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25/06/2024 | FRANCE | N°19/01785

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 25 juin 2024, 19/01785


25/06/2024





ARRÊT N° 270



N° RG 19/01785 - N° Portalis DBVI-V-B7D-M5JP

VS / CD



Décision déférée du 25 Février 2019 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 17/00382

M. GUICHARD

















Etablissement CABINET [D] [M]





C/



[G] [I]

S.A. AIG EUROPE










































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INFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

***



APPELANT



Etablissement CABINET [D] [M]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-charles CHAMPOL...

25/06/2024

ARRÊT N° 270

N° RG 19/01785 - N° Portalis DBVI-V-B7D-M5JP

VS / CD

Décision déférée du 25 Février 2019 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 17/00382

M. GUICHARD

Etablissement CABINET [D] [M]

C/

[G] [I]

S.A. AIG EUROPE

INFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

***

APPELANT

Etablissement CABINET [D] [M]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-charles CHAMPOL de la SELARL CABINET CHAMPOL CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [G] [I]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Bernard DE LAMY, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A. AIG EUROPE Limited devenue AIG Europe SA

Prise en la personne de son réprésant légal

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Ophélie BENOIT-DAIEF de la SELARL SELARL LX PAU-TOULOUSE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Anne-sophie PIA de la SELEURL AWKIS, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Décembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant V. SALMERON, Présidente, chargée du rapport et M. NORGUET, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère

M. NORGUET, conseillère

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre.

Exposé des faits et procédure :

Par acte du 8 juillet 2011, [G] [I] a souscrit par l'intermédiaire de [D] [M], conseiller en investissements financiers, un contrat auprès de la société de droit américain Absolute Return Fund Trust portant sur un investissement d'un montant de 200.000 euros.

Par acte du 31 décembre 2014, [G] [I] a souscrit par l'intermédiaire de [D] [M] un second contrat auprès de la société Absolute Return Fund Trust portant sur un investissement d'un montant de 30.000 euros.

Par actes d'huissier de justice des 17 et 20 janvier 2017, [G] [I] a assigné [D] [M] et son assureur la société Aig Europe Limited devant le tribunal de grande instance de Toulouse en paiement de la somme de 111.416,99 euros en réparation du préjudice causé par l'investissement réalisé par l'intermédiaire de [D] [M].

La société Aig Europe Limited a demandé au tribunal de débouter [G] [I] de la demande dirigée contre elle et, subsidiairement, d'appliquer la franchise contractuelle de 1.500 euros.

Par jugement du 25 février 2019, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

condamné [D] [M] à payer à [G] [I] la somme de 60.957,01 euros avec les intérêts de retard au taux légal à compter du 30 novembre 2016

condamné [D] [M] aux dépens et à payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

débouté [G] [I] de ses demandes contre la société Aig Europe Limited

condamné [G] [I] aux dépens et dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile (cpc).

Par déclaration en date du 16 avril 2019, [D] [M] a relevé appel du jugement. L'appel porte sur les chefs du jugement qui ont :

condamné [D] [M] à payer à [G] [I] la somme de 60.957,01 euros avec les intérêts de retard au taux légal à compter du 30 novembre 2016

condamné [D] [M] aux dépens et à payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du cpc.

Par courrier du 6 janvier 2020, Me [K] a indiqué révoquer Me [H] et se constituer en ses lieu et place pour le compte de la Sa Aig Europe.

Par conclusions en date du 23 août 2021, la société Aig Europe Sa a saisi le magistrat chargé de la mise en état d'un incident de procédure aux fins à titre principal de déclarer irrecevables l'appel principal de [D] [M] à l'encontre d'Aig Europe Limited, et l'appel incident de [G] [I] à l'encontre d'Aig Europe Limited, subsidiairement d'ordonner le sursis à statuer dans l'attente de l'issue d'une procédure pénale en cours.

Par ordonnance du 17 février 2022, le magistrat chargé de la mise en état a :

déclaré caduque la déclaration d'appel de [D] [M] à l'égard de la Sa Aig Europe

déclaré recevable l'appel incident de [G] [I] à l'encontre de la Sa Aig Europe

rejeté la demande de sursis à statuer de la Sa Aig Europe

condamné [D] [M] et la Sa Aig Europe aux dépens de l'incident, chacun pour moitié

vu l'article 700 du code de procédure civile, condamné la Sa Aig Europe à verser à [G] [I] la somme de 700 euros et débouté la Sa Aig Europe de ses demandes.

