COUR D'APPEL DE TOULOUSE
Minute 24/892
N° RG 24/00889 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QOG7
O R D O N N A N C E
L'an DEUX MILLE VINGT QUATRE et le vendredi 30 août à 16h00
Nous , N. ASSELAIN, magistrat délégué par ordonnance de la première présidente en date du 03 juillet 2024 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu l'ordonnance rendue le 29 août 2024 à 17H12 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :
X se disant [D] [F]
né le 13 Novembre 2001 à [Localité 3] (TUNISIE)
de nationalité Tunisienne
Vu l'appel formé le 30 août 2024 à 09 h 02 par courriel, par Me Elise DEMOURANT, avocat au barreau de TOULOUSE,
A l'audience publique du vendredi 30 aout 2024 à 10h30, assisté de , C. IZARD, greffier, avons entendu :
X se disant [D] [F]
assisté de Me Elise DEMOURANT, avocat au barreau de TOULOUSE
qui a eu la parole en dernier ;
En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En l'absence du représentant de la PREFECTURE DE L'AUDE régulièrement avisée ;
avons rendu l'ordonnance suivante :
M. X se disant [D] [F], né le 13 novembre 2001 à [Localité 4] (Tunisie), de nationalité tunisienne, a été interpellé le 29 juillet 2024 à l'occasion d'un contrôle routier pour circulation en trottinette électrique à contresens de circulation.
Il a fait l'objet, sous l'identité distincte d'[W] [O] né le 11 octobre 2002 à [Localité 1] (Algérie), de nationalité algérienne, d'un arrêté pris par le préfet de l'Hérault le 28 mars 2023, portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ.
Le préfet de l'Aude a pris une mesure de placement de [D] [F] en rétention administrative suivant décision du 30 juillet 2024. L'intéressé a été admis au centre de rétention administrative de [Localité 2].
Par ordonnance en date du 4 août 2024, confirmée par la cour d'appel le 5 août 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse a ordonné la prolongation de la mesure de rétention pour une durée de 26 jours.
Par requête en date du 28 août 2024, le préfet de l'Aude a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse d'une demande de prolongation de la mesure de rétention pour une durée supplémentaire de 30 jours.
Par ordonnance en date du 29 août 2024 à 17 h 12, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse a :
- prolongé le placement de Monsieur X se disant [D] [F] dans les locaux du centre de rétention administrative ;
- dit que l'application de ces mesures prendra fin au plus tard à l'expiration d'un délai de 30 jours à compter de l'expiration du précédent délai de 26 jours imparti par l'ordonnance prise le 4 août 2024 par le juge des libertés et de la détention.
Le conseil de M. X se disant [D] [F] a interjeté appel de cette décision par acte reçu au greffe le 30 août 2024 à 9 h 02.
[D] [F] demande à la cour, par son conseil, d'infirmer la décision du 29 août 2024 et d'ordonner sa remise en liberté.
Il invoque un défaut de diligences de l'administration contraire à l'impératif de célérité prévu par l'article L. 741-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en reprochant aux autorités françaises d'avoir relancé tardivement les autorités tunisiennes, le 26 août 2024, au regard des dispositions de l'accord bi-latéral franco-tunisien du 28 avril 2008, et d'un délai en toutes hypothèses excessif pour ce faire. Il ajoute que la préfecture ne justifie pas que les documents initialement présentés pour obtenir le laisser-passer correspondent à ceux visés par l'accord franco-tunisien.
Le préfet de l'Aude a sollicité la confirmation de la décision.
Le ministère public, avisé de la date d'audience, est absent et n'a pas formulé d'observations.
MOTIVATION DE LA DECISION
Sur la prolongation de la rétention
En application de l'article L. 741-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toutes diligences à cet effet.
Dès lors que le maintien en rétention ne se conçoit que s'il existe des perspectives raisonnables d'éloignement, il convient de rechercher si la préfecture a effectué les diligences nécessaires mais également si ces diligences ont une chance d'aboutir dans un délai ne dépassant pas la durée légale de la rétention.
En l'espèce, [D] [F], qui indique être né le 13 novembre 2001 à [Localité 4] (Tunisie), de nationalité tunisienne, est également connu sous l'identité distincte d'[W] [O], né le 11 octobre 2002 à [Localité 1] (Algérie), de nationalité algérienne.
Dès lors, il ne démontre pas que les dispositions spécifiques de l'accord bi-latéral franco-tunisien du 28 avril 2008 qu'il invoque, et qui impartissent aux autorités tunisiennes un délai de cinq jours pour se prononcer sur le laisser-passer demandé, lui soient effectivement applicables.
Cependant, l'administration, qui justifie de la saisine du consulat de Tunisie dès le début de la rétention, le 1er août 2024, n'invoque pas la saisine concomitante du consulat d'Algérie, malgré le doute existant sur l'identité et la nationalité de M. X, se disant [D] [F].
En toutes hypothèses, la préfecture a attendu les jours précédant sa requête tendant au renouvellement de la prolongation de la rétention, pour s'enquérir, le 26 août 2024, soit plus de trois semaines après sa demande initiale, des suites données à sa demande de laisser-passer.
Ce délai est excessif au regard des circonstances de l'espèce et des dispositions ci-dessus rappelées, l'administration n'ayant pas accompli, à des dates régulières et sans interruption de temps excessive, toutes les diligences utiles et nécessaires pour parvenir à l'éloignement de l'intéressé.
La cour infirme donc la décision entreprise en ce qu'a été ordonnée la prolongation de la rétention pour une durée de trente jours, et ordonne la remise en liberté de l'intéressé.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par ordonnance mise à disposition au greffe, après avis aux parties,
Infirmons l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse le 30 août 2024;
Ordonnons la mainlevée de la rétention administrative et la remise en liberté de [D] [F];
Rappelons à [D] [F] qu'il doit quitter le territoire français;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PREFECTURE DE L'AUDE, service des étrangers, à X se disant [D] [F], ainsi qu'à son conseil et communiquée au Ministère Public.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
C. IZARD N. ASSELAIN.