07/05/2024
ARRÊT N° 159
N° RG 21/01085 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OAU6
VS / CD
Décision déférée du 08 Février 2021 - Tribunal de Commerce de TOULOUSE - 2019J00160
M. CHAUVET
S.A.R.L. PRAXIS SERVICES
C/
S.A.S. FLUNCH
S.E.L.A.R.L. FHB
S.E.L.A.S. BMA ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES
S.E.L.A.R.L. PERIN BORKOWIAK
S.E.L.A.S. MJS PARTNERS
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU SEPT MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE
***
APPELANTE
S.A.R.L. PRAXIS SERVICES
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Jean IGLESIS, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEES
S.A.S. FLUNCH
[Adresse 5]
[Localité 9]
Représentée par Me Hervé JEANJACQUES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par par Me Damien LAUGIER, avocat plaidant au barreau de LILLE
S.E.L.A.R.L. FHB
Administrateur judiciaire de la SAS FLUNCH par jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 29 janvier 2021
Administrateurs Judiciaires [Adresse 2]
[Localité 12]
Représentée par Me Hervé JEANJACQUES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par par Me Damien LAUGIER, avocat plaidant au barreau de LILLE
S.E.L.A.S. BMA ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES
Administrateur judiciaire de la SAS FLUNCH par jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 29 janvier 2021
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Me Hervé JEANJACQUES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par par Me Damien LAUGIER, avocat plaidant au barreau de LILLE
S.E.L.A.R.L. PERIN BORKOWIAK
Mandataire judiciaire de la SAS FLUNCH par jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 29 janvier 2021
[Adresse 6]
[Localité 10]
Représentée par Me Hervé JEANJACQUES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par par Me Damien LAUGIER, avocat plaidant au barreau de LILLE
S.E.L.A.S. MJS PARTNERS
Mandataire judiciaire de la SAS FLUNCH par jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 29 janvier 2021
[Adresse 11]
[Localité 8]
Représentée par Me Hervé JEANJACQUES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par par Me Damien LAUGIER, avocat plaidant au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant V. SALMERON, présidente, chargée du rapport et S. MOULAYES, conseillère. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
S.MOULAYES, conseillère
I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère
Greffier, lors des débats : A. CAVAN
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par V. SALMERON, présidente et par A. CAVAN, greffier de chambre.
Exposé des faits et procédure :
Par acte sous seing privé du 1er juillet 2008, la société Flunch a conclu avec la société Actif Inter Nettoyage, aux droits de laquelle vient la société Praxis Services, un contrat portant sur une prestation de nettoyage et d'entretien des locaux du restaurant Flunch [Adresse 13] de [Localité 14].
Par courrier recommandé du 12 septembre 2018, la société Flunch a informé la société Praxis de la réduction de son activité en vue de la fermeture du restaurant, lui a demandé d'adapter ses horaires d'intervention et lui a notifié la résiliation du contrat à compter du 1er janvier 2019.
Par courrier recommandé du 19 septembre 2018, la société Praxis a indiqué à la société Flunch s'opposer à la résiliation, estimant que le terme du contrat était fixé au 30 juin 2020.
Par acte d'huissier de justice du 13 février 2019, la société Praxis a assigné la société Flunch devant le tribunal de commerce de Toulouse en paiement de la somme de 55.506,60 euros subsidiairement 18.502,20 euros en réparation du préjudice subi du fait de la rupture abusive du contrat.
Par jugement du 29 janvier 2021, le tribunal de commerce de Lille a ouvert une procédure de sauvegarde au bénéfice de la société Flunch et désigné en qualité d'administrateurs judiciaires la Selarl Fhb et le Salas Bma, et en qualité de mandataires judiciaires la Selarl Perin Borkowiak et la Selas Mjs Partners.
Par jugement du 8 février 2021, le tribunal de commerce de Toulouse a :
débouté la Sarl Praxis Services de toutes ses demandes ;
condamné la Sarl Praxis Services au paiement de la somme de 1.500 euros à la Sas Flunch au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
ordonné l'exécution provisoire ;
condamné la Sarl Praxis Services aux entiers dépens de l'instance.
Par déclaration en date du 8 mars 2021, la Sarl Praxis Services a relevé appel du jugement. La portée de l'appel est la réformation des chefs du jugement qui l'ont déboutée et condamnée aux dépens et à la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile (cpc).