Par courrier du 6 juillet 2022, Maître [O] a indiqué révoquer Maître [K] et se constituer en ses lieu et place pour le compte de la Sa Aig Europe.

L'affaire, qui devait être appelée à l'audience du 14 mars 2023, a été défixée puis fixée à l'audience du 19 décembre 2023.

Par des conclusions de procédure notifiées le 3 avril 2023, [G] [I] a demandé à la Cour de :

donner acte à Monsieur [G] [I] de ce qu'il se désistait de son appel et de son action à l'égard de la compagnie Aig Europe Sa.

les deux parties, Monsieur [G] [I] et la compagnie Aig Europe Sa conserveraient chacune la charge de leurs dépens.

la procédure se poursuivait devant la Cour à l'encontre de Monsieur [D] [M], appelant.

Par des conclusions d'acceptation de désistement d'instance et d'action notifiées le 7 avril 2023, la société Aig Europe Sa a demandé à la Cour de :

donner acte à Aig Europe qu'elle acceptait le désistement d'appel et d'action de [G] [I], qui se désistait de ses demandes formées par conclusions d'appel incident du 11 octobre 2019 et de toute action à l'encontre d'Aig Europe pour les faits décrits dans ces conclusions,

donner acte à Aig Europe qu'elle se désistait de toute demande et de toute action à en relation avec les faits visés dans les conclusions d'appel incident du 11 octobre 2019 de monsieur [I],

prononcer l'extinction de la présente instance enrôlée sous le Rg n°19/01785 à l'encontre d'Aig Europe, l'appel de monsieur [M] ayant en tout état de cause été déclaré irrecevable à l'encontre d'Aig Europe,

dire et juger que chaque partie conserverait la charge de ses frais (dont ceux visés à l'article 700 du Code de procédure civile) et de ses dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe.

Par une ordonnance en date du 27 avril 2023, le magistrat chargé de la mise en état, au visa de l'article 384 du code de procédure civile, a :

constaté le désistement d'instance et d'action de [G] [I], à l'égard de la compagnie Aig Europe Sa,

dit que le litige se poursuivait entre Établissement Cabinet [D] [M] et [G] [I],

dit que chaque partie conserverait la charge de ses frais et dépens.

La clôture est intervenue le 20 novembre 2023.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions n°2 notifiées le 27 mai 2020 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de [D] [M] demandant, au visa des articles L111-1 du code de la consommation et 1147 du code civil, de :

principalement sur l'absence de faute

constater que [G] [I] a, de sa propre initiative, recherché et trouvé sur internet des informations sur le fonds de fonds Absolute Return Fund Trust, et reconnaît être demandeur de ce produit qu'il sait offshore, puisque situé au Canada et non agrée par l'Amf

dire et juger que [G] [I] était un opérateur averti, de sorte que la responsabilité de [D] [M] ne saurait être engagée

en tout état de cause, dire et juger que [D] [M] est tenu d'une obligation de moyen

dire et juger que son devoir de conseil se limite à l'état de ses connaissances au jour de l'opération

en toutes hypothèses, constater que [G] [I] ne prouve aucune intention de nuire de la part de [D] [M] qui n'est aucunement à l'origine de cette proposition de placement,

partant, dire et juger que [D] [M] a rempli son devoir d'information et de conseil

dire et juger que [D] [M] a rempli son obligation de moyen et a satisfait à son devoir de mise en garde

dire et juger que [D] [M] n'a commis aucune faute dans l'exercice de sa mission ;

subsidiairement, sur l'absence de préjudice, si la Cour confirmait le jugement de première instance :

dire et juger que [G] [I] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice matériel

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a indemnisé un préjudice éventuel

très subsidairement,

infirmer le jugement en ce qu'il a débouté [D] [M] de sa demande de garantie à l'encontre de son assureur Aig Europe Sa

condamner Aig Europe Sa à relever et garantir [D] [M] de toute condamnation en principal et accessoire

condamner la partie succombant à payer à [D] [M] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

la condamner aux entiers dépens.

