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22/01/1998 | FRANCE | N°1995-190

France | France, Cour d'appel de Versailles, 22 janvier 1998, 1995-190


Selon acte reçu par Me X..., notaire associé à Montivilliers, en date du 18 janvier 1993, Mr DE Y... a vendu à la société COMMERCIALISATION PROSPECTION ETUDES (ci-après dénommée C.P.E.) une propriété sise route du Château de Villers à Villers sur Mer (Calvados) pour le prix de 5 300 000 F.

Mr DE Y... avait entreposé dans un local de la propriété du matériel de jardin, ainsi que des équipements appartenant à ses enfants dont il n'a pu récupérer que ces derniers malgré sommation interpellative en date du 26 avril 1993.

C'est dans ces conditions qu'il a assig

né le 13 juin 1993 la société C.P.E. devant le tribunal de commerce de Nanterre, ...

Selon acte reçu par Me X..., notaire associé à Montivilliers, en date du 18 janvier 1993, Mr DE Y... a vendu à la société COMMERCIALISATION PROSPECTION ETUDES (ci-après dénommée C.P.E.) une propriété sise route du Château de Villers à Villers sur Mer (Calvados) pour le prix de 5 300 000 F.

Mr DE Y... avait entreposé dans un local de la propriété du matériel de jardin, ainsi que des équipements appartenant à ses enfants dont il n'a pu récupérer que ces derniers malgré sommation interpellative en date du 26 avril 1993.

C'est dans ces conditions qu'il a assigné le 13 juin 1993 la société C.P.E. devant le tribunal de commerce de Nanterre, lequel, par jugement en date du 4 novembre 1994, l'a débouté de sa demande en restitution et l'a condamné au paiement d'une somme de 8 000 F au titre de l'article 700 du N.C.P.C.

Pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont retenu que la veille de la signature de l'acte de vente, Mr DE Y... avait fait retirer de la propriété différents meubles et que rien ne l'empêchait donc de faire procéder au retrait des matériels qu'il revendiquait ; que ces matériels étaient pour la plupart nécessaires à l'entretien des lieux et qu'ils ne présentaient aucun caractère d'hétérogénéité par rapport aux biens immobiliers.

Mr DE Y... a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 8 décembre 1994.

Il a fait valoir qu'il résultait expressément des échanges de correspondances antérieurs que le matériel agricole ne faisait pas partie de la vente et que donc, il ne saurait être tiré aucun

argument de l'absence de réserves à l'acte ; que les meubles revendiqués ne sauraient être considérés comme immeubles par destination au sens de l'article 524 du code civil ; qu'il n'avait pas eu le temps matériel de procéder à l'ensemble du déménagement avant la vente et que la société C.P.E. ne saurait se prévaloir de l'article 2279 du code civil ; que d'ailleurs, elle avait reconnu dans un courrier du 18 mai 1993 qu'il était resté propriétaire des équipements d'enfants, pourtant entreposés dans le même local que le matériel de jardin et qu'elle avait admis devant le gardien, Mr Z..., qu'elle n'était pas propriétaire de ce matériel.

Il a donc sollicité la restitution des matériels agricoles dont il était demeuré propriétaire, ce sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, ainsi que la condamnation de la société C.P.E. à lui verser la somme de 50 000 F pour résistance abusive et la somme de 10 000 F au titre de l'article 700 du N.C.P.C.

Pour conclure à la confirmation de la décision entreprise et solliciter une somme de 10 000 F au titre de l'article 700 du

N.C.P.C., la société C.P.E. a répliqué que le litige concernant le matériel agricole existait avant la signature de l'acte authentique, puisque Mr DE Y... proposait de le céder moyennant un prix supplémentaire de 100 000 F -, ce qu'elle-même refusait ; que si Mr DE Y... n'avait pas voulu le céder, il l'aurait fait préciser dans l'acte notarié ; qu'en l'absence de réserves de la part du vendeur, la propriété des biens lui avait été transférée par application des articles 2279 et 524 du code civil.

SUR CE, LA COUR

Considérant que les matériels litigieux ne sont pas à proprement parler des matériels agricoles, mais plutôt des matériels de jardin telles que tondeuse, tronçonneuse ou débroussailleuse ;

Considérant que l'acte de vente ne fait nulle mention de ces

matériels et qu'il est constant que Mr DE Y..., qui avait certes proposé de les vendre par courrier en date du 17 novembre 1992, en demandait un prix de 100 000 F que la société C.P.E. avait refusé de payer ;

Considérant qu'aux termes de l'article 524 du code civil, sont immeubles par destination les objets que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le service et l'exploitation de ce fonds ;

Considérant que l'acte de vente énumère les meubles auxquels Mr DE Y... a entendu conférer cette qualité et que, les matériels litigieux n'étant pas mentionnés, il doit être considéré qu'il n'avait pas l'intention de les affecter spécialement au service et à l'exploitation du fonds;

Considérant que le gardien, Mr Z..., a d'ailleurs confirmé dans son attestation du 1er décembre 1996 que Mr DE Y... devait reprendre ses matériels ;

Considérant que Mr Z... a encore indiqué que la société C.P.E. savait qu'elle n'était pas propriétaire de ces matériels, mais qu'elle entendait s'opposer à leur restitution en raison d'un litige qui l'opposait à Mr DE Y... au sujet d'une gazinière ;

Considérant qu'ainsi, la société C.P.E. n'exerçant pas la possession dont elle se prévaut à titre de propriétaire et n'étant pas de bonne foi, elle ne peut bénéficier de la règle portant qu'en fait de meubles, la possession vaut titre ;

Considérant qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris et

d'ordonner sous astreinte de 1 000 F par jour de retard la restitution des matériels ;

Considérant qu'en s'opposant abusivement à la reprise de matériels qu'elle savait ne pas lui appartenir, mettant ainsi Mr DE Y... dans l'impossibilité de les vendre ou de les utiliser, la société C.P.E. lui a causé un préjudice justifiant l'octroi d'une indemnité de 20 000 F ;

Considérant que l'équité commande, en outre, d'indemniser Mr DE Y... de ses frais non compris dans les dépens à concurrence d'une somme de 10 000 F ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Condamne la société C.P.E. (Commercialisation Prospection Etudes) à remettre à Mr Yann DE Y... les matériels énumérés dans la sommation du 26 avril 1993 et non encore restitués, sous astreinte de 1 000 Francs par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt ;

La condamne à lui payer une somme de 20 000 F à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

La condamne à lui payer une somme de 10 000 F au titre de l'article 700 du N.C.P.C. ;

La condamne aux dépens de première instance et d'appel, et accorde à la SCP JULLIEN LECHARNY ROL pour ceux d'appel le bénéfice de l'article 699 du N.C.P.C.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M. LE GRAND

J-L GALLET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-190
Date de la décision : 22/01/1998

Analyses

VENTE - Immeuble - ACCESSOIRES

Dés lors que sont énumérés dans l'acte de vente d'un immeuble, des meubles auxquels le vendeur a entendu conférer la qualité d'immeubles par destination en application de l'article 524 du code civil ; le matériel d'entretien de jardin n'y étant pas mentionné, celui-ci ne sauraient être considéré comme affecté spécialement au service et à l'exploitation du fonds, ce d'autant qu'il peut être attesté que le vendeur devait en effectuer la reprise.


Références :

Code civil 524

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GALLET

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1998-01-22;1995.190 ?
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