La clôture est intervenue le 10 octobre 2022.
L'affaire, qui devait être appelée à l'audience du 8 novembre 2022, a été défixée puis fixée à l'audience du 3 octobre 2023 à 14h.
La clôture a été rabattue avant l'ouverture des débats par mention au dossier.
Prétentions et moyens des parties :
Vu les conclusions notifiées le 4 octobre 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la Sarl Praxis Services demandant, au visa des articles 1995, 1212, 1217 et 1231 du code civil et L442-6 I 5° du code de commerce, de :
réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulouse le 8 février 2021,
à titre principal :
juger que la version du contrat fourni par la société Praxis est la véritable version,
en conséquence, juger que le contrat du 16 juin 2008 avait pour terme le 30 juin 2020
juger que les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que par le consentement mutuel des parties ou pour les causes que la loi autorise,
juger qu'il n'existait pas de circonstances imprévisibles au sens de la loi lors de la conclusion du contrat qui rendent l'exécution de celui-ci excessivement onéreuse pour la société Flunch qui en a accepté le risque
juger qu'en mettant fin au contrat unilatéralement pour le 1er janvier 2019, la société Flunch a commis une faute,
fixer la créance de la société Praxis services à la procédure de sauvegarde de la société Flunch au paiement de la somme de 55.506,60 €
à titre subsidiaire :
juger que les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que par le consentement mutuel des parties ou pour les causes que la loi autorise,
juger qu'il n'existait pas de circonstances imprévisibles lors de la conclusion du contrat qui rendent l'exécution de celui-ci excessivement onéreuse pour la société Flunch qui en a accepté le risque
juger qu'en mettant fin au contrat unilatéralement pour le 1er janvier 2019, la société Flunch a commis une faute,
fixer la créance de la société Praxis services à la procédure de sauvegarde de la société Flunch au paiement de la somme de 18.502,20 €
à titre infiniment subsidiaire :
juger que la rupture des relations contractuelles est intervenue de façon brutale,
fixer la créance de la société Praxis services à la procédure de sauvegarde de la société Flunch au paiement de la somme de 6.475,77 €
en tout état de cause : condamner la société Flunch au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.
Vu les conclusions notifiées le 6 octobre 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de la Sas Flunch, la Selarl Fhb es-qualités, la Selas Bma Administrateurs Judiciaires es-qualités, la Selarl Perin Borkowiak es-qualités et la Selas Mjs Partners es-qualités, demandant, au visa des articles 1234 et s. anciens, 1210 et s. et 1186 du code civil, de :
A titre principal :
' Confirmer le Jugement rendu par le Tribunal de commerce de TOULOUSE le 8 février 2021 sur le principe de toutes ses dispositions savoir en ce qu'il :
o Déboute la SARL PRAXIS SERVICES de toutes ses demandes ;
o Condamne la SARL PRAXIS SERVICES au paiement de la somme de 1.500 € à la SAS FLUNCH au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
o Ordonne l'exécution provisoire ;
o Condamne la SARL PRAXIS SERVICES aux entiers dépens de l'instance.
' Rejeter comme infondée la demande principale de la SARL PRAXIS SERVICES tendant à voir fixée une créance chirographaire échue de 55.506,60 € au passif de la sauvegarde de la SAS FLUNCH
' Rejeter comme infondée la demande subsidiaire de la SARL PRAXIS SERVICES tendant à voir fixée une créance chirographaire échue de 18.502,20 € au passif de la sauvegarde de la SAS FLUNCH ;
' Rejeter comme irrecevable et infondée la demande infiniment subsidiaire de la SARL PRAXIS SERVICES tendant à voir fixée une créance chirographaire échue de 6.475,77 € au passif de la sauvegarde de la SAS FLUNCH ;
Subsidiairement, si la Cour devait réformer le jugement :
' Prononcer la caducité du contrat conclu le 1er juillet 2008 entre la SARL PAXIS SERVICES et la SAS FLUNCH pour disparition de son objet ;
' Débouter en conséquence la société PRAXIS SERVICES de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
Plus subsidiairement :
' Limiter strictement le montant de l'indemnisation à la somme de 1.850,22 € et fixer à cette somme la créance chirographaire échue de la SARL PRAXIS SERVICES au passif de la sauvegarde de la SAS FLUNCH ;
En tout état de cause :
' Débouter la SARL PRAXIS SERVICES de sa demande de condamnation de la SAS FLUNCH et de ses mandataires de justice au paiement de la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;
' Condamner la société PRAXIS SERVICES à payer à la société FLUNCH la somme de 5.000,00 € en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure civile ;
' Condamner la société PRAXIS SERVICES aux entiers dépens tant de première instance que d'appel, le tout avec distraction au profit de Me Hervé JEANJACQUES, Avocat, sur ses affirmations de droit, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le 7 octobre 2022, les intimées ont communiqué une dernière pièce sur la situation de la société Flunch.
