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11/09/1997 | FRANCE | N°1996-8123

France | France, Cour d'appel de Versailles, 11 septembre 1997, 1996-8123


FAITS ET PROCEDURE :

La société S.M.I. a conclu, le 23 juin 1994, un contrat de location d'une presse industrielle moyennant un loyer mensuel de 27.070 DM avec la société de droit allemand FAHR BUCHER GMBH (ci-après dénommée FAHR BUCHER ALLEMAGNE).

Ce matériel, d'une valeur de 830.000 DM, avait fait l'objet d'une confirmation de commande datée du même jour signée à la fois par la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE et la société FAHR BUCHER FRANCE, représentant la précédente sur le territoire français.

La presse a, aux dires de la société S.M.I., présen

té de graves dysfonctionnements qui ont conduit cette dernière à résilier le contrat de ...

FAITS ET PROCEDURE :

La société S.M.I. a conclu, le 23 juin 1994, un contrat de location d'une presse industrielle moyennant un loyer mensuel de 27.070 DM avec la société de droit allemand FAHR BUCHER GMBH (ci-après dénommée FAHR BUCHER ALLEMAGNE).

Ce matériel, d'une valeur de 830.000 DM, avait fait l'objet d'une confirmation de commande datée du même jour signée à la fois par la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE et la société FAHR BUCHER FRANCE, représentant la précédente sur le territoire français.

La presse a, aux dires de la société S.M.I., présenté de graves dysfonctionnements qui ont conduit cette dernière à résilier le contrat de location.

Estimant par ailleurs avoir subi un important préjudice du fait de ces dysfonctionnements, la société S.M.I. a, par deux actes séparés tendant aux mêmes fins, fait assigner les sociétés FAHR BUCHER ALLEMAGNE et FAHR BUCHER FRANCE devant le Tribunal de Commerce de PONTOISE.

La société FAHR BUCHER ALLEMAGNE a soulevé l'incompétence de la juridiction saisie, motif pris que les documents contractuels, constitués par le contrat de location et la confirmation de commande, faisaient expressément référence à ses conditions générales de vente, lesquelles contenaient une clause attributive de compétence au profit des tribunaux de son siège social en Allemagne.

Par jugement en date du 12 septembre 1996, le Tribunal de Commerce de PONTOISE a joint les causes et faisant droit à l'exception invoquée, s'est déclaré incompétent ratione loci et a renvoyé les parties à se mieux pourvoir conformément aux dispositions de l'article 96 alinéa 1 du Nouveau Code de Procédure Civile. *

La société S.M.I. a formé contredit à l'encontre de cette décision.

A l'appui de son recours, ladite société fait valoir que c'est à tort

que les premiers juges ont retenu, pour décliner leur compétence, que les parties avaient convenu de soumettre leurs relations contractuelles au droit allemand et aux juridictions allemandes alors qu'il n'est pas établi en l'espèce que les conditions générales de vente de FAHR BUCHER ALLEMAGNE, prévoyant une clause attributive de compétence, aient été annexées à la confirmation de commande au contrat de location.

Elle déduit de là que seule peuvent trouver application en l'espèce les dispositions de l'article 5-1 de la convention de Bruxelles du 25 septembre 1968 qui donnent compétence au tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée.

Subsidiairement, elle invoque les dispositions de l'article 5-5 de la convention précitée dès lors que, selon elle, la société FAHR BUCHER FRANCE, filiale de la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE, est partie prenante au litige dans la mesure où celle-ci lui réclame des loyers impayés et où elle devait assurer le service après-vente. Pour l'ensemble de ces motifs, elle sollicite l'infirmation du jugement dont appel et demande que les parties soient renvoyées au fond devant le Tribunal de Commerce de PONTOlSE. Enfin, elle réclame à ses adversaires une indemnité de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et demande à être déchargée de tous les dépens. * La société FAHR BUCHER ALLEMAGNE conclut, pour sa part, à la confirmation du jugement déféré par adoption de motifs. Elle fait valoir que la société S.M.I. ne saurait utilement prétendre, pour la première fois devant la Cour qu'elle n'a pas eu communication de ses conditions générales de vente alors que les documents contractuels y font expressément référence et que ce point n'a jamais été contesté en première instance pas plus qu'il n'a été invoqué dans la motivation initiale du contredit. Elle ajoute, à

