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11/09/1997 | FRANCE | N°JURITEXT000006934943

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11 septembre 1997, JURITEXT000006934943


De l'union ayant existé entre René X... et Dominique TRANTOUL, dissoute par jugement de divorce du Tribunal de Grande Instance de NIMES du 25 mars 1987 est notamment issu PHILIPPE, né le 27 février 1982, confié à sa mère actuellement domiciliée à PARIS 17ème, 4 Place WAGRAM.

Par requête du 18 mai 1994, cette dernière a sollicité la suppression du droit de visite et d'hébergement du père au motif que l'enfant ne désirait plus le rencontrer.

Après avoir ordonné successivement une enquête sociale par ordonnance du 11 juillet 1994 et un examen psychologique de l'

enfant par ordonnance du 26 janvier 1995 confiée à Madame Y..., psychologue cl...

De l'union ayant existé entre René X... et Dominique TRANTOUL, dissoute par jugement de divorce du Tribunal de Grande Instance de NIMES du 25 mars 1987 est notamment issu PHILIPPE, né le 27 février 1982, confié à sa mère actuellement domiciliée à PARIS 17ème, 4 Place WAGRAM.

Par requête du 18 mai 1994, cette dernière a sollicité la suppression du droit de visite et d'hébergement du père au motif que l'enfant ne désirait plus le rencontrer.

Après avoir ordonné successivement une enquête sociale par ordonnance du 11 juillet 1994 et un examen psychologique de l'enfant par ordonnance du 26 janvier 1995 confiée à Madame Y..., psychologue clinicienne non inscrite sur la liste des experts dressée par la Cour d'Appel de VERSAILLES, 4 Impasse Jean ROUX - 28000 CHARTRES, le Juge aux Affaires Familiales de Chartres a par ordonnance du 5 octobre

1995, les rapports ayant été respectivement été déposés les 6 janvier 1995 et le 1er août 1995, a :

- accordé à la mère l'exercice de l'autorité parentale sur PHILIPPE X...,

- supprimé le droit de visite et d'hébergement précédemment accordé au père.

René X... a interjeté appel de cette décision par acte du 25 octobre 1995.

Dominique TRANTOUL a constitué avoué le 16 novembre 1995 mais n'a ni produit de pièces, ni conclu. A l'issue de l'audience de plaidoiries du 19 juin 1997, son avoué a fait connaître qu'il n'avait aucun dossier à déposer et qu'il dégageait sa responsabilité.

L'ordonnance critiquée a été rendue après audience du 21 septembre 1995 où la demanderesse était seulement représentée alors que le défendeur était présent.

Le Juge aux Affaires Familiales a fondé sa décision, malgré les dénégations du père, sur des révélations de faits incestueux datant de 1989 que l'enfant aurait exposés lors de son audition par la psychologue lorsqu'elle l'a reçu le 28 juillet 1995.

Par conclusions signifiées le 26 février 1996, René X... sollicite la réformation de l'ordonnance entreprise et demande :

- de dire que l'autorité parentale sera exercée en commun par les père et mère,

- de fixer à son profit un droit de visite et d'hébergement sur son fils PHILIPPE pendant une période de six mois la première moitié des vacances de NOEL et de PAQUES ainsi que durant la première quinzaine du mois d'août,

- de lui allouer une somme de 5.000,00 francs à titre de dommages-intérêts et une somme de 5.000,00 francs en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il conteste avec la plus grande virulence les accusations dont il est l'objet et fait valoir que l'expert psychologue n'a fait état dans son rapport que de "confidences d'une extrême gravité qu'elle n'entend pas expliciter", qu'elle aurait cependant révélé dans une correspondance ultérieure du 8 août 1995 alors que lui-même ne les aurait découvertes qu'à l'audience du 21 septembre 1995 où son ex-conjointe était absente.

Il s'étonne par ailleurs que ces faits, situés par l'enfant en 1989, alors qu'il a continué de rendre visite à son père en 1990 et 1991 sans qu'aucun témoin (voisin ou enseignant) ne relève un quelconque stigmate ou ne soit alerté par un signe nécessairement inévitable dans une telle situation, n'aient été révélés qu'en 1995, trois ans après que la mère ait quitté la région d'UZES où les ex-époux s'étaient installés sans faire connaître sa nouvelle adresse pour

faire sciemment échec à ses droits.

Il considère enfin que les "pseudo-confidences" ont été édictées à dessein par la mère animée d'un désir exacerbé de vengeance.

