre les mains de son successeur désigné.

Elle demande en conséquence à être déchargée de la totalité des condamnations prononcées à son encontre et réclame la restitution des sommes consignées, outre 10.000 francs de dédommagement au titre de l'immobilisation de ce capital. Elle réclame également à la société E.T.E.P. 20.000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et une indemnité du même montant sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. *

La société E.T.E.P. persiste à titre principal à imputer le défaut de paiement à la S.N.C. CABINET COMPERE et, à toutes fins, pour le cas où cette argumentation ne serait pas suivie, elle a assigné en appel provoqué la Copropriété, estimant son désistement d'instance à l'égard de cette dernière vicié dès lors qu'il a été obtenu sur la base d'informations tronquées fournies par le représentant de ladite Copropriété. Elle demande, en conséquence, pour le cas où la Cour ne confirmerait pas le jugement déféré, que la Copropriété soit condamnée à lui payer les sommes de : - 103.177,12 francs au titre du solde des travaux (après prise en compte d'un règlement partiel intervenu depuis le jugement) et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 1995 ; - 15.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La Copropriété estime pour sa part, irrecevable l'appel provoqué formé à son encontre et, subsidiairement elle affirme avoir versé entre les mains du Cabinet AGER, son précédent syndic, la totalité des sommes réclamées par la société E.T.E.P., à charge pour cette société de se retourner contre ledit Cabinet.

Elle réclame en outre à la société E.T.E.P. une indemnité de 15.000 francs en couverture des frais qu'elle a été tenue d'exposer devant la Cour. *

MOTIFS DE LA DECISION

. Sur les demandes dirigées contre la S.N.C. COMPERE

Considérant qu'il résulte des mentions du jugement déféré, qu'après s'être désisté de l'instance engagée à l'encontre du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES, la société E.T.E.P. a requis la condamnation de la seule S.N.C. CABINET COMPERE ; que le premier juge a fait droit à cette demande au motif "que les documents communiqués au Tribunal ont été examinés et qu'ils justifient les prétentions de la partie demanderesse" ;

Mais considérant qu'il suffit de se référer au contrat conclu le 13 juin 1995 pour constater qu'il y est expressément mentionné que le maître de l'ouvrage était la Copropriété, et que les travaux étaient demandés par et pour le compte de cette même Copropriété ; que cela est d'autant plus acquis que Monsieur X... est intervenu à l'acte en qualité de représentant du Conseil Syndical et qu'il a signé ledit acte aux côtés de la S.N.C. CABINET COMPERE dont la qualité de syndic était à chaque fois rappelée ; qu'il ressort de ces constatations que la société E.T.E.P. ne pouvait se méprendre sur l'identité réelle de son cocontractant et qu'elle ne pouvait ignorer que la S.N.C. CABINET COMPERE n'intervenait qu'en qualité de mandataire de la Copropriété ; qu'elle est d'autant plus mal venue à soutenir le contraire qu'elle admet qu'elle s'est désistée de l'instance introduite à l'encontre de

la Copropriété sur l'affirmation de son représentant Monsieur X... que les fonds nécessaires au règlement des travaux auraient été intégralement versés à la S.N.C. CABINET COMPERE, syndic de la Copropriété ;

Considérant qu'il suit de là que la S.N.C. CABINET COMPERE ne pouvait être condamnée sur un fondement contractuel, au paiement d'un solde de travaux effectués pour le compte de son mandant alors qu'il n'existait aucun doute possible sur l'identité du cocontractant réel de la société E.T.E.P. ;

Considérant qu'il n'est pas davantage démontré que la S.N.C. CABINET COMPERE aurait commis une faute dans l'exécution de son mandat susceptible de causer un préjudice à la société E.T.E.P. et dont celle-ci pourrait lui demander réparation sur un plan quasi-délictuel ;

Considérant en effet, qu'il est établi qu'il a été mis fin au mandat confié par la Copropriété à la S.N.C. CABINET COMPERE et que celle-ci a restitué la totalité des fonds qu'elle détenait à son successeur, la société PARLIM GESTION, et notamment un solde de 30.999 francs au titre des fonds appelés pour les travaux auprès de la Copropriété ; qu'il ne saurait pas plus être reproché à la S.N.C. CABINET COMPERE de ne pas avoir payé le solde du marché avant la fin de son mandat, alors que ce paiement aurait pu lui être imputé à faute en raison des réserves émises et qu'en tout état de cause ladite S.N.C. ne disposait pas de fonds suffisants ; qu'au demeurant, il appartenait à la société E.T.E.P. de se retourner vers la Copropriété dont elle ne pouvait ignorer sa qualité de cocontractant réel pour régler les difficultés liées au changement de Syndic ;

Considérant que, dans ces conditions, le jugement dont appel sera infirmé en toutes ses dispositions et la société E.T.E.P. condamnée à restituer à la S.N.C. CABINET COMPERE la somme consignée entre les

mains du Président de la Chambre des Avoués et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la présente décision valant mise en demeure ;

Considérant que la S.N.C. CABINET COMPERE a subi incontestablement un préjudice de trésorerie en se voyant contrainte d'immobiliser depuis le 1er novembre 1996 un capital de 149.892,45 francs ; que la société E.T.E.P. sera condamnée à lui payer en réparation la somme de 8.000 francs ;