Vu les conclusions n°4 notifiées le 19 juin 2020 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de [G] [I] demandant de :

confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse le 25 février 2019 en ce qu'il a reconnu la responsabilité de [D] [M] à l'égard de [G] [I]

réformer pour le surplus

condamner solidairement [D] [M] et la société Aig Europe Limited en sa qualité d'assureur en responsabilité professionnelle de [D] [M] à payer à [G] [I] la somme de 110.842,01 euros avec intérêts de retard au taux légal à compter du 30 novembre 2016 sur le fondement des articles 1231-1 du code civil et L124-3 du code des assurances.

condamner solidairement [D] [M] et la société Aig Europe Limited à payer la somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à [G] [I]

les condamner aux entiers dépens.

Motifs de la décision :

Les parties n'ont pas conclu de nouveau après l'ordonnance du magistrat chargé de la mise en état du 27 avril 2023 mais il résulte de cette ordonnance désormais définitive à défaut de déféré, que la Cie Aig Europe n'est plus partie à l'instance et ne peut se voir condamnée à quelque titre que ce soit dans le cadre du présent arrêt.

Le litige ne porte plus que sur les demandes formées par [G] [I] à l'encontre de [D] [M].

Il convient de rappeler qu'aucune présomption ne découle du seul constat de la non comparution d'une partie ; le tribunal ne peut en tirer des conséquences que sur la nature de la décision rendue.

En application de l'article 9 du cpc, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, [G] [I] demande des dommages-intérêts à celui qui lui a conseillé des investissements financiers en 2011 et lui a conseillé de ne pas racheter ses parts en 2013 avant de réinvestir sur le même fonds en 2014 ; il doit rapporter la preuve d'une faute, d'un préjudice et du lien de causalité entre la faute alléguée et le préjudice subi.

- Sur la faute de [D] [M] dans le cadre de sa mission de conseiller en investissement financier :

[G] [I] reproche à [D] [M] de lui avoir fourni une information et une mise en garde insuffisantes à l'égard du produit ARF et de l'avoir encouragé en 2013 à maintenir cet investissement au lieu de disposer des fonds investis à une date où son épouse avait récupéré l'intégralité de son investissement.

[D] [M] expose qu'il n'a commis aucune faute alors qu'il n'a pas démarché [G] [I] qui avait trouvé seul sur internet des informations sur le fonds ARF qu'il dénonce comme ne correspondant pas à ses besoins d'investissement alors qu'il s'agit d'un produit financier off shore situé au Canada et non agréé par l'Autorité de Marchés Financiers (AMF). Il rappelle que [G] [I] était un investisseur averti et que lui-même n'était soumis qu'à une obligation de moyens et non de résultat.

Il dit avoir rempli son obligation d'information et de conseil au visa des articles 325-3, 325-4 et 325-7 du règlement général de l'AMF et qu'il a rempli son obligation de mise en garde puisqu'il ressort des propres déclarations de [G] [I] dans des conclusions de première instance qu'il était parfaitement informé du contrat signé, visiblement avec son épouse en 2011, que les remboursements ont bien fonctionné au moins jusqu'en 2013, date du divorce de [G] [I], et ce en toute transparence.

La cour retient en effet que la mission d'un conseiller en patrimoine est de guider son client dans les choix des différents placements qui s'offrent à lui, de l'éclairer sur les conséquences juridiques et fiscales de ceux-ci et sur les risques comparés des divers investissements qui existent sur le marché.

Elle rappelle que le statut de conseiller en investissement financier (CIF) ne relève pas d'un statut réglementé mais est soumis à des textes précis tels que les articles L541-1 et suivants du code monétaire et financier (CMF) et des articles 325-1 et suivants du Règlement général de l'AMF. Ainsi pour être CIF, outre des compétences professionnelles reconnues, il doit adhérer à une association professionnelle agréée par l'AMF et avoir souscrit une assurance civile professionnelle en cas de manquement à ses obligations professionnelles (article L541-3 du CMF).

Figurent sur les courriers et mails de [D] [M] a dressé à [G] [I], le fait qu'il se présentait comme conseiller en gestion de patrimoine Indépendant et comme conseiller en investissements financiers au minimum depuis les souscriptions litigieuses en 2011.

