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19/06/2024 | FRANCE | N°24/00650

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Etrangers, 19 juin 2024, 24/00650


COUR D'APPEL DE TOULOUSE









Minute 24/655

N° RG 24/00650 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QJL2



O R D O N N A N C E



L'an DEUX MILLE VINGT QUATRE et le 19 Juin à 12h00



Nous A. CAPDEVIELLE, vice-présidente placée par ordonnance de la première présidente en date du 20 DECEMBRE 2023 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.



Vu l'ordonnance rendue le 17 juin 2024 à 17H09 pa

r le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :



[O] [V]

né le...

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

Minute 24/655

N° RG 24/00650 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QJL2

O R D O N N A N C E

L'an DEUX MILLE VINGT QUATRE et le 19 Juin à 12h00

Nous A. CAPDEVIELLE, vice-présidente placée par ordonnance de la première présidente en date du 20 DECEMBRE 2023 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu l'ordonnance rendue le 17 juin 2024 à 17H09 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant le maintien au centre de rétention de :

[O] [V]

né le 01 Février 2001 à [Localité 1] (ALGÉRIE)

de nationalité Algérienne

Vu l'appel formé le 18 juin 2024 à 15 h 49 par courriel, par Me El hadji baye ndiaga GUEYE, avocat au barreau de TOULOUSE,

A l'audience publique du 17 juin 2024 à 10h00, assistée de M.QUASHIE, greffier avons entendu :

[O] [V]

assisté de Me El hadji baye ndiaga GUEYE, avocat au barreau de TOULOUSE

qui a eu la parole en dernier ;

qui a prêté serment,

En présence de M.[C], interprète qui a prêté serment,

En l'absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;

En l'absence du représentant de la PREFECTURE DE LA HAUTE GARONNE régulièrement avisée ;

avons rendu l'ordonnance suivante :

Exposé des faits

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les dispositions du CESEDA,

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 17 juin 2024 à 17h09 qui a joint les procédures, constaté la régularité de la procédure et ordonné la prolongation pour une durée de 28 jours de la rétention de M. X se disant [O] [V] sur requête de la préfecture de la Haute-Garonne du 17 juin 2024 et de celle de l'étranger du même jour ;

Vu l'appel interjeté par M. X se disant [O] [V] par courrier de son conseil reçu au greffe de la cour le 18 juin 2024 à 15h49, soutenu oralement à l'audience, auquel il convient de se référer en application de l'article 455 du code de procédure civile et aux termes duquel il sollicite l'infirmation de l'ordonnance et sa remise immédiate en liberté pour les motifs suivants :

- la rétention est illégale car prise sous l'empire d'une loi qui fixait la validité de l'OQTF à un an

- erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressé

- subsidiairement assignation à résidence (moyen abandonné à l'audience)

Entendu les explications fournies par l'appelant à l'audience du 19 juin 2024 ;

Vu l'absence du préfet de la Haute-Garonne, non représenté à l'audience ;

Vu l'absence du ministère public, avisé de la date d'audience, qui n'a pas formulé d'observation.

SUR CE :

Sur la recevabilité de l'appel

En l'espèce, l'appel est recevable pour avoir été fait dans les termes et délais légaux.

Sur la régularité de l'arrêté de placement en rétention administrative

Sur le défaut de base légale du placement en rétention administrative :

Le conseil de l'intéressé soutient que l'arrêté portant obligation de quitter le territoire en date du 26 février 2022, donc de plus d'un an et qu'il ne permet pas de fonder le placement en rétention.

Selon l'article L741-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024, en vigueur depuis le 28 janvier 2024 l'administration peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger dans l'un des cas prévus à l'article L73 1-1, notamment (1°) s'il fait l'objet d'une décision d'obligation de quitter le territoire français prise depuis moins de trois ans auparavant, pour laquelle le départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé, lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.