Motifs de la décision :
A l'audience, les parties ont demandé le rabat de l'ordonnance de clôture pour voir déclarer recevables leurs dernières conclusions respectives des 4 et 6 octobre 2024 tirant les conséquences de la mesure de sauvegarde de la société Flunch et des demandes de fixation de créance.
La clôture a été rabattue par mention au dossier avant plaidoiries.
La société Flunch est en sauvegarde judiciaire depuis le 29 janvier 2021 ; un plan de sauvegarde sur 8 années a été arrêté le 5 novembre 2021 et les mandataires judiciaires ont été désignés en qualité de commissaires au plan.
Le litige porte sur la rupture fautive alléguée du contrat de nettoyage liant les parties au 12 septembre 2018, la société Praxis reprochant le caractère brutal de la rupture du contrat à la société Flunch tel que l'objet du litige ressort de l'assignation initiale en sollicitant la réparation du préjudice subi ressortant des mois d'exécution du contrat à durée déterminée restant à courir avant son terme en juillet 2020, selon le demandeur.
Dans ses conclusions d'appel, la société Praxis, appelante, soulève, à titre infiniment subsidiaire, pour la première fois en appel, la rupture brutale fondée sur l'article L442-6 I 5° du code de commerce demande que la cour ne peut examiner dès lors que l'objet d'un tel litige n'entre pas dans son champ de compétence matériae.
La cour n'analysera par conséquent que la seule demande traitée par le tribunal dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel c'est-à-dire la demande d'indemnisation d'une rupture contractuelle fautive de droit commun.
Préalablement, les parties s'opposent sur le contrat les liant, chacune produisant une version différente du contrat.
Le tribunal n'a pas tranché la difficulté après avoir constaté l'existence de deux versions.
Le contrat produit par la société Praxis est un document de 4 pages signé entre la société Internettoyage et la société Flunch le 1er juillet 2008 pour des travaux au Flunch [Adresse 13] (à [Localité 14]) portant sur l'entretien des locaux du lundi au dimanche jours fériés compris, qui en page 2 ,stipule dans le paragraphe « condition générale » que le contrat est signé pour une durée de 3 ans à compter de sa date de signature, contrat tacitement renouvelé pour la même durée que celle prévue initialement sauf dénonciation de l'une ou l'autre des parties par courrier recommandé avec accusé de réception en respectant un préavis de trois mois avant l'expiration de la période en cours.
L'exemplaire du contrat produit par la société Flunch est un document de 4 pages signé à la même date avec les tampons humides de chaque société mais avec des signatures sur la 1ere et la dernière page avec des présentations différentes ou des légers décalages. En outre, si le contenu est similaire, il diffère en page 2 relativement à la durée du contrat et au calcul du prix révisable.
La durée est de un an et le contrat résiliable par les deux parties avec un préavis d'un mois à tout moment.
Cette partie du contrat produit par la société Flunch, qui est essentielle pour dénouer le litige sur la durée et les conditions du renouvellement et de résiliation du contrat, présente en effet des incongruités :
- il n'est pas expressément stipulé qu'il sera tacitement renouvelable alors qu'ensuite on évoque un prix révisable à sa date anniversaire
- il comporte en page 2 des fautes d'orthographe étonnantes que l'on ne retrouve pas dans la version produite par la société Praxis ni dans les autres pages du document de la société Flunch : « le matériel mis en place serra renouveler entièrement et neuf », « se prix serra maintenu jusqu'au 31/12/2008 sauf dans le cas d'une situation économique Telle que définie ci-après. Il serra révisable a sa date anniversaire etc... »
La société Fluch, dans ses conclusions, s'appuie sur le fait que l'exemplaire du contrat qu'elle produit présente une ligne verticale sur chaque page et en déduit qu'il s'agit d'un contrat nécessairement envoyé par fax, exemplaire qu'elle a retourné signé comme on le lui demandait.
