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29/01/1998 | FRANCE | N°1995-9416

France | France, Cour d'appel de Versailles, 29 janvier 1998, 1995-9416


Par acte sous seings privés en date du 3 septembre 1984, Madame X... a donné en renouvellement à bail à Monsieur et Madame Y..., aux droits desquels se trouve Monsieur Z..., pour une durée de 9 années ayant commencé à courir le 1er juillet 1984, la totalité de l'immeuble ... à LA GARENNE COLOMBES (92), moyennant un loyer annuel en principal de 46.765 francs.

Par exploit en date du 22 octobre 1992, Monsieur Z... a notifié une demande de renouvellement du bail pour 9 ans, moyennant un loyer annuel fixé en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction publiÃ

© par l'INSEE.

Par exploit en date du 24 décembre 1992, Madame X....

Par acte sous seings privés en date du 3 septembre 1984, Madame X... a donné en renouvellement à bail à Monsieur et Madame Y..., aux droits desquels se trouve Monsieur Z..., pour une durée de 9 années ayant commencé à courir le 1er juillet 1984, la totalité de l'immeuble ... à LA GARENNE COLOMBES (92), moyennant un loyer annuel en principal de 46.765 francs.

Par exploit en date du 22 octobre 1992, Monsieur Z... a notifié une demande de renouvellement du bail pour 9 ans, moyennant un loyer annuel fixé en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction publié par l'INSEE.

Par exploit en date du 24 décembre 1992, Madame X... a notifié à Monsieur Z... congé avec offre de renouvellement de bail pour 9 ans, au 1er juillet 1993, moyennant un loyer annuel en principal de 279.620 francs, fixé suivant la valeur locative.

Par mémoire en date du 15 avril 1993, Monsieur Z... a demandé la fixation du prix du nouveau bail à la somme de 118.100 francs à compter du 1er juillet 1993.

Le 28 avril 1993, Madame X... a signifié à Monsieur Z... un mémoire en réponse demandant la fixation du nouveau loyer à 280.000 francs.

Par jugement du tribunal de grande instance de NANTERRE du 2 novembre 1993, un expert a été désigné.

Celui-ci a déposé son rapport le 14 juin 1994.

A la suite de ce dépôt de rapport, Madame X... a notifié un mémoire dans lequel elle demandait que le loyer soit fixé à 179.500 francs par an.

Monsieur Z..., quant à lui, a contesté que la valeur locative puisse être appliquée et, subsidiairement, les chiffres retenus par l'expert.

Par le jugement déféré en date du 15 juin 1995, le tribunal a dit que le prix du bail renouvelé serait fixé à compter du 1er juillet 1993, à la somme de 170.000 francs annuels en principal.

Au soutien de l'appel qu'il a interjeté contre cette décision, Monsieur Z... fait tout d'abord valoir qu'un hôtel restaurant n'est pas, par nature, monovalent, notamment lorsque, comme c'est son cas, la proportion des recettes réalisées par l'hôtel démontre qu'il ne s'agit pas de l'activité principale par rapport à celle de son restaurant et que l'entrée de l'hôtel et celle du restaurant sont distinctes.

S'agissant de la modification des facteurs locaux de commercialité, Monsieur Z... souligne que l'expert relève que les changements ayant affecté LA GARENNE COLOMBES sont restés sans portée sur son commerce.

Aussi estime-t'il que seul le loyer plafonné peut être retenu et demande sa fixation à 58.000 francs au 1er juillet 1993.

Subsidiairement, Monsieur Z..., soulignant le caractère de l'emplacement des locaux, leur qualité moyenne, les conditions du bail, et les tendances du marché immobilier estime que la valeur locative de la partie restaurant ne saurait être supérieure à 61.600 francs par an. S'agissant de la partie hôtel -qui, de fait ne comprend que 16 chambres- Monsieur Z... précise que les chambres ne sont occupées que cinq jours par semaine et que, compte-tenu d'un mois de fermeture, il convient de retenir 235 jours d'occupation par an. La recette théorique hors taxes et hors services est de 473.076 francs par an. Compte-tenu du taux de fréquentation (0.70) et des caractéristiques de l'établissement, il estime que le loyer devrait être de 49.673 francs ou subsidiairement, si l'on comptait une chambre supplémentaire, de 52.568 francs. Il demande en conséquence à la cour de fixer le loyer global à 58.000 francs, subsidiairement à 104.273 francs et plus subsidiairement à 113.768 francs au 1er juillet 1993.

Madame X... se porte appelante incidente. Elle estime que les locaux ont un caractère monovalent, la partie hôtel n'ayant jamais, à l'origine, été construite pour un usage différent et que les locaux ont toujours été interdépendants. En toute hypothèse, les facteurs locaux de commercialité de LA GARENNE COLOMBES ont notablement été modifiés.

Sur le montant de loyer, elle souligne les surfaces et estime que celles de la partie café restaurant doivent être fixées à 102,30 m pondérés. S'agissant de la partie hôtel -de 18 chambres-, Madame X... considère que la recette annuelle théorique H.T. et hors services en est de 795.991,86 francs. Compte-tenu du taux de fréquentation (0,70) et de la valeur locative (18 %), elle chiffre celle-ci à 100.300 francs soit, pour les deux activités, 179.500 francs.

