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05/12/1997 | FRANCE | N°JURITEXT000006935159

France | France, Cour d'appel de Versailles, 05 décembre 1997, JURITEXT000006935159


Monsieur et Madame X... ont versé à la société FRELIE VOTRE MAISON la somme de 17.000 F à titre d'acompte, lors de la conclusion, le 24 décembre 1992, d'un contrat de construction de maison individuelle sous condition suspensive.

Monsieur et Madame X... n'ayant pas obtenu le prêt immobilier sollicité par eux, ont demandé la restitution de cet acompte ; une ordonnance d'injonction de payer a été prononcée le 28 juin 1994 par le président du tribunal d'instance de SANNOIS à l'encontre de la société FRELIE VOTRE MAISON. Puis, Monsieur et Madame X... ont déclaré leur cré

ance auprès du mandataire chargé de la liquidation judiciaire de la soci...

Monsieur et Madame X... ont versé à la société FRELIE VOTRE MAISON la somme de 17.000 F à titre d'acompte, lors de la conclusion, le 24 décembre 1992, d'un contrat de construction de maison individuelle sous condition suspensive.

Monsieur et Madame X... n'ayant pas obtenu le prêt immobilier sollicité par eux, ont demandé la restitution de cet acompte ; une ordonnance d'injonction de payer a été prononcée le 28 juin 1994 par le président du tribunal d'instance de SANNOIS à l'encontre de la société FRELIE VOTRE MAISON. Puis, Monsieur et Madame X... ont déclaré leur créance auprès du mandataire chargé de la liquidation judiciaire de la société débitrice et ont été invités, à l'occasion de la procédure, à se rapprocher de la Compagnie Européenne d'Assurances Européennes (C.E.A.I.), en sa qualité de caution de la société FRELIE VOTRE MAISON, qui a refusé sa garantie.

Le 28 mars 1995, Monsieur et Madame X... ont fait assigner la Compagnie EUROPEENE D'ASSURANCES INDUSTRIELLES (C.E.A.I) devant le tribunal d'instance de SAINT GERMAIN EN LAYE.

Monsieur et Madame X... ont exposé que l'attestation de garantie intégrée dans le contrat de construction oblige la C.E.A.I., sauf pour celle-ci à démontrer qu'il s'agit d'un faux. Ils ont invoqué la théorie du mandat apparent et soutenu que la C.E.A.I. devait fournir

sa garantie, puis exercer tout recours utile contre le dirigeant de la société assurée.

Ils ont donc demandé au tribunal de condamner la C.E.A.I. à leur payer les sommes suivantes :

- 17.000 francs représentant l'acompte versé par eux auprès de la Société FRELIE VOTRE MAISON et due en vertu d'une assurance souscrtite auprès de la défenderesse par ladite société,

- 5.000 francs au titre de dommages intérêts pour résistance abusive, - 5.000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et avec le bénéfice de l'exécution provisoire du jugement à venir.

La Compagnie EUROPEENNE D'ASSURANCES INDUSTRIELLES a répliqué que Monsieur et Madame X... ne rapportent pas la preuve d'un

cautionnement avec engagement ferme de sa part, pour garantir le remboursement de l'acompte ; que la société de construction a photocopié les originaux remis par elle dans d'autres dossiers.

Elle a donc sollicité le rejet des demandes des époux X..., ainsi que leur condamnation à lui payer la somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement en date du 1er juin 1995, le tribunal d'instance de Saint Germain en laye a rendu la décision suivante:

- Vu l'article R. 231.8-II du Code de la construction et de l'habitation,

- déclare recevable et bien fondée la demande de Monsieur et Madame

Jacques X...,

- Condamne la Compagnie EUROPENNE d'ASSURANCES INDUSTRIELLES à payer à Monsieur et Madame X... les sommes suivantes :

- la somme de 17.000 francs à titre principal, et la somme de 1.000 francs à titre de dommages intérêts,

- Déboute les parties pour le surplus;

- Ordonne l'exécution provisoire du pésent jugement.

- Condamne la Compagnie EUROPENNE D'ASSURANCES INDUSTRIELLES à payer à Monsieur et Madame Jacques X... la somme de 2.500 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

ainsi qu'aux entiers dépens.

