Selon acte sous seing privé en date du 1er août 1987, Monsieur X... a donné en location à Monsieur Y... un appartement situé à RUEIL MALMAISON, 135/139, rue Philibert.
Ayant appris que Madame Z... occupait cet appartement, Monsieur X... a assigné Monsieur Y... devant le tribunal d'instance de PUTEAUX.
Par jugement rendu le 19 décembre 1995, ce tribunal a :
- constaté la résiliation du contrat de bail liant les parties à compter du 24 mai 1995,
- ordonné l'expulsion de Monsieur Y... et de Madame Z...,
- condamné solidairement Monsieur Y... et Madame Z... à payer à Monsieur X... :
* la somme de 61.023 Francs en deniers ou quittances valables, correspondant à leurs loyers et leurs charges impayés au 24 mai 1995, ainsi que sur l'indemnité d'occupation des lieux dont ils sont redevables depuis cette date arrêtée au 31 août 1995,
* une indemnité provisionnelle d'occupation des lieux égale au montant du loyer et des charges à partir du 1er septembre 1995 jusqu'à parfaite libération des locaux,
* la somme de 4.500 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- rejeté les autres demandes, formées par chacune des parties.
Appelante de cette décision, Madame Z... expose que suite au départ de Monsieur Y... son concubin, le 1er juillet 1989, elle était restée dans les lieux, ce que Monsieur X... savait et a accepté, dès lors qu'il lui a délivré des quittances à son nom et accepté le règlement du loyer et des charges par elle sans émettre de protestation.
Elle soutient que Monsieur X... n'a pas respecté la procédure de résiliation du bail, faute de lui avoir délivré un commandement de
payer préalablement à l'assignation.
Elle conteste enfin devoir les sommes au paiement desquels elle a été condamnée.
Elle demande, par conséquent, à la Cour, d'infirmer le jugement déféré, de constater que Monsieur X... a reconnu à Madame Z... la qualité de locataire, dire et juger qu'il y a eu un transfert du contrat de bail établi au nom de Monsieur Y... et Madame Z... sa concubine, après le départ de celui-là, constater la violation par Monsieur X... de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dire et juger n'y avoir lieu à prononcer l'acquisition de la clause résolutoire, surseoir à la condamnation de Madame Z... à payer des loyers impayés jusqu'à la production par Monsieur X... de communiquer les justificatifs des charges afférentes au loyer depuis le 1er juillet 1989, il ne sera pas fait droit à sa demande en paiement, condamner Monsieur X... à payer à Madame Z... la somme de 10.000 Francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Monsieur X... réplique que Madame Z... n'est pas en mesure de rapporter la preuve de l'existence d'un bail écrit voire verbal.
Il fait valoir que le congé n'a pas à être signifié au concubin du locataire principal, et que la résiliation du bail est acquise de plein droit pour défaut du paiement des loyers.
Il conclut au débouté de Madame Z..., à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de Madame Z... au paiement de la somme de 147.631 Francs en principal, outre les intérêts depuis le 23 mars 1995 et de celle de 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Madame Z... prie la Cour de déclarer Monsieur X... irrecevable en ses demandes, de constater qu'elle est titulaire d'un bail oral, de dire et juger Monsieur X... non fondé en sa demande tendant à la
voir déclarer sans droit ni titre et à obtenir son expulsion, vu les paiements qu'elle a effectués, seule, à Monsieur X... avec l'accord de ce dernier, d'abord en espèces puis par chèques depuis 1989, dire et juger ce dernier ni recevable ni fondé en ses demandes en paiement, à titre subsidiaire, nommer un constatant pour faire les comptes entre les parties.
Un procès-verbal de vaines recherches a été dressé en ce qui concerne Monsieur Y....