Il était membre de l'association Anacofi mais il résulte du jugement déféré, dans la partie garantie de l'assureur dont le jugement est devenu définitif de ce chef puisque [D] [M] s'est désisté de son appel contre son assureur AIG Europe, que l'Anacofi a radié [D] [M] en tant que membre de cet organisme à la suite de plaintes de clients sans que la cour puisse savoir si cette radiation est en lien avec la commercialisation des produits ARF, objet du litige.

Préalablement il convient de relever que [G] [I], faisant application de l'article L214-1-1 du CMF retient qu'en 2011, il n'était pas interdit de commercialiser pour un CIF le fonds ARF ; en revanche, ce texte a été modifié par la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 et une telle commercialisation sans autorisation préalable de l'AMF est devenue interdite.

L'investissement de 200.000 euros réalisé le 8 juillet 2011 par l'intermédiaire de [D] [M] n'était donc pas interdit. En revanche, celui de 30.000 euros réalisé le 18 décembre 2014 ne serait pas conforme aux exigences de l'AMF mais, à l'examen des pièces produites, rien n'établit que [G] [I] n'a pas procédé à cet investissement seul auprès de sa banque.

En revanche tant en 2011 qu'en 2014, [D] [M] était soumis à une obligation d'information et de mise en garde à l'égard de ses clients et il lui appartenait de faire une évaluation des compétences de son client en matière financière pour déterminer si ce dernier était un investisseur profane ou averti et en l'espèce, [D] [M] devait établir la qualité d'investisseur averti ou non de [G] [I].

Or, dans le cadre du litige, il se borne à expliquer que [G] [I] disposait en 2011 d'une somme de 200.000 euros à investir, ce qui ne suffit évidemment pas à établir que son client était un client averti. D'après la fiche d'investissement (pièce 10), il s'agissait uniquement de fonds placés en assurance vie, ce qui ne permet pas d'en déduire que [G] [I] était un investisseur financier averti.

Il ne produit aucune fiche de renseignement sur son client pour connaître son expérience et son patrimoine en 2011 et pour déterminer ensuite les produits financiers les plus adaptés pour répondre aux attentes de son client.

[D] [M] avait donc nécessairement en qualité d'intermédiaire financier qui commercialise des produits d'investissements, une obligation d'information renforcée et de mise en garde à l'égard de son client investisseur profane en 2011 comme en 2014.

Sur le produit d'investissement choisi, les produits du fonds ARF relevant d'un fonds canadien non soumis à autorisation de l'AMF, il se devait de signaler les risques importants attachés à un tel investissement qui ne relevait pas de la surveillance directe de l'AMF, qui nécessitait de procéder à d'autres formes de contrôle que des contrôles auprès des organismes nationaux de surveillance des marchés, et qui ne bénéficiait pas de sa garantie d'assurance responsabilité civile professionnelle.

A l'examen des pièces produites par [D] [M], qui sont uniquement celles de [G] [I], aucun élément ne permet d'affirmer que l'information sur le fonds ARF était suffisante en 2011 ni que la mise en garde sur les risques d'un tel investissement avait été fournie à cette date. Il se borne à affirmer que [G] [I] se considérait comme suffisamment informé en invoquant des conclusions de première instance de son adversaire non produites aux débats.

En 2013, lorsque [G] [I] a demandé à racheter ses titres pour financer un projet personnel, [D] [M] lui a conseillé de maintenir intact l'investissement catégorie Optimum (mail du 9 janvier 203 pièce 12) et de solliciter un prêt pour répondre à son besoin de financement. Et ce n'est que le 3 décembre 2014 que [G] [I] a fourni une attestation sur l'honneur reconnaissant être informé du fait que le fonds Absolute Return Fund Trust (ARF) de la société Alter Management dont le siège est situé au Canada est un produit non agréé par l'AMF et être demandeur de ce produit financier qu'il savait « off shore ».

[G] [I] expose enfin qu'il a investi toutes ses liquidités, 200.000 euros, dans ce produit en 2011 alors que ce placement était présenté sur le site de [D] [M] comme un fonds en gestion alternative chapeautant plus de 500 sous fonds ce qui lui donnait autant de rentabilité que de pérennité, annonçant 3 compartiments possibles, le premier à capital protégé avec un taux de rentabilité moyen de 8,5% depuis 1999, le 2ème à capital et taux garantis dont 35% sur 5 ans et le 3ème un compartiment Optimum comportant le plus rentable des sous fonds ($gt; 13%/an) mais le plus risqué.