SUR CE, LA COUR

Considérant que l'on ne peut que s'étonner du silence méthodiquement

organisé par l'intimée en cause d'appel alors qu'elle a su, en première instance, susciter des investigations psycho-sociales ;

Considérant d'une part, contrairement aux affirmations péremptoires du premier Juge que le rapport d'enquête sociale de la Sauvegarde de l'Enfance du 6 janvier 1995, particulièrement minutieux et circonstancié, n'affirme pas que PHILIPPE X... "est un enfant malheureux, déstabilisé, et qu'il serait périlleux de perturber davantage" ;

Que ce document, s'il fait état de l'anxiété de l'enfant, alors âgé de 13 ans, à l'idée d'être séparé de sa mère et de son refus d'aller chez son père "où il dit s'ennuyer et se sentir mal à l'aise", précise que si PHILIPPE n'a pas eu "précédemment la possibilité suffisante de dialoguer avec son père pour contrebalancer l'image que lui en donne sa mère", et "bien qu'il se montre déterminé, il parait

important de ne pas le laisser décider seul de le rencontrer car il a toujours choisi lui-même et décidé de l'organisation de ces droits de visite et d'hébergement alors que ce rôle est dévolu aux parents" ;

Que l'enquêtrice a alors conclu au maintien de la résidence du mineur chez sa mère, mais, dans le cadre d'une autorité parentale conjointe, à un droit de visite et d'hébergement de René X... une semaine l'hiver et un mois l'été pour laisser le temps à PHILIPPE de reprendre ses marques chez son père, lequel a fondé une nouvelle union ;

Considérant d'autre part que la psychologue clinicienne, laquelle n'a pas rencontré le père mais a eu connaissance intégrale du rapport d'enquête sociale susvisé ainsi qu'elle le précise, situe ses entretiens avec le mineur et sa mère quelques jours à peine avant le début du droit d'hébergement réglementé de celui-ci ;

Qu'à l'issue des tests, elle estime que "les deux épreuves ne révèlent pas de troubles de la personnalité en profondeur" du niveau "mais une perturbation réactionnelle à un traumatisme", qu'elle n'explicite cependant pas, "introduisant un état dépressif et anxieux chez un sujet doué de richesse intellectuelle et de finesse affective" dont la "capacité d'introspection lui permettrait de bénéficier d'une aide psychothérapique afin de maîtriser quelques mécanismes d'ordre névrotique" ;

Qu'au terme de l'entretien avec l'enfant, elle relate que ce dernier, "très ému, lui fait part de faits d'une extrême gravité dont l'authenticité ne parait pas douteuse étant donné les détails avoués et l'état émotionnel du garçon" ;

Qu'elle indique alors dans cet unique document, "respecter le secret professionnel et la promesse faite" lui laissant à penser que PHILIPPE ne pourrait être contraint à un séjour chez son père ;

Qu'elle considère, René X... devant venir chercher son fils trois jours plus tard, que la situation risque d'être alors assez dramatique et qu'elle comprend l'inquiétude de la mère, au point de conclure qu'il "serait bon que ce dernier se montre patient et compréhensif, ce qui serait la meilleure preuve d'un attachement authentique pour son enfant qu'il serait périlleux de perturber davantage" ;

Considérant en fait que si l'enquête sociale revêt le caractère d'objectivité et d'impartialité qu'une juridiction est en droit d'attendre d'un expert, le rapport d'examen psychologique ordonné à la seule demande de la mère, exécuté par une "clinicienne" dans des conditions de forme, de temps et de non-respect du principe du contradictoire incompatibles, avec les principes généraux du droit interne français et des conventions internationales, ne satisfait aucune de ces obligations légales supérieures, procède par de simples affirmations sur l'éventuel péril du mineur concerné et ne "distille" ses confidences que dans un document distinct postérieur ne respectant aucun élément d'un débat judiciaire serein et équitable ; Considérant en conséquence qu'il convient, en dépit de l'ancienneté de la requête initiale, de la durée de la procédure d'appel, de l'inaction volontaire de l'intimée et du désir persistant du père dont le bien-fondé ne peut en l'état être apprécié, de faire

procéder, à titre exceptionnel et avant dire droit, à une procédure d'investigation complémentaire par un expert dûment inscrit et compétent dans un domaine sensible à propos duquel l'actualité ne saurait motiver une requête au fondement incertain et non sérieusement soutenu et dont le Ministère Public est curieusement écarté ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement après débats en chambre du conseil :

AVANT DIRE DROIT :

ORDONNE un examen psychologique de Philippe X...,

DESIGNE pour y procéder :

- Madame Colette Z..., 2 rue Saint Symphorien à VERSAILLES (78000) - Tél. 01.39.51.73.16., Expert inscrit sur la liste établie par la Cour d'Appel de VERSAILLES, avec mission, connaissance prise des éléments du dossier, d'entendre également les père et mère du mineur,

ORDONNE que René X... consigne entre les mains du régisseur de la Cour de céans la somme de 1.500,00 francs à valoir sur les frais et honoraires de l'expert,

DIT que faute de consignation dans le délai de deux mois de la présente décision la nomination de l'expert sera caduque,

ORDONNE que l'expert commis dépose son rapport dans le délai de TROIS MOIS à compter de sa saisine,

FIXE ainsi qu'il suit le nouveau programme de procédure :

- date de la clôture : 31 MARS 1998,

- date des plaidoiries : 5 MAI 1998,

RESERVE les dépens.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

Le Greffier

Le Président

Laurent LABUDA

Alain DUBREUIL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006934943
Date de la décision : 11/09/1997

Analyses

AUTORITE PARENTALE

Le rapport d'examen psychologique ordonné à la seule demande de la mère, exécutée par une "clinicienne" dans des conditions de forme, de temps et de non-respect du principe du contradictoire incompatibles avec les principes généraux du droit français et des conventions internationales, ne satisfait à aucune des obligations légales et réglementaires.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1997-09-11;juritext000006934943 ?
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