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30/10/1997 | FRANCE | N°1995-9147

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 octobre 1997, 1995-9147


Madame X... a avalisé deux billets à ordre d'un montant de 150.000 francs chacun, émis le 30 septembre 1993 par la SARL STEFF MEUBLES, dont l'intéressée était la gérante, au profit de la BANQUE PARISIENNE DE CREDIT (B.P.C.).

A leur échéance du 15 décembre 1993, ces billets à ordre sont revenus impayés et, le 14 mars 1994, la société STEFF MEUBLES a été placée en liquidation judiciaire.

La Banque a régulièrement déclaré sa créance et, par acte du 06 juin 1994, elle a engagé une action en paiement à l'encontre de Madame X..., prise en sa qualité d'avalist

e. [*

Par jugement en date du 07 septembre 1995, le Tribunal de Commerce de PONTOI...

Madame X... a avalisé deux billets à ordre d'un montant de 150.000 francs chacun, émis le 30 septembre 1993 par la SARL STEFF MEUBLES, dont l'intéressée était la gérante, au profit de la BANQUE PARISIENNE DE CREDIT (B.P.C.).

A leur échéance du 15 décembre 1993, ces billets à ordre sont revenus impayés et, le 14 mars 1994, la société STEFF MEUBLES a été placée en liquidation judiciaire.

La Banque a régulièrement déclaré sa créance et, par acte du 06 juin 1994, elle a engagé une action en paiement à l'encontre de Madame X..., prise en sa qualité d'avaliste. [*

Par jugement en date du 07 septembre 1995, le Tribunal de Commerce de PONTOISE, constatant l'absence de timbre, a déclaré irrecevable l'action de la B.P.C. sur le fondement des articles 916 et 1840 T Bis du Code Général des Impôts (C.G.I.). *]

Appelante de cette décision, la B.P.C. lui fait grief d'avoir fait une application erronée des dispositions susvisées et soutient que, s'agissant d'effets établis à l'occasion d'une opération de crédit bancaire, la formalité du timbre ne s'imposait pas. Elle demande en conséquence que Madame X... soit condamnée à lui payer la somme de 30.000 francs avec intérêts de droit à compter du 15 décembre 1993, que soit ordonnée la capitalisation des intérêts et que lui soit alloué une indemnité de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Madame X... conclut, pour sa part, à la confirmation du jugement déféré sauf à se voir accorder une indemnité de 25.000 francs en couverture des frais de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer. En réplique, elle fait valoir que les dispositions de l'article 1840 T Bis du C.G.I. ont une portée générale et que l'article 916 du même Code ne peut recevoir application que s'il s'agit d'une véritable opération de crédit, ce qui n'est pas, selon elle, le cas en l'espèce, dès lors que les billets à ordre n'ont été émis qu'en considération de l'état virtuel de cessation de paiement de la société STEFF MEUBLES et pour absorber un découvert. Elle ajoute encore, qu'aucun protêt n'a été dressé dans les 10 jours suivant l'échéance des billets à ordre et en déduit que la Banque, porteur négligent, est déchue de tout droit envers l'avaliste, ce à quoi la Banque réplique que les billets sont stipulés sans frais, ce qui la dispensait de faire dresser protêt. *

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant que l'article 1840 T Bis du C.G.I., abrogé par la loi n° 96.1181 du 30 décembre 1996, prévoyait que "le porteur d'une lettre de change non timbrée ou non visée pour timbre, conformément aux articles 910 et 911, ne peut jusqu'à l'acquittement des droits de timbre et des amendes encourues, exercer aucun des recours qui lui sont accordés par la loi contre le tireur, les endosseurs et les autres obligés" ; (que) "est également suspendu jusqu'au paiement des droits de timbre et des pénalités encourues, l'exercice des recours appartenant au porteur de tout autre effet sujet au timbre et non timbré ou non visé pour timbre, conformément aux mêmes articles" ;