Cet argument est toutefois peu probant dans la mesure où la société Praxis produit en pièce 5 la réponse de la société Flunch du 12 novembre 2018 au refus de résiliation du contrat formulé par la société Praxis le 29 octobre 2018 en y joignant la preuve du contrat initial d'une durée d'un an et cette version ne comporte aucune ligne verticale sur aucune page ; elle l'a donc bien reçue sans la trace verticale.
Si les deux versions produites du contrat sont datées du même jour et diffèrent essentiellement sur les pages 1 et 2, on peut imaginer soit que le client a reçu deux versions, dont une à retourner, ce qui explique pourquoi les 1eres et dernières pages sont un peu différentes mais cela n'explique pas la différence déterminante de la page 2, soit que deux versions ont été d'emblée échangées entre les parties et signées par elles en raison de deux hypothèses négociées entre les parties sur la durée du contrat et sa condition de résiliation. Mais aucune des parties n'évoquant cette dernière hypothèse, elle ne sera donc pas retenue.
Il convient de relever que d'une part dans chacune des versions les pages ne sont pas paraphées, que d'autre part, il est manifeste que le contrat a été rédigé par la société prestataire de service Praxis puisque dans chaque cas, il est proposé à la société Flunch de retourner la version signée et qu'enfin, on ne comprend pas pourquoi le rédacteur du contrat ferait des fautes d'orthographe énormes dans une version et pas dans l'autre.
Par conséquent, et à défaut d'autres éléments extrinsèques venant corroborer une telle thèse, notamment des courriers en cours d'exécution du contrat, il y a donc nécessairement une version des deux exemplaires du contrat produits aux débats qui est un faux.
Force est de constater que la version produite par la société Flunch n'est pas crédible du fait de l'incohérence et des incongruités des stipulations de la page 2 que la société Flunch ne pouvait manquer de relever avant de la signer si son prestataire l'a lui avait adressée avec autant de négligences rédactionnelles. De plus, dans un contrat de nettoyage, et de surcroît pour un client restaurateur, la durée du contrat et ses conditions de résiliation sont déterminantes, la société Flunch ne pouvait que prêter une attention rigoureuse à la page 2 du contrat.
Dès lors, la version incongrue produite par la société Flunch ne sera pas retenue.
Toutefois, la société Flunch considère que la question de la détermination de la bonne version du contrat est inopérante depuis la réforme des obligations, suite à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016. Elle oppose à la demande de la société Praxis l'application des articles 1211, 1214 et 1215 du code civil dans leur version postérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 pour établir qu'après le premier renouvellement du contrat à durée déterminée, un nouveau contrat est souscrit calqué sur le contrat initial à l'exception de la durée et est réputé conclu à durée indéterminée. Elle considère que le contrat après son renouvellement est devenu un contrat à durée indéterminée et est donc résiliable à tout moment sous réserve de respecter un délai de préavis raisonnable, ce qu'elle a fait en septembre 2018 après l'application de la réforme.
La société Praxis lui oppose une autre interprétation des nouveaux textes en se fondant sur l'arrêt de la chambre commerciale Cass. Comm. 16 octobre 2019 n° 17-12952 et considère que les contrats par tacite reconduction sont demeurés des contrats à durée déterminée de 3 ans ou d'1 an selon la version du contrat retenue par la cour.
Or, il ressort des motifs du dit arrêt de la cour de cassation que les conditions de l'espèce étaient totalement distinctes du présent litige puisqu'il y est mentionné, d'une part, « si les parties avaient limité l'exécution du contrat conclu le 4 avril 2001 à une période de trois années, sans tacite reconduction, la négociation éventuelle d'un nouveau contrat était prévue à l'échéance » et d'autre part, « c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la commune intention des parties et sans méconnaître le principe de la liberté du commerce et de l'industrie que la cour d'appel a retenu que celles-ci avaient conclu un nouveau contrat verbal de licence, qui s'est substitué à compter du 5 avril 2004 à celui conclu le 4 avril 2001, aux mêmes conditions contractuelles, incluant l'engagement réciproque d'exclusivité ». Il s'agissait d'un renouvellement de contrat à durée déterminée bien avant la réforme de 2016, sans tacite reconduction mais avec renégociation envisagée, et le litige ne portait que sur un engagement réciproque d'exclusivité et non sur la durée du contrat renouvelé.
