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03/10/1997 | FRANCE | N°1995-1633

France | France, Cour d'appel de Versailles, 03 octobre 1997, 1995-1633


FAITS ET PROCEDURE,

Par acte sous seing privé en date du 4 mars 1994, Madame X... a donné à bail aux époux Y... un logement situé ... à COURBEVOIE. Madame Z... s'est engagée en qualité de "caution" des époux Y....

Suite au défaut de paiement des loyers et charges par acte du 26 mai 1994, Madame X... a fait délivrer aux époux Y... un commandement d'avoir à payer la somme de 6.760 francs de loyers et de charges locatives.

Par acte du 6 septembre 1994, Madame X... a assigné les époux Y... et leur "caution", Madame Z..., devant le Tribunal d'Instance de COURB

EVOIE aux fins de voir déclarer acquise la clause résolutoire, ordonner l'expuls...

FAITS ET PROCEDURE,

Par acte sous seing privé en date du 4 mars 1994, Madame X... a donné à bail aux époux Y... un logement situé ... à COURBEVOIE. Madame Z... s'est engagée en qualité de "caution" des époux Y....

Suite au défaut de paiement des loyers et charges par acte du 26 mai 1994, Madame X... a fait délivrer aux époux Y... un commandement d'avoir à payer la somme de 6.760 francs de loyers et de charges locatives.

Par acte du 6 septembre 1994, Madame X... a assigné les époux Y... et leur "caution", Madame Z..., devant le Tribunal d'Instance de COURBEVOIE aux fins de voir déclarer acquise la clause résolutoire, ordonner l'expulsion des locataires, fixer l'indemnité d'occupation à 3.500 francs par mois, et les entendre condamnés solidairement au paiement de la somme de 21.211,06 francs en principal représentant les loyers impayés d'avril à septembre 1994 inclus et celle de 3.500 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout assorti de l'exécution provisoire. Monsieur et Madame Y..., bien que régulièrement cités à mairie, n'ont pas comparu à l'audience du tribunal d'instance.

Par jugement réputé contradictoire et en premier ressort rendu le 10 novembre 1994, le Tribunal d'Instance de COURBEVOIE a, notamment, ordonné l'expulsion de Monsieur et Madame Y... et de tous occupants de leur chef des lieux loués, autorisé le transfert et la

séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux loués, condamné solidairement les époux Y... et Madame Z... à payer à Madame X... la somme de 21.211,06 francs avec intérêts de droit à compter de la citation, les a autorisés à s'acquitter de leur dette en trois versements mensuels de 7.070 francs, les a condamnés solidairement au paiement de la somme de 500 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et des dépens, le tout avec exécution provisoire.

Par requête en date du 10 avril 1995, Madame Z... a sollicité la rectification du jugement du 10 novembre 1994 exposant que ce jugement l'avait, à tort, déclarée comparante, alors qu'elle ne s'était pas présentée à l'audience.

Par jugement réputé contradictoire et en premier ressort rendu le 18 mai 1995, le Tribunal d'Instance de COURBEVOIE a rectifié cette erreur matérielle affectant le jugement du 10 novembre 1994, en les termes suivants : "Madame Z... A..., bien que régulièrement citée, ne comparaît pas et n'est pas représentée".

Par ordonnance du 13 octobre 1995, les procédures RG n° 1633/95 et n° 7280/95 ont été jointes sous le seul numéro du rôle général 1633/95. * Madame A... Z..., appelante,soutient à l'appui de ses prétentions, d'une part, que la rectification du jugement du 10 novembre 1994 n'implique pas que le principe du contradictoire aurait été respecté et, d'autre part, qu'elle apporte la preuve par la comparaison d'écritures qu'elle n'avait pas porté de sa main sur l'acte de caution, les mentions manuscrites des dispositions des

articles 2015 et 1326 du Code civil.

Elle ajoute avoir signé une prétendue reconnaissance de "caution", alors qu'elle se trouvait dans une situation de dépendance qui résulte de sa situation de profane du droit, aggravée par le fait qu'elle ne maîtrise pas les termes juridiques.

Madame Z... prie donc la Cour, vu l'article 2028 du Code civil, de : - condamner Monsieur et Madame Y... à la garantir de toute condamnation en principal intérêts et frais qui serait prononcée contre elle si, par impossible, la Cour ne faisait pas droit à son appel contre Madame B..., Par conséquent, les condamner au paiement de la somme principale de 14.140 francs avec intérêts de droit payés par elle à leur place, - lui accorder la somme de 5.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner solidairement Madame B..., Monsieur et Madame Y... aux entiers dépens d'appel au profit de Maître JUPIN, avoué près la Cour, qui pourra les recouvrer dans les conditions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

* Madame Jacqueline X..., intimée, conclut à la confirmation du jugement dont appel en toutes ses dispositions.