Considérant cependant que l'article 916 du C.G.I. également abrogé par la loi susvisée du 30 décembre 1996, disposait que les actes et écrits établis à l'occasion des activités bancaires et financières sont dispensées des droits de timbre applicables aux effets négociables ; que les premiers juges ont à tort écouté ces dispositions dérogatoires désormais abrogées alors qu'il résulte des pièces des débats que la Banque a apporté son concours financier à la société STEFF MEUBLES pour l'octroi d'une facilité de caisse garantie par les effets litigieux, et ce, à une époque où la société était encore in bonis ; qu'il suit de là que s'agissant d'une opération d'activité bancaire entrant dans la définition des dispositions susvisées de l'article 916 et Madame X... ne rapportant pas la preuve qui lui incombe que la Banque connaissait l'état de déconfiture de la société au moment où elle a apporté son concours, le moyen invoqué tenant à l'absence de timbre, retenu à tort par le Tribunal, ne pourra être qu'écarté ;

Considérant que Madame X... ne peut davantage soutenir que la Banque se serait comportée en porteur négligent dans la mesure où elle n'a pas fait dresser protêt dans les 10 jours suivant l'échéance ;

Considérant en effet que les deux billets à ordre comportant la mention "sans frais" apposée par le Tireur et ladite clause étant opposable à tous les signataires, la banque était dispensée de faire dresser protêt en cas de non paiement à l'échéance ainsi qu'en dispose l'article 150 du Code du Commerce ;

Considérant que dans ces conditions, Madame X... sera condamnée à payer à la B.P.C., en sa qualité d'avaliste, la somme de 300.000 francs, avec intérêts de droit à compter du 15 décembre 1993, date d'échéance des effets et le jugement dont appel infirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que la Banque est, par ailleurs, fondée à réclamer le bénéfice de la capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil et ce, à compter du 15 février 1996, date de la première demande en justice formée par voie de conclusions ;

Considérant également qu'il serait inéquitable de laisser à la Banque la charge des frais qu'elle a été contrainte d'exposer pour parvenir au recouvrement de sa créance ; que Madame X... sera condamnée à lui payer une indemnité de 6.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Considérant enfin que l'intimée, qui succombe, supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- Reçoit la BANQUE PARISIENNE DE CREDIT, dite B.P.C. S.A. en son appel ;

Y faisant droit pour l'essentiel,

- Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

- Condamne Madame Catherine X... à payer à la BANQUE PARISIENNE DE CREDIT, dite B.P.C. S.A. la somme de 300.000 francs avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 1993 ;

- Ordonne la capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil, à compter du 15 février 1996, date de la première demande en justice ;

- Condamne également l'intimée à payer à la BANQUE PARISIENNE DE CREDIT, dite B.P.C. S.A., une indemnité de 6.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- Condamne enfin Madame Catherine X... aux entiers dépens et autorise la SCP d'Avoués LAMBERT-DEBRAY-CHEMIN, à en poursuivre directement le recouvrement, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-9147
Date de la décision : 30/10/1997

Analyses

EFFET DE COMMERCE - Billet à ordre

Si aux termes de l'article 1840 T Bis du Code Général des Impôts, dans sa rédaction applicable en la cause, le porteur d'une lettre de change non timbrée ou non visée pour timbre, conformément aux articles 910 et 911, ne peut, jusqu'à l'acquittement des droits de timbre et des amendes encourues, exercer aucun des recours qui lui sont accordés par la loi contre le tireur, les endosseurs et les autres obligés, et qu'est également suspendu jusqu'au paiement des droits de timbre et des pénalités encourues, l'exercice des recours appartenant au porteur de tout autre effet sujet au timbre et non timbré ou visé pour timbre, conformément aux mêmes articles, il résulte de l'article 916 CGI, dans sa rédaction applicable à la cause, que les actes et écrits établis à l'occasion des activités bancaires et financières sont dispensés des droits de timbre applicable aux effets négociables.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Assié

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1997-10-30;1995.9147 ?
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