titre subsidiaire, que même si l'on se réfère à l'article 5-1 de la convention de Bruxelles, il ne fait aucun doute que le lieu d'exécution de l'obligation de délivrance qui sert de base à l'action engagée à son encontre par la société S.M.I. est celle de son siège social et déduit de là que seule la juridiction allemande a compétence pour connaître du litige. Enfin, elle réclame à la société S.M.I. une indemnité de 10.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. * La société FAHR BUCHER FRANCE soutient, pour ce qui la concerne, qu'elle n'a agi qu'en qualité de mandataire et pour compte de sa maison mère allemande et qu'elle est étrangère au litige, déclarant s'en rapporter à justice sur le mérite de l'exception d'incompétence invoquée par cette dernière. Elle demande par voie de conséquence à être déchargée de toute condamnation pour le cas où la position de la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE ne serait pas suivie. MOTIFS DE LA DECISION X... qu'il ressort des éléments de la cause que les seules parties au contrat de location de la machine prétendument défectueuse sont d'une part la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE et d'autre part la société S.M.I. ; que, de même, la confirmation de commande datée du même jour que le contrat de location est établie à la seule en-tête et au seul nom de la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE, même si elle comporte aux côtés du cachet de cette société celui de la société FAHR BUCHER FRANCE ; qu'il doit en être tiré pour conséquence que le seul contractant de la société S.M.I. est la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE et que la société FAHR BUCHER FRANCE, qui n'a pris à titre personnel aucun engagement à l'égard de S.M.I., n'est intervenue qu'en qualité de représentant de sa maison mère, comme elle le soutient ; que dès lors, il y a lieu de se référer pour déterminer le tribunal territorialement compétent, aux documents contractuels liant la société S.M.I. à la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE et d'écarter les

dispositions de l'article 5-5 de la convention de Bruxelles, invoquées à titre subsidiaire par la société S.M.I., qui n'ont pas lieu de s'appliquer en l'espèce. X... que la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE se prévaut des dispositions de l'article 17 de la convention de Bruxelles précitée qui prévoient que, si pour une convention écrite ou par une convention verbale confirmée par écrit, les parties dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un état contractant, désignent un Tribunal ou les tribunaux d'un état contractant pour connaître des différents nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, le tribunal ou les tribunaux de cet état sont seuls compétents ; qu'elle fait valoir qu'en l'espèce la confirmation de commande datée du 23 juin 1994 renvoie expressément à ses conditions générales de vente et de livraison jointes, lesquelles prévoient une clause attributive de compétence au profit des tribunaux de son siège social ; qu'elle ajoute que, de même, le contrat de location qui se réfère expressément à la confirmation de commande, prévoit que le droit de la "RFA" lui est seul applicable ; qu'elle en déduit que c'est à bon droit qu'en application de ces dispositions contractuelles, les premiers juges ont décliné leur compétence.

Mais considérant qu'il ne peut être tenu pour satisfait aux conditions de forme de l'article 17 précité qu'autant qu'il soit établi que les conditions générales de vente, portant clause attributive de compétence, visées à la convention, aient été réellement annexées à celle-ci ou connues de l'acheteur, cette connaissance pouvant se déduire de rapports d'affaires suivies sur la base des mêmes conditions entre les mêmes parties. Or, considérant qu'en l'espèce il n'est nullement démontré que la société S.M.I. et la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE aient entretenu des rapports d'affaires suivies ; que l'absence d'objections élevées contre une

confirmation de commande émanant unilatéralement de l'autre partie ne peut valoir acceptation de conditions générales de vente visées par simple référence, alors qu'il n'est pas rapporté la preuve que ces conditions aient été réellement annexées dans leur intégralité à la confirmation de commande ; que la référence à la loi allemande rappelée dans le contrat de location n'est pas davantage de nature à faire présumer une connaissance parfaite et exhaustive de l'acheteur des conditions générales de vente de FAHR BUCHER ALLEMAGNE ; que dès lors, la société S.M.I. est fondée à faire valoir, même pour la première fois devant la Cour et par des moyens additionnels non visés dans la motivation du contredit, que les conditions générales de vente de la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE ne lui sont pas opposables. X... qu'il convient dès lors, pour fixer la compétence, de se référer aux dispositions de l'article 5-1 de la convention de Bruxelles qui prévoit que le défendeur domicilié sur le territoire d'un état contractant peut-être attrait en matière contractuelle devant le Tribunal du lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée. X... qu'en l'espèce, la société S.M.I. a attrait la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE devant le Tribunal de Commerce de PONTOISE afin de la voir condamner (à l'instar de la société FAHR BUCHER FRANCE) au paiement de dommages et intérêts pour délivrance d'une chose, à savoir une presse donnée en location, prétendument défectueuse et non conforme ; que c'est donc cette obligation de délivrance qui sert de base à la demande de la société S. M. I. X... que le lieu d'exécution de cette obligation doit en l'espèce être établi conformément au droit allemand, choisi par les parties pour régir leurs rapports contractuels (cf article 11 du contrat de location). X... que l'article 269 du BGB allemand fixe, à défaut d'autres éléments de rattachement, le lieu d'exécution de la prestation au domicile du débiteur de l'obligation ; qu'il en