Considérant en revanche que la S.N.C. CABINET COMPERE ne démontre pas que l'action engagée à son encontre, même si elle est mal fondée, ait dégénéré en abus de droit, qu'elle sera déboutée de la demande en dommages et intérêts complémentaires qu'elle forme de ce chef ;

Considérant toutefois, qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de l'appelante les sommes qu'elle a été contrainte d'exposer tant en première instance qu'en cause d'appel ; que la société E.T.E.P. sera condamnée en compensation à lui payer une indemnité de 12.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

. Sur la mise en cause de la Copropriété

Considérant que, eu égard à l'argumentation développée par la S.N.C. CABINET COMPERE devant la Cour, la société E.T.E.P. a formé un appel provoqué à l'encontre du Syndicat des Copropriétaires, demandant que celui-ci soit condamné, pour le cas où il serait fait droit aux moyens de l'appelante, à supporter les condamnations prononcées par le premier juge à l'encontre de la S.N.C. CABINET COMPERE susnommée ; Mais considérant qu'il sera rappelé que la société E.T.E.P. s'est désistée devant le premier juge de l'instance introduite à l'encontre du Syndicat des Copropriétaires ; qu'elle ne rapporte en rien la preuve qui lui incombe que ce désistement aurait été obtenu par

fraude, faisant état sur ce point de simples allégations non étayées suivant lesquelles il lui aurait été affirmé par Monsieur X..., signataire du marché, que la totalité des fonds aurait été versée entre les mains de la S.N.C. CABINET COMPERE ; que même, si cela avait été le cas, alors que le contraire est désormais établi, la prudence procédurale élémentaire commandait, surtout en l'absence de la S.N.C. CABINET COMPERE, de maintenir en cause le Syndicat des Copropriétaires seul redevable du prix des travaux, à charge pour ce dernier de se retourner contre son mandataire pour lui demander des comptes ; que, dans ces conditions, le désistement d'instance avec toutes les conséquences de droit qui en résultent doit être tenu pour valablement acquis aux débats et l'appel provoqué formé à l'encontre du Syndicat des Copropriétaires, déclaré irrecevable à charge pour la société E.T.E.P. de se mieux pourvoir ;

Considérant cependant que l'équité ne commande pas d'allouer audit Syndicat une quelconque indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant en revanche que la société E.T.E.P., qui succombe, supportera les entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais de mise en cause du Syndicat des Copropriétaires. PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- Reçoit la S.N.C. CABINET COMPERE en son appel ;

Y faisant droit pour l'essentiel,

- Constate que l'appelante, intervenue en qualité de Syndic représentant la COPROPRIÉTÉ DU 2/4 SQUARE DE LA CANCHE, ne saurait être redevable du solde de travaux exécutés par la société E.T.E.P. pour le seul compte de la Copropriété ;

- Constate qu'il n'est pas établi que la S.N.C. CABINET COMPERE

aurait commis une faute dans l'exécution de son mandat ;

- Infirme en conséquence, en toutes ses dispositions, le jugement déféré et, statuant à nouveau, décharge la S.N.C. CABINET COMPERE de toutes les condamnations prononcées à son encontre ;

- Ordonne la restitution à la S.N.C. CABINET COMPERE des sommes consignées en vertu d'une ordonnance de Monsieur le Premier Président, entre les mains du Président de la Chambre des Avoués ;

- Dit que ces sommes produiront intérêt au taux légal à compter de la notification de la présente décision ;

- Condamne en outre la société E.T.E.P. à payer à la S.N.C. CABINET COMPERE la somme de 8.000 francs, en réparation du préjudice financier subi par cette dernière, ainsi qu'une indemnité de 12.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- Rejette le surplus des réclamations formées par la S.N.C. CABINET COMPERE ;

- Dit irrecevable l'appel provoqué interjeté par la société E.T.E.P. à l'encontre du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU 2/4 SQUARE DE LA CANCHE à ELANCOURT ;

- Rejette la demande formée par ledit syndicat au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- Condamne la société E.T.E.P. qui succombe, aux entiers dépens de première instance et d'appel et autorise les Avoués en cause concernés à en poursuivre directement le recouvrement, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER DIVISIONNAIRE

LE PRESIDENT A. PECHE-MONTREUIL

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-9740
Date de la décision : 29/01/1998

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE

Lorsqu'une entreprise assigne un syndicat des copropriétaires et son mandataire en règlement de solde de travaux, pour ensuite se désister de son action contre le syndicat précité et limiter la mise en cause au seul mandataire, elle ne peut prétendre s'être méprise ou avoir ignorée la qualité du mandataire pour l'actionner en paiement sur le fondement du contrat de travaux alors qu'il ressort expressément dudit contrat que le maître d'ouvrage était le syndicat des copropriétaires, que le représentant du conseil syndical était partie au contrat et qu'enfin il était spécifié que la commande était passée par et pour le compte de la copropriété. L'entreprise précitée n'est pas non plus fondée, en application de la responsabilité quasi-délictuelle, à demander réparation au mandataire, dès lors qu'elle ne démontre pas l'existence d'une quelconque faute susceptible de lui causer un préjudice dans l'exécution du mandat


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-01-29;1995.9740 ?
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