Le conseil de l'intéressé soutient que cet article dans sa nouvelle rédaction est inapplicable en l'espèce car s'appliquant à une OQTF devenue caduque comme ayant été édictée plus d'une année avant le placement en rétention administrative.

Toutefois, l'article 1 du code civil énonce que les lois et, lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication.

Aucune date n'est fixée pour l'entrée en vigueur des dispositions modifiées de l'article L 731-l du CESEDA, l'article 86 IV de la loi précitée régissant les conditions d`application dans le temps de l'article 72, excluant précisément de son champ d'application le 2° du VI, lequel porte d`un à trois ans l'ancienneté maximale de la décision portant OQTF sur la base de laquelle l`autorité administrative peut assigner à résidence ou placer en rétention administrative l'étranger.

La loi précitée du 26 janvier 2024 ayant été publiée au Journal officiel le 27 janvier 2024, cette disposition est donc entrée en vigueur le 28 janvier 2024.

En conséquence, toute décision d'assignation à résidence ou de placement en rétention administrative prise à compter de cette date est susceptible d'avoir pour base légale un arrêté portant obligation de quitter le territoire français pris depuis moins de trois ans, sans que cela implique un effet rétroactif de la loi nouvelle puisqu'une OQTF de plus d'une année mais de moins de trois années, a créé une situation juridique qui contraint l'étranger à quitter la France. Cette situation, née dans le passé, s'est poursuivie jusqu'à l'adoption de la loi du 26 janvier 2024 qui s'applique désormais.

Le moyen sera rejeté.

Sur l'erreur manifeste d'appréciation

En application de l'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3.

Aux termes de ce dernier article le risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.

En l'espèce, l'appelant soutient que l'arrêté de placement en rétention est insuffisamment motivé ou entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que l'intéressé a créé en France des attaches personnelles dont il peut justifier.

Cependant, la décision critiquée cite les textes applicables à la situation de M. [V] et énonce les circonstances de fait qui justifient l'application de ces dispositions.

Elle précise en effet notamment que l'intéressé :

- ne peut justifier d'une entrée régulière et n'a pas demandé de titre de séjour,

- est célibataire sans enfants

- ne présente pas d'état de vulnérabilité,

- ne présente pas de garanties de représentation suffisantes faute de document d'identité ou de voyage en cours de validité et faute d'une adresse stable.

Le préfet n'est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'étranger dès lors que les motifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention au regard des critères légaux, étant souligné que les circonstances doivent être appréciées au vu des éléments dont il disposait au jour de sa décision.

Le préfet a tiré toutes les conséquences de droit de la situation qu'il a relevée dans son arrêté. Le grief tiré d'une erreur de droit et manifeste d'appréciation doit donc être écarté.

Compte tenu de ce qui précède, M. [V] a pu être regardé comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire.

C'est donc sans méconnaître le principe de proportionnalité et de nécessité et en procédant à un examen de la situation de l'étranger que la décision de placement en rétention a été prise.

L'appréciation par l'administration des garanties de représentation

Il est encore fait grief à la décision attaquée de ne pas avoir pris en compte la stabilité de l'intéressé.

Or, la situation actuelle est la suivante : Monsieur [V] a déclaré qu'avant son incarcération il habitait chez sa copine [L] [D] sans avoir été capable de donner l'adresse du logement.

Par ailleurs questionné à l'audience il a confirmé que la victime de sa condamnation pour violences sur conjoint le 28 mars 2023 était Madame [L] [D].

Aujourd'hui, ces arguments font apparaître un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement, laquelle ne pourrait être sérieusement respectée et garantie par une quelconque autre mesure.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,

Déclarons recevable l'appel interjeté par M. X se disant [O] [V] à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Toulouse du 17 juin 2024,

Confirmons ladite ordonnance en toutes ses dispositions,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PREFECTURE DE LA HAUTE GARONNE, service des étrangers, à [O] [V], ainsi qu'à son conseil et communiquée au Ministère Public.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

M.QUASHIE A. CAPDEVIELLE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 24/00650
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;24.00650 ?
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