Le 28 juin 1995, la Compagnie EUROPENNE D'ASSURANCES INDUSTRIELLES a interjeté appel.

Elle fait valoir que le caractère frauduleux de l'attestation de remboursement de l'acompte, annexée au contrat de construction, a été reconnu par le premier juge; que les conditions de garantie de remboursement sont définies par les articles R 231 VIII-II du code de la construction et de l'habitation; que cette garantie est une caution solidaire régie par les textes du code civil en matière de cautionnement, lesquels disposent qu'il n'y a pas de cautionnement sans manifestation de la volonté ; que si elle a réglé les causes du jugement déféré, c'est parce que celui-ci était assorti de l'exécution provisoire.

Elle demande à la Cour de:

* Recevoir la C.E.A.I. en son appel,

* Le considérer bien fondé,

En conséquence, infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er juin 1995,

Statuant à nouveau,

* Dire que la C.E.A.I. n'a jamais garanti la société FRELIE VOTRE MAISON, au bénéfice du maitre d'ouvrage X....

* En conséquence, condamner Monsieur et Madame X... à restituer à la C.E.A.I. la somme de 20.965 francs correspondant au règlement par cette dernière des termes des jugements,

* Condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouverts par la SCP FIEVET, avoués, aux offres de droit, et aux entiers dépens dont distraction au profit du même office d'avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

* Condamner les mêmes à la somme de 7.000 francs H.T. en vertu des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Monsieur et Madame X... soutiennent que le règlement sans réserve par l'appelante des sommes dues en principal vaut renonciation à l'appel; que subsidiairement, ils sont tiers à la relation de caution entre la C.E.A.I. et la société de construction ; qu'il appartient à la C.E.A.I de verser aux débats les registres correspondants aux engagements de caution consentis sur la période litigieuse, en particulier ceux correspondant au numéro de l'attestation annexée au contrat de construction souscrit par eux ; que plus subsidiairement, ils ont pu légitimement croire que la société FRELIE VOTRE MAISON avait été mandatée par la C.E.A.I.. pour formaliser en son nom son engagement de caution.

Ils demandent à la Cour de:

- Constater que par son règlement sans réserves en suite du jugement rendu, la C.E.A.I. a renoncé à son appel,

Subsidairement,

La débouter de l'ensemble de ses demandes,

La condamner aux entiers dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés directement par la SCP KEIME et GUTTIN, conformément aux dipositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 25 septembre 1997 et appelée à l'audience du 7 novembre 1997.

SUR CE, LA COUR :

Considérant que le jugement déféré étant assorti de l'exécution provisoire, donc par définition susceptible d'une exécution forcée, il ne peut être déduit du règlement par l'appelante de la somme qu'elle a été condamnée à payer en principal, sa renonciation à l'appel régulièrement soutenu ;

Considérant que les époux X... versent aux débats l'original du contrat de construction souscrit par eux auprès de la société FRELIE

VOTRE MAISON en date du 24 décembre 1992; qu'il y est précisé que ce contrat est soumis à la condition suspensive de l'obtention par le constructeur de la garantie de livraison prévue à l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation et que l'organisme garant est la Compagnie Européenne d'Assurances Industrielles; qu'est annexée à ce contrat un document à en tête de cette même Compagnie Européenne d'Assurances Industrielles, intitulé "attestation de garantie de remboursement de l'acompte perçu" par lequel celle-ci, en qualité d'assureur-garant, s'engage de manière ferme et irrévocable à rembourser au maître d'ouvrage ayant contracté auprès du constructeur FRELIE CONSTRUCTION (en caractères préimprimés), le montant de l'acompte versé, soit 17.000 F (écriture manuscrite) ; que ce document porte le cachet de la C.E.A.I. et trois signatures ; que seul un examen attentif permet de constater que l'une est photocopiée et que les deux autres sont des originaux, à savoir celles des époux X..., qui sont aussi portées sur le contrat de construction ;