Depuis l'ordonnance du 10 février 2016, l'article 1214 du code civil dispose que « le contrat à durée déterminée peut être renouvelé par l'effet de la loi ou l'accord des parties. Le renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au précédent mais dont la durée est indéterminée ».
L'article 1215 poursuit ainsi « lorsqu' à l'expiration du terme d'un contrat conclu à durée déterminée, les contractants continuent d'en exécuter les obligations, il y a tacite reconduction. Celle-ci produit les mêmes effets que le renouvellement du contrat. ».
Enfin l'article 1211 dispose que « lorsque le contrat est conclu pour une durée indéterminée, chaque partie peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou à défaut, un délai raisonnable ».
La cour en déduit qu'après 2016, le contrat reconduit après tacite reconduction est un nouveau contrat. En 2017, le contrat reconduit était soumis nécessairement au nouveau régime légal issu de l'ordonnance de 2016. Le contrat reconduit ou renouvelé peut comporter les mêmes stipulations que le précédent sauf sur la durée car il devient un contrat à durée indéterminée.
Dans le contrat souscrit en 2008, la durée du contrat était stipulée ainsi dans la version produite par la société Praxis :
« le présent contrat est signé pour une durée de trois (3) ans à compter de sa date de signature. Ce contrat est tacitement renouvelé pour la même durée que celle prévue initialement sauf dénonciation de l'une ou l'autre des parties par courrier recommandé avec accusé de réception en respectant un préavis de trois mois avant l'expiration de la période en cours ».
En application des articles 1214 et 1215 du code civil, au plus tard en 2017, après l'application des dits textes, la reconduction tacite du contrat a donné lieu à un contrat à durée indéterminée résiliable à tout moment dès lors que le délai de préavis était raisonnable.
Qu'il s'agisse donc d'un contrat de trois ans, ou d'un contrat d'un an, le contrat renouvelable tacitement pour la même durée à la date anniversaire de la signature du contrat conduisait au 1er juillet 2017, au plus tard, à un contrat à durée indéterminée, résiliable unilatéralement à tout moment à la condition de respecter un délai raisonnable, et le délai de préavis dans le contrat initial était de 3 mois.
En l'espèce, la société Flunch a résilié le contrat par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 septembre 2018 pour une résiliation unilatérale au 1er janvier 2019.
Au 12 septembre 2018, le contrat qui avait été tacitement renouvelé le 1er juillet 2017 était à durée indéterminée, la société Flunch a respecté un délai de préavis de plus de 3 mois pour résilier unilatéralement le contrat au 1er janvier 2019, la résiliation n'est donc pas fautive.
Quelle que soit la version du contrat retenu par la cour, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Praxis de sa demande car la résiliation du contrat par la société Flunch n'est pas fautive.
Il n'y a donc pas lieu de répondre davantage à la demande subsidiaire de la société Praxis fondée sur les stipulations du contrat produit par la société Flunch.
Il n'y a pas davantage lieu d'examiner la théorie de l'imprévision ni la demande subsidiaire de caducité du contrat développées par la société Flunch.
- sur les demandes accessoires :
la société Praxis qui succombe en appel prendra en charge les dépens de première instance et d'appel.
Eu égard au circonstances particulières de l'affaire, le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à la société Flunch 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile;en revanche, chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
- Dit que le contrat liant les parties correspond à la version produite par la société Praxis
- Dit que le contrat en 2018 était un contrat à durée indéterminée après reconduction tacite du contrat liant les parties
- Dit que la résiliation du contrat par la société Flunch n'était pas fautive
Confirme le jugement
- Dit que la cour n'a pas compétence pour statuer sur la demande infiniment subsidiaire qui n'avait pas été présentée devant le tribunal de commerce de Toulouse
- Condamne la société Praxis aux dépens d'appel avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Le Greffier La Présidente
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