SUR CE LA COUR
Considérant que le 30 juillet 1987, Monsieur X... a consenti à Monsieur Y..., seul, un bail pour une durée d'une année à compter du 1er août 1987, renouvelable par tacite reconduction ;
Considérant que Monsieur Y... n'a jamais mis fin à ce bail et qui, par conséquent, continue de recevoir application ;
Considérant que selon l'article 8 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire ne peut céder le bail sauf avec l'accord écrit du bailleur, y compris sur le prix du loyer ;
Que tel n'est pas le cas en l'espèce, Madame Z... ne démontrant pas que Monsieur Y... avait informé le bailleur de ce qu'elle restait dans les lieux et qu'au surplus, il avait obtenu l'accord écrit du bailleur pour une éventuelle cession ;
Que l'acceptation de chèques émis par Madame Z... en règlement du loyer ne peut valoir reconnaissance par le bailleur de la substitution de locataire dès lors qu'il n'a pas consenti expressément à ce changement ; qu'il n'est d'ailleurs pas fait état d'avis d'échéances ou de quittances qui auraient mentionné Madame Z... en tant que locataire ;
Que l'appelante est, dans ces conditions, irrecevable à invoquer l'existence d'un quelconque bail oral ;
Considérant au surplus que Madame Z... ne rapporte pas la preuve de
ce qu'elle avait la qualité de concubine notoire de Monsieur Y..., ni de ce qu'elle vivait avec lui depuis au moins un an lorsqu'il avait abandonné le domicile, ainsi que l'exige l'article 14 de la loi susvisée ;
Qu'elle ne peut donc se prévaloir de la continuation du bail à son profit ;
Considérant dans ces conditions que le bailleur n'était tenu de délivrer un commandement de payer qu'à Monsieur Y... qui, seul, a la qualité de locataire, Madame Z... étant pour sa part occupante sans droit ni titre des lieux litigieux ;
Qu'à juste titre, le tribunal a considéré comme étant régulier et valable le commandement visant la clause résolutoire délivré le 23 mars 1995 à Monsieur Y..., constaté la résiliation du bail, ledit commandement étant demeuré infructueux, et ordonné l'expulsion tant de Monsieur Y... que de Madame Z... ;
Considérant que Madame Z... ne verse aucune pièce au soutien de sa contestation des sommes qui lui sont réclamées par Monsieur X... ; Qu'aux termes de l'article 146 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile, en aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve ;
Qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de constatation sollicitée par Madame Z... ;
Considérant qu'il résulte des pièces produites que, (appels de provision émis par le Cabinet RIGNAULT PREVEL, compte de charges établis par la société FONCIA FOUBERT) la dette locative s'élève au 26 juin 1997 à la somme de 147.631 Francs ;
Qu'il convient de condamner solidairement Monsieur Y... et Madame Z... au paiement de cette somme majorée des intérêts au taux légal à
compter du 23 mars 1995, date du commandement de payer ;
Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X... les sommes exposées par lui qui ne sont pas comprises dans les dépens ;
Qu'il y a lieu de condamner Madame Z... à lui verser la somme de 5.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort :
Vu le jugement du tribunal d'instance de PUTEAUX le 19 décembre 1995 :
- CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions sauf en celle concernant le montant de la condamnation au titre de l'arriéré de loyer et charges ;
Y ajoutant ;
- DIT n'y avoir lieu à faire droit à la demande de constation sollicitée par Madame Z... ;
- CONDAMNE solidairement Monsieur Y... et Madame Z... à payer à Monsieur X... la somme de 147.631 Francs, montant de l'arriéré des loyers et charges à la date du 26 juin 1995, ce, outre les intérêts au taux légal à compter du 23 mars 1995, date du commandement de payer ;
- CONDAMNE Madame Z... à payer à Monsieur X... la somme de 5.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- LA CONDAMNE en outre aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par Maître BOMMART, Avoué, conformément aux dispositions de l'article
699 du nouveau code de procédure civile.
ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : LE GREFFIER
LE PRESIDENT S. RENOULT
A. CHAIX