La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/10/1997 | FRANCE | N°1995-9585

France | France, Cour d'appel de Versailles, 09 octobre 1997, 1995-9585


La SA IMMOPAR a été admise au bénéfice du règlement amiable de la loi du 1er mars 1994.

La C.R.C.A.M. du VAL DE FRANCE, créancière d'IMMOPAR, avait, dans le cadre des négociations menées afin d'aboutir à un règlement amiable, accepté l'abandon de sa créance et consenti le règlement de créances non bancaires du débiteur à hauteur de 2.000.000 francs sous condition résolutoire du dépôt de bilan de IMMOPAR, et sous condition suspensive de l'adoption d'un plan de redressement amiable signé par les banques créancières dans les conditions de la conciliation avant le 30

juin 1995.

Après le dépôt, le 28 avril 1995 au greffe du tribunal de comm...

La SA IMMOPAR a été admise au bénéfice du règlement amiable de la loi du 1er mars 1994.

La C.R.C.A.M. du VAL DE FRANCE, créancière d'IMMOPAR, avait, dans le cadre des négociations menées afin d'aboutir à un règlement amiable, accepté l'abandon de sa créance et consenti le règlement de créances non bancaires du débiteur à hauteur de 2.000.000 francs sous condition résolutoire du dépôt de bilan de IMMOPAR, et sous condition suspensive de l'adoption d'un plan de redressement amiable signé par les banques créancières dans les conditions de la conciliation avant le 30 juin 1995.

Après le dépôt, le 28 avril 1995 au greffe du tribunal de commerce, des accords bilatéraux conclus avec les créanciers bancaires, IMMOPAR a sollicité l'exécution de l'accord conclu avec la C.R.C.A.M. Celle-ci, après avoir demandé la communication des accords convenus par les autres banques, a déclaré ne pas pouvoir s'exécuter tant qu'elle n'aurait pas l'assurance de l'exécution de ceux-ci. Par ordonnance de référé en date du 07 juillet 1995, le président du tribunal de commerce de Paris a alors désigné un mandataire adhoc dans le but de résoudre les difficultés dans l'exécution des conventions passées.

IMMOPAR a ensuite assigné en référé la C.R.C.A.M. en exécution de son obligation et a demandé que lui soit versée la somme provisionnelle de 2.000.000 francs et la somme de 20.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par ordonnance en date du 30 octobre 1995, le président du tribunal de commerce de Chartres a constaté la caducité du protocole signé par la C.R.C.A.M., a débouté IMMOPAR de ses demandes et l'a condamnée à payer à la C.R.C.A.M. la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Appelante de cette décision, la société IMMOPAR fait grief au

tribunal d'avoir déduit de l'article 38 du décret du 1er mai 1985 que celui-ci imposait la rédaction d'un document unique et global, et de l'article 36 de la loi du 1er mars 1984, que la conclusion d'accords séparés aurait rendu nécessaire l'homologation du plan alors que, selon la concluante, ces dispositions issues de la modification opérée par la loi du 10 juin 1994 et son décret d'application ne sont applicables qu'aux procédures ouvertes après le 21 octobre 1994, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Elle estimait, en effet, que les anciennes dispositions n'imposaient pas la rédaction d'un document unique et que la signature d'actes bilatéraux, relevant de la nature contractuelle du règlement amiable, ne pouvait être remise en cause que pour vice du consentement. L'accord signé par la C.R.C.A.M. est dès lors, selon elle, conforme à la loi du 1er mars 1984.

La C.R.C.A.M., intimée, estime que le tribunal a fait une exacte interprétation de la loi qui exige un accord unique qui se justifie par le fait que les créanciers qui y participent, acceptent de se soumettre aux dispositions du règlement amiable. Ainsi, elle considère que les accords bilatéraux intervenus entre l'appelante et les autres banques ne sont qu'un élément constitutif de l'accord visé par l'article 38 du décret du 1er mars 1985.

En outre, elle relève que la condition de l'exécution de l'accord n'a pas été réalisée puisque le plan de redressement amiable devait être signé par l'ensemble de la communauté bancaire concernée et que chacun devait respecter la solidarité interbancaire ainsi décidée. Elle souligne qu'elle était en droit de vérifier l'exécution pour les autres créanciers de leurs engagements.

L'appelante conteste l'argumentation de la C.R.C.A.M., relevant que les dispositions de la loi du 1er mars 1984 et de son décret d'application ne changent en rien la nature contractuelle de l'accord

qui reste soumis à l'article 1134 du code civil et que la C.R.C.A.M. ne peut se prévaloir d'une absence de signature d'un accord global unique pour se soustraire à son engagement.

D'autre part, elle considère que c'est à tort que la C.R.C.A.M. allègue l'absence de "constatation de la bonne fin de la conciliation" prévue par l'accord du 30 janvier 1995 ainsi que de la réalisation des conditions de la conciliation.