Considérant qu'il ressort de ce document que M. et Mme X..., tiers

au contrat d'assurance liant la C.E.A.I.. et le constructeur, ont pu croire légitimement que celui-ci était le mandataire de celle-là pour leur présenter l'attestation de garantie de remboursement et qu'elle était donc valable ; que les relations d'affaires existant entre la société FRELIE CONSTRUCTION et la C.E.A.I., puisque celle-ci en était l'assureur dans le cadre de la garantie construction, ne faisaient que conforter l'apparence de mandat ; qu'il est fréquent qu'un professionnel présente lui-même à son co-contractant la garantie qui lui est donnée par son assureur habituel ; que, par conséquent, les circonstances autorisaient Monsieur et Madame X... à ne pas vérifier les limites exactes des pouvoirs de la société FRELIE VOTRE MAISON et la validité du contrat de garantie annexé au contrat de construction;

Considérant que la C.E.A.I.. ne produit pas l'original de l'attestation d'assurance portant le N° A.9010.200, dont l'attestation litigieuse serait la photocopie, ni d'ailleurs aucun original d'attestation, qui selon ses écritures porterait un tampon

de couleur verte accompagné d'une signature de couleur rouge; qu'elle ne prouve donc pas le caractère frauduleux de l'attestation annexée au contrat de construction ; qu'en tout état de cause, la fraude éventuelle ne saurait être imputée qu'au constructeur et non au maître d'ouvrage, dont il a été démontré qu'il pouvait croire légitiment à l'authenticité du document ;

Considérant que pas davantage, la C.E.A.I. ne peut se prévaloir des règles spécifiques du cautionnement solidaire pour prétendre à la non application des règles du mandat apparent, appliquées par la jurisprudence à toutes les formes de contrat ; que la Cour rappelle, d'ailleurs, que tout engagement contractuel suppose un engagement de volonté de la personne à laquelle on l'oppose et que l'apparence ne peut donc se révéler créatrice de droit qu'à de strictes conditions réunies en l'espèce ; que la C.E.A.I. est donc tenue, vis-à-vis des intimés, à leur rembourser l'acompte de 17.000 F sur la base du mandat apparent ;

Considérant que, par conséquent, c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à la demande des époux X... de condamnation de la C.E.A.I. à leur payer la somme de 17.000 F par le jeu de la garantie et qu'il a déclaré abusive la résistance opposée par cette dernière; que la Cour confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

CONFIRME en son entier le jugement déféré;

DEBOUTE la Compagnie Européenne d'Assurances Industrielles des fins de toutes ses demandes;

La CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP KEIME GUTTIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Et ont signé le présent arrêt:

Le Greffier,

Le Président,

Sylvie RENOULT

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006935159
Date de la décision : 05/12/1997

Analyses

MANDAT - Mandat apparent - Engagement du mandant - Conditions - Croyance légitime du tiers - Circonstances autorisant celui-ci à ne pas vérifier les pouvoirs du mandataire apparent - /

La souscription d'un contrat de construction de maison individuelle doit, en application de l'article L. 231-6 du Code de la construction et de l'habitation, être assortie d'une garantie de livraison par cautionnement du constructeur. Les souscripteurs qui versent un acompte, sous condition suspensive d'obtention d'un prêt, à l'occasion de la signature d'un contrat de construction assorti d'une garantie de livraison, sous condition suspensive du cautionnement du constructeur par un assureur nommément désigné au contrat, alors qu'un certificat annexé au contrat et apparemment signé par l'assureur caution garantit le remboursement de l' acompte, peuvent légitimement croire que l'assureur/caution est engagé à garantie en vertu d'un mandat confié au constructeur (article 1998 du Code civil), sans obligation pour eux de vérifier l'exacte étendue des pouvoirs du constructeur et, partant, la validité du certificat de garantie. Les règles afférentes à la validité du cautionnement ne pouvant faire obstacle à l'application des dispositions de l'article 1998 du Code civil relatives au mandat et au mandat apparent, l'assureur est tenu à restitution de l'acompte versé par les souscripteurs


Références :

Code civil, article 1998 Code de la construction et de l'habitation, article L 231-6

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1997-12-05;juritext000006935159 ?
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