résulte que, en l'absence d'indications contraires stipulées au contrat, l'obligation de délivrance de la chose prétendument défectueuse a pour lieu d'exécution le domicile du débiteur de l'obligation, à savoir le siège social de la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE ; que le jugement dont appel sera dans ces conditions confirmé mais par substitution de motifs, en ce qu'il a fait droit au déclinatoire de compétence soulevé par la société FAHR BUCHER ALLEMAGNE et en ce qu'il a renvoyé les parties à se mieux pourvoir, conformément aux dispositions de l'article 96 alinéa 1 du Nouveau Code de Procédure Civile. X... que l'équité ne commande pas, au stade actuel de la procédure, d'allouer à l'une ou l'autre des parties une quelconque indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que la société S.M.I., qui succombe dans l'exercice de son recours, en supportera les frais . PAR CES MOTIFS La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, - Dit recevable le contredit formé par la société S.M.I. SA à l'encontre du jugement rendu le 12 septembre 1996 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE, mais le déclare mal fondé, - Confirme, mais par substitution de motifs, le jugement déféré en toutes ses dispositions, - Dit n'y avoir lieu, au stade actuel de la procédure, à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - Condamne la société S.M.I. SA aux frais de contredit. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER DIVISIONNAIRE LE PRESIDENT A. PECHE-MONTREUIL F. ASSIE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1996-8123
Date de la décision : 11/09/1997

Analyses

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968.

L'article 17 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 prévoit que lorsque par une convention écrite ou une convention verbale confirmée par écrit, les parties, dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un Etat contractant, désignent un tribunal ou les tribunaux d'un Etat contractant pour connaître des différents nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, le tribunal ou les tribunaux désignés sont seuls compétents. A défaut d'établir que les conditions générales de vente et de livraison portant clause attributive de compétence au profit des tribunaux de son siège social, en Allemagne, ont été réellement annexées à une convention qui s'y réfère, ou ont été connues de l'acheteur, cette connaissance peut néanmoins se déduire de l'existence de rapports d'affaires suivis, sur la base des mêmes conditions, entre les parties. Lorsqu'il n'est pas démontré que les parties en cause ont entretenu des rapports suivis, l'absence d'objection d'une partie à une confirmation de commande émanant unilatéralement de l'autre partie, ne peut valoir acceptation de conditions générales de vente visées par simple référence, pas plus que la référence à la loi allemande rappelée dans le contrat principal ne peut faire présumer une connaissance des conditions générales de vente évoquées. Il s'ensuit que la compétence doit être fixée par référence à l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968.

Selon l'article 5-1 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat contractant peut, en matière contractuelle, être attrait devant le tribunal du lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée. Une action qui, introduite par une société cliente à l'encontre de son fournisseur allemand, tend à la condamnation de celui-ci au paiement de dommages et intérêts à raison de la livraison d'un équipement industriel prétendument défectueux, se fonde sur l'obligation de délivrance. Lorsque le contrat liant les parties prévoit que celui-ci sera régi par le droit allemand, le lieu d'exécution de l'obligation de délivrance doit être défini conformément à ce même droit. L'article 269 du BGB allemand fixant, à défaut d'autre élément de rattachement, le lieu d'exécution de l'obligation de délivrance au domicile du débiteur de l'obligation, c'est à dire en l'espèce au lieu du siège social allemand du fournisseur, c'est à juste titre qu'il est fait droit au déclinatoire de compétence soulevé par le fournisseur et que les parties sont renvoyées à se mieux pourvoir, conformément aux dispositions de l'article 96, alinéa 1, du nouveau Code de procédure civile


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1997-09-11;1996.8123 ?
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