D'après le mail du 9 janvier 2013, l'investissement s'est porté sur le compartiment Optimum, c'est à dire le plus rentable mais aussi le plus risqué et qu'il a concerné toutes les économies de [G] [I] sans mise en garde sur le fait de ne pas diversifier les dits placements.

Dans la mesure où [D] [M] ne justifie pas avoir donné une information complète sur un tel placement à l'étranger et notamment sur le défaut de couverture de sa responsabilité professionnelle ni avoir mis en garde un investisseur profane sur les risques à choisir un tel placement sans diversification pour l'ensemble de ses actifs mobiliers et à persévérer en ce sens en 2013 alors que son client avait besoin de liquidités ce qui s'avérera une erreur dès avril 2015 lorsqu'il a demandé le rachat total de son contrat impossible, la faute de [D] [M] est donc avérée (pièces 5 et 16).

- Sur l'existence d'un préjudice en lien de causalité directe avec la faute retenue :

s'agissant d'un manquement au devoir de mise en garde, le préjudice ne peut être que la perte de chance de ne pas avoir investi dans le fonds ARF.

[G] [I] sollicite un préjudice correspondant à la décote de 20% lors de la revente anticipée des titres Fair Vesta de 49.885 euros et le solde créditeur formellement reconnu par ARF dans sa valorisation de l'investissement au 30 juin 2017 de 60.957,01 euros (pièce 24) soit un total de 110.842,01 euros.

[D] [M] conteste le caractère certain du préjudice en lien direct avec la faute retenue. Il expose qu'il n'est pas établi puisque [G] [I] a subi une décote suite à un rachat anticipé des titres Fair vesta alors même qu'il a accepté d'échanger sa créance ARF contre des titres Fair vesta pour une valeur de 249 425 euros en raison de besoins financiers urgents. Enfin, il n'a subi aucune perte financière puisqu'il a revendu ses titres Fair vesta pour le prix de 199 540.026 euros et il a été dédommagé de la perte de son investissement initial de 230.000 euros pour 250.019, 82 euros.

Il ressort des pièces produites qu'en effet, après négociation avec le dirigeant du fonds ARF une transaction a permis à [G] [I] d'obtenir le rachat pour 250 000 euros de titres Fair vesta et la différence en valeur en 2016 des deux placements lui a fait perdre 57.000 euros (cf pièce 25) et le rachat des titres Fair Vesta lui a permis plus tard de percevoir le 20 mars 2017 la somme de 199.540, 02 euros.

La cour en déduit que le préjudice financier subi existe mais est limité à environ 50.000 euros dès lors que le gain espéré était aléatoire et le placement choisi risqué et qu'il a été limité grâce à une transaction avec le dirigeant du fonds ARF.

S'agissant de la perte de chance de ne pas investir dans le placement conseillé, il est très limité puisqu'en 2014, [G] [I] a choisi d'investir de nouveau sur le même fonds risqué pour un montant de 30.000 euros.

La cour évalue la perte de chance de ne pas souscrire le contrat d'investissement à une chance sur cinq et évalue le préjudice à indemniser par [D] [M] à 8.000 euros avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt.

- Sur les demandes accessoires :

[D] [M] qui succombe prendra en charge les dépens de première instance et d'appel.

Il sera condamné à verser 3000 euros à [G] [I] pour les frais irrépétibles en première instance et 2.000 euros en appel en application de l'article 700 du cpc.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

- Infirme le jugement, mais seulement en ce qu'il a condamné [D] [M] à payer à [G] [I] la somme de 60.957,01 euros avec les intérêts de retard au taux légal à compter du 30 novembre 2016

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés

- Condamne [D] [M] à payer à [G] [I] la somme de 8.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt

- Confirme le jugement pour le surplus

- Condamne [D] [M] aux dépens d'appel

- Condamne [D] [M] à payer à [G] [I] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel.

Le greffier, La présidente,

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/01785
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;19.01785 ?
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