Elle demande en outre 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. *

MOTIFS DE L'ARRET

. Sur le caractère des locaux,

Attendu que constituent des locaux monovalents les locaux construits en vue d'une seule utilisation -comme celle d'hôtel-café restaurant dès lors que les deux activités sont destinées, du fait de la configuration des locaux, à être interdépendantes- ; que, par exception, de tels locaux peuvent être considérés comme polyvalents lorsque l'activité normalement annexe -celle de café restaurant- acquiert une indépendance par rapport à l'activité de base ;

Attendu qu'il n'est pas contestable qu'en l'espèce les locaux ont été construits en vue d'une seule utilisation, celle d'hôtel-café restaurant ;

Attendu que la partie hôtel et la partie café-restaurant sont matériellement demeurées interdépendantes ;

Attendu que le fait que l'activité normalement annexe -de café restaurant- génère un chiffre d'affaires largement supérieur à celle d'hôtel, constitue un élément pouvant entrer dans une démonstration de l'indépendance de cette activité ; que cet élément est cependant, à lui seul, insuffisant à apporter la preuve de cette indépendance de l'activité de bar restaurant, une telle indépendance supposant nécessairement qu'une part importante de la clientèle du bar restaurant soit différente de celle de l'hôtel ;

Attendu que Monsieur Z... fait valoir que l'activité de café restaurant aurait acquis, par rapport à celle d'hôtel, une indépendance ; qu'il produit, à effet de démontrer cette affirmation, une attestation d'un comptable et la copie de ses déclarations fiscales 2031 et 2033 pour l'année 1994 ;

Attendu que, pour les raisons qui viennent d'être exposées, et indépendamment en l'espèce de l'imprécision de l'attestation du comptable, ces seuls éléments sont impuissants à apporter, à eux seuls, la démonstration requise ;

Attendu que Monsieur Z... ne verse aux débats, notamment, aucune attestation de clients étrangers à l'hôtel -alors qu'il verse des attestations de clients de l'hôtel- ; que, non plus, lors de l'expertise, il n'a pas fait constater le type de fréquentation du café restaurant, alors que cette mesure d'instruction lui aurait permis de le faire ;

Attendu qu'au contraire, Monsieur Z... produit des documents commerciaux et publicitaires de restaurants proches de son établissement dont il résulte que ceux-ci concurrencent son commerce, en ce qui concerne l'éventuelle clientèle extérieure à l'hôtel ;

Attendu qu'il résulte des éléments précédemment rappelés que les conditions d'existence de locaux monovalents sont réunies en l'espèce ; que la preuve n'est pas rapportée que les locaux aient perdu ce caractère ; que dès lors, c'est à bon droit que le premier juge a qualifié les locaux de monovalents et dit que le loyer du bail à renouveler devait être fixé en fonction de la valeur locative ;

. Sur le montant du loyer,

Attendu qu'à juste titre le premier juge, après avoir constaté que, de fait, l'hôtel comportait dix huit chambres, a écarté l'allégation de Monsieur Z..., dénuée de tout support probatoire, selon laquelle deux d'entre elles ne pourraient être louées ;

Attendu qu'il résulte notamment de l'attestation de Monsieur A..., qui certes écrit que durant certaines fins de semaine, il n'y a "personne à l'hôtel", que l'établissement fonctionne bien durant ces périodes de la semaine puisque, durant celles-ci, il fréquente lui-même cet établissement ; que la preuve contraire n'est nullement rapportée par l'attestation du seul Monsieur B..., qui précise qu'en ce qui le concerne il n'occupe une chambre que du lundi au vendredi quand bien même il précise que "tous les clients font comme" lui, dès lors qu'aucun élément ne montre comment il pourrait avoir une connaissance directe de ce qu'il affirme en ce qui concerne les personnes autres que lui et qu'aucune attestation desdits autres clients ne corrobore ce dont il atteste ainsi, la seule attestation d'un autre client étant, précisemment celle de Monsieur A... qui séjourne à l'hôtel y compris durant les fins de semaine ;

Attendu dans ces conditions qu'il y a lieu de retenir les chiffres proposés par l'expert et retenus par le premier juge, Madame X... n'apportant pas la preuve de ce que six chambres et non trois, comme constaté par l'expert, seraient louées à 180 F par jour ;

Attendu dans ces conditions que, pour ces motifs et ceux retenus par le premier juge, il y a lieu de confirmer la décision déférée, sauf en ce qui concerne les dépens ; Attendu que l'équité conduit à condamnation de M. Z... à payer à Mme X... la somme de 8 000 F sur le fondement de l'article 700 NCPC; * PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et contradictoirement,

- Confirme le jugement déféré et statuant plus avant,

- Condamne Monsieur Z... à payer à Madame X... la somme de 8.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- Le condamne aux dépens de première instance et d'appel, frais d'expertise inclus,

- Admet la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-9416
Date de la décision : 29/01/1998

Analyses

BAIL COMMERCIAL

Des locaux construits en vue d'une seule utilisation constituent des locaux monovalents. Tel est le cas d'un hôtel-café et restaurant lorsque ces deux activités sont destinées, du fait de la configuration des locaux, à être interdépendantes. Par exception, ces même locaux peuvent être considérés comme polyvalents quand l'activité normalement annexe de "café restaurant" acquiert une indépendance par rapport à l'activité de base. Si le chiffre d'affaires constitue un élément de nature à entrer dans la démonstration de l'indépendance d'une activité, il est à lui seul insuffisant, en l'occurrence, à établir la preuve de l'indépendance de l'activité de bar restaurant au regard de celle d'hôtellerie alors que n'est pas rapporté la réalité d'une différenciation de clientèle entre chacune d'elles


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-01-29;1995.9416 ?
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