Elle précise que Monsieur Y... n'a jamais respecté son engagement de régler à Madame Z... la somme de 14.410 francs par versements mensuels de 500 francs à compter du 1er décembre 1995 et que Madame Z... a demandé pour la première fois en appel que soit déclaré nul et de nul effet l'acte de caution en date du 4 mars 1994.

Par conséquent, elle demande à la Cour de : - dire et juger l'appel

de Madame Z... irrecevable sur le fondement de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile en ce qu'elle demande pour la première fois la nullité de sa caution, - confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, Y ajoutant, dire que Monsieur Y... sera tenu de la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle, - condamner Madame Z... au paiement de la somme de 10.000 francs en vertu des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés directement par la SCP KEIME ET GUTTIN, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

* Monsieur et Madame Y... (aide juridictionnelle totale), intimés au principal, appelants incidents, soutiennent qu'étant demeurés dans les lieux loués avec l'accord de Madame X... et lui payant scrupuleusement le montant des loyers et charges courants, cette dernière ne pouvait donc prétendre raisonnablement au bénéfice de l'acquisition de la clause résolutoire auquel elle a clairement renoncé.

Ils ajoutent que le bail qui leur avait été consenti ayant expiré le 28 février 1997 sans qu'aucun congé ne leur soit délivré, un nouveau bail leur a donc été tacitement consenti. Subsidiairement, ils sollicitent les plus larges délais pour se libérer de leur arriéré locatif.

Par conséquent, ils demandent à la Cour de : - infirmer le jugement déféré, Et statuant à nouveau, de : - constater que Madame X... a renoncé à se prévaloir du bénéfice de l'acquisition de la clause

résolutoire à l'encontre des époux Y..., - constater qu'ils sont titulaires d'un nouveau bail ayant pris effet le 1er mars 1997, - constater qu'ils sont à jour du paiement des loyers et charges courants, Subsidiairement, leur accorder les plus larges délais aux fins de leur permettre de s'acquitter de la dette d'arriéré éventuel, - condamner Madame X... au paiement de la somme de 5.000 francs en vertu des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - la condamner en tous les dépens dont distraction au profit de l'aide juridictionnelle.

L'ordonnance de clôture a été signée le 26 juin 1997 et l'affaire plaidée pour les parties à l'audience du 3 juillet 1997.

SUR CE, LA COUR,

I/ Considérant que Madame Z... invoque d'abord une prétendue nullité qui affecterait le premier jugement du 10 novembre 1994 mais qu'elle ne démontre aucun grief (au sens de l'article 114 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile), alors qu'il est constant que la simple erreur matérielle affectant cette première décision a été réparée par le jugement rectificatif du 18 mai 1995 ; que l'appelante ne fait pas état de mesures d'exécution du premier jugement qui auraient été diligentées ou tentées à son encontre, et qu'elle ne justifie donc d'aucun préjudice, ni d'aucun grief ; qu'elle est, par conséquent, déboutée des fins de son appel-nullité tendant à faire prononcer la nullité du premier jugement ; qu'étant constant que Madame Z... n'était pas comparante devant le premier juge (jugement du 10 novembre 1994) il ne peut, maintenant, lui être reproché d'invoquer la nullité du cautionnement et que l'article 564

du Nouveau Code de Procédure Civile ne peut donc lui être opposé pour faire échec à la recevabilité de ses moyens et de sa demande, de ce chef ;

II/ Considérant en ce qui concerne la validité de l'acte dit de "caution" du 4 mars 1994, qu'il est démontré par la simple comparaison des écritures, que les dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989 (article 22-1) n'ont pas été respectées ; que, notamment, il est manifeste que cet acte ne porte pas la reproduction manuscrite du montant du loyer et des conditions de sa révision, tels qu'ils figurent dans le contrat de location, ni aucune mention manuscrite de la part de Madame Z..., exprimant, de façon explicite et non équivoque la connaissance qu'elle avait de la nature et de l'étendue de l'obligation qu'elle contractait ; que pas davantage ne figure dans cet acte la reproduction manuscrite de l'alinéa précédent (article 22-1 alinéa 2) ; que seule est indiscutable la simple signature de l'appelante ;