En effet, l'attestation du conciliateur, ainsi que l'homologation des accords intervenus le 17 novembre 1995, suffisent. Par ailleurs, IMMOPAR estime que la condition d'obtention d'un plan global que la C.R.C.A.M. met en avant, est nouvelle et ne figurait pas parmi les conditions évoquées. En conséquence, elle demande que la C.R.C.A.M. soit déboutée de ses demandes et que l'ordonnance soit infirmée. SUR CE LA COUR

Attendu que les dispositions de la loi du 10 juin 1994 qui a notamment modifié la loi du 1er mars 1984 ne sont, selon l'article 99 du premier de ces textes, applicables qu'aux procédures ouvertes à compter de la date de son entrée en vigueur ; qu'à défaut de décret ayant fixé celle-ci à une date antérieure, la loi du 10 juin 1994 est entrée en vigueur le 1er octobre 1994 ; que le décret du 21 octobre 1994 modifiant le décret d'application du 1er mars 1985, publié le 22 octobre 1994, est entré en vigueur immédiatement ;

Attendu qu'IMMOPAR a été admise au bénéfice de la procédure de règlement amiable le 1er octobre 1993, par l'ordonnance du président du tribunal de commerce désignant le conciliateur au vu de la demande de règlement amiable et des propositions de redressement proposées ; que la procédure de règlement amiable ayant été ouverte avant l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1994, c'est à tort que le premier juge n'a pas fait application de la loi du 1er mars 1984 en sa rédaction antérieure à la loi du 10 juin 1994 ;

Attendu que selon l'article 38 du décret du 1er mars 1985, en sa rédaction applicable à l'espèce, "l'accord entre le débiteur et les créanciers est constaté dans un écrit signé par les parties et le conciliateur" ; que ce même texte prévoit que "ce document est déposé au greffe et communiqué au procureur de la République" ;

Attendu que, contrairement aux affirmations de la C.R.C.A.M. Val de France, ce texte, qui ne déroge nullement aux règles de droit commun de validité des conventions, ne prévoit pas la nécessité d'un écrit -encore moins d'un écrit unique- qui serait destiné à rendre effectif l'accord ; qu'au contraire, la signature d'un écrit a, aux termes mêmes du décret, pour seule fin de "constater" l'existence d'un tel accord ;

Attendu que l'accord conclu entre la C.R.C.A.M. Val de France et IMMOPAR prévoit que "la Caisse Régionale de Crédit Agricole accepte, dans le cadre du règlement amiable proposé par le conciliateur, de participer en tant que de besoin au règlement partiel des créances super privilégiées et chirographaires non bancaires" et que "cette participation sera calculée à due concurrence de la quote part des encours de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Loir et Cher" (aujourd'hui Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel De Val de France) "s'élevant au 1er octobre 1993 à la somme de cinquante deux millions de francs par rapport à l'encours global du groupe IMMOPAR à la même date, soit une somme forfaitairement fixée à deux millions de francs" ;

Attendu que l'accord prévoit encore que "cette participation sera versée à la constatation de la bonne fin de la conciliation" ; que "cet engagement de participation au passif non bancaire... deviendrait caduque (sic) en cas de dépôt de bilan du groupe IMMOPAR et, en tout état de cause, à la date du 30 juin 1995 si le plan de redressement amiable n'(était) pas signé à cette date par l'ensemble

de la communauté bancaire concernée et dans les conditions décrites au début de la conciliation" ;

Attendu que ces stipulations sont claires et précises et ne nécessitent pas d'interprétation ;

Attendu que le groupe IMMOPAR n'a pas déposé son bilan ;

Attendu que le plan de redressement amiable a été signé par l'ensemble de la communauté bancaire avant le 30 juin 1995 comme cela résulte du certificat du conciliateur en date du 2 mai 1995 ; qu'il en résulte que la conciliation a été menée à bonne fin dans le délai requis, la signature des accords par les banques impliquant nécessairement que chacune de celles-ci a "la ferme intention d'acquitter ce qu'elle doit dans les proportions indiquées dans son protocole particulier" ;

Attendu que les conditions décrites en début de l'acte de conciliation font seulement référence à la conduite de la conciliation par le conciliateur désigné ; qu'il n'est avancé aucun élément de preuve qui permettrait d'interpréter ce membre de phrase comme signifiant que le conciliateur aurait indiqué que les différents accords avec les banques respecteraient un "principe d'équité mathématique" ;

Attendu dans ces conditions qu'aucune contestation sérieuse n'existant sur les conditions de mise en oeuvre de l'accord régulièrement signé entre la C.R.C.A.M. Val de France et IMMOPAR, il y a lieu de faire droit à la demande de celle-ci et lui accorder une provision de 2.000.000 francs ;

Attendu que l'équité conduit à condamnation de la C.R.C.A.M. à payer à IMMOPAR la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

- Infirme l'ordonnance déférée et statuant à nouveau,

- Condamne la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL VAL DE FRANCE "C.R.C.A.M." à payer à la société IMMOPAR SA une somme provisionnelle de 2.000.000 francs et la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- La condamne aux dépens,

- Admet la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS etamp; ASSOCIES au bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR MARON, CONSEILLER ET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER DIVISIONNAIRE

LE PRESIDENT A. PECHE-MONTREUIL

F. X...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-9585
Date de la décision : 09/10/1997

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (prévention et règlement amiable) - Règlement amiable - Accord amiable

La banque qui, dans le cadre de négociations conduites en vue d'aboutir à un règlement amiable des difficultés d'un débiteur, consent un abandon de créance et accorde une ligne de crédit pour l'extinction de créances non bancaires, sous double conditions résolutoire du dépôt de bilan et suspensive de l'adoption d'un plan de redressement amiable signé par les banques créancières, dans les conditions de la conciliation et selon un terme préfix, prend un engagement contractuel dont la validité n'est pas affectée par les dispositions du décret du 1er mars 1985, relatif au règlement amiable.Dès lors que les conditions précitées sont remplies, dans le délai requis, par le promoteur bénéficiaire de l'engagement, la banque est tenue d'honorer son engagement


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1997-10-09;1995.9585 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award