Considérant qu'il est donc patent que cette inobservation de ces mesures d'ordre public de protection a causé à Madame Z... un grief certain et direct (article 114 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile), puisque rien n'indique, -surtout s'agissant d'une personne de nationalité japonaise- qu'elle ait pu comprendre la nature et la portée des obligations qu'elle contractait par cet acte ; que la nullité de cet acte du 4 mars 1994 et du cautionnement est donc prononcée ;

Considérant que l'appelante est donc en droit d'obtenir le remboursement de la somme de 14.140 francs qu'elle a indûment payée à Madame X... en exécution de cet acte et, de ce cautionnement

nuls, et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la date de cette demande qui a été formulée par conclusions du 9 décembre 1996, valant sommation de payer au sens de l'article 1153 alinéa 3 du Code civil ; que Madame X... est donc condamnée à lui rembourser cette somme avec ces intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 1996 ; Considérant que ce cautionnement étant nul, l'appelante n'est pas fondée à invoquer l'article 2028 à l'encontre des époux Y... et qu'elle est donc déboutée de sa demande, de ce chef ;

Considérant, en outre que, compte tenu de l'équité, Madame X... est condamnée à payer à Madame Z... la somme de 3.500 francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

II/ Considérant qu'il est constant que Madame X... née C... n'a principalement conclu qu'à l'égard de l'appelante, et qu'en ce qui concerne les époux Y..., elle se borne à faire valoir que Monsieur Y... se serait, selon elle, "irrévocablement" engagé à régler à Madame Z... la somme de 14.410 francs par versements mensuels de 500 francs à compter du 1er décembre 1995 ; qu'il sera cependant observé que l'appelante n'a pas fait valoir ce moyen à l'égard de Monsieur Y... ; que Madame X... est donc déboutée de sa demande en "garantie" formée contre Monsieur Y... ; qu'en outre, Madame X... ne réclame pas expressément la confirmation du jugement déféré en ses dispositions concernant ses locataires(acquisition de la clause résolutoire et expulsion) ; que, par ailleurs, il est constant que le bail litigieux ayant donné lieu au jugement déféré est expiré le 28 février 1997, qu'aucun congé n'a été délivré aux époux Y..., de sorte qu'un nouveau bail leur a été

ainsi tacitement consenti à compter du 1er mai 1997 ; que la demande d'expulsion originairement formée par Madame X... est donc devenue sans objet ;

Considérant que les époux ne contestent pas le montant de leur dette de loyers exactement fixée par le premier juge et qui est donc confirmée ; que le paiement de cette dette se fera en deniers ou quittances, compte tenu des paiements libératoires faits par les deux débiteurs ;

Considérant que depuis la date du jugement déféré, les époux Y... ont déjà, en fait, bénéficié des plus larges délais pour apurer leur dette, et qu'il n'y a donc pas lieu de leur allouer de nouveaux délais, en vertu des articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil ; qu'ils sont donc déboutés de ce chef de demande ;

Considérant enfin que, compte tenu de l'équité, les époux Y... sont déboutés de leur demande contre Madame X... en paiement de la somme de 5.000 francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Vu l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 (loi du 21 juillet 1994) :

I/ . Déclare nuls l'acte du 4 mars 1994 et le cautionnement ;

Par conséquent,

. condamne Madame Jacqueline X... née C... à rembourser à Madame Z... la somme de 14.140 francs (QUATORZE MILLE CENT QUARANTE FRANCS), avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 1996 ;

. Déboute l'appelante de sa demande contre les époux Y..., fondée sur l'article 2028 du Code civil ;

. Condamne Madame X... à payer à Madame Z... la somme de 3.500 francs (TROIS MILLE CINQ CENTS FRANCS) en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

II/ . Déboute Madame X... de sa demande en "garantie" contre Monsieur Y... ;

. Constate que la demande originaire de Madame X... en expulsion des époux Y... est maintenant devenue sans objet ;

. Confirme le jugement déféré du 10 novembre 1994 en ce qui concerne la dette des époux Y... envers Madame X... ; dit et juge que le paiement de ces sommes confirmées se fera en deniers ou quittances ; . Déboute les époux Y... de leur demande en octroi de délais de paiement ;

. Les déboute de leur demande contre Madame X... en paiement de 5.000 francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

. Condamne Madame X... aux dépens d'appel de Madame Z... qui seront recouvrés directement contre elle par Maître JUPIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ; laisse à la charge de Madame X... et à celle des époux Y... tous leurs propres dépens (avec, si besoin est, recouvrement conforme aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle).

Et ont signé le présent arrêt : Le Greffier,

Le Président, Sylvie RENOULT

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-1633
Date de la décision : 03/10/1997

Analyses

BAIL A LOYER (loi du 6 juillet 1989)


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1997-10-03;1995.1633 ?
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